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tisé; c'est, dis-je, afin de convaincre par là tous les esprits que le baptême de Jean est donc un baptême salutaire; qu'il est saint, et qu'il est de Dieu, puisque lui, qui est le Fils de Dieu, en veut bien user. Mais, Seigneur, que faites-vous, s'écrie Jean-Baptiste, touché et confus d'une humilité si profonde; que faites-vous, et avez-vous oublié ce que vous êtes et ce que je suis? c'est moi qui dois être baptisé par vous, et vous venez à moi! Ne craignez-vous point, en vous abaissant jusque-là, d'obscurcir votre gloire, et qu'on n'en tire des conséquences au préjudice de votre sainteté? Sine modò, lui répond le Fils de Dieu : sic enim decet nos implere omnem justitiam (1); Laissez-moi faire pour cette heure: car c'est ainsi qu'il faut que nous accomplissions toute justice. Vous m'avez rendu témoignage, je vais vous le rendre à mon tour; et pour apprendre à tout le monde que votre baptême vient du ciel, moi qui suis descendu du ciel, j'en veux bien faire l'épreuve dans ma personne. Quoique ce soit le baptême de la pénitence, moi qui suis l'innocence même, je veux bien m'y soumettre; et quoi qu'en m'y soumettant je paroisse inférieur à vous sans l'être, je ne dédaigne point de le paroître, pourvu que je persuade aux hommes que la pénitence à laquelle ce baptême les engage, est la seule voie qui peut les conduire au salut et à la véritable rédemption. N'est-il pas vrai, mes chers auditeurs, qu'il n'appartient qu'à Dieu de savoir honorer ses saints?

Finissons par le dernier, mais le plus essentiel de tous les témoignages que Jésus-Christ ait rendu à son précurseur, en publiant la sainteté de Jean, l'innocence de ses mœurs et l'austérité de sa pénitence. Où le trouvons-nous ce témoignage ? au chapitre onzième de saint Matthieu ; car c'est là qu'il est dit que notre adorable Sauveur s'entretenant avec le peuple, et ins

(1) Matth. 3.

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truisant les Juifs qui l'écoutoient, leur parloit ainsi : Qu'êtes-vous alles voir dans le désert? Quid existis in desertum videre? (1) Vous y avez vu Jean-Baptiste; hé bien! qu'en dites-vous? avez-vous cru voir en lui un roseau agité du vent, c'est-à-dire, un esprit léger et sans consistance, qui suit le mouvement de ses passions, qui plie sous l'adversité, qui s'évanouit dans la prospérité, qui succombe à la crainte, que la vue de plaire, ou que l'intérêt ébranle; qui cède à tout et qui ne résiste à rien: Arundinem vento agitatam? (2) Non, Jean n'est point un homme de cette trempe ; c'est un cœur ferme et inébranlable dans le parti de Dieu; c'est une ame solide et à l'épreuve de toutes les tentations du monde; c'est un esprit supérieur à tout ce que la foiblesse humaine peut former d'obstacles dans l'accomplissement des devoirs les plus difficiles, et qui demandent une vertu plus héroïque en voilà le caractère. Mais encore, qu'avez-vous vu dans le désert? y avezvous trouvé un homme vêtu avec mollesse, un homme voluptueux, attaché à ses commodités, aimant les douceurs de la vie, esclave de son corps et de ses sens: Sed quid existis videre? hominem mollibus vestitum ? (3) Au contraire, vous avez vụ un homme crucifié pour le monde, un homme mort à tous les plaisirs du monde, un homme ennemi de son corps, un homme épuisé d'abstinences et de jeûnes, un homme couvert d'un rude cilice telle est la forme de vie dont Jean-Baptiste est venu servir de modèle. Qui parle ainsi, chrétiens? le Fils de Dieu, lequel rend témoignage de la sainteté de son précurseur; et qui n'allègue pour cela ni les révélations, ni les extases, ni le don des miracles et des guérisons, ni l'esprit de prophétie, ni toutes les autres grâces éclatantes dont saint Jean étoit rempli, mais qui fait consister cette sainteté dans une vie (1) Matth. 11. (2) Ibid. (3) Ibid.

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pénitente et mortifiée, dans la haine de soi-même, dans le crucifiement de la chair, surtout dans la constance et la fermeté.

