Belle Aurore! il sommeille, il n'entend plus ta voix; En vain la mort a fermé ta paupière, Vous, qui m'aimez, vous, mes jeunes compagnes, Vos chants si doux plaisaient à mon oreille; LES CHANTS DE SELMA. ÉTOILE de la nuit, dont la tête brillante Sort du nuage épais qui rembrunit les cieux; Que regardes-tu dans la plaine? Le vent du jour retient son orageuse haleine; Au pied du roc le flot tombe expirant; Tes cheveux blonds et radieux. De mon génie éteint que la splendeur première Sur le mont de Lora mes amis rassemblés; Et Minona, si plaintive et si tendre. Comme au printems fleuri les zéphyrs caressans Un jour, en ces tems mémorables, Minona vint chanter au palais de Selma Les aventures déplorables Du beau Salgar et de Colma. Les yeux baissés, mouillés de larmes, Elle avança, pleine de charmes, Au sein des héros attendris: Ils avaient vu souvent la tombe solitaire Qui de ces deux amans renfermait les débris. >> « Avant que sur ce mont la nuit chasse le jour. Salgar ne revient pas; la nuit répand son ombre; Et, seule avec l'effroi, présage du malheur, COLMA. Seule, durant la nuit, vers un champêtre asile, J'entends au pied du mont, sur la roche immobile, O lune! sors du sein de la montagne obscure; Calmez, feux bienfaisans! la peine que j'endure; Pourquoi donc tarde-t-il? Qui peut à ma tendresse, Voici tous les témoins de sa douce promesse : Salgar! entends la voix de ta Colma fidèle; Salgar! sur le rocher c'est Colma qui t'appelle; La lune enfin paraît; je vois l'onde agitée Mais je ne le vois point sur leur cime argentée, Qui sont ces deux guerriers couchés sur la poussière? Près de Salgar mon frère dort! Ciel! deux glaives sanglans! ô Salgar! ô mon frère! Vous dormez du sommeil de mort! Ombres chères! parlez à Colma désolée, Venez, amis des morts! que leur tombe sacrée Mais ne la fermez pas que je n'y sois entrée: Selma voyait fleurir ma vie à peine éclose; Entre les deux héros que mon ombre repose, Quand je verrai la nuit monter sur la colline, OEuvres anciennes. III. 26 |