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appréciateur des choses: qui le cherche avec des intentions pures le trouvera. Il est une pensée de saint Augustin, souvent répétée, mais qu'il faut rappeler toujours, parce que toujours on l'oublie, et que nous allons reproduire dans les expressions mêmes de Pascal: Il y a assez de lumière pour ceux qui ne désirent que de voir, et assez d'obscurité pour ceux qui ont une disposition contraire. (Pensées, chap. 18, n. 2.)

Ici, comme en tout le reste, le christianisme se montre éminemment raisonnable; et nous pouvons remarquer combien la révélation confirme, en l'épurant, en le perfectionnant, tout ce qu'inspire une saine raison. Elle nous apprend que c'est ici le temps des ombres et des obscurités, et non celui de la pleine et parfaite lumière; qu'il faut commencer par croire, pour mériter de voir; qu'il sera déchiré, le voile qui nous dérobe la Divinité, et que, semblable au crépuscule qui aunonce le soleil, le temps présent n'est que l'aurore du jour de l'éternité.»

Par cela même que personne ne voit Dieu pleinement, personne aussi ne peut le comprendre. Nous ne devons point en être surpris, notre faible esprit étant bien éloigné de pouvoir embrasser l'Etre infini dans toute son étendue. Que comprend-il d'ailleurs cet esprit excessivement borné? Se comprendil lui-même ? Sait-il comment sa mémoire lui rend présent ce qui n'est plus, comment sa pensée s'élance dans tous les mondes à la fois, comment son imagination met sous ses yeux ce qui n'a jamais existé? Sait-il par quels liens mystérieux il est uni au corps? Connatt-il bien ce corps auquel il est si întimement uni? Que dis-je! comprend-il un grain de sable, un atome? hélas! il ne voit le tout de rien: comment voudrait-il voir le tont de l'Infini ?

Mais quoique nous ne puissions comprendre Dieu, cela ne nous empêche point de le connaitre suffisamment pour l'aimer, l'adorer, obéir à sa voix. Ecoutons encore, ici, les sages raisonnements de l'abbé de Frayssinous, dans la conférence que nous citions lout à l'heure:

< Comprendre Dieu, » dit-il, « ce serait en avoir une idée complète, en pénétrer la nature, en sonder toutes les profondeurs; ce serait voir parfaitement la beauté et l'harmonie de toutes ses perfections, et c'est là sans doute ce qui surpasse la capacité d'un esprit faible et borné comme celui de l'homme. Connaître Dieu, c'est savoir qu'il existe, en avoir des idées non complètes sous tous les rapports, mais assez nettes, assez déve loppées, pour voir suffisamment ce qu'il est par rapport à nous, et ce que nous sommes par rapport à lui; pour en parler d'une maBiere sage et raisonnable, pour avoit la conviction intime et profonde de son existence, de sa puissance, de sa sagesse, de sa bonté, de sa justice, encore que nous ne puissions pas les embrasser dans toute leur étendue. Or, telle est notre situation sur la terre. Eh quoi ! lorsque le grand nom de Dieu reten

