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apôtre avoit fait paroître. Amour fervent : de quel feu et de quelle ardeur étoit animé cet apôtre, quand il prêchoit Jésus-Christ, quand il rendoit hautement témoignage à Jésus-Christ, quand il formoit et qu'il exécutoit tant de saintes entreprises pour Jésus-Christ? Amour patient: que ne dut point souffrir cet apôtre au milieu de tant d'ennemis qu'il eut à combattre, et de tant d'obstacles qu'il eut à surmonter pour la propagation de l'évangile de Jésus-Christ, et pour l'affermissement de son Eglise? ni les courses fréquentes, ni les longs voyages, ni les veilles continuelles, ni les misères, ni les persécutions, ni les prisons, jamais rien put-il lasser son zèle et le rebuter! Amour héroïque, en vertu duquel cet apôtre eut le courage et la force de s'exposer à la plus cruelle et la plus honteuse mort ; vous me direz qu'il fut crucifié, et que la croix n'étoit plus un supplice ignominieux, puisque dans la personne de Jésus-Christ elle étoit plutôt devenue un sujet de gloire ; vous me direz que Jésus-Christ ayant subi luimême ce genre de mort, les vrais disciples ne doivent plus le regarder comme un opprobre, mais comme un triomphe. J'en conviens; mais c'est de là même que je tire une preuve incontestable de ma proposition; car saint Pierre ne put envisager la croix comme le sujet de sa gloire, que parce qu'il aimoit Jésus-Christ de l'amour le plus héroïque. Saint Pierre ne put désirer la croix, ne put soupirer après la croix, ne put aller chercher la croix, que parce qu'il fut transporté pour Jésus-Christ d'un amour sans bornes, et qu'il voulut lui en donner une marque, en lui rendant amour pour amour, sacrifice pour sacrifice. Saint Pierre ne put s'estimer heureux de mourir sur la croix comme JésusChrist, que parce que l'excès de son amour lui fit souhaiter d'être en tout semblable à cet homme-Dieu, et même jusqu'à la mort et à la mort de la croix.

Quoi qu'il en soit, chrétiens, c'est sur le modèle du

prince des apôtres que nous devons tous nous former: car nous avons tous la même obligation d'aimer Dieu, et Jésus-Christ, Fils unique de Dieu, et Dieu lui-même. Or notre amour pour Dieu, et pour le Fils de Dieu, est-ce un amour généreux comme celui de saint Pierre ; c'est-à-dire, est-ce un amour fervent ? est-ce un amour patient? est-ce un amour héroïque? Prenez garde : est-ce un amour fervent? mais qu'avons-nous fait jusqu'à présent pour Dieu, et que faisons-nous? Peut-être appelonsnous amour de Dieu certains discours vagues et sans fruit: car telle est l'illusion ordinaire de s'en tenir à de spécieuses paroles qui ne coûtent rien, et qui dans la pratique ne vontà rien.Peut-être prenons-nous pour amour de Dieu, certains sentimens dont le cœur est quelquefois touché, mais sans effet. Autre erreur encore plus subtile et plus dangereuse : on compte pour beaucoup quelques mouvemens affectueux dont l'ame se sent remuée et attendrie; mais si les œuvres manquent, si l'on mène une vie tranquille et oisive, si, dès qu'il faut agir, qu'il faut prier, qu'il faut soulager les pauvres, qu'il faut visiter les hôpitaux, les prisons, qu'il faut vaquer aux exercices de la religion, on devient lâche et paresseux, que servent alors les plus beaux sentimens, et de quel prix peuvent-ils être devant Dieu? Est-ce un amour patient? mais qu'avons-nous souffert jusqu'à présent pour Dieu, et que voulons-nous souffrir? une foible violence qu'il y a à se faire, une légère contradiction qu'il y a à soutenir, n'est-ce pas assez pour déconcerter toute notre piété, et pour éteindre tout le feu de ce prétendu amour de Dieu, qui paroissoit à certaines heures si vif et si animé? On suit JésusChrist jusqu'à la cène, mais on l'abandonne au Calvaire; on aime Dieu, ou l'on croit l'aimer, et cependant on ne voudroit pas se gêner pour lui dans la moindre rencontre, se refuser pour lui le moindre plaisir, sacrifier pour lui le moindre intérêt. Est-ce un amour

