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tife des honneurs extraordinaires qu'il acrele volontiers, malgré le titre de serviteu r des serviteurs qu'il se donne, et qui ulte en effet de ses fonctions. Mais cela ne doit point nous surprendre, puisque c'est por disposer les âmes, dans leur intérêt propre et celui de l'Eglise, à un respect plus profond et à une obéissance plus grande. L'éclat des honneurs n'a rien de blåmable en soi, pourvu qu'il n'attache point notre cœur à la terre. Il est donc bien permis à celui qui se trouve chargé de célestes fonctions de s'en servir pour commander plus de respect et d'obéissance à ses semblables. Voyez les rois: quel éclat jaillit de leur trône! Seastraient-ils aussi respectés et aussi obéis, s'ils paraissaient toujours à nos yeux dépouillés de cette pompe éblouissante qui les environne? Yous parlez de l'humble Jésus ! Mais cet s humble Jésus ne fut pas toujours dans l'état d'abaissement, où il s'était volontairement es réduit pour l'expiation de nos péchés. Quelos quefois il se vit environné d'une foule imDense qui chantait ses louanges. Le ciel rendit aussi témoignage à sa divinité, en e le revêtant d'un éclat extraordinaire. ex N'eût-il jamais quitté l'héroïque abaissement de sa vie habituelle que nous ne pourrions en tirer aucune conséquence relatievement à la conduite des autres. Pour commander le respect et se faire obéir, Jésus n'avait aucun besoin de cet éclat extérieur si nécessaire à l'homme. La sagesse et la simplicité sublime de ses discours, la perfection de son caractère, la sainteté de ses actions, l'incontestable autorité de ses prodiges, cette vertu secrète qui était en lui et dont chacun ressentait l'influence, tout sela prouvait suffisamment sa divine mison et lui donnait les moyens de la remslir.

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Ce que nous disons du maître, nous pourons le dire, en partie, des premiers paseurs; formés par ses exemples et par ses nstructions, abondamment pourvus des dons elagrâce, dépositaires de la toute-puissance Dieu, jusqu'à un certain point, ils trouaient, dans leurs paroles et dans leurs acions, une autorité suffisante à l'exercice du ainistère sacré. Pierre se rendait au temple; n pauvre était à la porte lui demandant aumône. Pierre lui dit: Je n'ai ni or ni rgent; mais ce que j'ai, je vous le donne. a nom de Jésus de Nazareth, levez-vous marchez. (Act. m. 6.) Et cet homme fut néri, et, louant Dieu, il suivit Pierre au ample.

Une autre considération qu'il importe de résenter ici, c'est que l'Eglise, toujours la ême dans sa constitution intrinsèque, est pelée à subir différentes transformations après le besoin des temps. Elle enseibe aujourd'hui ce qu'elle enseignait autreis, elle célèbre les mêmes mystères; mais nenseignement se fait avec plus d'apareil, il y a plus de pompe dans son culte. Si le temple chrétien a pu se revêtir d'un velat inaccoutumé sans cesser d'être le ieme, pourquoi n'en serait-il pas ainsi du

pontife qui célèbre dans ce temple? Quand l'Eglise a vaincu, quand elle s'est définitivement établie et qu'elle possède la paix sur la terre, j'entends cette paix dont peut jouir une société destinée à livrer de continuels combats, nous ne devons point nous étonner de voir ses pasteurs se montrer à nos yeux sous un extérieur qu'ils n'avaient point aux temps héroïques de la primitive Eglise. Voyez-vous ce monarque tranquillement assis sur son trône et gouvernant en paix ses sujets heureux et dociles? Naguère, une épée à la main, il conduisait an combat une armée de soldats valeureux: ses cheveux étaient en désordre, une sueur abondante couvrait son visage, ses habits étaient souillés de sang et de poussière. Pourquoi n'est-il donc plus le même aujourd'hui, extérieurement du moins? Son courage s'est-il refroidi, sa vertu a-t-elle baissé? Non, mais c'est qu'il ne se trouve plus dans les mêmes circonstances. A une lutte acharnée a succédé une paix profonde.

