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néenne et hérodienne. Le savant académicien ne pense pas que la comparaison du palais de Hyrcan découvert par M. de Vogüé avec les monuments de Jérusalem puisse amener cette conclusion. En effet, Hyrcan s'est suicidé quelques années avant la révolte des Machabées, et au moment même de l'avénement d'Antiochus IV, 176 ans avant J. C. Or Hyrcan, construisant une forteresse, a dû copier quelque chose, car il n'est pas l'inventeur du système architectonique qui est employé dans les soubassements du Haram-ech-Chérif. Il a donc copié, lui Juif de nation et petit-neveu du grand prêtre Onias, une fortification à lui connue, puisqu'il employait des ouvriers juifs. Donc le système du gros appareil employé dans le mur du Haramech-Chérif est indubitablement antérieur aux Asmonéens. M. de SAULCY cite deux quatrains d'Aurélius Prudentius, écrivant vers l'an 394, dont l'un mentionne l'angle antique du Haram-ech-Chérif, qu'il rattache au templum vetus. Il dit que la porte dorée, qu'il appelle porta speciosa, est du temps de Salomon, ce qui est une erreur palpable, et que c'est là qu'eut lieu le miracle du boiteux guéri par saint Pierre. Cette porta speciosa ne peut être une des portes du temple, puisqu'un infirme en eût été rigoureusement écarté par la loi religieuse. Est-ce une porte occidentale donnant sur la ville? cela semble improbable, parce que les lépreux et les infirmes se tiennent, de nos jours encore, aux portes extérieures des villes de l'Orient pour implorer la pitié des passants. M. de SAULGY se demande à quelle époque chrétienne la porte dorée aurait pu être construite. Depuis Constantin, l'emplacement du temple fut le réceptacle des immondices de la cité, par respect pour la prophétie du Christ sur le temple. Omar nettoya avec son manteau la place nécessaire pour faire sa prière sur la roche sacrée. M. de SAULCY cite: 1° le témoignage d'Eusèbe, qui, en 320, mentionne formellement des restes du temple d'Hérode encore debout; 2° celui de saint Jérôme, qui parle des angles du temple antique, existant encore à l'époque où il écrit, c'est-à-dire en 400; 3° celui du pèlerin de Bordeaux, qui, en 333, parle des salles souterraines qui sont sous les grands murs du temple, et spécialement sous l'angle en question.

Quant aux constructions intérieures, M. de SAULCY ne les a pas vues, mais il se rendra à Jérusalem au mois de septembre pour les

voir. Il prie l'Académie de vouloir bien jusque-là suspendre son jugement. Il rapportera les photographies des monuments d'Hérode à Samarie, à Césarée et à Hérodéion.

M. NAUDET termine la seconde lecture de son Mémoire Sur la Noblesse chez les Romains, dont nous nous bornons à reproduire ici l'extrait rédigé par le savant membre lui-même, et lu à la séance publique annuelle de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres le 1er août 1862.

La Noblesse chez les Romains.

EXTRAIT.

<«<Retracer l'histoire de la noblesse chez les Romains, depuis les origines de Rome jusqu'à la chute de l'empire d'Occident, l'espace de douze siècles, dans une lecture de vingt-cinq minutes, ce serait un tour de force dont je ne me sens pas capable. Présenter un sommaire superficiel et vague d'un travail qui n'a de valeur, s'il en a, que par le détail, ce serait pour l'assemblée qui me fait l'honneur de m'écouter une déception, et pour l'auteur une maladresse que je ne veux pas prendre sur moi. Mieux vaut, ce me semble, montrer seulement une partie, encore très-incomplète, que d'offrir du tout une esquisse insignifiante. Voilà ce qui m'a déterminé à préférer ici de simples extraits à une analyse du Mémoire sur la noblesse romaine.

<< La noblesse de Rome commença par des priviléges héréditaires, insolents, tyranniques. Elle se fondait sur une distinction de castes que sanctionnaient des superstitions, car l'asservissement d'une caste à l'autre ne se maintient pas sans l'abus des idées religieuses. Le gouvernement romain, dans ces temps primitifs, eut donc pour base la théocratie. Les pouvoirs politiques, militaires, sacerdotaux, se concentrèrent entre les mains d'un petit nombre de familles, qui enchaînaient de ce triple lien les peuples subjugués.