Arrêtons-nous là, mes chers auditeurs; voilà ce que je vous laisse à méditer, et ce qui doit être pour vous et pour moi le fruit de ce discours. Je vous l'ai dit, et je vous le dis encore, que si Jésus-Christ ne nous reconnoît devant son Père, et ne rend témoignage en notre faveur, comme il l'a rendu en faveur de Jean-Baptiste, nous ne serons jamais du nombre de ses prédestinés et de ses élus. Il faut, pour être justes dans cette vie, que nous ayons le témoignage de Dieu en nous : Qui credit, habet testimonium Dei in se (1); et j'ajoute que pour être glorifiés dans l'autre, il faut il faut que nous ayons le témoignage de Jésus-Christ pour nous. Or jamais JésusChrist ne nous rendra ce témoignage favorable dont dépend notre salut éternel, si nous ne sommes fermes comme saint Jean dans l'observation de la loi de Dieu, et si nous n'entrons dans cette sainte voie de la pénitence et de la mortification où a marché le saint précurseur. Pourquoi cela? parce que Jésus-Christ ne rendra témoignage qu'en faveur de ceux qui auront eu soin de se conformer à lui. Or, nous ne pouvons nous conformer à Jésus-Christ que par cet esprit de pénitence, accompagné et soutenu d'une inviolable persévérance; par conséquent le témoignage de cet homme-Dieu nous est indispensablement nécessaire. Il le donne au→ jourd'hui au plus saint des hommes, qui est Jean-Baptiste ; mais il ne le donne que fondé sur ces deux chefs, de l'austérité de sa vie, et de la solidité de sa vertu. Il n'est pas croyable que nous l'obtenions à des conditions plus douces, ni qu'il ait pour nous des lois de Providence moins sévères et plus commodes. Savez-vous donc, chrétiens, ce que nous avons à craindre ? c'est

(1) 1. Joan. 5.

que Jésus-Christ, dans le jugement dernier, au lieu de rendre témoignage pour nous, ne le rende contre nous; et qu'au lieu que son témoignage, s'il nous étoit favorable, mettroit le sceau à notre justification et à notre prédestination, il ne fasse notre condamnation et notre réprobation. Si jamais cet affreux malheur nous arrivoit, par où Jésus-Christ fortifiera-t-il son témoignage contre nous ? par l'exemple de saint Jean, par la pénitence de saint Jean, par la retraite de saint Jean, un mot, par l'énorme et monstrueuse opposition qui paroîtra entre la conduite de la plupart des chrétiens et celle de saint Jean.

en

Car comment nous sauverons-nous de cette contradiction, et qu'aurons-nous à y répondre? Jean, rempli du Saint-Esprit et sanctifié même avant sa naissance, n'a pas laissé d'embrasser une vie austère et pénitente; et moi qui suis pécheur, chargé devant Dieu du poids de mes iniquités, je veux mener une vie aisée et douce. Jean, dans la plus parfaite innocence, n'a pas laissé de mater sa chair par le jeûne et le cilice ; et moi j'épargne la mienne qui est une chair de péché. Jean, à l'épreuve de toutes les tentations du monde : n'a pas laissé de fuir le monde; et moi qui suis la foiblesse même, je m'expose à tous les dangers du monde; voilà, dis-je, mes chers auditeurs, ce que saint Jean nous reprochera au tribunal de Dieu : car après avoir été témoin de JésusChrist dans le premier avénement de ce Dieu sauveur, il viendra encore dans le second, et sera appelé en témoignage contre les lâches chrétiens: Hic venit in testimonium (1). Oui, il viendra, non plus pour servir de témoin à la lumière, mais pour servir de témoin contre l'iniquité. Ce sacré chef que vous conservez comme un précieux dépôt ; ce chef dont la vue confondit l'impie Hérode, et le fit trembler jusque sur le trône; ce chef

(1) Joan. 1.

muet maintenant depuis qu'une mort sanglante lui a ôté l'usage de la voix, mais alors rappelé à la vie et plus éloquent que jamais, fera sortir de sa bouche des paroles foudroyantes qui attéreront les pécheurs. Ah! grand saint, parlerez-vous donc contre ce peuple qui vous est spécialement dévoué? il vous honore et il vous invoque comme son protecteur; en deviendrez-vous l'accusateur et le juge? obtenez-lui ces grâces de conversion, ces grâces de sanctification qui le remettront dans la voie du salut que vous nous avez enseignée ; surtout faites-lui bien comprendre ce fameux oracle, que depuis le temps où vous avez vécu sur la terre, le royaume du ciel ne s'emporte que par violence: A diebus Joannis Baptistæ regnum cœlorum vim patitur (1).

Du reste, chrétiens, parlant devant un prélat que je considère ici, non-seulement comme l'évêque et le pasteur de vos ames, mais comme un des maîtres de l'éloquence de la chaire, où tant de fois il s'est distingué, j'aurois eu besoin dans tout ce discours, des dons excellens qu'il a reçus du ciel, et qu'il a su si dignement et si saintement employer. Du moins, Monseigneur, ai-je eu l'avantage de trouver en vous de quoi persuader à votre troupeau les saintes vérités que je viens de lui annoncer, et de quoi les lui rendre sensibles: car en faisant l'éloge du précurseur de Jésus-Christ, je n'ai pu m'empêcher de bénir le ciel, qui, pour ma consolation, me fait voir encore aujourd'hui dans votre personne, un prélat rempli de l'esprit de Jean-Baptiste et imitateur de ses vertus; je veux dire, un prélat aussi éclairé que zélé, aussi fervent que vigilant, et si j'ose m'exprimer de la sorte, aussi aimable que vénérable; un prélat plein de vigueur et de force pour faire observer la discipline, mais en même temps plein d'onction et de douceur pour la faire. aimer; un prélat qui, comme Jean-Baptiste, a édifié la

(1) Matth. 11.

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