N'y a-t-il pas incompatibilité entre la royauté et le sacerdoce? avez-vous objecté

encore.

Pourquoi done cette incompatibilité? Le prince doit s'occuper surtout du bonheur de la vie présente, j'en conviens; mais la vie présente, n'est-ce pas le prélude de la vie future? Le prêtre doit s'occuper principalement du bonheur de la vie future; mais la vie future, n'est-ce pas la conséquence de la vie présente? L'une et l'autre sont nécessairement liées ensemble, elles se complètent mutuellement, ou plutôt ce n'est qu'une seule vie, appelée tantôt le temps, tantôt l'éternité. Leurs intérêts, en apparence opposés, sont donc évidemment les mêmes.

Aussi l'antiquité, quelquefois si juste et si expressive dans l'énonciation des droits de chacun, nous montre-t-elle souvent la royauté et le sacerdoce réunis sur la même tête. Presque partout, je vois celui qui tient le sceptre ou qui porte l'épée présider les assemblées religieuses et immoler des victimes. Il y a, il est vrai, quelque chose d'évidemment faux dans ce mélange, dans cette confusion, si je puis m'exprimer de la sorte, de la royauté et du sacerdoce; mais on y voit du moins que, dans les idées générales, il n'y a pas, comme vous le prétendez, incompatibilité entre les deux dignités. Dieu n'est-il pas regardé comme roi, et même comme le roi des rois? Jésus-Christ n'at-il pas été, comme nous disons, sacré roi et prêtre par son Père éternel? Il n'est donc point étonnant que cette double dignité se trouve aussi dans la personne de celui qui est le vicaire de Jésus-Christ, le représentant de Dieu sur la terre.

Un sophiste du dernier siècle ne craignit point d'avancer que l'homme de l'Evangile ne pouvait être un bon citoyen. Cette assertion fut aussitôt contredite; on lui prouva, par les raisonnements comme par les faits, que le parfait Chrétien serait au contraire le

parfait citoyen. A ceux qui disent qu'un saint évêque ne saurait être un bon prince, la réponse est la même. Voyez cette longue série de Pontifes que l'histoire de l'Eglise offre à notre vénération; jamais, dans aucun lieu de la terre, vous ne trouverez une dynastie qui puisse lui être comparée. Pourquoi le Pape ne gouvernerait-il pas avec gloire et sagesse? Il est l'ami, le père de son peuple. La conscience est son guide, il connaît ses devoirs, et il a la volonté de les remplir. Chose merveilleuse! pouvons-nous dire ici, en nous servant de la pensée d'un célèbre écrivain, chose merveilleuse! le Pape, qui semble n'être appelé qu'à rendre l'homme heureux dans l'autre vie, peut faire encore son bonheur en celle-ci.

Soyons de bonne foi, et nous regarderons même comme un grand bienfait du ciel l'indépendance que le chef de l'Eglise doit à son titre de souverain. Si le Pape était soumis à la juridiction temporelle d'un prince étranger, ce prince, fût-il le plus vertueux de tous ceux qui ont porté une couronne, exercerait, ou du moins chercherait à exercer sur l'esprit du Pontife, son sujet, une influence presque toujours contraire au bien général de l'Eglise ou des autres Etats. L'administration temporelle et l'administration spirituelle seraient presque toujours en contact. De là des contestations interminables, de là des persécutions. De quel prétexte s'est-on servi pour élever Jésus en croix? C'est qu'il avait obtenu sur l'esprit du peuple un ascendant inconciliable avec l'autorité souveraine de César; c'est qu'il avait voulu se faire roi, ont dit tout à la fois ses accusateurs, ses juges et ses bourreaux.

Que d'embarras encore lui viendraient du dehors! Supposons le Pape à Notre-Dame de Paris les Catholiques des autres pays verront en lui un étranger, un ennemi peutêtre, surtout quand ils seront en guerre avec nous. Les relations continuelles qu'ils sont obligés d'entretenir avec le Saint-Siége rencontreront une infinité d'obstacles. Supposons le Pape dans les Etats de l'empereur d'Autriche les inconvénients sont les mêmes, et peut-être plus grands encore, quoique venant d'une autre part. Dans l'état où sont les choses, toutes ces difficultés disparaissent. A Rome, le souverain est en même temps le chef suprême de l'Eglise. Il est indépendant de toute puissance, et, en raison du peu d'étendue de ses Etats, il ne peu! inspirer aux autres d'inquiétude sérieuse.

