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tous les docteurs de l'Église, qui ont parlé de la nature de l'homme (1). On trouve bien dans quelques Pères, dans Tertullien par exemple, et même dans saint Irénée, saint Hilaire et saint Ambroise, quelques expressions qui ne répondent pas parfaitement à l'idée que nous avons de la spiritualité de l'âme; mais, pour les concilier avec eux-mêmes et avec l'enseignement catholique, auquel, si on excepte Tertullien, ils ont toujours tenu plus qu'à la vie même, on peut dire que, s'ils se sont servis quelquefois du mot corps, ou de toute autre expression contraire au langage de la psychologie, ils donnaient à ce terme plus d'étendue qu'il n'en a, le prenant comme synonyme de substance. D'ailleurs, que quelques anciens auteurs ecclésiastiques ne se soient pas exprimés avec toute la précision possible en parlant de la nature de l'homme; que, faute d'avoir analysé les facultés de notre âme, ils ne l'aient pas conçue telle que nous la concevons, c'est-à-dire comme absolument simple ou spirituelle, on n'en peut rien conclure contre la croyance générale et constante de l'Église, soit parce que leur opinion n'était qu'une erreur particulière, soit parce qu'ils croyaient implicitement ce que croyaient les autres docteurs. Ils reconnaissaient tous, d'une manière plus ou moins expresse, que notre âme vient immédiatement de Dieu, qu'elle a été créée à l'image de Dieu, qu'elle est d'une autre nature que le corps, et qu'elle survit au corps pour recevoir la récompense ou le châtiment qu'elle a mérité. Cette observation s'applique aux gentils, qui ont cru, dans tous les temps, à la spiritualité de l'âme, sans en avoir une connaissance aussi parfaite que le chrétien.

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99. Troisièmement : « La spiritualité de l'âme, dit Bergier, aussi • bien que l'existence de Dieu, est une croyance universelle, un té• moignage constant que l'humanité se rend à elle-même ; c'est la foi du genre humain. Qu'elle soit venue de la tradition primitive, « du sentiment intérieur, ou de la réflexion de nos opérations, cela « est égal: pourquoi ne serait-elle pas venue de ces trois sources? • Avant qu'il y eût des philosophes, aucun peuple, aucun être « raisonnable ne s'était persuadé que la matière pût penser; aucun, même, n'avait imaginé qu'elle pût se mouvoir. Malgré les so⚫phismes d'Épicure, la spiritualité de l'être pensant est un dogme « aussi généralement répandu que dans les premiers âges du « monde. S'il y a une vérité que la nature et la conscience dictent « à tous les hommes, c'est la différence entre l'esprit et la matière.

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(1) Voyez la Dissertation sur la spiritualité de l'âme, par de la Luzerne.

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« Aucun peuple qui n'ait des termes divers pour les désigner; « tous entendent, sous le nom d'esprit, un être qui connait, qui se « sent exister, qui a la conscience du moi individuel, qui a le pou• voir d'agir et de mouvoir la matière. Il s'est trouvé des nations «< assez aveugles pour rendre un culte aux animaux; mais il n'y en « eut jamais d'assez stupides pour croire que l'homme n'est qu'un « animal. La superstition de ces peuples était fondée sur un principe directement contraire au matérialisme, sur la supposition « d'un génie logé dans le corps des animaux. Aucune opinion vraie a ou fausse, universellement répandue, n'eut jamais le matéria«lisme pour base (1). » Aussi la plupart des anciens philosophes, entre autres Pythagore, Platon, Aristote, Xénocrate, Philolaüs, Architas de Tarente, Varron, Cicéron, Plutarque, Plotin, Longin, Porphyre, ont-ils professé de la manière la plus expresse le dogme de la spiritualité de l'àme (2).

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100. Quatrièmement enfin, la raison se trouve d'accord avec la foi; elle démontre clairement que notre âme est une substance spirituelle, simple, indivisible, essentiellement distincte de la matière. Pour peu que l'homme se replie sur lui-même, il découvre dans le fond de son être, dans le moi, la faculté de sentir, de penser, de comparer, de juger, de raisonner, de vouloir et d'agir à volonté. Or la faculté de sentir, la faculté de penser, la faculté de comparer, de juger, de raisonner, de vouloir et d'agir, sont évidemment incompatibles avec les propriétés essentielles de la matière. Un corps, quelque subtil qu'on le suppose, sera toujours étendu, composé de parties, divisible par conséquent; les matérialistes en conviennent. Or, les facultés intellectuelles de l'homme, la pensée, le jugement, les opérations de notre âme, quel qu'en soit l'objet, sont nécessairement des actes simples, indivisibles. Qui oserait dire: La moitié, le tiers, le quart, le cinquième de ma pensée, de mon jugement, de mon raisonnement; un morceau ou fragment de ma volonté, de mon choix? Non penser, comparer, juger, vouloir et agir, ne sont point des actes susceptibles d'étendue, de parties; ils ne peuvent donc avoir pour principe qu'un agent absolument simple ou spirituel, qu'une substance faite à l'image de Dieu, que ce souffle divin qui fait de l'homme une âme vivante, qui l'établit le maître de la terre, en lui donnant l'empire sur les animaux, l'empire sur lui-même.