héroïque? car il doit être tel pour être un véritable amour de Dieu; et s'il n'est pas assez fort, assez efficace pour me disposer à verser mon sang en certaines occasions, et à donner ma vie pour Dieu, ce n'est plus un amour de Dieu. Or, de bonne foi, mes chers auditeurs, peuton penser que nous soyons dans une pareille disposition, quand on nous voit céder si aisément aux premiers obstacles qui se présentent, et nous rendre, lorsqu'il est question du service de notre Dieu, à des difficultés que nous surmontons tous les jours pour le monde? Si donc Jésus-Christ nous faisoit aujourd'hui la même demande qu'il fit à saint Pierre, Amas me? M'aimez-vous? pourrions-nous lui répondre: Oui, Seigneur, je vous aime, et vous le savez: Domine, tu scis, quia amo te (1). Si nous osions le dire, nos cuvres ne nous démentiroient-elles pas ? Cependant sans l'amour de Dieu et de Jésus-Christ, homme-Dieu et notre espérance, que pouvons-nous être autre chose devant Dieu que des anathêmes et des sujets de malédictions? Ah! chrétiens, ranimons dans nos cœurs ce saint amour; et si nous ne l'avons pas, ne cessons point de le demander à Dieu. Servons-nous de notre foi pour l'exciter davantage et pour le rendre plus ardent ; et par un heureux retour, cette charité divine servira à vivifier notre foi et à la rendre plus agissante. Pour l'un et pour l'autre, employons auprès de Dieu l'intercession du glorieux apôtre dont nous solennisons la fête c'est le patron de tous les fidèles, puisqu'il est le chef de toute l'Eglise; et c'est en particulier le vôtre dans cette église, où il est spécialement honoré. En lui adressant nos prières, travaillons à imiter ses vertus, pour avoir part à sa gloire dans l'éternité bienheureuse que je vous souhaite, etc.

:

(1) Joan. 21.

AUTRE

POUR LA FÊTE

DE SAINT PIERRE.

SUR L'OBÉISSANCE A L'ÉGLISE.

Et ego dico tibi, quia tu es Petrus, et super hanc petram ædi ficabo Ecclesiam meam, et portæ inferi non prævalebunt ad

versùs eam.

Et moi je vous dis que vous étes Pierre, et que sur cette pierre je bâtirai mon Eglise, et que les portes de l'enfer ne prévaudront point contre elle. En saint Matthieu, chap. 16.

CE sont, en peu de paroles, deux grands éloges tout à la fois prononcés par la bouche de Jésus-Christ; l'un, en faveur de saint Pierre, le prince des apôtres, dont nous célébrons aujourd'hui la fête ; et l'autre en faveur de l'Eglise. Saint Pierre est le fondement sur qui l'Eglise a été bâtie et sur qui elle subsiste : voilà l'abrégé de toutes ses grandeurs. L'Eglise est un édifice spirituel, dont la solidité et la fermeté est à l'épreuve de tous les efforts de l'enfer : voilà tout ce qui se peut dire de plus avantageux et de plus glorieux pour elle. JésusChrist ne sépare point ces deux choses, parce que ces deux choses sont renfermées l'une dans l'autre. La gloire de saint Pierre vient de ce que l'Eglise est fondée sur lui, et la force de l'Eglise vient de ce qu'elle est fondée sur saint Pierre ; c'est l'Eglise qui honore saint Pierre, et c'est saint Pierre qui soutient l'Eglise car, encore une fois, chrétiens, voilà proprement le mystère de ces paroles du Fils de Dieu, que j'ai prises pour mon texte: Tu es Petrus, et super hanc petram ædificabo Ecclesiam meam. Ce seroit trop entreprendre, que

TOME XII.

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d'embrasser ces deux sujets dans un seul discours; ainsi, je me borne à vous parler de l'Eglise, et en particulier de l'obéissance que nous lui devons: matière d'une extrême conséquence, et l'une des plus importantes qu'un prédicateur puisse traiter dans la chaire. Car l'Eglise, chrétiens, est l'épouse de Jésus-Christ, et Jésus-Christ veut que son épouse soit écoutée, qu'elle soit obéie, et qu'on ait recours à elle comme à l'oracle; c'est cette Sion d'où sort la loi, et cette Jérusalem d'où la parole de Dieu est annoncée. Marie même, toute mère de Dieu qu'elle étoit, s'est glorifiée de ce titre de fille de l'Eglise. Avant que d'expliquer mon dessein, adressons-nous à cette vierge si fidèle, et disons-lui: Ave, Maria.

Pour entrer dans le dessein de ce discours, je trouve que l'Eglise exerce envers les fidèles deux fonctions différentes; elle les instruit et elle les gouverne : elle les instruit par les vérités qu'elle leur propose, et elle les gouverne par les commandemens qu'elle leur fait ; elle les instruit en leur apprenant ce qu'elle a appris ellemême du Fils de Dicu, son époux, et elle les gouverne en leur prescrivant des lois. Le Sauveur des hommes lui a donc donné deux sortes de pouvoirs ; l'un d'enseigner de sa part, et l'autre de commander; l'un pour nous dire: Croyez ceci, et l'autre pour nous dire : Faites cela. Or sur ces deux pouvoirs qui conviennent à l'Eglise, je fonde l'obligation de deux sortes d'obéissances qui lui sont dues, dont la première est une obéissance de l'esprit, et la seconde une obéissance du cœur. Nous lui devons l'obéissance de l'esprit, parce qu'elle nous propose les vérités de la foi: c'est le premier point; et nous lui devons l'obéissance du cœur, parce qu'elle nous impose des lois et des préceptes pour le réglement de notre vie; c'est le second point. Parce qu'elle a droit

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