:

Comme capitale des Etats de l'Eglise, Rome n'est rien, ou est du moins peu de chose, avons-nous dit. Mais, comme siége du Souverain Pontife, elle est la capitale du monde entier, et, en cette qualité, que de transformations elle voit opérer chaque jour en son. sein! Vers elle se réfugient, de préférence, les grandeurs déchues, les coeurs froissés, en attendant l'ombre et le silence du tombeau; et cependant son trône lui-même est accessible au plus humble habitant de la ville la plus ignorée. Oui, et cela n'est pas sans

exemple, le pauvre pâtre qui garde son tron peau dans une campagne déserte sera peulêtre élevé sur le Siége pontifical avant le prince de l'Eglise né dans un palais splendide et depuis longtemps déjà revêtu de la pourpre.

Combien de fois, avez-vous ajouté, le Pape n'a-t-il pas abusé de son influence pour semer partout la dissension? Il a frappé les rois d'anathème, délié les peuples du serment de fidélité, etc., etc.

De quoi l'homme ne peut-il pas abuser el n'abuse-t-il pas réellement? Si je voulais raconter les abus qui ont eu et qui ont encore aujourd'hui leur source dans l'exercice des droits les plus incontestables, je dirais des choses effroyables. Faut-il vous montrer des royautés sans contrôle écrasant les peuples dont elles étaient appelées à faire le bonheur? Ou bien vous montrerai-je les peuples révoltés, déchirant le livre sacré des lois, brisant tout frein, celui de la force comme celui du droit, et se dévorant les uns les autres comme des bêtes sauvages? Mais non, ne récriminons point. Au lieu de prendre plaisir à étaler aux yeux de tous les plaies que l'humanité se fait continuelie ment à elle-même, cachons soigneusement ces plaies hideuses sous le voile de ses ver tus. C'est bien la meilleure réponse que nous puissions faire à l'objection qui nous est présentée ici.

De tous les princes de l'Europe, le Sou verain Pontife est sans contredit celui qui a le moins abusé de son autorité. Parmis Papes, il y a eu des guerriers, il y a eus profonds politiques. Ont-ils beaucoup soc: à l'agrandissement de leurs Etats? Evide ment non. Pour celui qui connaît le c humain, pour celui qui sait apprécier in fluence que le Pape possédait autrefois, qu'il possède encore sur l'esprit des peuples, c'est là une preuve incontestable d'une grande sagesse de sa part; ou plutôt, ces une preuve évidente de l'action providen tielle dans tout ce qui concerne les intéres de l'Eglise. Aucun peuple n'est resté tionnaire ou il a succombé, ou il a pris accroissement quelconque. Les Etats l'Eglise sont à peu près aujourd'hui ce qu étaient au commencement. Rappelez-v Rome païenne. Cette étroite enceinte, ne renfermait d'abord que quelques vole a fini par s'étendre jusqu'aux extrémits la terre. Elle a noué ses chaînes dans tou les directions, elle a fait peser son joug** fer sur tous les peuples. Qu'a fait Re chrétienne, cette fille de la civilisation et la vertu? Elle a aussi rougi toute la terre mais ce n'est qu'avec le sang de ses s chers enfants. Elle n'a fait peser sur le peuples que le joug suave du Seigneur le fardeau léger de sa loi.