Mais l'énergie et la grandeur du génie italien ne pouvaient être contenus et resserrées longtemps dans ces entraves; il les rompit, et, par les conquêtes successives des classes affranchies, il substitua à l'exclusive immobilité de la souche patricienne la puissance populaire et progressive de la noblesse d'illustration. Ce fut le triomphe de la liberté. Mais la liberté eut ses enivrements et ses excès. La noblesse nouvelle qu'elle avait enfantée lui devint suspecte et odieuse, et, en voulant l'abattre, elle alla se précipiter avec elle sous le joug du despotisme. Ce fut la punition du débordement de la démocratie.

« J'essaye d'exposer dans la première des trois parties de ce Mémoire la transformation du patriciat en une aristocratie ouverte aux familles plébéiennes qui s'anoblissent par les grandes magistratures, puis dégénérant en un parti opposé aux factions populaires et périssant dans les guerres civiles par l'audace heureuse de quelques grands et habiles usurpateurs qui flattent et déchaînent la démocratie, pour l'enchaîner elle-même à son tour en ne cessant point de la flatter: ce fut le temps de la république.

« Des débris de l'aristocratie romaine ramassés par Auguste, sous la protection d'un pouvoir absolu, représentant de la souveraineté populaire, tribunitia potestate, les Césars, continuateurs de son système, consti

tuent une noblesse nouvelle qui tient de son origine républicaine par l'accessibilité pour tous les hommes de fortune, et de la monarchie par un ordre de promotions hiérarchiques constamment et strictement observé dans l'usage et toujours soumis à la volonté du maître noblesse ayant sa maturité florissante dans le sénat, sa pépinière dans l'ordre des chevaliers, son école dans les petites magistratures urbaines et dans les commandements inférieurs de la milice; noblesse sans indépendance et sans autorité, destinée seulement à servir de support au trône, d'exemple d'obéissance au peuple, d'instrument docile à l'action du pouvoir; distinguée enfin du reste des sujets moins par sa grandeur propre que par l'exemption des charges humiliantes et des rigueurs de pénalité préventive et afflictive dont les plébéiens seuls étaient passibles.

« Cette seconde période s'étend jusqu'à la naissance de l'empire de Constantinople. Déjà ont commencé les ambitions des titres vains et des dignités fictives, les lois de l'étiquette et la jalousie des préséances, jusquelà qu'un des oracles de la jurisprudence, Ulpien, se pose gravement cette question: Si un ex-préteur doit céder le pas à une femme consulaire; et, tout bien examiné, tout bien pesé, il se prononce en faveur du prétorien, par la raison péremptoire de la supériorité du sexe. C'est alors qu'on voit s'élever les clarissimes, les perfectissimes, les égréges, avec leurs priviléges transmissibles aux femmes et aux enfants, et les titulaires sans fonctions, les consulaires, les prétoriens, les décorés d'insignes du triomphe, sans avoir jamais été ni consuls, ni préteurs, ni militaires.

« Après Dioclétien, le christianisme n'eut pas la vertu d'abolir cette grande iniquité sociale de la condition des personnes, et, tandis que le sort du peuple allait toujours se déprimant, les habitudes de la cour de Constantinople, qui lui furent communes avec celles d'Occident, enrichirent le protocole impérial de grades multipliés et de titres pompeux. Auguste avait refusé les honneurs divins dans Rome en laissant faire dans les provinces. Tibère avait repoussé la flatterie qui vénérait ses occupations sacrées; il voulait qu'on les dît seulement laborieuses. Dioclétien fut le premier qui se fit appeler dieu et adorer comme tel : l'emphase orientale commençait à dominer. Mais ce fut sous les empereurs chrétiens que la chancellerie palatine poussa aux dernières hyperboles le paganisme du langage et la déification du prince. Tout ce qui venait de lui, tout ce qui touchait à sa personne ou à son service n'avait pas d'autre qualification que celle de divin et de sacré. Le ministère des finances était « l'office des largesses sacrées; » les chambellans, « les gardiens de la chambre sacrée ; » les ordonnances impériales, « des oracles célestes, des volontés divines; >> les faveurs accordées par le prince, « des bienfaits de la céleste bonté. » Usurper un titre ou un rang qu'on n'avait pas équivalait à un sacrilége; la hiérarchie ayant été réglée par les empereurs. On les appelait «< Votre Eternité, Votre Divinité; » on ne les abordait qu'en les adorant.