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tit à nos oreilles, n'est-ce là qu'un vain sont qui se dissipe? Ne sentons-nous s'éveiller aucune pensée, aucun sentiment dans nos âmes? Quoi! si nous parlons de l'Etre éternel, sans commencement et sans tin, dont la nature est d'exister, à qui l'être est aussi essentiel que la rondeur l'est au cercle; qui, indépendant de toute cause étrangère, n'a rien reçu, comme il ne peut rien perdre; qui demeure toujours inaltérable, toujours le même, tandis que, dans ce monde, tout passe, tout s'use comme un vêtement; qui seul est véritablement, parce que tout le reste des êtres tient de lui une existence empruntée; devant qui l'univers est comme un néant, toutes les nations comme si elles n'étaient pas, et qui peut dire de soi cette parole de nos Livres saints: Je suis celui qui suis (Exod. 11, 14); si nous parlons d'un Etre tout-puissant qui a communiqué à tout ce qui compose cet univers l'être, le mouvement et la vie; qui peut créer des soleils avec la même facilité que des insectes; qui a semé les étoiles dans le firmament comme la poussière dans nos campagnes; qui n'a besoin que de sa volonté pour produire, et qui au commencement dit : Que la lumière soit, et la lumière fut (Gen. 1, 3); si nous parlons d'un Etre souverainement sage qui, par des lois également simples et fécondes, gouverne ce monde visible; dont la Providence embrasse tout sans effort, les mondes étoilés comme l'herbe des champs, les vastes empires comme l'individu le plus obscur, conduit les créatures intelligentes à ses fins toujours adorables avec force, mais aussi avec douceur, et se joue ainsi dans cet inmense univers; si nous parlons eufin de ce Dieu juste, qui suit en tout les règles de sa souveraine et infaillible raison; de ce Dieu saint, dont l'infinie pureté le tient à une distance infinie de tout ce qui est mal; de ce Dieu bon qui, heureux de lui-même, aime à épancher sur ses créatures quelque chose de sa suprême félicité; si nous tenons devant vous un semblable discours, sommesnous aussi inintelligibles que si nous parlions une langue étrangère et qui vous fat inconnue? Toutes ces pensées n'ont-elles plus aucun rapport avec votre manière de sentir et de juger? Tout cela est-il aussi barbare, aussi absurde, que si nous venions Vous entretenir d'un cercle qui fût carré, ou d'un carré qui fût circulaire? Ou plutôt l'idée de Dieu n'est-elle pas si raisonnable qu'elle entre naturellement dans tous les esprits, qu'elle est plus ou moins développée chez tous les peuples de la terre; que son nom se trouve dans toutes les langues, dans les ouvrages des plus beaux génies que le monde ait produits, dans les institutions de tous les grands législateurs, dans les chants religieux de toutes les nations et de tous les âges; que le souvenir en est ineffaçable; que la connaissance, sans être parfaite, en est distincte, pour devenir la règle plus ou moins sentie des actions humaines? Je vous le demande, parler de la cause intelligente ou du hasard; d'un être puissant et sage,

qui opère avec choix et raison, ou d'une aveugle nécessité; d'un Dieu, auteur de l'ordre et des beautés de cet univers, ou de cet univers, résultat du concours fortuit des parties de la matière en mouvement: est-ce donc la même doctrine? L'énoncé de l'une et de l'autre fait-il naître les mêmes idées ? Ou plutôt n'avez-vous pas sur toutes deux dies notions assez justes, pour sentir qu'elles sont en opposition entre elles? Quand je vois un tableau d'un effet admirable, ne puisje pas me faire une idée, au moins imparfaite, du talent du peintre, de son intelligence, de sa merveilleuse industrie, encore que je ne puisse apprécier exactement les qualités de son esprit, ni la manière dont il a su animer la toile, et faire, pour ainsi dire, revivre sous nos yeux ce qui n'est déjà plus ? Je vois une vaste cité où tout est en paix, où les personnes et les propriétés sont en sureté sous la sauvegarde des lois, où la liberté ne dégénère pas en licence: ne puis-je pas me former une idée raisonnable de l'agent invisible qui tient les ressorts de cette sage administration,fencore que j'ignore comment il les met en jeu et les fait concourir au bien de tous? Et s'il est vrai que ce monde n'est qu'un enchaînement de causes secondes et de leurs effets, ne puis-je pas avoir l'idée de la cause première, de l'Etre auteur et ordonnateur suprême de toutes choses, encore que, dans sa manière d'exister et d'agir, il échappe à mes pensées? On peut donc avoir l'idée de Dieu, tout incompréhensible qu'il est; et n'est-ce pas en avoir une idée que de savoir qu'il est incompréhensible? »

Je vous entends me dire ici: Mieux vaut ne pas connaître une personne que d'en avoir une fausse idée.