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Quels sont d'ailleurs les abus dont parle? Les Papes ont-ils frappé d'anali des rois vertueux? Ont-ils appelé ta ds corde et la guerre chez des nations trad

les et heureuses? Non, jamais. S'ils eusessayé de faire prévaloir l'injustice, tentative n'aurait obtenu aucun résulleur voix n'eût pas même été écoutée. ont des ambitions désordonnées qu'ils nchaînées; ce sont des appétits grossiers is ont réfrénés. Ils prenaient parti cona force sans règle en faveur de la faise opprimée. En cela, ont-ils été coues? Quelle que soit votre manière de à cet égard, vous ne pouvez vous emer de convenir que, s'ils ont quelquefois e-passé leur pouvoir comme Papes, ce est d'ailleurs contesté, ils se sont mondignes de l'admiration générale, comme iliateurs reconnus entre les rois et les ples. Et, aujourd'hui surtout, ne doiventpas nous apparaître comme des héros de aix, comme des demi-dieux, ces illustres tifes qui, dans des siècles non encore cés, ont fait seuls prévaloir le droit cona violence, et ont obtenu, par la puis

sance de leurs paroles, ce que ne pouvaient obtenir les peuples armés?

Du reste, j'ai la persuasion que ce contrôle du Souverain Pontife, au lieu d'avoir porté atteinte à la dignité des rois qu'il avertissait, et quelquefois réprimait, n'a servi qu'à la conserver, au contraire, puisque leur puissance, sans aucune espèce de contre-poids, les eût infailliblement entraînés dans l'abîme. Il y a sur la terre peu de puissances réellement absolues; Dieu ne l'a pas permis, à cause des maux incalculables qui en seraient résultés pour l'espèce humaine. En France, en Angleterre, dans tous les pays constitutionnels, ce sont les représentants qui contrôlent le pouvoir; en Turquie, c'est le poignard, dit-on, comme en Russie le poison. Les monarchies du moyen âge enrent un contrôle beaucoup plus salutaire dans l'autorité du Souverain Pontife. Croyezvous que ce contrôle éclairé serait encore inutile de nos jours?

PAUVRETÉ VOLONTAIRE.

jecttons. A quoi sert la pauvreté voire? Il y a bien assez de pauvres qui out involontairement. La pauvreté luit naturellement à la mendicité, qui a source d'une infinité de désordres.t-il pas honteux de voir des jeunes gens es jeunes filles aller mendier au nom de eligion, tandis qu'ils pourraient bien ailler?

ponse. La pauvreté volontaire est un rois vœux formés par celui qui entre en jon. C'est bien un vœu sublime, comme de chasteté et d'obéissance; et cepenil n'en est pas moins dénigré par un 4 nombre de personnes.

quoi sert la pauvreté volontaire? nous inde-t-on.

is, cela est évident, à imiter Notre-Seiir, qui, possédant tout ou plutôt étant lui-même dans le ciel, a bien voulu re dans une étable, dépourvu des choses lus indispensables à cette misérable vie: bien là la pauvreté volontaire par ex

nce.

mme celle de Jésus-Christ, la pauvreté ntaire de l'homme sert à satisfaire à la re divine offensée par nos péchés, à rélier la terre avec le ciel, à pratiquer milité, le dévouement, le détachement biens de ce monde, le sacrifice, tous les , toutes les vertus du christianisme, et rier les autres à l'accomplissement de actes et de ces vertus. En doutez-vous? z, par exemple, un saint François et les 5, si pauvres, aux yeux des hommes, de les biens de la terre, si riches en vertus, yeux de Dieu; voyez également un saint Fent et sa nombreuse famille, répandue urd'hui par toute la terre.

y a bien assez de pauvres qui le sont ontairement, remarquez-vous.

Sans doute il y en a bien assez, et même beaucoup trop; mais ceux qui se font pauvres volontairement n'aggravent point, tant s'en faut, le fardeau déjà si lourd de la pauvreté. Ils peuvent dire réellement comme le poëte:

Qui vit content de rien possède toutes choses;

et mieux encore avec l'apôtre saint Paul: Quoique tristes, nous sommes toujours dans la joie; dépourvus de tout, nous enrichissons plusieurs; nous n'avons rien et nous possédons tout: « Quasi tristes, semper autem gaudentes; sicut egentes, multos autem locupletantes; tanquam nihil habentes, et omnia possidentes. » {II Cor. vi, 10.)

