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on ne saurait laisser une trop large voie aux améliorations. » Aussi la Constitution présente n'a-t elle fixé que ce qu'il était impossible de laisser incertain. Elle n'a pas enfermé dans un cercle infranchissable les destinées d'un grand peuple; elle a laissé aux changements une assez large voie pour qu'il y ait, dans les grandes crises, d'autres moyens de salut que l'expédient désastrueux des ré

volutions.

Le sénat peut, de concert avec le Gouvernement, modifier tout ce qui n'est pas fondamental dans la Constitution; mais quant aux modifications à apporter aux bases premières, sanctionnées par vos suffrages, elles ne peuvent devenir définitives qu'après avoir reçu votre ratification.

Ainsi, le peuple reste toujours maître de sa destinée. Rien de fondamental ne se fait en dehors de sa volonté.

Telles sont les idées, tels sont les principes dont vous m'avez autorisé à faire l'application. Puisse cette Constitution donner à notre patrie des jours calmes et prospères! Puisse t-elle prévenir le retour de ces luttes intestines où la victoire, quelque légitime qu'elle soit, est toujours chèrement achetée! Puisse la sanction que vous avez donnée à mes efforts être bénie du ciel! Alors la paix sera assurée au dedans et au dehors, mes vœux seront comblés, ma mission sera accomplie!

Palais des Tuileries, le 14 janvier 1852.

LOUIS-NAPOLEON BONAPARTE.

Constitution

Faite en vertu des pouvoirs délégués par le peuple français à LouisNapoléon Bonaparte, par le vote des 20 et 21 décembre 1851.

Le Président de la République,

Considérant que le peuple français a été appelé à se prononcer sur la résolu

tion suivante :

Le peuple veut le maintien de l'autorité de Louis-Napoléon Bonaparte et lui « donne les pouvoirs nécessaires pour faire une Constitution d'après les bases établies dans sa proclamation du 2 décembre; »

Considérant que les bases proposées à l'acceptation du peuple étaient : 1° Un chef responsable nommé pour dix ans;

» 2o Des ministres dépendants du pouvoir exécutif seul;

3o Un conseil-d'Etat formé des hommes les plus distingués, préparant les lois et en soutenant la discussion devant le corps législatif;

( 4° Un corps législatif discutant et votant les lois, nommé par le suffrage universel, sans scrutin de liste qui fausse l'élection;

«5° Une seconde assemblée formée de toutes les illustrations du pays, pou«voir pondérateur, gardien du pacte fondamental et des libertés publiques; >> Considérant que le peuple français a répondu affirmativement par sept millions cinq cent mille suffrages,

Promulgue la Constitution dont la teneur suit :

TITRE PREMIER.

Art. 1er. La Constitution reconnaît, confirme et garantit les grands principes proclamés en 1789, et qui sont la base du droit public des Français.

TITRE II.

Formes du Gouvernement de la République.

Art. 2. Le Gouvernement de la République française est confié, pour dix

ans, au prince Louis-Napoléon Bonaparte, Président actuel de la République. Art. 3. Le Président de la République gouverne au moyen des ministres, du conseil-d'Etat, du sénat et du corps législatif.

Art. 4. La puissance législative s'exerce collectivement par le Président de la République, le sénat et le corps législatif.

TITRE III.

Du Président de la République.

Art. 5. Le Président de la Républiqoe est responsable devant le peuple français, auquel il a toujours le droit de faire appel.

Art. 6. Le Président de la République est le chef de l'Etat; il commande les forces de terre et de mer, déclare la guerre, fait les traités de paix, d'alliance et de commerce, nomme à tous les emplois, fait les règlements et décrets nécessaires pour l'exécution des lois.

Art. 7. La justice se rend en son nom.

Ar.t 8. Il a senl l'initiative des lois.

Art. 9. Il a le droit de faire grâce.

Art. 10. Il sanctionne et promulgue les lois et les sénatus codsultes.

Art. 11. Il présente, tous les ans, au sénat et au corps législatif, par un message, l'état des affaires de la République.

Art. 12. Il a le droit de déclarer l'état de siége dans un ou plusieurs départements, sauf à en référer au sénat dans le plus bref délai.

Les conséquences de l'état de siége sont réglées par la loi.

Art. 15. Les ministres ne dépendent que du Chef de l'Etat; ils ne sont responsables que chacun en ce qui le concerne des actes du Gouvernement; il n'y a point de solidarité entre eux; ils ne peuvent être mis en accusation que par le sénat.

Art. 14. Les ministres, les membres du sénat, du corps législatif et du conseil-d'Etat, les officiers de terre et de mer, les magistrats et les fonctionnaires publics prêtent le serment ainsi conçu :

Je jure obéissance à la Constitution et fidélité au Président.

