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tignac furent conduits ensemble dans la salle, d'où les victimes ne sortoient que pour aller entendre leur sentence de mort. A l'aspect de ces malheureuses victimes, pâles, déses pérées, tremblantes à chaque instant, de se voir appellées devant le tribunal sanguinaire. L'un et l'autre oublient le sort qui les attend eux-mêmes; ils oublient qu'ils vont mourir aussi, ou plutôt la mort devant les yeux, ils s'applaudissent avant de la subir, que la Providence leur offre encore des ames à sauver. Avec tout l'ascendant que donne la vertu dans ces instans terribles, ils annoncent à tous ces compagnons de leur captivité, qu'il est un autre tribunal, devant lequel il faudra comparoître, après celui des massacreurs. Ils élevent leur ame vers le ciel; ils la remplissent du salutaire répentir, qui peut seul leur ouvrir les portes éternelles. Ils leurs apprennent à fuir d'autres supplices que ceux de leurs bourreaux.

A leurs voix, tous les sentimens religieux se réveillent dans ces ames abattues; tous ces captifs tombent à leurs genoux. Seuls, debout, avec toute l'autorité qu'ils ont reçue du ciel, ils prononcent l'absolution sur ces cœurs répentans et humiliés. Ils les rélevent et leur apprennent ensuite, comment doivent mourir des chrétiens résignés et soumis.

Appellé au supplice, M. l'Enfant y marche, avec le même calme et la même fermeté qui l'accompagnoient dans les chaires chrétiennes pour annoncer les vérités évangéliques, comme il montoit sur le trône de ces vérités saintes qu'il annonçoit au peuple. On assure qu'en le voyant paroître, plusieurs voix deman

derent sa vie. Les bourreaux le lâcherent. Le peuple le poussoit, lui crioit: sauvez-vous, et il étoit déja hors de la foule, lorsque quatre brigands regrettent leur proies; ils accourent, le saisissent. M. l'Enfant leve les mains au ciel mon Dieu, je vous remercie de pouvoir vous offrir ma vie, comme vous avez offert la vôtre pour moi. Ce furent ses dernieres paroles. Il expira sous les coups des bourreaux.

Le jeune abbé Pey, vicaire de St. Landry, fut encore une des innocentes victimes immolées à l'Abbaye; on peut le faire connoître sous le rapport d'un vrai sage. Il avoit refusé un canonicat de Notre-Dame, qu'un oncle vouloit lui résigner, et que sur son refus, il résigna à un de ses freres. Il ne desiroit que la retraite. La possession d'une petite cure de campagne, où il put faire le bonheur des bons villageois, en les instruisant des vérités saintes, et en leur apprenant à être heureux dans la vertu, étoit le dernier terme de tous ses desirs ici bas, mais il n'osoit encore s'en croire digne.

M. l'abbé Vitalis, vicaire de St. Méry, le concitoyen et l'ami de M. l'abbé Barret, massacré aux Carmes, fut massacré lui-même à l'Abbaye. Une douceur inaltérable faisoit la partie distinctive de son caractere, et il portoit sur son intéressante figure l'expression de cette belle vertu.

Le seul connu pour avoir échappé à la boucherie, des seize, arrêtés aux barrieres, fut un religieux de lugni. En arrivant à l'Abbaye, il remarqua, parmi les commissaires, un hom me, avec qui il s'étoit trouvé diverses fois chez

un ami commun. Cet ami, croyant le religieux assuré de l'exportation, lui avoit remis une somme. Le religieux vouloit rendre cet argent. Il remet son portefeuille au commissaire, et lui en confie la restitution. Le commissaire alors reconnoissant ce religieux, imagine, pour lui sauver la vie, de le conduire dans le bureau même, où des écrivains étoient occupés à dresser le procès-verbal du jour. Sans avoir trop le temps de lui expliquer ce qu'il doit faire, il le place à une des tables du bureau, et lui dit écrivez. Le religieux attend qu'on lui dicte ce qu'il doit écrire. Le commissaire s'apperçoit de son embarras; affectant un ton brusque, il ajoute : écrivez donc ce que je vous ai dit, et que tout soit prêt à mon retour. Le religieux entend ce langage, et se met à écrire, ou à faire semblant.