« Il fallait bien inventer pour les premiers d'entre les sujets et pour les agents supérieurs du pouvoir des titres dont l'éclat répondit à la majesté du maître. Les dénominations d'illustre et de considérable (spectabilis) devinrent des signes d'honneur et des désignations de rang et d'état dans le monde officiel, principalement sous les successeurs de Constantin. Ce prince était plus simple, et s'en tint à la nomenclature telle qu'il l'avait trouvée toute formée.

<< On aperçoit, pour la première fois, la qualité d'illustre dans une loi de Constance de l'an 354; Valentinien l'Ancien jette les éléments de la Notice des dignités, espèce d'almanach impérial, dans une ordonnance de l'an 372; le rang des illustres n'est expressément réglé que par un édit

de Théodose. Celui des considérables s'était introduit comme intermédiaire entre les illustres et les clarissimes.

<< Le commencement du quatrième siècle vit éclore une autre forme de noblesse qui remontait par ses éléments primitifs aux anciens temps de la cité romaine, qui existait en germe, mais sans avoir pris encore une forme carac térisée et précise, sous les premiers empereurs, et qui ne reçut sa constitution définitive que du règne de Constantin et de ses successeurs : je veux parler des comtes, comites.

« Déjà les citoyens éminents de la république avaient eu, outre leurs clients ordinaires, sous le nom d'amis, une autre espèce de clientèle plus libre, plus volontaire et beaucoup plus étendue. Un vieil historien raconte que les Gracques ne sortaient point de leur maison sans un cortège de trois à quatre mille personnes. Il y avait, au dire de Sénèque, divers degrés de réception, diverses classes d'amis: ceux qui n'entraient point, et se tenaient à la porte, prêts à faire cortége; ceux qu'on admettait dans le vestibule et dans l'atrium; enfin les intimes, et, comme le disait un noble personnage, ceux de tous les jours et de toutes les heures.

<< La coutume se continua sous l'e mpire, surtout chez les empereurs, mais dans de moins vastes proportions et dans des rapports plus fixes et plus déterminés de commerce domestique et de commensalité. Pour ne citer que quelques exemples entre beaucoup d'autres, Hadrien et Alexandre Sévère se faisaient des conseillers intimes de quelques jurisconsultes, de quelques sénateurs, et mème de certains chevaliers, auxquels ils donnaient le titre quasi officiel d'amis; ils choisissaient souvent parmi eux des magistrats, et le titre d'ami restait joint au nom de la magistrature •

« Un autre usage de la république lorsqu'un préteur ou un proconsul était envoyé dans une province, outre les officiers de son prétoire, greffier, héraut, licteurs, etc., il emmenait avec lui des amis qui l'assistaient comme conseillers, quelquefois comme délégués; qui tout au moins vivaient aux dépens des provinciaux, voyageaient à leurs dépens, s'enrichissaient de leurs biens et commandaient chez eux par la volonté souveraine et absolue du magistrat qui faisait la loi au nom du peuple romain. Ces amis étaient dits les compagnons, comites, du préteur. Les empereurs eurent de même leur compagnie, comitatus, dans leurs voyages et dans leurs expéditions guerrières. C'était en quelque sorte un état que d'être ami ou compagnon de César ou des princes de sa famille, souvent les deux titres réunis. Suétone fait remarquer que Tibère, par avarice, ne donnait à ses compagnons que des indemnités de route, et point de traitement.

« Lorsque le cérémonial de la cour voulut qu'on adorât le prince comme un dieu, c'eût été presque un sacrilége que d'oser se dire ami des Augustes; c'était beaucoup que d'être élevé à l'honneur de leur compagnie. Le titre d'ami disparut; celui de comes, comte, devint une dignité. Cette transformation s'opéra sous Constantin, qui créa des comtes de premier, de second, de troisième ordre. Tout ministère, tout office émanant directement du prince et ressortissant plus ou moins immédiatement à lui portait le dignitaire dans la sphère du comitat sacré, comte, non pas de l'empire, mais de l'empereur, et ce titre se joignait à un nom d'emploi ou remplaçait les anciens noms de préfet et de légat: comte des largesses sacrées, comte du domaine privé, comte des corps ou divisions militaires.