Oui, surtout quand cette idée est à son désavantage; mais non pas une idée incomplète, ce qui n'est pas la même chose, tant s'en faut. Pourquoi vaut-il mieux ne pas connaître une personne que de s'en faire une fausse idée, surtout quand cette idée est à son désavantage? Parce que cette idée l'abaisse, la dégrade à nos yeux, et nous la représente sous des couleurs telles qu'il vaudrait mieux pour elle n'avoir jamais existé que d'être ainsi. Vous êtes un parfait honnête homme, je suppose. Je me fais de vous l'idée d'un scélérat. N'est-il pas clair qu'il vaudrait mieux pour vous que je ne vous counusse pas du tout

me un autre.

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que d'avoir de vous une telle idée, puisqu'il est moins désavantageux de ne pas être que d'être un scélérat ? Il n'en est point ainsi de l'idée incomplète. Comme cette idée est conforme à la vérité, quoiqu'elle ne vous la fasse pas connaître parfaitement, ce qui est très-difficile, très-difficile, sinon même complétement impossible, il est plus avantageux, sous tous les rapports, de l'avoir que de ne pas l'avoir. Rendons cela sensible par un exemple. Vous avez une mère dont le coeur est pour vous plein de tendresse. Vous connaissez bien ce cœur; on peut dire même qu'il y a peu d'objets que vous connaissiez aussi bien, puisque c'est sur lui et en lui, si je puis m'exprimer de la sorte, que vous avez en partie vécu. Le connaissez-vous parfaitement? Non. Il y a plus, c'est que quelque soin que vous ayez d'étudier, d'approfondir toutes ses qualités, vous ne parviendrez ja mais, vous, fils, à savoir, bien au juste, tout ce qu'il y a de tendresse, de sollicitude, de dévouement, dans ce cœur maternel. Est-ce à dire pour cela qu'il vaudrait mieux ne pas le connaître du tout que de le connaître ainsi ?, Evidemment non; car l'idée que vous en avez, quelque incomplète qu'elle soit, est noble et juste en soi, et elle peut avoir, elle a même les plus grands avantages.

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On peut en dire autant, à plus forte raison, de ce père souverainement puissant et bon que nous appelons Dieu. Nous le connaisSuns certainement; nous devrions même le connaître beaucoup mieux que n'importe quelle créature, puisque c'est en lui que chacun de nous a l'être, le mouvement et la vie, suivant le langage de l'Apôtre. Le connaissons-nous parfaitement? Nul de nous n'y parviendra jamais, puisque, quelque progrès que nous avons fait dans cette connaissance, nous avons toujours devant nous l'infini, qui est le propre de toute la nature divine. Faut-il en conclure qu'il vaudrait mieux ne pas le connaître du tout que d'avoir de lui une telle idée? Nullement : car cette idée, tout incomplète qu'elle est, est juste et sainte en soi, elle a toujours été et sera toujours, pour tous les hommes qui s'en pénètrent, une source inépuisable de paix, de consolation, de lumière, de force, en un mot, de tout ce qui nous est nécessaire pour achever heureusement la difficile carrière que nous avons à parcourir ici-bas.

DIMANCHE.

Objections. Le dimanche est un jour com- Pourquoi aller à la Messe, ce jour-là surtout? Pourquoi interrompre les œuvres serviles? On mange ce jour-là comme les autres jours; il faut bien travailler aussi ce jour-là comme les autres jours. Dieu l'a dit formellement à notre premier père: Vous vivrez du travail de la terre tous les jours de votre vie : « In laboribus comedes ex ea cunctis diebus vitæ tuæ. » (Gen. 1, 17.) Le travail est une chose sainte d'ailleurs. On le reconnait généralement, quand on dit: Qui

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travaille prie. En tout cas, il vaut beaucoup mieux travailler que de mal parler, ou d'aller au cabaret. Si on ne travaille pas le dimanche, tout reste en arrière. Les maitres le veulent la plupart du temps, et il faut bien leur obéir, comme vous nous l'ensei gnez vous-même. Les quitter pour aller ailleurs, ce serait souvent quitter une posi tion passable, pour en prendre une intolé rable. Le prêtre nous défend de travaille le dimanche, et c'est précisément ce jour-l qu'il travaille le plus lui-même. Combie d'oeuvres profanes il se permet, et permet au

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riches également, qui ne vont pas plus à la sanctification du dimanche que les travaux serviles, comme on les appelle.