Voyez cette pauvre fille qui semble ne pouvoir suffire à ses propres besoins: pourquoi l'appelle-t-on sœur de Charité, quand elle s'est faite pauvre volontairement, au nom et pour l'amour de Jésus-Christ? est-ce parce qu'elle va demander la charité ? Bien au con. traire, c'est qu'elle va l'exercer à l'égard des

autres.

Il en est à peu près de même de tous ceux qui font vou de pauvreté. A l'exemple de leur divin maître, élevé sur une haute et solitaire montagne d'où il aperçoit une grande multitude affamée qu'il nourrit miraculeusement, avec quelques pains d'orge seulement, le pauvre volontaire se rapproche de Dien, sur les ailes de la charité, et on le voit souvent, quoique n'ayant rien lui-même, subvenir d'une manière extraordinaire aux besoins d'un grand nombre, réalisant le mot de saint Paul: Sicut egentes, multos autem locupletantes.

Vous allez me dire peut-être que tous les religieux n'ont pas pour mission l'accom plissement des œuvres de charité.

Sans doute; mais c'est le grand nombre. Qui ne sait d'ailleurs que ceux qui n'ont pas pour mission l'accomplissement des œuvres de charité corporelles n'en sont que plus déYoués aux œuvres de charité spirituelles, comme la prédication, le bon exemple, la prière. Or, comme vous le savez, et, comme Notre-Seigneur nous l'a dit lui-même en propres termes : L'homme ne vit pas seule ment de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu : « Non in solo pane vivit homo, sed in omni verbo, quod procedit de ore Dei. (Malth. iv, 4.)

Nous avons donc eu raison de dire que ceux qui se font pauvres volontairement n'aggravent point, tant s'en faut, le fardeau déjà si lourd de la pauvreté.

Ajoutons à ces considérations qu'en s'éloignant du banquet de la vie, ils laissent aux autres plus de place, si je puis m'exprimerde la sorte, puisqu'en leur apprenant, par leurs paroles comme par leur exemple, la modération des désirs et le détachement des choses de la terre, ils leur enseignent également à ne pas craindre et même à vaincre la pauvreté.

La pauvreté, avez-vous ajouté, conduit naturellement à la mendicité, qui est la source d'une infinité de désordres.

Non pas toujours; car il est une pauvreté forte et courageuse qui ne mendie jamais. Or, celle dont nous parlons ici est plus que forte et courageuse, elle est divine.

Elle mendie aussi cependant, me direz

vous.

Pour les autres, oui; mais non pas pour elle-même; ou, si elle le fait pour elle-même, c'est pour être plus apte à se dévouer au service de Dieu et de l'humanité. Une telle mendicité ne saurait être, comme vous dites, la source d'une infinité de désordres. Au contraire, elle est la source de l'ordre, en établissant l'union, la paix, l'harmonie, entre les rangs ies plus opposés de la société. Elle s'élève, au nom de la religion, jusqu'au cœur des riches, d'où elle descend, chargée de biens, au cœur souffrant des malheureux qu'elle soulage, et dont elle reporte la reconnaissance à leurs bienfaiteurs. Quelle mission touchante, avantageuse, au point de vue des intérêts temporels aussi bien que des intérêts éternels!

N'est-il pas honteux, avez-vous dit encore, de voir des jeunes gens et des jeunes filles aller mendier au nom de la religion, tandis qu'ils pourraient bien travailler?

Les croyez-vous sans occupation, par hasard? Suivez-moi un instant. Nous voilà dans un orphelinat. Il y a,je suppose, une centaine de petites orphelines. Combien de

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mères ou de sœurs, pour vêtir, blanchir, nourrir et élever cette multitude d'enfants qui ne se rattachent à leurs cœurs que par les liens de la religion? Une dizaine tout au plus; et elles s'acquittent de tout admirablement. Connaissez-vous dans le monde beaucoup de femmes chargées d'autant d'occupations et s'en acquittant aussi bien ? De l'orphelinat passons immédiatement dans une de ces maisons de vieillards si bien tenues par les petites sœurs des pauvres ? Combien de vieillards dans cette maison? Une centaine environ. Et, pour subvenir à tous les besoins de cette seconde eufance, plus répugnante et plus difficile encore que la première, combien de mères ou de sœurs. Une dizaine également. Je vous le demande de nouveau, connaissez-vous, dans le monde, beaucoup de femmes chargées d'autant d'occupations, et s'en acquittant aussi bien?

