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gneur furent alors aussi justes envers eux, que l'est aujourd'hui sa sévérité envers nous; que Dieu fut alors aussi équitable en élevant les Romains par son assistance, qu'il l'est aujourd'hui en punissant. Et plût à Dieu que les malheurs nous devinssent utiles! Ce qu'il y a de plus grave, de plus déplorable, c'est que la punition n'amène aucun amendement. Dieu veut nous guérir par les châtimens qu'il nous envoie, mais ces remèdes restent sans efficacité. Quel mal est donc le nôtre? Les bêtes de somme et les animaux sont guéris par le tranchant du fer; les entrailles putréfiées des mulets, des ânes et des porcs, lorsqu'elles ont été purifiées par les flammes, semblent reconnaître l'effet salutaire de ce feu médical; les parties viciées du corps ont-elles été ou brûlées ou coupées, une chair vivante remplace aussitôt les chairs mortes. Nous, nous passons par le feu, par le fer, mais ni le tranchant du fer, ni l'ardeur du feu, ne peut nous guérir; ce qui est bien plus grave, les remèdes ne servent qu'à nous rendre pires encore. C'est donc à bon droit qu'il nous arrive ce qui arrive ordinairement aux animaux et aux bêtes de somme, qui sont travaillés de maladies incurables. Car, dans toutes les parties du monde, la mort et le meurtre nous achèvent, parce que les soins et les remèdes ne peuvent rien sur nous. Et maintenant, pour ne pas répéter ce que j'ai déjà dit, comment qualifier ces désordres déjà signalés, l'union de la misère et du luxe? Je le veux, que ce soient là les vices des heureux (bien que personne ne puisse être à la fois heureux et criminel, puisque la vraie félicité ne saurait se trouver là où ne se rencontre point une sincère vertu), mais encore, que ce soient là, comme je

dixi, esto, sint vitia ista et longæ pacis et opulentæ securitatis. Cur, quæso, illic sunt ubi jam nulla pax, ubi nulla securitas? In omni enim ferme orbe Romano pax et securitas non sunt. Cur sola tantum vitia perdurant? Quis, rogo, ferre possit in homine egestuoso esse lasciviam? Criminosior quippe est luxuriosa paupertas; et majoris invidiæ, miser nugax. Totus Romanus orbis et miser est, et luxuriosus. Quis, quæso, pauper et nugax? Quis captivitatem expectans, de circo cogitat; quis metuit mortem, et ridet ? Nos, et in metu captivitatis ludimus; et positi in mortis timore, ridemus. Sardonicis quodammodo herbis omnem Romanum populum putes esse saturatum. Moritur, et ridet. Et ideo in omnibus fere partibus mundi risus nostros lacrymæ consequuntur. Advenit etiam in præsenti super nos illud Domini nostri dictum : Væ vobis qui ridetis, quoniam flebitis (1).

Sed forsitan, cum de ludicris ac fœditatibus publicis diutissime dixerimus, in hoc tantum quis deteriores esse nos putat barbaris, quia illi hæc non agunt, nos agimus, cæterum ipso carnalis libidinis scelere et fornicationis funestæ cœno non ita pollui. Comparemus, si placet, cœteris nationibus etiam in hac parte Romanos. Et quidem nescio an ullis rectius comparentur quam

(1) Luc. VI. 25.

l'ai déjà dit, les vices d'une longue paix et d'une opulente sécurité; pourquoi, je le demande, voit-on régner ces désordres là où il n'y a plus de paix, plus de sécurité? Car, la paix et la sécurité sont exilées de presque tout le monde romain. Pourquoi les vices seuls survivent-ils? Qui pourrait supporter dans un homme indigent un amour effréné du plaisir? Car, une pauvreté luxurieuse est plus criminelle, et le malheureux qui s'adonne à des frivolités devient plus odieux. Tout le monde romain est à la fois dans les plaisirs et l'indigence. Où est l'homme, je vous prie, à la fois pauvre et dissipé? Où est l'homme qui, dans l'attente de la captivité, ose songer au cirque? Où est l'homme qui craint la mort, et qui rit? Nous, avec la crainte de l'esclavage, nous jouons; avec l'appréhension de la mort, nous rions. Vous diriez que tout le peuple romain est en quelque sorte saturé d'herbes sardoniques. Il meurt, et il rit. Et voilà pourquoi, dans presque toutes les parties du monde, nos rires sont suivis de larmes. Aujourd'hui même s'accomplit sur nous cette parole de notre maître : Malheur à vous qui riez, car vous pleurerez.