Réponse. Le jour consacré au repos et à la prière était, chez les Juifs, 1e sabbat, qui répond à notre samedi. C'était leur saint jour. Dieu leur avait ordonné de l'observer comme tel, en mémoire du repos dans lequel il était entré après avoir achevé l'œuvre de la création. Chez les Chrétiens, c'est le dimanche, le jour du Seigneur. L'Eglise l'a substitué au samedi, en mémoire de ce que, ce jour-là, après avoir achevé l'œuvre de la Rédemption, Jésus-Christ est entré dans le repos de sa gloire. Mais, comme le sabbat a cessé, par cela même, d'être observé, la célébration du dimanche nous rappelle tout à la fois et le repos de Dieu, après la création, et celui de Jésus-Christ, après la Rédemption.

Que la substitution du dimanche au samedi, comme jour de repos et de prière, ait été faite dès le commencement du christianisme, c'est ce dont il n'est pas permis de douter. Il est fait mention du dimanche dans les écrits des apôtres et de leurs disciples. (I Cor. xvi, 2; Apoc. 1, 10; Epist. Barnabæ, n° 15.) Le jour qu'on appelle du soleil, » dit saint Justin dans son Apologie pour les Chrétiens, tous ceux qui demeurent à la ville ou à la campagne, s'assemblent en un même lieu, et là on lit les écrits des apôtres et des prophètes, autant que l'on a detemps. »> Il fait ensuite la description de la liturgie. Elle consistait dès lors en ce qu'après la lecture des Livres saints le pasteur, dans une espèce de prône ou d'homélie, expliquait les vérités qu'on venait d'entendre, et exhortait le peuple à les mettre en pratique. Puis on récitait les prières qui se faisaient en commun, et qui étaient suivies de la consécration du pain et du vin, que l'on distribuait ensuite à tous les fidèles. Enfin, on recevait les aumônes volontaires des assistants, lesquelles étaient employées, par le pasteur, à soulager les pauvres, les orphelins, les veuves, les malades, les prisonniers, etc. C'est à peu près, comme on le Voit, ce qui se fait encore aujourd'hui.

L'homme, d'un côté, ayant besoin d'un jour de repos, par semaine, comme être corporel, et, comme être spirituel, d'un jour tout particulièrement consacré aux œuvres saintes; le dimanche, d'un autre côté, étant ce jour, jour de repos et de bonnes œuvres unanimement reconnu par nos pères, depuis plus de dix-huit siècles, on ne comprend pas comment ce jour est sur le point de ne plus éire reconnu comme tel aujourd'hui, on comprend encore moins toutes les objections et quelquefois toutes les absurdités élevées contre l'observance de ce jour par ceux mêmes qui ont le plus grand intérêt à le maintenir. Ecoutons plutôt :

Le dimanche est un jour comme un autre, nous dit-on.

Physiquement parlant, peut-être, et encore Newton, qui pourtant n'était point un petit esprit, prétend qu'il est plus ordinairement

doté des faveurs du soleil qu'un autre. (Traité de la lumière.) Spirituellement et moralement parlant, non assurément! Non, sous ce rapport, ce n'est point un jour comme un autre car il n'est regardé comme tel ni par les individus ni par les peuples.

Et, en effet, c'est tout particulièrement le jour du Seigneur. Son nom seul le dit: car le mot Dimanche, en latin Dies Dominica, veut dire jour du Seigneur. De là la raison première, fondamentale de son observance.

