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tions, le plus solide appui des loix, et le moyen le plus simple, comme le plus sûr,

de rendre les hommes vertueux et heureux.

Or, pour remplir un pareil dessein, il étoit nécessaire de mêler aux articles de religion, ceux d'une politique bien entendue et d'une littérature épurée. Il fallait encore varier de telle sorte nos sujets, que cet ouvrage fût constamment le recueil des principes et celui des faits les plus propres à piquer la curiosité des gens de bien et à les maintenir libres, purs et inviolables dans la foi de leurs pères, et dans la soumission aux loix divines et humaines.

Tel est le but de ce Journal, et ce qui doit justifier son sitre d'Annales Religieuses, Politiques et Littéraires, si le succès de nos travaux répond à la grandeur de notre entreprise.

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DU CULTE PUBLIC

EN GÉNÉRAL.

PREMIER DISCOURS.

Du culte public, considéré dans ses rapports avec le consentement unanime des peuples.

Omni autem in re consentio omnium
Gentium lex naturæ putanda est. Cic. Tusc. 1-3.

LA connoissance d'un culte public est aussi

>>

ancienne et aussi universelle dans le monde que celle d'une divinité. « Parcourez les divers » pays de la terre, dit Plutarque, vous trou» verez des villes sans fortification, sans légis»lation et sans lettres; vous trouverez des » hordes sauvages qui n'ont pas même de >> chaumières pour se loger, ni de vêtemens » pour se couvrir; mais ce que vous ne trou» verez nulle part, ce sont des hommes réunis >> en société, sans l'idée d'une religion et d'un » culte (1). »

(1) Voyez Plutarque, traité contre l'Epic. Colotés. Cette universalité de témoignages déplaît à certains philosophes, et selon eux, plusieurs peuplades isofées, vivent sans religion et sans dieu. Mais voyez d'abord quels hommes ces philosophes veulent opposer à la croyance de tous les peuples? Ils sont obligés de les qualifier eux-mêmes de barbares, d'hommes des bois, d'Antropophages, et d'avouer que leur raison

).

On objecte contre cet assentiment général l'étrange variété des cultes et les nombreuses superstitions qui, trop souvent, obscurcirent ou

est d'ailleurs si dégradée qu'elle diffère peu de celle des brutes. Remarquez en second lieu sur quelles rélations ces philosophes fondent leur histoire. Les auteurs originaux qu'ils citent avouent eux-mêmes ne connoître ni la langue, ni les coutumes des pays dont ils parlent. Ils en ont conclu que les habitans n'avoient aucune religion, parce qu'ils ne les ont surpris dans P'exercice actuel d'aucun culte, ou que leurs cérémonies religieuses ne ressemblent en rien aux nôtres. Ainsi, Bougainville ne craint pas d'avancer dans ses mémoires, que les habitans des isles du Sud sont étrangers à toutes les idées religieuses, et Cook qui les a visités après lui, nous donne une longue description de leurs rites sacrés, dans lesquels on retrouve les mêmes élémens de croyance que chez tous les auires peuples. Ce qu'il y a de plus singulier dans ces rélations, adoptées, de préférence, par les Sceptiques, c'est qu'elles se contredisent ouvertement; ainsi, après avoir dit de plusieurs hordes sauvages, que le sentiment religieux leur est inconnu, elles ajoutent que ces sauvages saluent la lune quand elle est pleine et nouvelle, en se prosternant à terre et levant les mains au ciel; qu'ils honorent la mémoire de leurs ancêtres et qu'ils leurs portent à manger sur leurs tombeaux. Or, l'immortalité de l'ame, de quelque manière qu'on Padmette, suppose nécessairement l'idée d'un Dieu et l'idée d'un Dieu celle d'un culte. L'auteur anglais qui vient de nous donner la rélation des isles Pelew se rontrarie donc également lui-même, lorsqu'il affirme de ces insulaires leur ignorance de tout culte. Ce qu'il dit ensuite de la croyance religieuse d'un jeune sauvage de ces isles, nous apprend ce que nous devons penser de son premier récit, et quelle sorte de foi méritent les voyageurs quand ils osent nous raconter comme certains des faits démentis par le témoignage de tous les autres voyageurs, et en opposition avec notre propre conscience. Voici le fait dont je parle.