Peut-être, comme je n'ai parlé jusqu'à présent que des jeux et des infamies publiques, peut-être quelqu'un se persuadera-t-il qu'en cela seulement nous sommes inférieurs aux Barbares, parce qu'ils ne se livrent point à ces désordres et que nous nous y livrons, mais que du reste les Romains ne se plongent pas dans la fange des voluptés charnelles, ni dans une avilissante fornication. Comparons, si vous le voulez, même sous ce rapport, les Romains aux autres nations. Et l'on ne saurait mieux les comparer, ce semble, qu'à ces peuples que Dieu a

his quos Deus in medio Reipublicæ sinu positos, possessores fecit ac dominos soli esse Romani. Unde, quamvis nihil disputari de judicio Dei possit, tamen cum ablatam nobis juris nostri optimam partem barbaris dederit, videamus an id quod nobis tulit et illis tradidit, justo judicio tradidisse videatur. Nemini dubium est Aquitanos ac Novempopulos medullam fere omnium Galliarum et uber totius fœcunditatis habuisse, nec solum fœcunditatis, sed, quæ præponi interdum fœcunditati solent, jucunditatis, voluptatis, pulchritudinis. Adeo illic omnis admodum regio aut intertexta vineis, aut florulenta pratis, aut distincta culturis, aut consita pomis, aut amoenata lucis, aut inrigua fontibus, aut interfusa fluminibus, aut crinita messibus fuit. Ut vere possessores ac domini terræ illius non tam soli istius portionem quam paradisi imaginem possedisse videantur. Quid ergo post ista omnia? Officiosiores absque dubio Deo esse debuerant, quos peculiariter Deus abundantissima beneficiorum suorum dote ditaverat. Quid enim rectius, aut quid dignius, quam ut quibus per munera sua Dominus quasi specialiter videbatur placere voluisse, iidem quoque specialius Domino cultu ac religione placuissent; præsertim cum a nobis Deus nil onerosum, nil grave exigat. Non enim nos ad aratra aut ad ligones vocat, non ad scindendas terras, neque ad vineas pastinandas, non

placés au sein même de la république, et qu'il a rendus possesseurs et maîtres du sol romain. C'est pourquoi, bien qu'il ne soit jamais permis de scruter les jugemens de Dieu, toutefois, puisqu'il nous a enlevé la meilleure part de notre domination pour la livrer aux barbares, voyons si, dans ce dépouillement d'un côté et dans cette transmission de l'autre, sa justice sera trouvée irréprochable. Aucun doute que l'Aquitaine et la Novempopulanie ne soient comme la moëlle de presque toutes les Gaules, et ne possèdent un terroir d'une merveilleuse fécondité, un terroir plein non-seulement de fécondité, mais encore, ce qui est quelquefois préférable, d'agrément, de plaisir, de charme. Là, tout le pays est chargé de vignes, orné de riantes prairies, parsemé de champs cultivés, planté d'arbres fruitiers, ombragé de bosquets gracieux, arrosé de fontaines, entrecoupé de fleuves, couvert de moissons ondoyantes, en sorte que les possesseurs et les maîtres de cette terre semblent habiter moins une portion d'un sol terrestre qu'une image du paradis. Quoi donc après tout cela? Ils devaient sans doute se montrer plus religieux, ces peuples que le ciel avait particulièrement enrichis de si larges bienfaits. Quoi de plus juste, quoi de plus digne que de voir ces hommes auxquels le Seigneur semblait avoir voulu plaire d'une manière spéciale par ses présens, s'efforcer eux aussi, de se rendre plus agréables au Seigneur par une piété, par un culte spécial, d'autant que Dieu n'exige de nous rien d'onéreux, rien de pénible? Il ne nous appelle point à conduire la charrue, à manier le hoyau, à déchirer la terre, à façonner la vigne; en un mot, il ne demande point de ses serviteurs ce que nous

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