Art. 15. Un sénatus-consulte fixe la somme allouée annuellement au Président de la République pour toute la durée de ses fonctions.

Art. 16. Si le Président de la République meurt avant l'expiration de son mandat, le sénat convoque la nation pour procéder à une nouvelle élection. Art. 17. Le Chef de l'Etat a le droit, par un acte secret et déposé aux archives du sénat, de désigner au peuple le nom du citoyen qu'il recommande, dans l'intérêt de la France, à la confiance du peuple et à ses suffrages.

Art. 18. Jusqu'à l'élection du nouveau Président de la République, le Président du sénat gouverne avec le concours des ministres en fonctions, qui se forment en conseil de gouvernement, et délibère à la majorité des voix.

TITRE IV.

Du Sénat.

Art. 19. Le nombre des sénateurs ne pourra excéder cent cinquante : il est fixé pour la première année à quatre-vingts.

Art. 20. Le sénat se compose':

1o Des Cardinaux, des maréchaux, des amiraux;

2o Des citoyens que le Président de la République juge convenable d'élever à la dignité de sénateur.

Art. 21. Les sénateurs sont inamovibles et à vie.

Art. 22. Les fonctions de sénateurs sont gratuites; néanmoins le Président de la République pourra accorder à des sénateurs, en raison de services rendus et de leur position de fortune, une dotation personnelle, qui ne pourra excéder trente mille francs par an.

Art. 23. Le président et les vice-présidents du sénat sont nommés par le Président de la République et choisis parmi les sénateurs.

Ils sont nommés pour un an.

Le traitement du président du sénat est fixé par un décret.

Art. 24. Le Président de la République convoque et proroge le sénat. Il fixe la durée de ses sessions par un décret.

Les séances du sénat ne sont pas publiques.

Art. 25. Le sénat est le gardien du pacte fondamental et des libertés publiques. Aucune loi ne peut être promulguée avant de lui avoir été soumise. Art. 26. Le sénat s'oppose à la promulgation :

1o Des lois qui seraient contraires ou qui porteraient atteinte à la Constitution, à la religion, à la morale, à la liberté des cultes, à la liberté individuelle, à l'égalité des citoyens devant la loi, à l'inviolabilité de la propriété et au principe de l'inamovibilité de la magistrature;

2o De celles qui pourraient compromettre la défense du territoire.

Art. 27. Le sénat règle par un sénatus-consulte :

1° La constitution des colonies et de l'Algérie ;

2° Tout ce qui n'a pas été prévu par la Constitution et qui est nécessaire à sa marche;

5o Le sens des articles de la Constitution qui donnent lieu à différentes interprétations.

Art. 28. Ces sénatus-consultes seront soumis à la sanction du Président de la République, et promulgués par lui.

Art. 29. Le sénat maintient ou annule tous les actes qui lui sont déférés comme inconstitutionnels par le Gouvernement ou dénoncés pour la même cause par les pétitions des citoyens.

Art. 30. Le sénat peut, dans un rapport adressé au Président de la République, poser les bases des projets de loi d'un grand intérêt national.

Art. 51. Il peut également proposer des modifications à la Constitution. Si la proposition est adoptée par le pouvoir exécutif il y est statué par un sénatusconsulte.

Art. 52. Néanmoins, sera soumise au suffrage universel toute modification, aux bases fondamentales de la Constitution, telles qu'elles ont été posées dans la proclamation du 2 décembre et adoptées par le peuple français.

Art. 55. En cas de dissolution du corps législatif, et jusqu'à une nouvelle convocation, le sénat, sur la proposition du Président de la République, pourvoit, par des mesures d'urgence, à tout ce qui est nécessaire à la marche du Gouvernement.

TITRE V.

Du Corps législatif.

Art. 34. L'élection a pour base la population.

Art. 35. Il y aura un député au corps législatif à raison de trente-cinq mille électeurs.

Art. 36. Les députés sont élus par le suffrage universel, sans scrutin de liste. Art. 37. Ils ne reçoivent aucun traitement.

Art. 38. Ils sont nommés pour six ans.

Art. 39. Le corps législatif discute et vote les projets de loi et l'impôt. Art. 40. Tout amendement adopté par la commission chargée d'examiner un projet de loi sera renvoyé, sans discussion, au conseil-d'Etat, par le président du corps législatif.

Si l'amendement n'est pas adopté par le conseil-d'Etat, il ne pourra pas être soumis à la délibération du corps législatif.

Art. 41. Les sessions ordinaires du corps législatif durent trois mois; ces séances sont publiques; mais la demande de cinq membres suffit pour qu'il se forme en comité secret.

Art. 42. Le compte-rendu des séances du corps législatif par les journaux ou tout autre moyen de publication ne consistera que dans la reproduction du procès-verbal dressé à l'issue de chaque séance par les soins du président du corps législatif.