même dénaturèrent l'idée d'un Dieu par des prières absurdes et des cérémonies religieuses, indignes de la majesté suprême. Mais de cette erreur de l'esprit humain, que peut-on en conclure contre la nécessité même d'un culte ? Qu'elle existe, comme celle de la religion indépendante de tous les changemens des empires, du savoir ou de l'ignorance des nations; que sur ce principe fondamental tous les peuples sont d'accord, qu'ils s'accordent tous à croire à une puissance divine et à l'honorer par des prières, des offrandes et des sacrifices; que ce n'est point là une croyance qui ait été concertée ou qui ait jamais varié ; que les hommes ne se sont point donnés le mot pour l'établir, et que leurs loix n'y ont point de part. Or, là où l'opinion est unanime, là où le consentement des peuples est général; là est la raison, là est le sentiment, là est la loi de nature. Il y a donc un Dieu, qui mérite la crainte et l'amour, le respect et

Le capitaine Wilson avoit amené en Angleterre un jeune sauvage, appellé Lee-Boo, fils d'un roi des isles. Pelew. Un jour le capitaine lui disoit que les prières avoient pour but de rendre les hommes meilleurs, et que lorsqu'ils mouroient et étoient enterrés, ils alloient revivre en haut, (en lui montrant le firmament). Lee-Boo lui répondit aussi-tôt, en élevant ses mains en l'air et en remuant les doigts. La même chose à Pelew. Méchans hommes, rester en terre. Bonnes gens, aller au ciel, et devenir très-beaux. Or, comment supposer avec une telle croyance l'absence de toute idéo religieuse? Relation des isles Pelew, tom. 2, ch. 26, pag. 199.-Voyez Cicéron Tuscul. 1. §. 13.-Hume, Histoire Naturelle de la Religion, pag. 135. - Latfiteau, Moeurs des Sauvages Américains, tom. I et tom. 4, passim.

l'adoration des hommes. Il y a donc une religion, il y a donc aussi un culte public, qui impose de grands devoirs à remplir au Tégislateur, au magistrat, au simple citoyen; telle étoit la morale des anciens sages.

Pourquoi n'a-t-elle pas toujours été celle de nos philosophes ? Pourquoi s'en est-il trouvé parmi eux qui n'ont pas rougi d'avancer à cet égard des principes subversifs de toute morale? Pourquoi d'autres philosophes, encore plus inconséquens, ont-ils admis, d'un côté, l'idée de la religion, et ont-ils voulu la réduire, de l'autre, à des actes purement intérieurs (1), comme si la religion pouvoit être séparée des cérémonies religieuses, comme si elle ne devoit être qu'une conception métaphysique, à la portée seulement d'un petit nombre, et exclusive pour la multitude?

Je sais avec quel malheureux et funeste avantage, ces philosophes se sont élevés contre le culte public, quand ils ont réuni dans un seul et même tableau tous les genres d'abus, de superstition et de crimes, dont on accuse les divers cultes d'avoir été, dans les divers temps, ou l'occasion ou le prétexte. C'est ainsi qu'ils ont prévenu l'esprit de leurs disciples et qu'ils les ont égarés dans leurs pensées; c'est ainsi qu'ils ont fini par les soulever contre tous les cultes, et par leur faire oublier que dans la religion, comme dans la nature, tout n'est pas désordre et confusion, qu'il est une vérité et un mensonge, un zèle éclairé et un fanatisme, une piété raisonnée et une supers

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(1) Jean-Jacques Rousseau est de ce nombre.

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