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nouveau genre de folie s'est emparé des séculiers comme aussi de quelques personnes consacrées à Dieu. Car, ainsi que nous l'avons remarqué, ce n'est pas seulement à ses fils ou à ses petits fils, la tendresse naturelle du moins rendrait cela supportable, mais encore à ses parens et à ses proches venant, comme on dit, de ligne directe, de ligne oblique et transversale, ou plutôt d'une ligne ennemie et contraire, que l'on abandonne ses biens, c'est-à-dire le prix de sa rédemption, suivant qu'il est écrit: Il n'a rien offert à Dieu qui le réconcilie avec lui, et qui soit le prix de la rédemption de son ame. Et un peu après: L'imprudent et le fou périront également, ils laisseront leurs richesses à des étrangers; Et leurs sépulcres seront leur demeure à jamais. Ce n'est pas ici le lieu de marquer la différence qui se trouve entre le fou et l'imprudent; il importe peu d'ailleurs de donner une distinction précise entre des hommes dont la ruine est la même. Le prophète a dit que l'imprudent et le fou périront également, cela suffit pour notre sujet; voyons maintenant ce qui est la cause et le comble de leur ruine. Ils laisseront, ajoutet-il, leurs richesses à des étrangers. Il a raison; car, estil rien d'aussi insensé, d'aussi dépravé que de ne point employer ses richesses à son bonheur propre, lorsque Dieu nous assure qu'il ne sert à rien de gagner l'univers et de perdre son ame. Et qu'est-ce que l'homme donnera, dit l'Evangéliste, en échange pour son ame? Si donc les hommes doivent mépriser le monde entier pour ne pas perdre leurs ames; s'il faut préférer son salut à tous les intérêts de la terre, quelle infidélité, quelle folie n'est-ce pas de condamner son ame, pour

sua (1). Si ergo homines totum mundum spernere oportet, ne animarum damna patiantur, et propter suam salutem debet quispiam etiam sua lucra contemnere, quam infidelis est, quam insipiens est, qui, ut alium divitem faciat, animam suam ipse condemnat ? maxime cum et ille non multum adipiscatur qui usum temporalium rerum accipit, et ille inestimabilia damna perferat qui fructum beatæ æternitatis amittit. Nam et ideo sequitur in psalmo : Sepulcra eorum, domus eorum in æternum. Quam misera ergo erit perdita sors eorum, qui quasi sepulcris perennibus deputati, quam conditionem post mortem perferunt corporum, eamdem quodammodo patiantur animarum, et quidem minus miseram, si eamdem, aut si ad eos, ut jumenta insipientia, nec bonorum sensus nec malorum passio perveniret. Sed illud acerbum atque intolerabile, quod similiter pereunt, sed non similiter puniuntur: illorum enim mors sempiterna sine sensu est, istorum omnium cum dolore, ac sic conditionem hominum peccatorum perditio quidem facit pecudibus esse similem, sed tamen pœnam graviorem. Cogitent igitur cuncta ista quæ dicimus, imo cogitent cuncta illa quæ Deus dicit, qui sibi nec ante mortem omnino consulunt, nec in morte succurrunt, apud quos oblivio est penitus suarum animarum. Nec interest pene jam apud

(1) Matth. XVI. 26.

