devant mes yeux. Je dois quitter toutes ces créatures qu'on aime avec tant de paffion & perdre en un moment ces honneurs, ces richeffes & ces plaisirs qui poffédoient tout le cœur. Toutes les grandeurs de l'homme fe diffipent par un fouffle, & toute leur gloire fe réduit à un peu de pouffière. Cependant, une ame s'en va devant vous dépouillée de tout & ne portant avec elle que les actions. bonnes ou mauvaifes qu'elle a faites dans ce corps qu'elle eft obligée d'abandonner. Vous la citez à votre Tribunal & vous la jugez, & elle connoît dans ce jugement terrible, que tout le fiècle n'eft que vanité, qu'elle a perdu tout le temps qu'elle n'a pas employé à vous fervir. Mais cette connoiffance ô mon Dieu fait fa confufion & fon défefpoir, fi elle n'a pas méprifé ici - bas ce qu'elle voit alors n'avoir été que vanité, & fi elle a au contraire méprifé ce temps qu'elle devoit faire fervir en vous aimant, à l'acquifition d'une bienheureuse éternité. Il n'eft plus temps pour elle de rien faire pour fon falut, & il faut qu'elle reçoive ce qui eft dû à la vie qu'elle a menée en ce monde. Vous nous obligez, Seigneur d'implorer votre miféricorde pour Ames que vous retirez de cette vie; mais en priant pour celles que je vous recommande, faites, s'il vous plaît, que je ne

K

ces

m'oublie pas moi-même. Je dois d'autant plus penfer à moi, que je fuis encore en état par votre bonté de réparer mes fautes paffées, & d'en obtenir le pardon par une pénitence fincère. Donnez-la-moi

mon

Dieu, cette pénitence, qui me faffe méprifer tout ce qui fe paffe, & quitter volontaire-. ment ce que je dois perdre néceffairement par la mort. Faites-moi la grace d'estimer plus que je n'ai fait, le temps que vous me donnez pour vous aimer, & pour vous mériter en vous aimant. Il arrive quelquefois fur la terre qu'un Juge condamne un coupable, & en même temps fait informer contre quelqu'autre qui n'y penfe pas, & donne ordre de l'arrêter. Hélas! Seigneur, c'eft peut-être ce qui fe paffe à mon égard. Vous jugez cette ame pour qui je vous prie & vous avez peut-être prononcé l'arrêt de ma mort; & ce fera peut-être dès aujourd'hui qu'il doit être exécuté. Faites donc, mon Dieu, que je prévienne cette heure terrible, & que dès ce moment, qui eft le feul dont je me puiffe tenir affurée, je me renouvelle tellement devant vous, que foit que je vive encore long-temps, foit que je meure bientôt, je n'aime plus que vous, & que je ne craigne plus la perte de tout ce qu'il y a ici bas pour aller à vous.

,

Prière pour demander à Dieu la grace converfion.

de fa

Seigneur, qui tenez nos cœurs entre vos

mains convertiffez-nous à vous nous nous convertirons.

&

C'eft à vous feul, ô mon Dieu, qu'est réservée la conquête de mon cœur ; vous feul favez par où on y peut entrer. Que les hommes parlent fans vous, leurs paroles n'ont aucun effet, mais parlez une fois, Seigneur & votre voix toute-puiffante fe fera entendre jufques dans le tumulte & le bruit du monde.

O Père des miféricordes qui du fein même des pierres, faites naître des enfans d'Abraham amoliffez une ame endurcie! O Père des lumières, qui percez les plus épaiffes ténèbres conduifez vous-même une ame aveugle & égarée !

Je vous demande mon Dieu ce qui vous eft le plus agréable, & ce qui m'eft le plus avantageux; ce n'eft point d'être plus riche, plus honorée, plus heureuse felon le monde, c'eft de retourner à vous par une fincère pénitence; c'eft d'avoir plus de vertu, plus de piété que je n'en ai c'eft de vous fervir plus fidèlement que je n'ai fait jufqu'à cette heure. Si je connoiffois quelque chofe de meilleur pour votre gloire & pour mon falut, je vous le demanderois. Ah! je vous demande un cœur contrit & humilié avec un fens

droit, qui me faffe marcher dans les voies de la Juftice chrétienne.

Je fouhaite avec Salomon, cette véritable fageffe qui confifte à n'eftimer que les chofes éternelles; donnez-la-moi, Seigneur, & je la préférerai aux fceptres & aux couronnes; tout l'or & tout l'argent de la terre ne me fera, au prix d'elle, que de la boue.

Rappellez ces jours de bénédiction & de falut, où j'ai été à vous. Il y en a eu quelques-uns dans ma vie, vous ne les avez pas oubliés, & moi je ne puis fans un extrême regret me fouvenir d'un état fi heureux, dont je fuis déchue par ma faute, & où j'espère rentrer bientôt par votre grace.

Si c'eft affez de connoître fes befoins & les plaies de fon coeur pour être exaucé de vous je viens Seigneur devant vos Autels vous faire un aveu de ma foibleffe; s'il y faut joindre la connoiffance de fon indignité, j'en fuis encore bien convaincue. Je fais mon Dieu , , que je n'ai pas mérité de vous le don le plus excellent qui vient d'en haut, qui est la grace de ma converfion. Je fais plus car je confeffe devant votre adorable Majefté, que je m'en fuis rendue abfolument indigne. Ce n'eft point auffi votre justice que je reclame, c'eft votre miféricorde & votre grande miféricorde, comme David. Oui j'ai befoin qu'elle agiffe dans toute fon étendue qu'elle déploie fur

moi toute fa force, pour rompre la chaîne qui me tient efclave, & pour me remettre dans la liberté des enfans de Dieu.

Combien de fois, mon Dieu, m'avez-vous follicitée & preffée ? Combien de fois m'avezvous fait entendre intérieurement ces paroles Ma fille donnez-moi votre coeur: je vous l'ai refufé, & vous n'avez pas ceffé de me le demander. Le voici enfin, Seigneur, ne le rejettez pas lorfque je viens vous l'offrir.

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Je le dis, & je commencerai dès aujourd'hui à l'exécuter avec le fecours de votre grace je rentrerai dans la voie de vos Commandemens, j'y marcherai, j'y courrai comme David, jufqu'à ce que j'arrive à l'heureux terme où vous m'appellez. Ainfi foit-il.

Prière pour demander à Dieu la grace de connoître & de fuivre fa vocation.

A Dorable Jefus

profternée humble

ment à vos pieds, je vous demande vos lumières & votre fecours dans la plus importante affaire que je puiffe avoir. Il faut prendre mon parti & choifir un état de vie; je fais que mon repos & mon falut dépendent beaucoup de ce choix que c'eft m'expofer aux plus grands dangers, que de me déterminer fans vous confulter, ou fans conformer ma volonté à la votre. Bien des routes différentes fe