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domestique. Toutes les conséquencès de cette doctrine ancienne et primitive des Chinois s'offrent d'elles-mêmes à l'esprit.

Résister aux volontés d'un père et d'un chef de famille, c'est résister à Dieu même : leur manquer de respect, est un outrage fait à la divinité. Toutes les fautes contre les devoirs de la piété filiale sont une espèce de sacrilége. Les faveurs et les bénédictions du ciel sont le prix de l'obéissance et de la fiidélité ; et la malédiction ne manque jamais d'atteindre, tôt ou tard, l'enfant, ingrat ou rebelle, et de venger les droits sacrés de l'autorité paternelle, quelquefois même pendant une longue suite de générations.

Il n'est point de peuple, qui soit plus attaché à sa religion, plus fidèle à ses traditions anciennes, en général, plus superstitieux, que le peuple chinois; mais dans cet empire, les idées superstitieuses, les opinions du fanatisme religieux, tout semble fait de manière à tourner au profit de l'autorité que le père exerce sur les enfans, les serviteurs, les esclaves, tous les membres de la famille. Tout encore dans l'éducation, soit privée son publique, se rapporte à ce grand objet. C'est la première leçon que donne la mère à ses enfans, et qu'elle enseigne plus efficacement encore, par ses exemples. Les maîtres dans l'enseignement des écoles, les docteurs de la loi dans leurs livres, les mandarins chargés de l'instruction du peuple, et dans les discours qu'ils lui font souvent, et à des jours que le tribunal des rites a fixés, prennent toujours pour leur texte principal, les droits

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de la paternité et les devoirs de piété filiale. « Toutes les vertus sont en péril, quand la piété filiale s'affoiblit dans le cœur d'un enfant. Tout ce qui porte atteinte à la piété filiale est une calamité publique. Il vaut mieux faire pleurer cent fois sa femme, que de faire soupirer une seule fois sa mère. On ne jouit bien de son cœur que par la piété filiale.

Cette doctrine est la seule qui puisse fixer les vrais principes du gouvernement d'un empire: si on l'abandonne, les loix portent à faux, l'autorité chancelle, l'Etat est près de sa ruine. Le Tien (Dieu) ne verse ses bienfaits que sur les fils reconnoissans et dociles. Un fils tendre et vertueux n'a ni goût, ni sentiment à lui. Ce qui plaît à ses parens, lui plaît; ce qui les afflige, l'afflige. Son cœur n'est que l'écho du coeur de ses parens. Un souverain n'est grand et ne se couvre de gloire qu'autant qu'il surpasse ses sujets en piété filiale. C'est elle qui le fait aimer de ses sujets, et qui lui donne le sceptre de tous les cœurs. Qui n'aime pas ses parens, haïra l'empereur. L'amour de la patrie expire des plaies qu'a reçues la piété filiale. Elle est le point d'appui de toutes les loix sociales et politiques. Malédiction sur la tête du fils ingrat ou indocile : les menaces d'un père sont le tonnerre des familles, elles effraient l'innocence même; l'indocilité qui les brave est si abominable, qu'elle en inspire encore une plus grande frayeur ».

Nous nous bornons à ce petit nombre de sentences. On en pourroit composer un volume, si on vouloit copier les auteurs des livres sacrés et leurs

commentateurs le recueil qui les renferme a été publié par l'empereur Kang-Hi, contemporain de Louis XIV, pour les assemblées du peuple, de chaque mois, soit dans les villes, soit dans les campagnes, assemblées auxquelles président les mandarins ou les anciens, et qui sont instituées depuis une époque très-ancienne, pour servir, à l'instruction publique. Ces leçons ne manquent jamais d'être accompagnées du récit des faits miraculeux, des prodiges merveilleux et surnaturels opérés par la divinité, ou pour exciter la fidélité aux devoirs de la piété filiale, ou pour jeter la terreur dans les ames de ceux qui seroient tentés de secouer le joug du pouvoir paternel, ou de violer quelques-uns de ses droits sacrés. Si vous échappez, dit l'empereur Kang-Hi, à la justice des loix, sachez que vous n'échapperez pas à la vengeance du Tien. Cet empereur rapporte des exemples de punitions les plus épouvantables. C'est ainsi, poursuit-il, que seront punis les ingrats qui manquent à la piété filiale. La sévérité de la justice du Tien s'étend aussi loin que son pouvoir. La promptitude de ses châtimens est effrayante. Oserez-vous désormais nourir dans votre cœur, une seule pensée contre les devoirs que sa loi vous prescrit envers vos pères et vos mères? Ici le peuple assemblé doit répondre tout d'une voix : Pou-kan, qui veut dire: nous ne l'oserons pas. Oserez-vous désormais faire rien qui lui soit contraire? Même réponse de l'assemblée Pou-kan; nous ne l'oserons pas.