Mais elles mendient, objectez-vous.

Pourraient-elles faire autrement? et connaissez-vous un autre moyen de faire face aux dépenses de leur nombreuse famille? Cette famille d'ailleurs appartient au public, et il est juste que le public la nourrisse.

Je ne vois pas partout les mêmes besoins, me direz-vous.

Sans doute; mais il y en a d'autres quine sont ni moins pressants ni moins respectsbles. En tout cas, aucune maison religieuse ne peut solliciter la charité publique qu'en raison de ses besoins.

Ce sont là des vérités si claires qu'elles devraient frapper le plus simple bon sens campagnard. Ce qui n'a pas toujours lieu.

Il y avait délibération, dans une petite commune, pour savoir si on accepterait, ou si on refuserait un don fait à condition qu'il y aurait des sœurs chargées d'élever les enfants et d'avoir soin des pauvres et des malades. « Ce sont des mendiantes, qui voudraient vivre sans rien faire, dit un opposant. Si elles manquent d'ouvrage, qu'elles viennent chez moi, elles garderont les vaches. Un peu plus de calme, maître, lui répondit quelqu'un, qui était d'un avis contraire. On sait bien que, pour avoir des bêtes à garder, on ne peut mieux s'adresser que chez vous; mais il y a d'autres emplois sur la terre, et il est juste que chacun sot rempli. Ne faut-il pas que nos enfants, nos pauvres et nos malades soient gardés el soignés aussi bien que vos vaches? et, si on nous demande à chacun quelques centimes pour cela, nous ne devons point hésiter..

Je ne sais de quel côté se rangea la majorité; mais il n'est pas difficile de voir de quel côté avait été la raison.

PÉCHE ORIGINEL.

Objections. Avez-vous des preuves assez fortes pour nous faire croire une chose

aussi extraordinaire que le dogme du péché originel? Est-ce que cela ne répugne pas

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à la justice et surtout à la bonté de Dieu ? - N'y aurait-il pas réellement de la cruauté de la part de Dieu à punir de la sorte un nombre infini de créatures formées à son image, pour une faute aussi légère que le fut celle de nos premiers parents?- Prévoyant quel serait le résultat de l'épreuve, il devait l'éviter. Dans la supposition du péché originel, Adam et Eve auraient dû garder la continence, et la même obligation subsisterait pour leurs descendants: le malheur et la faute des enfants retombant alors nécessairement sur les parents. Une preuve bien convaincante qu'on n'admet point généralement la transmission du péché originel, c'est que rien n'est plus commun que d'entendre répéter partout: Innocent comme l'enfant qui vient de naître.

Réponse. Ce ne sont pas quelques voix seulement qui proclament hautement le dogme du péché originel. Depuis l'enfant qui naît en faisant entendre le cri de la douleur jusqu'au vieillard qui descend à la tombe en faisant entendre le même cri qu'il n'a guère interrompu pendant tout le cours de son existence, il n'y a pas de créature humaine qui ne le publie, la plupart du temps, à son insu. Mais comme ce dogme heurte rudement notre raison et humilie notre orgueil, comme il nous oblige à croire à la religion chrétienne et à employer tous les moyens qu'elle nous propose d'opérer notre réhabiitation, quelques-uns le repoussent dédaigneusement, ou du moins le révoquent en doute.

Avez-vous des preuves assez fortes, ditesvous, pour nous faire croire une chose aussi extraordinaire que le dogme du péché originel ?

Hélas! oui. Nous en avons de tellement fortes qu'il nous est impossible d'en douter, quelque désir que nous ayons de le faire. La religion chrétienne nous rappelle à chaque instant et de toute manière cette désolante vérité; il n'y en a aucune qui se trouve plus clairement exprimée dans la tradiiion des peuples, et notre propre nature fait entendre sur ce point à tous et à chacun un langage assez intelligible.