<< Les comtes du consistoire impérial, sacrum consistorium, tenaient le rang le plus élevé dans la seconde classe de la noblesse après les illustres, au-dessus des clarissimes. Le consistoire impérial était à la fois le conseil des ministres et le conseil d'Etat réunis: d'une part, les grands officiers

de la couronne, préfet du prétoire, maîtres généraux des milices, grand maître des offices palatins, secrétaire d'Etat, etc.; de l'autre, les comtes sans fonctions actives, mais cependant en service ordinaire et pour ainsi dire en disponibilité perpétuelle, et pouvant être appelés aux délibérations souveraines. Aussi le secrétaire du roi Théodoric fait-il remarquer dans la formule de nomination à celui à qui elle est adressée que « Sa Spectabilité » a l'honneur d'entrer dans l'assemblée des illustres (le conseil des ministres) et qu'il n'y a pas de dignité qui puisse être placée entre eux et lui.

<< En y réfléchissant, la réflexion pourra sembler tardive, mais elle est toujours opportune, puisqu'elle est vraie et nécessaire, — je m'aperçois que le mot de noblesse dont je me suis servi si souvent dans ce Mémoire peut entraîner une erreur. La noblesse n'existait pas dans le Bas-Empire, telle du moins que l'histoire de notre pays, et, en général, l'histoire des temps modernes nous en ont inculqué l'idée, à savoir: des familles dans lesquelles se transmettent, avec le nom et le patrimoine, des distinctions, des priviléges, et en même temps des devoirs onéreux et honorables, par droit de naissance, sous la condition du droit d'aînesse; subsistant par elles-mêmes, indépendamment de la volonté du souverain; formant, soit comme conseil ou partie du gouvernement, soit par l'association ou la simple communauté des intérêts, une puissance politique. Cela se voit encore en Angleterre, en Allemagne et dans d'autres royaumes. Cela ne se voit plus chez les peuples qui ont établi pour bases de leur contrat social l'égalité des citoyens devant la loi et le partage égal des héritages. Là on prendra encore des titres nobiliaires; il pourra même s'être conservé des familles illustres dans lesquelles on garde toujours la maxime : « Noblesse oblige; » il n'y aura point de noblesse. La démocratie, qui lui est antipathique et avec laquelle elle demeure incompatible, règne souverainement quelque forme qu'elle revête, ochlocratie ou monarchie. Si c'est la multitude qui domine, elle se ruine bientôt elle-même et, comme dit Montaigne, s'abat par l'extravagance de sa force. Si de son débris s'élève un pouvoir absolu et despotique, la réaction de l'opinion publique, l'influence réciproque des diverses nations qui se pénètrent les unes les autres par les idées, la solidarité de la fortune publique avec les fortunes privées et avec les finances étrangères, modèrent ce pouvoir ou le détruisent.

« Il n'en était pas, il n'en pouvait pas être ainsi dans l'empire romain en décadence. Tombés de la liberté, pour laquelle et par laquelle vivait le citoyen, sous le joug des Césars, qui devinrent désormais l'unique et universelle puissance, les Romains furent les sujets les plus soumis, les plus abandonnés: In servitutem ruebant. Etrangers au sentiment du point d'honneur des modernes, ils n'eurent pas même la pudeur de la servitude. Point de contrôle de l'opinion publique; tout se taisait devant le maître. L'empire embrassant tout le monde civilisé, point de civilisation étrangère dont l'exemple et le contact fussent à redouter, dont il fallût ménager les jugements. Les Césars ne voyaient au dehors que des barbares qui les châ-tiaient quelquefois et ne les corrigeaient pas.

« Le despotisme, en ce temps, avait atteint le dernier degré où des peuples civilisés puissent descendre, la volonté du maître faisant la loi en tout et mesurant le droit de chacun à son bon plaisir, le sort et la vie de tous suspendus en la main d'un seul. Comment la noblesse, à vrai dire, auraitelle pu exister en un tel état d'instabilité et de misères? On rangeait les emplois du gouvernement et de l'administration dans des classes, sous des titres indiquant les degrés de promotion, selon qu'on approchait de la maison ou de la personne du prínce, quelque chose comme la hiérarchie des

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