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JE soupçonne, ou plutôt je suis certain que la prolixité de cet ouvrage paraîtra d'autant plus fastidieuse à beaucoup de lecteurs, qu'elle attaque la corruption de notre vie. Tous les hommes veulent être loués, la réprimande ne plaît à personne. Et, ce qui est bien pis encore, si mauvais, si dépravé que l'on soit, on préfère un éloge menteur à une censure méritée ; on aime mieux se laisser tromper par des louanges fausses et dérisoires, que de trouver un remède dans des avis salutaires. Et alors, que reste-t-il à faire? Faut-il s'accommoder à la volonté des méchans? s'ils vont jusqu'à ambitionner des louanges frivoles, nous convient-il de déférer à leurs caprices vains et ridicules? Il est du devoir des hommes fidèles d'épargner les dérisions à ceux mêmes qui semblent ne pas les craindre, comme aussi d'épargner un éloge menteur à ceux mêmes dont la vanité se repaît

prædicari qui se cupiunt titulo etiam falsæ laudis ornari; quia non tam illud quod unusquisque illorum cupiat audire, quam quid nos dicere deceat considerandum est; præcipue cum Propheta dicat: Væ his qui dicunt dulce amarum, et amarum dulce (1). Ac per hoc, modis omnibus tenenda veritas, ut quod in re est, hoc et in verbis sit; quæ in se dulcedinem habent, dulcia, quæ amaritudinem, amara dicantur; præsertim nunc in negocio sacro, ubi a plurimis nostræ iniquitates Deo adcensentur, et ne accusabiles ipsi esse videantur, Deum accusare præsumunt. Cum enim eum incuriosum et negligentem, resque humanas aut non ex judicio gubernare, aut etiam nec gubernare blasphement, quid aliud utique Deum quam inertiæ et abusionis et iniquitatis accusant? O humanæ insipientiæ cœcitatem! O insanæ temeritatis furorem! Deum ergo, o homo, incuriosum ac negligentem vocas! Si quemlibet ingenuorum hominum hac contumelia læderes, injuriarum insolentium reus esses; certe si inlustriorem quempiam ac sublimiorem, etiam censuram juris publici sustineres. Pupillis enim vel maxime prodigis hæc objiciuntur opprobria, perditorum hoc adolescentium speciale convitium est, ut abusores scilicet et incuriosi ac negligentes rerum suarum esse dicantur. O sacrilegæ voces, o pro

(1) Is. V. 20.

de fausses louanges. Il faut avoir égard, en effet, moins à ce qui leur pourrait être agréable, qu'aux choses que nous devons leur dire, suivant ces paroles du Prophète : Malheur à ceux qui changent la douceur en amertume, et l'amertume en douceur! Et ainsi, en toute manière, il faut tenir pour la vérité; ce qui est en effet, on doit le retrouver dans nos paroles; appelons doux, ce qui a de la douceur; amer, ce qui a de l'amertume. Nous devons. surtout en agir de la sorte, dans une chose sainte, lorsqu'il se trouve des hommes qui imputent nos iniquités à Dieu, et qui, pour ne point paraître condamnables euxmêmes, osent s'en prendre au ciel. Accuser Dieu d'incurie et de négligence, affirmer par un outrageant blasphême qu'il ne gouverne point avec sagesse les affaires humaines, ou même qu'il les laisse aller à l'aventure, n'est-ce point là, le taxer d'inertie, d'imprévoyance et d'injustice? O aveuglement de la folie humaine! O fureur d'une témérité insensée! O homme, tu accuses donc le ciel d'incurie et de négligence! Si tu faisais cette injure à quelque homme d'honneur, tu passerais pour un calomniateur insolent; et, si cet homme était aussi illustre par ses emplois que par sa naissance, un châtiment public vengerait cet outrage. C'est aux pupilles les plus prodigues que l'on jette un l'on jette un pareil déshonneur, c'est à une jeunesse dissolue que l'on applique plus spécialement ce reproche, quand on l'accuse d'imprévoyance, de négligence et d'incurie dans ses affaires. O paroles sacriléges! O effronterie impudente! Nous attribuons donc à Dieu ce que l'on n'oserait dire parmi nous que des hommes les plus dissolus. Encore ne se borne-t-on point là. On va, comme je l'ai déjà dit, jusqu'à lui im

fanæ procacitates! Deum ergo hoc esse dicimus, quod etiam inter homines nonnisi perditissimos nuncupamus. Quamvis non sola ista dicantur. Nota quippe ei, ut ante jam dixi, etiam iniquitatis impingitur. Si enim nos quæ patimur non meremur, et indigni miseriarum præsentium tolerantia sumus, injustum utique Deum dicimus, qui nos jubeat mala indigna tolerare. Sed non tam, inquis, jubet quam permittit. Adquiescamus hoc ita esse. Sed quam longe, quæso, est a jubente permittens? Qui enim scit nos ista perferre, et prohibere potest ne perferamus, probat absque dubio debere perferre quæcumque patitur sustinere. Unde videmus quia judicii est sui justa permissio, et sententia superna quod patimur. Cum enim sint omnia ditionis sacræ, et nutus Dei cuncta moderetur, quicquid malorum quotidie pœnarumque perferimus, censura est divinæ manus, quam utique censuram nos inardescere facimus, et peccatis nostris jugiter commovemus. Nos cœlestis iræ ignem accendimus, et excitamus incendia quibus ardeamus. Ut recte utique, quoties mala ista perferimus, etiam ad nos dici illud propheticum possit: Ite in flammam ignis quam accendistis (1), Ac per hoc, juxta sententiam sacram, ipse sibi parat peccator quisque quod patitur. Nihil est itaque quod de calamitatibus

(1) Is. L. 11.

primer une note infamante d'iniquité. Car, si nous ne méritons pas ce que nous endurons, si nous ne méritons pas les malheurs qui nous accablent, assurément nous accusons la justice de Dieu, qui nous fait souffrir des maux si grands, malgré notre innocence. Mais, direz-vous, il permet plutôt qu'il n'ordonne. Supposons qu'il en soit ainsi. Je vous le demande, y a-t-il une si grande différence entre ordonner et permettre? Celui qui a la connaissance de nos maux, et qui peut nous en délivrer, montre sans doute que nous devons souffrir tout ce qu'il nous laisse endurer. D'où l'on voit que nos malheurs nous adviennent par une juste permission de sa sagesse, et nous sont envoyés par une sentence divine. Puisque tout est du domaine de Dieu, et que sa volonté règle chaque événement, ce que nous endurons de maux et de peines, est une correction de la main divine, main vengeresse que nous irritons, , que nous provoquons sans cesse par nos péchés. Nous allumons le feu de la colère céleste, nous excitons l'incendie qui doit nous dévorer; en sorte qu'on peut bien, chaque fois que nous souffrons ces maux, nous appliquer ces paroles du Prophète : Allez aux flammes que vous avez excitées. Et dès lors, suivant la parole sainte, le pécheur prépare lui-même son supplice. Il n'est donc rien dans nos calamités que nous puissions imputer à Dieu; c'est nous qui sommes les artisans de nos maux. Car le Seigneur est bon, miséricordieux, et, suivant l'Ecriture, il ne veut ni la perte ni le mal de personne. Nous donc, nous faisons tout contre nous. Non, il n'est rien de plus cruel envers nous que nous-mêmes; c'est nous, oui, c'est nous qui

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