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manière dont j'ai exécuté mon travail, apprendra seule si j'ai bien ou mal fait de m'attacher à la fin que j'ai choisie. Après tout, ce Discours dépasse peut-être à peine les limites de quelques Eloges connus et consacrés.

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Je ne dis rien du plan que j'ai suivi : il m'a paru, si je puis ainsi m'exprimer, obligé de sa nature et tracé par le sujet même. C'est des prodiges dans les Sciences par Pascal que a débuté ; il a écrit les Provinciales dans l'âge mûr et son grand Ouvrage sur la Religion devait couronner ses travaux. Ainsi, l'ordre à peu près chronologique dans les faits, l'ordre des matières et la gradation d'intérêt, tout se trouve ici réuni. Vouloir s'écarter de ce plan, c'eût été chercher ridiculement à faire un tour de force aux dépens du naturel et du vrai, dont on ne viole jamais impunément les lois. Ayant un tel plan sous la main, et, pour le remplir, des détails d'une richesse et d'une beauté rares si l'orateur, placé d'ailleurs dans les circonstances convenables ne parvenait pas à inspirer quelque intérêt, ce serait bien complètement sa faute. Cependant, je crois avoir besoin, pour mon compte, de toute l'indulgence du Public j'ai écrit dans la solitude, loin de toute lumière et de tout secours au travers de nombreux devoirs à remplir; et il ne m'a pas été possible de choisir une situation plus

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AVANT-PR O P O S.

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favorable. Ces mêmes circonstances ne m'ont permis d'entrer dans le Concours, faute de l'avoir connu plutôt, que vers le milieu du terme dont d'autres concurrens ont pu jouir.

Quant aux Notes que j'ai placées à la suite de mon Discours ce recueil accessoire étonnera peut-être d'abord par son volume; mais, , comme on peut à son gré lire ou omettre ces Notes, je ne crois pas qu'il soit nécessaire de m'en excuser. Voici toutefois les motifs qui me les ont fait entreprendre. L'auteur d'un Eloge serait bien mal-adroit qui ne parviendrait pas à faire naître quelque intérêt en faveur de son héros ; le panégyriste de Pascal le serait sur-tout beaucoup plus qu'un autre. Or, cet intérêt, quand il a pour objet un homme si extraordinaire, peut être assez vif pour produire le désir de retrouver sous un même point de vue tous les détails qui concernent le personnage loué, et qui tendent à le faire mieux connaître. J'ai pensé, d'ailleurs, que la vie et les travaux de Pascal, rappelant des époques célèbres dans l'histoire des sciences des lettres et des doctrines religieuses, on serait peut-être bien aise de trouver dans un petit volume, à la portée de tout le monde, un abrégé des circonstances les plus remarquables qui ont fait tant de bruit, et propre à dispenser de recourir à un grand nombre d'ouvrages volumineux, qui

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ne sont pas entre les mains de tout le monde, et dont quelques-uns ne sont pas susceptibles d'être entendus par tous les lecteurs.

Pour ce qui regarde les questions théologiques, que je n'ai pu me dispenser de rappeler, je prie le lecteur de considérer que les concurrens n'ont jamais dû perdre de vue l'obligation expresse, qui leur était imposée par l'Académie" de se montrer étrangers aux querelles théologiques auxquelles Pascal crut devoir prendre part.

La célérité avec laquelle la première édition de ce Discours a été imprimée dans le Recueil de l'Académie des Jeux floraux, a donné lieu à quelques fautes typographiques, à quelques omissions et transpositions de Notes je les ai rectifiées ici avec le plus grand soin.

DE

BLAISE PASCAL.

LESPERS ES PERSONNAGES célèbres que l'histoire recommande à l'estime ou à l'admiration de la postérité, n'obtiennent pas tous une part constante aux suffrages des générations. Les uns, en effet, ne sont grands que relativement à leur siècle pour découvrir le vrai mérite de ces hommes dont le progrès des lumières semble effacer peu à peu la gloire, il est nécessaire de remonter à l'époque où ils ont vécu, de prendre place, en quelque sorte, parmi leurs contemporains, et là d'étudier avec soin les hommes qui les ont environnés, les circonstances sous l'empire desquelles ils ont agi ou pensé; enfin, d'acquérir une connaissance assez juste de leurs vertus, de leurs talens ou de leur génie, pour entrevoir ce qu'ils auraient fait dans un meilleur âge. Mais nous en voyons d'autres, dont les éminentes qualités sont absolues, qui savent apercevoir ces vérités éternelles, supérieures à l'opinion et aux systèmes, developper des talens ou s'élever à des vertus, à des principes reconnus de tous les siècles: ceux-là peuvent se montrer seuls; et, grands de leur propre mérite, ils le sont alors pour tous les temps et pour tous les lieux.

Or, on a vu paraître un homme qui a pu, dans un petit nombre d'années troublées par de continuelles souffrances, être à la fois Archimède et Galilée dans la géométrie et la physique; le précur seur et l'égal de Molière et de Boileau, pour le sel et

savans de sa patrie, rechercher son amitié. Leurs entretiens journaliers et un commerce épistolaire très-étendu, leur donnaient une part dans tous les progrès que les sciences faisaient à cette époque chez les nations les plus instruites. Les savantes conférences d'Etienne Pascal et de ses amis éveillent l'instinct géométrique du jeune Blaise : un enfant de dix ans vient s'intéresser aux objets des hautes méditations qui occupent les premiers Géomètres de l'Europe.

la

Pascal père, portant des vues saines et judicieuses dans l'éducation de ses enfans, attaché à une méthode dictée par la nature et sanctionnée par l'autorité de l'expérience; sachant que, dans les hommes ordinaires, la mémoire et la sensibilité précèdent la raison et le jugement; bien éloigné de soupçonner la trempe du génie de son fils, destiné par nature à la plus étonnante des exceptions, Etienne Pascal veut que son élève, livré d'abord tout entier à l'étude des langues et des lettres, n'entreprenne celle des sciences que lorsque son esprit, formé par l'âge, l'observation et la réflexion, aura acquis la force et la maturité nécessaires pour soutenir les laborieux exercices du raisonnement (b). Il pense qu'il faut sans cesse étudier la mesure des forces intellectuelles des enfans, et ne rien exiger d'eux qui passe cette limite (1). Il craint encore qu'un goût trop précoce pour l'exactitude géométrique n'étouffe dans leur germe le sentiment et l'imagination, n'empèche dès-lors son jeune fils de trouver aucun attrait dans les arts et les lettres.

Ces réflexions sont sages sans doute; mais quand la nature s'occupe de former ces génies extraordinaires

(1) « Sa principale maxime, dit M.me Périer, était de tenir toujours » cet enfant au-dessus de son ouvrage. » ( Vie de M. Pascal, par M.me Périer, sa sœur.)

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