(1) Traité de la religion, tome 1, édit. de 1780, page 37. Dissertation sur la spiritualité de l'âme, par de la Luzerne.

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ARTICLE IV.

De la liberté de l'homme.

101. L'homme est libre. La faculté de choisir entre agir et n'agir pas, de prendre un parti de préférence au parti contraire, sans y être déterminé par aucune nécessité, soit absolue, soit relative, est la plus belle prérogative de l'homme, celle par laquelle il approche le plus près de la Divinité. Une brute, asservie à l'appétit ou à l'instinct qui lui est propre, une portion de matière, qui ne se meut que par suite de l'impulsion qu'elle reçoit d'une cause étrangère, ne sont point des êtres créés à l'image de Dieu. « Le Créateur, en faisant « l'homme libre, lui a donné un merveilleux trait de ressemblance « avec la Divinité, dont il est l'image. C'est une merveilleuse puis« sance dans l'être dépendant et créé, que sa dépendance n'empêche point sa liberté, et qu'il puisse se modifier comme il lui plaît. Il se fait bon ou mauvais, à son choix; il tourne sa volonté « vers le bien ou vers le mal; et il est, comme Dieu, maître de son opération intime; il a même, comme Dieu, un mélange de liberté « pour certains biens, et de nécessité pour d'autres. Comme Dieu « est nécessité de s'aimer, et de n'aimer jamais que le bien, l'homme « ne peut aimer que ce qui a quelque degré de bien; et il aime « Dieu nécessairement, dès qu'il le connaît en pleine évidence. D'un « autre côté, Dieu, infiniment supérieur à tout bien distingué de « lui, se trouve, par cette supériorité infinie, pleinement libre de « choisir tout ce qui lui plaît entre tous les biens subalternes, les« quels, quoique inégaux entre eux, ont une espèce d'égalité en ce « qu'ils sont infiniment inférieurs à l'Être suprême. Ainsi aucun « d'eux n'est assez parfait pour déterminer Dieu, et chacun d'eux le laisse à sa propre détermination. L'homme a quelque chose de cette

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« liberté. Aucun des biens qu'il connaît ici-bas ne surmonte sa volonté, aucun ne le détermine invinciblement; tous le laissent à sa

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• propre détermination. Il est à lui, il délibère, il décide, et il a « un empire suprême sur son propre vouloir. Il est certain qu'il " y a, dans cet empire sur soi, un caractère de ressemblance avec ⚫ la Divinité, qui étonne. Ce trait de ressemblance est digne de ce• lui qui se doit à soi-même de faire tout pour soi (1). »

102. Il est vrai que par le péché d'Adam, qui a entraîné le genre

(1) Fénelon. Lettre sur la religion, c. u, u° XI.

humain dans sa chute, le libre arbitre de l'homme a été affaibli, viribus attenuatum (1); mais c'est un dogme catholique qu'il n'est point éteint: Si quis liberum hominis arbitrium post Adæ peccatum amissum et extinctum esse dixerit... anathema sit (2). Ainsi, notre premier père est demeuré libre après comme avant son péché, quoiqu'il n'ait pu se réconcilier avec Dieu que par le secours de la grâce; de même ses descendants sont libres dans l'ordre moral: l'homme, que Dieu n'abandonne jamais ici-bas, peut, à volonté, choisir entre le bien et le mal, entre la vie et la mort éternelle. La croyance de l'Église sur la liberté de l'homme, même déchu, est fondée sur l'Écriture, sur la tradition, sur le sentiment intérieur, et le témoignage universel des hommes.

103. Premièrement si nous ouvrons les livres saints, nous lisons qu'après la chute d'Adam le Seigneur dit à Caïn, qui méditait le crime : « Pourquoi es-tu en colère? et pourquoi ton

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visage est-il abattu? Si tu fais le bien, n'en seras-tu pas récom« pensé? Si, au contraire, tu fais le mal, ton péché (ou le châti

« ment de ton péché) ne sera-t-il pas aussitôt à ta porte? Mais

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« le désir du mal est en ton pouvoir, et tu peux le dominer (3). Il n'est donc pas vrai que l'homme ait perdu la liberté par le péché d'Adam. Après le déluge, Dieu défendit le meurtre sous peine de mort, parce que l'homme a été créé à l'image de Dieu : « Quiconque aura répandu le sang de l'homme, sera puni par << l'effusion de son propre sang; car Dieu a fait l'homme à son image (4). » Cette image n'a donc pas été entièrement effacée par le péché.

