Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

celles des Jacobites, des Cophtes, des Arméniens, des Éthiopiens, des Syriens, des Nestoriens; en un mot, toutes les liturgies antérieures à la Réforme déposent en faveur de la foi catholique, touchant la prière pour les morts. Il est donc constant que la croyance au purgatoire et à l'utilité des prières pour les morts remonte jusqu'aux premiers siècles du christianisme, et qu'elle ne peut venir que des apôtres et de Jésus-Christ. « On croit avec raison que ce « qui s'observe dans l'Église universelle, et qui s'est toujours ob«servé sans avoir été établi par aucun concile, nous a été transmis « par les apôtres; » quod universa tenet Ecclesia, nec conciliis institutum, sed semper retentum, nonnisi auctoritate apostolica traditum rectissime creditur (1). Le dogme du purgatoire n'eût-il pas d'autre fondement que la tradition, il n'en serait pas moins inébranlable; car, comme nous l'avons montré ailleurs, il est des vérités de la religion qui sont admises par tous les chrétiens, même par les protestants, quoiqu'on ne puisse les prouver que par la tradition (2).

205. Mais nous n'avons pas seulement la tradition pour nous. On a déjà pu remarquer que les Pères s'appuient sur le Nouveau et même sur l'Ancien Testament, pour prouver l'existence du purgatoire. En effet, on lit dans saint Matthieu : « Quiconque aura « parlé contre le Fils de l'Homme, son péché lui sera remis; mais « si quelqu'un parle contre le Saint-Esprit, son péché ne lui sera << remis ni dans ce siècle ni dans l'autre; » non remittetur, neque in hoc sæculo, neque in futuro (3); c'est-à-dire que son péché lui sera remis difficilement, soit en ce monde, soit en l'autre : ce qui suppose qu'il y a des péchés qui sont remis ou expiés après la mort, comme l'ont observé, parmi les anciens, saint Augustin, saint Grégoire le Grand, saint Isidore de Séville, Gérard, évêque de Cambrai, et saint Bernard. C'était, d'ailleurs, la croyance des Juifs l'auteur du deuxième livre des Machabées rapporte qu'après une bataille, Judas vint avec ses gens pour emporter les corps de ceux qui avaient été tués, et que, « ayant fait une collecte, il envoya douze mille dragmes d'argent à Jérusalem, afin de faire « offrir un sacrifice pour les péchés des morts, ayant de bons et de

(1) Saint Augustin, liv. iv, du Baptême, c. xxiv. (2) Voyez, au tome 1, la seconde partie du traité de l'Écriture sainte et de la tradition. — (3) Saint Matthieu, c. XII, v. 32. - Voyez aussi, dans la Ire épître de saint Paul aux Corinthiens, c. in, v. 11, le texte Fundamentum hoc nemo potest ponere, etc., sur lequel plusieurs saints Pères, entre autres saint Augustin et saint Grégoire le Grand, s'appuient pour prouver le dogme du purgatoire.

«

religieux sentiments sur la résurrection. C'est donc une sainte et « salutaire pensée, ajoute l'écrivain sacré, de prier pour les morts, « afin qu'ils soient délivrés de leurs péchés (1). » C'est en vain que les protestants révoquent en doute la canonicité ou l'inspiration des livres des Machabées; car nous avons prouvé qu'on doit les admettre comme canoniques (2). D'ailleurs, quand les hérétiques seraient fondés à ne pas regarder ces livres comme divins, le passage que nous avons cité est au moins un témoignage de la croyance du peuple de Dieu à l'utilité de la prière pour les morts, et à l'existence du purgatoire.

206. Après avoir montré, par l'Écriture, le témoignage des Pères et l'autorité des conciles, qu'il y a un purgatoire, et que les âmes qui y sont détenues sont soulagées par les prières des fidèles et le saint sacrifice de la messe, nous ferons remarquer que le dogme catholique ne va pas plus loin. Il est de foi, 1° que les justes qui meurent sans avoir entièrement satisfait à la justice divine, doivent satisfaire après cette vie par des peines temporaires qu'on appelle les peines du purgatoire; 2° que les âmes du purgatoire trouvent du soulagement dans les prières de l'Église. Voilà ce que la foi nous enseigne; mais elle s'arrête là. Le purgatoire est-il un lieu particulier plutôt qu'un état, ou un état plutôt qu'un lieu particulier? La peine du purgatoire est-elle la peine du feu, ou simplement une douleur vive et amère d'avoir offensé Dieu ? Quelle est la rigueur et la durée de cette peine? Ces questions et autres semblables ne sont point comprises dans le domaine du dogme catholique. Ce sont des questions au sujet desquelles il n'existe aucune décision, aucun jugement de la part de l'Église. Cependant nous ne devons point laisser ignorer que l'opinion la plus commune parmi les théologiens fait consister, en partie, les tourments du purgatoire dans la peine du feu, ou du moins dans une peine analogue à celle du feu. Nous ajouterons que, selon saint Augustin et saint Thomas, dont le sentiment est assez suivi, la peine du purgatoire surpasse toute peine de cette vie : Pœna purgatorii, dit le docteur angélique, quantum ad pœnam damni et sensus, excedit omnem pœnam istius vitæ (3).

