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CHOISIES

DE BERNARDIN

DE SAINT-PIERRE,

CONTENANT

PAUL ET VIRGINIE,

LA CHAUMIÈRE INDIENNE,

LE CAFÉ DE SURATE,

VOYAGE EN SILÉSIE, A L'ILE DE FRANCE,

L'ARCADIE;

DE LA NATURE DE LA MORALE;
VOEUX D'UN SOLITAIRE.

PARIS,

LIBRAIRIE DE FIRMIN DIDOT FRÈRES,

IMPRIMEURS DE L'Institut,

RUE JACOB, 56.

-

1848.

Harvard College Library

Aug. 23, 1917

Gift of

Dr. H. Bradford

EXTRAIT DU PRÉAMBULE

DE L'ÉDITION IN-QUARTO

DE PAUL ET VIRGINIE.

Ce petit ouvrage n'est qu'un délassement de mes Études de la Nature, et l'application que j'ai faite de ses lois au bonheur de deux familles malheureuses. Il fut publié en 1786, et l'accueil qu'il reçut à sa naissance surpassa mon attente: on en fit des romances, des idylles, et plusieurs pièces de théâtre. Un grand nombre de mères firent porter à leurs enfants les noms de Paul et de Virginie; enfin, la réputation de cette pastorale s'étendit dans toute l'Europe, et elle fut successivement traduite en anglais, en italien, en allemand, en hollandais, en polonais, en russe et en espagnol. Sans doute j'ai obligation de ce succès unanime, chez des nations d'opinions si différentes, aux femmes, qui, par tout pays, ramènent de tous leurs moyens les hommes aux lois de la nature. Elles m'en ont donné une preuve évidente, en ce que la plupart de ces traductions ont été faites par des dames ou des demoiselles. J'ai été enchanté, je l'avoue, de voir mes enfants adoptifs revêtus de costumes étrangers par des mains maternelles ou virginales; et sans doute ils lui sont redevables d'une réputation qui semble s'étendre, dès à présent, vers la postérité.

Plusieurs personnes m'ont questionné sur le sujet de cet ouvrage. « Ce vieillard, m'ont-elles dit, vous a-t-il en effet raconté «< cette histoire? avez-vous vu les lieux que vous avez décrits ? Virginie a-t-elle péri d'une manière aussi déplorable? comment une « fille peut-elle se résoudre à quitter la vie plutôt que ses ha<< bits? >>

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Je leur ai répondu : L'homme ressemble à un enfant. Donnez une rose à un enfant : d'abord il eu jouit, bientôt il veut la connaître. Il en examine les feuilles, puis il les détache l'une apres l'autre ; et quand il en connaît l'ensemble, il n'a plus de rose. Télé

BERN. DE S.-PIERRE.-T. I.

maque, Clarisse, et tant d'autres sujets qui nous portent à la vertu, ou qui nous font verser des larmes sont-ils vrais?

Au fond, je suis persuadé que ces personnes m'ont fait ces questions plutôt par un sentiment d'humanité que de curiosité. Elles étaient fachées que deux amants si tendres et si heureux eussent fait une fin si funeste.

Plut à Dieu qu'il m'eût été libre de tracer à la vertu une carrière parfaite de bonheur sur la terre! Mais, je le répète, j'ai décrit des sites réels, des mœurs dont on trouverait peut-être encore aujourd'hui des modèles dans quelques parties solitaires de l'Ile-deFrance, ou de l'Ile de Bourbon qui en est voisine, et une catastrophe bien certaine, dont je puis produire, même à Paris, des témoignages irrécusables.

Un jour, étant au Jardin du Roi, une dame, d'une figure trèsintéressante, accompagnée de son mari, ayant su de M. Jean Thouin, chef de ce jardin, que j'étais l'auteur de Paul et Virginie, m'aborda pour me dire : « Ah! monsieur, que vous m'avez << fait passer une nuit terrible! Je n'ai cessé de gémir et de fondre << en larmes. La personne dont vous avez décrit la fin malheureuse « avec tant de vérité, dans le naufrage du Saint-Géran, était ma parente. Je suis créole de Bourbon. » J'appris ensuite de M. Jean Thouin que cette dame était l'épouse de M. de Bonneuil, premier valet de chambre de MONSIEUR. Cette dame, depuis, a bien voulu me permettre de publier ici son témoignage sur la vérité de cette ca-~tastrophe, dont elle m'a rapporté des circonstances capables d'ajouter beaucoup à l'intérêt qu'inspirent la mort de cette sublime victime de la pudeur, et celle de son amant infortuné.

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D'autres personnes ayant témoigné le désir que je fisse connaitre avec quelques détails la vie de M. de la Bourdonnais, mes relations avec sa famille m'ont mis à même de les satisfaire.

« Sa principale vertu était l'humanité. Les monuments qu'il a établis à l'Ile-de-France sont garants de cette vérité... »

En effet, j'ai vu dans cette île, où j'ai servi comme ingénieur du roi, non-seulement des batteries et des redoutes qu'il avait placées aux lieux les plus convenables, mais des magasins et des hôpitaux très-bien distribués. On lui doit surtout un aqueduc de plus de trois quarts de lieue, par lequel il a amené les eaux de la petite rivière jusqu'au Port-Louis, où, avant lui, il n'y en avait

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