Art. 43. Le président et les vice-présidents du corps législatif sont nommés par le Président de la République pour un an; ils sont choisis parmi les députés. Le traitement du président du corps législatif est fixé par un décret.

Art. 44. Les ministres ne peuvent être membres du corps législatif.

Art. 45. Le droit de pétition s'exerce auprès du sénat. Aucune pétition ne peut être adressée au corps législatif.

Art. 46. Le Président de la République convoque, ajourne, proroge et dissout le corps législatif. En cas de dissolution, le Président de la République doit en convoquer un nouveau dans le délai de six mois.

TITRE VI.

Du conseil-d'Etat.

Art. 47. Le nombre des conseillers d'Etat en service ordinaire est de quarante à cinquante.

Art. 48. Les conseillers d'Etat sont nommés par le Président de la République, et révocables par lui.

Art. 49. Le conseil-d'Etat est présidé par le Président de la République, et, en son absence, par la personne qu'il désigne comme vice-président du conseild'Etat.

Art. 50. Le conseil-d'Etat est chargé, sous la direction du Président de la République, de rédiger les projets de loi et les règlements d'administration publique, et de résoudre les difficultés qui s'élèvent en matière d'administration.

Art. 51. Il soutient, au nom du Gouvernement, la discussion des projets de oi devant le sénat et le corps législatif.

Les conseillers d'Etat chargés de porter la parole au nom du Gouvernement sont désignés par le Président de la République.

Art. 52. Le traitement de chaque conseiller d'Etat est de vingt-cinq mille francs.

Art. 53. Les ministres ont rang, séance et voix délibérative au conseild'Etat.

TITRE VII.

De la Haute-Cour de justice.

Art. 54. Une Haute-Cour de justice juge, sans appel ni recours en cassation, toutes personnes qui auront été renvoyées devant elle comme prévenues de crimes, attentats ou complots contre le Président de la République et contre la sûreté intérieure ou extérieure de l'Etat.

Elle ne peut être saisie qu'en vertu d'un décret du Président de la République.

Art. 55. Un sénatus-consulte déterminera l'organisation de cette HauteCour.

TITRE VIII.

Dispositions générales et transitoires.

Art. 56. Les dispositions des codes, lois et règlements existants, qui ne sont pas contraires à la présente Constitution, restent en vigueur jusqu'à ce qu'il y soit légalement dérogé.

Art. 57. Une loi déterminera l'organisation municipale. Les maires seront nommés par le pouvoir exécutif, et pourront être pris hors du conseil municipal.

Art. 58. La présente Constitution sera en vigueur à dater du jour où les grands corps de l'Etat qu'elle organise seront constitués.

Les décrets rendus par le Président de la République, à partir du 2 décembre jusqu'à cette époque, auront force de loi.

Fait au palais des Tuileries, le 14 janvier 1852.

Vu et scellé du grand-sceau :

Le garde des sceaux, ministre de la justice,
E. ROUHER.

LOUIS-NAPOLÉON.

Actes officiels et Décrets.

Le Moniteur publie ce matin un décret qui règle les formes à suivre pour l'expropriation des terrains bâtis ou non bâtis que l'administration de la Guyane française aura jugé nécessaire de se procurer pour les établissements à former dans cette colonie.

Un décret, en date du 15 janvier, nomme chevalier de l'ordre de la Légiond'Honneur M. l'abbé Vilain, curé desservant de Neuvy-sur-Loire. Ce décret est précédé du rapport que voici :

Monseigneur,

Permettez-moi d'appeler votre attention sur les cruelles épreuves que M. l'abbé Vilain a si héroïquemedt supportées durant les troubles récents du département de la Nièvre.

‹ M. Vilain (J.-B.), né en 1797, est desservant de Neuvy-sur-Loire depuis le 1er octobre 1825. Il n'a cessé de prodiguer les bienfaits de sa charité à cette commune, où il a successivement fondé, avec ses seules ressources, une école gratuite de filles, une salle d'asile et une œuvre particulière pour la visite des pauvres à domicile.

Le dimanche, 7 décembre, à l'issue de la messe, ce prêtre vénérable apprend que les hommes de sa paroisse sont en armes sur la place publique; il se rend au milieu d'eux pour leur prêcher la paix. Sa voix paternelle, loin de calmer ces furieux, n'ayant fait que les irriter davantage, il est contraint de se retirer au presbytère. Il est suivi par une bande ameutée qui lui demande ses armes : <Mes armes, mes enfants, les voilà, répond le digne prêtre en montrant son bréviaire, je n'en ai pas d'autre. » — Vous en avez, répondent les insurgés. Ils fouillent partout, mais ne trouvant rien, ils s'en vont.

« Quelques moments après, ils reviennent plus menaçants:

Allons, lui di

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