(1) Et facta collatione, duodecim millia drachmas argenti misit Jerosolymam offerri pro peccatis mortuorum sacrificium, bene et religiose de resurrectione cogitans.... Sancta ergo et salubris est cogitatio pro defunctis exorare ut a pecCatis solvantur. 11o liv. des Machabées, c. xìì, v. 43, etc.— (2) Voyez le tom. 1, n° 239 et 240.- (3) Suppl., quæst. LXXII, art. 1.

CHAPITRE IV.

De la réprobation.

207. La réprobation est un acte, un décret par lequel Dieu exclut du royaume des cieux et condamne au supplice de l'enfer les pécheurs qui meurent dans l'impénitence finale. C'est le contraire de la prédestination.

C'est un dogme catholique qu'il y a une réprobation, c'est-à-dire un décret de Dieu, par lequel il veut non-seulement exclure du bonheur éternel un certain nombre d'hommes, mais encore les condamner aux peines de l'enfer. Au jour du jugement, le Seigneur dira aux prédestinés : « Venez, les bénis de mon père; pos« sédez le royaume qui vous a été préparé depuis la création du ◄ monde. » De même, il dira aux réprouvés : « Retirez-vous de « moi, maudits; allez au feu éternel qui est préparé à Satan et à «ses anges (1). » Ce décret, quoique infaillible comme la prescience divine, n'impose à ceux qui en sont l'objet aucune nécessité de pécher; il suppose même la liberté, ou l'abus volontaire et véritablement libre de la grâce que Dieu ne refuse à personne. Celui qui est réprouvé ne l'est pas parce qu'il existe un décret de réprobation; mais ce décret n'existe que parce que le pécheur qu'il concerne se réprouve lui-même, en persévérant volontairement et librement dans son péché jusqu'à la fin.

ARTICLE I.

Dieu ne condamne aux peines éternelles de l'enfer que ceux qui l'ont mérité; il n'a décrété leur damnation que sur la prévision de leurs péchés et de leur impénitence.

208. Il est de foi que la grâce de la justification n'est pas seulement pour ceux qui sont prédestinés à la vie; que tous les autres qui sont appelés reçoivent la grâce; et que personne n'est prédestiné au mal par la puissance divine. « Si quelqu'un dit que la grâce « de la justification n'est que pour ceux qui sont prédestinés à la

(1) Saint Matthieu, c. xxv, v. 34 et 41.

« vie ; et que tous les autres qui sont appelés sont à la vérité appe« lés, mais qu'ils ne reçoivent point la grâce, comme étant pré⚫ destinés au mal par la puissance de Dieu; qu'il soit anathème (1) ! » Cette définition du concile de Trente contre Calvin, qui a renouvelé l'erreur des prédestinatiens, est conforme à celle du concile d'Orange de l'an 529, dont les actes ont été sanctionnés par le pape Boniface II. « Non-seulement nous ne croyons pas, disent ⚫les Pères de ce concile, que Dieu ait prédestiné quelques-uns au « mal; mais s'il en est qui persistent dans des sentiments si détes<tables, nous les avons en horreur, et nous leur disons anathème (2). » Le concile de Valence, de l'an 855, s'exprime de la mème manière : il enseigne que Dieu, par sa prescience, connaît de toute éternité le bien que les bons doivent faire, et le mal dont les méchants doivent se rendre coupables; qu'il a prévu que les bons seraient bons par sa grâce, et que, par la même grâce, ils recevraient la récompense éternelle; qu'il a prévu également que les méchants seraient méchants par leur propre malice, et que, par sa justice, ils seraient condamnés à la peine éternelle. Le même concile ajoute que la prescience de Dieu n'impose à personne la nécessité d'être méchant; mais que Dieu, qui connaît toutes choses avant qu'elles arrivent, a prévu que le méchant le serait par sa propre volonté; que celui qui est condamné l'est par le mérite de sa propre iniquité, et non par un décret antérieur à la prescience divine; que si les méchants périssent, ce n'est pas qu'ils n'aient pu être bons, mais bien parce qu'ils n'ont pas voulu être bons: nec ipsos malos ideo perire quia boni esse non potuerunt, sed quia boni esse noluerunt (3); que, dans le choix de ceux qui seront sauvés, la miséri