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Les massacreurs alloient et revenoient dans ce bureau, racontant leurs massacres, demandant des listes, et se livrant à toute leur féroce joie, sur les victimes qu'ils avoient égorgées. Il leur en manquoit une sur les seize prêtres; c'étoit ce religieux même, qu'ils prenoient pour un commis. C'étoit devant lui qu'ils demandoient le prêtre qu'on leur avoit ravi. Il les voyoit frémir de rage de l'avoir laissé échapper. Connoissant toute l'importance du rôle qu'il avoit à jouer, il continuoit à écrire, sans se détourner, et comme un homme fort occupé des ordres qu'il avoit à remplir. Le commissaire, au moment favorable, reparut, examina ce que ce religieux avoit écrit, lui fit prendre ses papiers sous le bras, et l'emmena chez lui comme son secrétaire.

On compte environ soixante prêtres mas sacrés à l'Abbaye, qui, réunis à ceux des Carmes, font deux cent vingt prêtres égorgés, dans l'espace de deux ou trois mois.

N. B. Nous donnerons la liste de tous les prêtres massacrés dans Paris, les 2 et 3 septembre, dont le nom nous est parvenu, quand nous aurons terminé le récit de ces massacres, et la relation de la conversion d'un homme de lettres connu.

VARIÉTÉ.

Il a paru, dans les premiers jours du Carême, une ENCY CLIQUE des EVÊQUES, ci-devant CONSTITUTIONNELS, qui a donné lieu à une lettre adressée à l'ABBREVIATEUR, et qu'on lit dans le N°. 49 de son journal, du jeudi, 18 février 1796. Nous avons cru devoir l'insérer dans le nôtre, sans toutefois approuver le ton d'amertume qui y regne, et qui ne peut être celui que nous avons adopté dans un journal consacré à la défense d'une Religion, dont la douceur et la charité font le principal caractere.

LETTRE à l'Abbréviateur Universel.

Il est passé, citoyen, ce temps, où pour être Evêque cons titutionnel, on se croyoit obligé de se chamarrer des livrées de la philosophie, auxquelles on auroit, au besoin, mêlé quelques brins d'athéisme. Maintenant les Evêques ci-devant cons titutionnels prêchent sérieusement le célibat des prêtres, le carême, le jeûne; ils iront même jusqu'à permettre A LEURS FIDELES de manger des œufs. Rien de plus aisé que de juger combien de pareils Mandemens sont réputés obligatoires, venant de gens dénués de toute espece de titre, d'intrus ABANDONNES de la puissance civile qui SULE les plaça, que Pintérêt et l'orgueil égarerent, que la constitution méconnoit an point de ne pas même SUPPOSER leur existence, que l'EGLISE UNIVERSELLE RÉPROUVE, et qu'aujourd'hui la philosophis couvre de ridicule, après les avoir déshonorés de ses éloges. Salut, votre concitoyen,

THEOPHILE.

N. B. La question sur la validité des mariages catholiques, dont il est parlé, pages 211 et 212 de ces Anrales, sera traites dans un prochain No. où l'on dira quels principes on doit sui vre au sujet de la bénédiction nuptiale donnée aux Fidelles par des prêtres étrangers à leur communion.

RELIGIEUSES,

POLITIQUES ET LITTÉRAIRES.

DU CULTE PUBLIC

EN GÉNÉRAL.

Du culte public considéré dans ses rapports avec la religion du sentiment.

Est non scripta sed nata lex quam non didiscimus, accepimus, legimus, verùm ex naturâ ipsâ arripuimus, hausimus, expressimus. Cicero Orat, pro Milo.

J'APPELLE 'APPELLE religion du sentiment ce mouvement involontaire de l'ame qui s'empare de tous nos sens, et nous fait invoquer un Dieu suprême toutes les fois que nous sommes profondément émus d'espérance ou de crainte, d'admiration ou d'amour. J'appelle encore ainsi tous les sentimens naturels qui attachent l'homme de bien à la Divinité, et Ini inspiTome I. Ann. Rel. Q

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