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Le recueil des édits, ordonnances et instructions publiées par Kang-Hi est divisé en soixante livres. Il

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y traite de vertu, de science, de politique, d'adoration du Tien, de l'imitation des ancêtres, des belleslettres, des moyens de soulager le peuple, de faire un choix parmi les mandarins destinés aux emplois de l'empire, etc.; et tous ces sujets longuement discutés sont tous rangés sous le titre général de l'autorité des chefs de famille et de la piété filiale. Partout l'empereur ne se considère que sous les rapports qu'il a comme père de sòn empire, et il en déduit tous les devoirs de la royauté, sa qualité et ses devoirs de souverain.

L'impératrice mère tomba malade. Nous regrettons que les limites dans lesquelles nous devons nous renfermer, nous interdisent de transcrire la longue relation de la conduite de l'empereur, des soins qu'il lui rendit, jusqu'à descendre à toutes les fonctions de garde-malade; des voeux qu'il fit offrir dans toutes les, provinces, pendant sa maladie, des actes de religion, et des sacrifices solennels qui les accompagnèrent à sa convalescence. Nous ne citerons que ces paroles attendrissantes: « Les inquiétudes de mon amour ne » me quittent ni jour ni nuit, le sonimeil et la nour>> riture ne sont plus rien pour moi; toute ma con»solation est de tourner humblement mes pensées » vers le Tien suprême; les yeux noyés dans mes » larmes, je me suis prosterné la face contre terre, » et j'ai profondément médité sur tout ce qui pour» roit me mériter son assistance divine : j'ai songé » que le plus sûr moyen de fléchir sa colère et d'ob>>> tenir les effets de sa clémence et de sa bonté, se»roit de me montrer moi-même clément et misé

» ricordieux; que c'étoit à ce seul prix que le Tien » se laisseroit toucher à la vue de mon extrême dou» leur, et qu'il m'accorderoit la prolongation d'une

» vie que je n'acheterois pas trop cher au dépens de

» ma propre vie ». En conséquence Kang-Hi se détermina à faire grâce à tous les criminels qui ne sont pas exceptés par la loi, des grands pardons. L'empereur finit par dire: Je prie le Tien de bénir mes

ѵеих.

Aux sentimens et aux droits de la nature, à l'empire sacré de la religion, ajoutons les loix de l'empire et les édits de ses souverains. On diroit que la législation chinoise n'est, à proprement parler, qu'un code de famille. Les loix de la Chine ne reconnoissent presque point de bornes a l'étendue de l'autorité des pères sur la famille. Hors le droit de vie et de mort, il n'en est point de tous ceux qu'un homme peut avoir sur un autre homme, que la loi ne reconnoisse dans l'autorité naturelle d'un chef de famille, Un père peut engager et vendre son fils. Maître absolu de ses biens propres, soit de ceux qu'il a acquis, soit de ceux qu'il a hérités de ses ancêtres, un père a également le droit d'engager, de vendre, de dissiper les biens que son fils a acquis: bien plus, quelque dette qu'ait contractée le père, à moins que ce ne soit au jeu, parce que dans les mœurs chinoises, le jeu lucratif est défendu et ne peut donner aucun droit, un fils est la caution nécessaire de son père; il est tenu d'acquitter toutes les créances tirées sur lui.

Une bru n'a rien en propre, n'a aucun meuble qui lui soit personnellement affecté; elle ne peut rien

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