(1) Si quis justificationis gratiam nonnisi prædestinatis ad vitam contingere dixerit; reliquos vero omnes qui vocantur, vocari quidem, sed gratiam non accipere, utpote divina potestate prædestinatos ad malum; anathema sit. Con⚫ cile de Trente, sess. vi, can. XVII. — (2) Aliquos vero ad malum divina potestate prædestinatos esse non solum non credimus, sed etiam, si sunt qui tantum malum credere velint, cum omni detestatione illis anathema dicimus. Labbe, Concil., tom. iv, col. 1671. (3) Deum præscire et præscisse æternaliter, et bona quæ boni erant facturi, et mala quæ mali sunt gesturi. ... fideliter tenemus et placet tenere, honos præscisse omnino per gratiam suam bonos futuros, et per eamdem gratiam æterna præmia accepturos: malos præscisse per propriam malitiam malos futuros, et per suam justitiam æterna ultione damnandos.... Nec prorsus ulli malo præscientiam Dei imposuisse necessitatem, ut aliud esse non posset, sed quod ille futurus erat ex propria voluntate, ille, sicuti Deus, qui novit omnia antequam fiant, præsciit ex sua omnipotenti et incom mutabili majestate. Nec ex præjudicio ejus aliquem, sed ex merito propriæ iniquitatis credimus condemnari. Nec ipsos malos ideo perire, quia boni esse non

corde de Dieu précède leur mérite, tandis que, dans la condamnation de ceux qui périront, leur démérite précède le juste jugement de Dieu; que Dieu a prévu la malice des méchants, parce qu'elle est d'eux; mais qu'il ne l'a point prédestinée, parce qu'elle n'est point de lui; qu'à l'égard de la peine qui suit leurs mauvaises actions, Dieu l'a prévue, parce qu'il sait tout, et l'a décrétée, parce qu'il est juste. Enfin, les évêques du concile de Valence concluent en disant anathème, d'après le concile d'Orange, à ceux qui croient que quelques-uns ont été prédestinés au mal par la puissance divine (1).

[ocr errors]

"

209. Non, l'on ne peut soutenir saus impiété que Dieu veuille, d'une volonté antécédente ou absolue, la perte des réprouvés. Dieu, dit saint Augustin, peut sauver quelqu'un sans qu'il l'ait mérité, parce qu'il est bon; mais il ne peut damner personne qui « ne l'ait mérité, parce qu'il est juste: Deus potest aliquos sine a bonis meritis liberare, quia bonus est: non potest quempiam « sine malis meritis damnare, quia justus est (2). Ce n'est point « Dieu qui a fait la mort; il ne se réjouit point de la perte des vivants: « Deus mortem non fecit, nec lætatur in perditione vivorum (3). » Le souverain juge ne condamne les méchants aux peines de l'enfer que parce qu'ayant pu faire le bien ici-bas, ils ne l'ont pas fait. « Retirez-vous de moi, maudits; allez au feu éternel qui a été préparé à Satan et à ses anges: car j'ai eu faim, et vous ne m'avez « pas donné à manger; j'ai eu soif, et vous ne m'avez pas donné à « boire (4).

210. Le décret de la damnation éternelle est donc fondé sur la prévision des péchés et de l'impénitence finale des pécheurs : ce qui s'accorde parfaitement avec la volonté de Dieu de sauver tous les hommes; volonté sincère, antécédente, mais conditionnelle, dont nous avons parlé plus haut (5).

ARTICLE II.

Du châtiment des réprouvés, ou des peines de l'enfer.

211. On entend ici par enfer le lieu ou l'état dans lequel les demons, et les hommes qui meurent en état de péché mortel, sont punis éternellement.

potuerunt; sed quia boni esse noluerunt. Labbe, Concil., tom. vIII, col. 135.(1) Ibidem, col. 136. (2) Liv. I, contre Julien. — (3) Sagesse, c. 1, V. 13.--(4) Saint Matthieu, c. xxv, v. 41 et 42. - (5) Voyez le n° 168, etc.

« ZurückWeiter »