La religion chrétienne nous rappelle à chaque instant, et de toute manière, le dogme du péché originel, avons-nous dit avec raison: Qui peut rendre pur l'homme né d'un sang impur, sinon vous seul? (Job xiv, 4) dit à Dieu Job, l'homme de la douleur. J'ai été conçu dans l'iniquité et formé en péché dans le sein de ma mère (Psal. L, 7), s'écrie également le Roi pénitent. Comme c'est par un seul homme que le péché est entré dans ce monde et la mort par le péché, dit l'apôtre saint Paul, ainsi lamort est passée dans tous les hommes par ce seul homme en qui tous ont péché... Comme donc c'est par le péché d'un seul que tous les hommes sont tombés dans la condamnation; ainsi c'est par la justice d'un seul que tous les hommes reçoivent la justification de la vie (Rom. v, 12, 18.- La mort est venue par un homme, dit ailleurs le même DICTIONN. DES OBJECT. POPUL.

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Apôtre, et la résurrection vient par un autre homme; de même que tous meurent en Adam, ainsi tous seront vivifiés en Jésus-Christ. (I Cor. xv, 21, 22.) Et encore: Si un seul est mort pour tous, donc tous sont morts. (11 Cor. v, 14.)

Mais qu'est-il besoin de réunir ici quelques textes épars dans nos saints Livres pour prouver le dogme du péché originel, quand cette vérité est incontestablement établie par l'essence même du christianisme, el, pour mieux dire encore, par le christianisme luimême tout entier? Qu'est-ce que le christianisme, en effet? La religion de JésusChrist. Et Jésus-Christ? - Le Fils de Dieu fait homme. Mais pourquoi le Fils de Dieu s'est-il fait homme ?- Pour nous racheter tous. Et pourquoi nous racheter tous? Parce que nous avions tous péché en Adam. Sous l'Ancien Testament, les hommes ne peuvent se sauver que par la vertu du sang que Jésus-Christ doit répandre sur le Calvaire. Ils ne peuvent se sauver sous le Nouveau Testament que par la vertu de ce même sang déjà répandu. La croix est donc la base même du christianisme. Mais la croix n'est élevée que pour détruire la puissance que la prévarication d'Adam a donnée au démon sur la race humaine. J'ai donc eu raison de dire que le dogme du péché originel est établi d'une manière incontestable par l'essence même du christianisme. Considérons actuellement celte religion divine dans ses différentes parties, et nous arriverons au même résultat. Pourquoi, en effet, le baptême ? Pourquoi tous les sacrements? Pourquoi la prière ? Pourquoi toutes les pratiques pieuses ?. Ah! il est facile de le voir, c'est pour arriver plus ou moins directement à notre réhabilitation. Mais pourquoi cette réhabilitation? C'est parce que nous sommes déchus. Done, encore une fois, le dogme du péché originel est établi incontestablement par le christianisme lui-même tout entier.

Aussi l'Eglise rejette-t-elle de son sein tout Chrétien qui ose le nier: Si quelqu'un soutient, lisons-nous dans le concile de Trente (De peccato originali, sess. 5), que la prévarication d'Adam n'a été préjudiciable qu'à lui seul et non pas aussi à sa postérité, et que ça n'a été que pour lui et non pas aussi pour nous, qu'il a perdu la justice et la sainteté qu'il avait reçues et dont il est déchu, ou qu'étant souillé personnellement par le péché de désobéissance il n'a communiqué et transmis à tout le genre humain que la mort et les peines du corps et non pas le péché qui est la mort de l'âme, qu'il soit anathème.

Tenons-nous-en là aussi bien le péché originel ne saurait être nié aux yeux de la foi. Il ne peut l'être que par notre orgueilleuse et indocile raison. Eh bien ! prouvonsle donc à cette raison.

S'il est un dogme attesté par la croyance unanime des peuples, c'est bien celui du péché originel. Nous retrouvons partout le Souvenir d'un age d'or, c'est-à-dire d'un âge heureux auquel succède un âge moins heu

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