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104. Écoutez ce que dit le Seigneur par la bouche de Moyse, en parlant de la loi qu'il donnait aux Hébreux : « Ce commande«ment que je vous prescris aujourd'hui n'est ni au-dessus de « vous, ni loin de vous. Il n'est point dans le ciel, pour vous don«ner lieu de dire: Qui de nous peut monter au ciel pour nous apporter ce commandement, afin que, l'ayant entendu, nous l'accomplissions par nos œuvres? Il n'est point au delà de la mer,

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(1) Concile de Trente, session vi, c. 1. — (2) Si quis liberum hominis arbitrium post Adæ peccatum amissum et extinctum esse dixerit; aut rem esse de solo titulo, imo titulum sine re; figmentum denique a Satana invectum in Ecclesiam; anathema sit. Ibidem, can. v. — (3) Quare iratus es? et cur concidit facies tua? Nonne si bene egeris, recipies: sin autem male, statim in foribus peccatum aderit; sed sub te erit appetitus ejus, et tu dominaberis illius. Genèse, c. 4, v. 6, 7. .· (4) Quicumque effuderit humanum sanguinem, fundetur sanguis illius; ad imaginem quippe Dei factus est homo. Ibid., c. 1X, V. 6.

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« pour vous donner lieu de vous excuser en disant : Qui de nous pourra passer la mer pour l'apporter jusqu'à nous, afin que, « l'ayant entendu, nous puissions faire ce qu'on nous ordonne? « Mais cette loi est toute proche de vous; elle n'exige que votre « bouche et votre cœur pour l'accomplir. Considérez que je vous ai « proposé aujourd'hui, d'un côté, la vie et le bien, et, de l'autre, « la mort et le mal, afin que vous aimiez le Seigneur votre Dieu « et que vous marchiez dans ses voies, et que vous observiez ses préceptes, ses cérémonies et ses ordonnances, et que vous viviez, et qu'il vous multiplie, et qu'il vous bénisse, dans la terre où je vous introduirai. Mais si votre cœur se détourne de lui, si « vous ne voulez pas l'écouter, et que, vous laissant séduire par l'erreur, vous adoriez et vous serviez des dieux étrangers, je vous « prédis aujourd'hui que vous périrez, et que vous ne demeurerez « pas longtemps dans la terre dont vous entrerez en possession. Je prends aujourd'hui à témoin le ciel et la terre que je vous ai « proposé la vie et la mort, la bénédiction et la malédiction. Choi« sissez donc la vie, afin que vous viviez, vous et votre postérité: « elige ergo vitam, ut et tu vivas, et semen tuum (1). » Si l'homme n'était pas libre de faire le bien et le mal, s'il était esclave de la nécessité, pourrait-on dire que la loi de Dieu n'est point au-dessus de ses forces? qu'il peut choisir entre la bénédiction et la malédiction, entre la vie et la mort? Non, Dieu ne se joue point des hommes. 105. Josué, près de mourir, leur tient le même langage: Maintenant donc craignez le Seigneur, et servez-le avec un « cœur parfait et sincère. Otez du milieu de vous les dieux que « vos pères ont adorés dans la Mésopotamie et en Égypte, et servez le Seigneur. Si vous croyez que ce soit un malheur pour vous ⚫ de servir le Seigneur, l'option vous est donnée; choisissez au• jourd'hui ce qu'il vous plaira, ou de servir le Seigneur, ou de " servir les dieux qu'ont servis vos pères dans la Mésopotamie, ou « ceux des Amorrhéens au pays desquels vous habitez: pour moi « et ma maison, nous servirons le Seigneur: Optio vobis datur ; « eligite hodie quod placet (2). » Pouvait-on s'exprimer d'une manière plus formelle en faveur de la liberté de l'homme ?

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(1).... Testes invoco hodie cœlum et terram, quod proposuerim vobis vitam et mortem, benedictionem et maledictionem. Elige ergo vitam, ut et tu vivas, et semen tuum. Deutéronome, c. xxx, v. 19. — (2) Nunc ergo timete Dominum, et servite ei perfecto corde atque verissimo; et auferte deos, quibus servierunt patres vestri in Mesopotamia et in Ægypto, ac servite Domino. Sin autem malum vobis videtur ut Domino serviatis, optio vobis datur : eligite ho

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