enrichir un étranger, d'autant plus qu'il gagne peu, celui qui reçoit l'usage des choses temporelles, et qu'il essuie des dommages incalculables, celui qui, perd le fruit d'une éternité bienheureuse! C'est pour cela qu'on ajoute dans le psaume: Leurs sépulcres seront leur demeure à jamais. Qu'il est donc malheureux le triste sort de ces hommes qui, réservés pour ainsi dire à des sépulcres éternels, subissent en quelque façon dans leurs ames la même destinée qu'ils éprouvent dans leurs corps après le trépas; encore, serait-elle moins déplorable, si elle était la même, ou si, comme les animaux privés de raison, ils n'avaient le sentiment ni de la félicité, ni du malheur. Ce qu'il y a d'amer et de cruel, c'est que ces hommes et les animaux périssent de la même manière, sans avoir le même sort: ceux-ci sont éternellement privés de sentiment, ceux-là livrés à de poignantes douleurs; les hommes pécheurs rendent en se perdant leur condition semblable à celle des bêtes, mais toutefois le supplice qu'ils endurent établit une différence. Qu'ils méditent donc ce que je viens de dire, ou plutôt ce que Dieu leur dit, ceux qui ne veillent point à leurs intérêts avant la mort, n'y songent point à l'heure dernière, et oublient entièrement leurs ames. Ils ne regardent pas quels sont les hommes dont ils se constituent les patrons, pourvu que leurs propres avantages soient mis en dehors. Car, à l'approche de la mort, quelques-unes des personnes que nous désignons, manquent-elles d'enfans, dans une coupable sollicitude, elles cherchent à qui donner le nom de parens ou d'alliés, et à défaut de titres véritables, elles vont inventer des liens chimériques et des titres imaginaires. Et alors,

homines quibus consulant, dummodo sibi omnino non consulant. Si qui enim ex istis, de quibus loquimur, morte appropinquante, filios non habent, quærunt infidelissime quos aut propinquos aut adfines suos dicant, aut, si id forte deest, quærunt saltem aliqua novarum necessitudinum ficta nomina. Nec interest, ut dixi, apud eos quorum meminerint, dummodo sui obliviscantur; non interest quos amare se dicant, dummodo animas suas oderint; non interest quos divites faciant, dummodo se æterna mendicitate consu

mant.

O infelicitas, o insania! Quid tantum, quæso, de se miserrimi omnium male promeruerunt, ut, dum aliorum voluptatibus serviunt, se perpetuo persequantur? Videas enim a quibusdam infelicissima vanitate investigari quosdam novos ac nobiles propinquos, videas incognitarum agnationum pudenda nomina et recentium ac præpotentium adfinitatum ridicula commenta, cum dicat quis de aliquo adoptivo ac subitaneo propinquo: Illum hæredem facio, parentem meum. Aut quæcumque sanctæ professionis vidua vel puella: Illum hæredem scribo, proximum meum. Ac, sic, quidam quos in omni vita quasi extraneos alienosque habuerant, subito in extremis propinquos habent; et qui extranei semper fuere viventium, parentes esse incipiunt mortuorum. Introducunt enim repente in testamentum quos

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il n'importe guère, comme je l'ai dit, quels sont les hommes dont on se souvient, pourvu qu'on s'oublie soi-même; il n'importe guère quels sont ceux que l'on traite d'amis, pourvu que l'on haïsse son ame; il n'importe guère quels sont ceux qu'on enrichit, pourvu qu'on se condamne à une éternelle indigence.

O malheur ! & folie! en quoi, je vous prie, ces infortunés ont-ils donc mérité si mal d'eux-mêmes, pour se persécuter sans relâche, pendant qu'ils servent les plaisirs des autres? On voit des hommes qui, par une déplorable vanité, cherchent à se donner des parens nobles; on voit des généalogies inconnues qui reposent sur des titres ridicules, des affinités nouvelles et puissantes fondées sur des preuves risibles et mensongères. On entend dire d'un parent adoptif et improvisé : Je fais un tel mon héritier, parce qu'il est mon parent. Il n'est pas jusqu'à des veuves, jusqu'à des vierges d'une profession sainte, qui ne disent: Je constitue un tel mon héritier, parce qu'il est mon proche. Ainsi des personnes que, dans tout le cours de la vie, on avait tenues pour étrangè res, on se hâte à l'heure dernière de les ériger en parens; et, d'inconnues qu'elles furent toujours aux vivans, elles se trouvent, unies aux morts par d'intimes liens. Car on introduit tout-à-coup dans son testament, ceux

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