« On conuaît le commandement formel que le Très-Haut fit à son peuple, » dit à ce sujet un écrivain profondément religieux (Le Dimanche, ou bonheur que procure la sanctification de ce saint jour), dont nous citerons quelques passages : «Souvenez-vous de sanctifier le jour du Sabbat. Vous travaillerez pendant six jours, et vous ferez ce que vous aurez à faire, mais le septième jour est le jour du Seigneur votre Dieu. Vous ne ferez, ce jour-là, aucun ouvrage, ni vous, ni votre fils, ni votre fille, ni votre serviteur, ni votre servante, ni vos bêtes de service, ni l'étranger qui demeure chez vous: car le Seigneur a fait en six jours le ciel et la terre et tout ce qu'ils contiennent, et il s'est reposé le septième; c'est pourquoi il a béni le septième jour, l'a fait saint, et l'a consacré à son service. (Exod. xx, 8 seq.) Or ce précepte divin s'applique actuellement au dimanche, puisque ce jour a été substitué au sabbat.

« L'Eternel a parlé : Souvenez-vous, a-t-il dit, de sanctifier le jour ou j'ai cessé de créer des merveilles, le jour que je me suis choisi. Qui donc oserait lui contester ce droit d'exger de nous ce qui lui plaît? Un roi de la terre ne rend-il pas des ordonnances, et ses sujets ne lui obéissent-ils point? Pourquoi donc le Seigneur, qui est le Roi des rois, ne nous prescrirait-il pas ses ordres à nous, qui tenons tout de lui, qui n'existons que par lui? Il y a donc obligation pour tout Chrétien, pour tout homme qui n'a pas renoncé à la raison, de sanctifier le dimanche... Une créature raisonnable, et par conséquent capable de connaître et d'aimer son Créateur, ne peut se dispenser de lui rendre hommage comme à son souverain Seigneur, à son bienfaiteur et à sa dernière fin: cela va de soi... Et quoique ce devoir soit une dette journalière, ou plutôt de tous les moments, cependant l'homme est obligé de réserver certains jours où, libre de toute occupation temporelle, il puisse se livrer entièrement au culte qu'exigent de lui les perfections infinies et la suprême excellence de l'auteur de son être. Eh! combien de motifs se réunissent pour nous rendre cette obligation plus pressante, plus sacrée! Si nous devons de la reconnaissance à un père, à un bienfaiteur; si nous rendons hommage à la puissance des rois de la terre, quelles actions de grâces, quel hommage, quelle soumission ne devonsnous pas à Dieu, le père commun de tous les hommes, le créateur et le souverain maî tre de l'univers? Au reste, ne serait-ce pas uue contradiction manifeste de reconnaître que Dieu nous a faits, que nous dépendons conti

nuellement de lui, et de nier, en même temps, que nous soyons tenus de reconnaître sa souveraineté, et de confesser notre dépendance?

« Mais, nous l'avons dit, il faut un jour spécial pour rendre à Dieu cet hommage; il ne faut pas seulement que nous témoignions chaque jour notre reconnaissance, nous devons encore lui payer à une époque déterminée un tribut de louanges et de bénédictions. Quel jour sera-ce donc? Ce ne peut être que celui du repos, marqué par le Très-Haut lui-même. La division de la semaine, la même chez tous les peuples, est mémorable. Les annales de Moïse nous en expliquent l'origine et le sens profond. Or, en transportant au dimanche le jour du sabbat ou du Seigneur, le christianisme en a rendu le culte primitif plus solennel encore; il nous apprend à honorer à la fois, en ce jour, le souvenir de la Toute-Puissance, et celui de l'infinie Bonté, les merveilles du Seigneur au commencement et dans la durée des siècles, dans l'œuvre de la création, lorsqu'il dit: Que le monde soit, et le monde fut, et dans J'œuvre de la régénération, lorsqu'il dit: Je vous ai envoyé mon Fils bien-aimé, écoutezle. »(Luc. ix, 35.)

Les saintes Ecritures et les saints Pères nous enseignent également que le jour du repos et de la prière est particulièrement le jour du Seigneur :

Voici, s'écrie le Roi-Prophète, voici le jour que le Seigneur a fait, célébrons-le avec des transports de joie: « Hæc est dies quam fecit Dominus: exsultemus, et lætemur in ea.» (Psal. CXVII, 24.) Il serait trop long de citer tous les passages qui ont rapport à la célébration de ce jour.

« Nous devons, dit saint Jean Chrysostome, observer religieusement le jour du dimanche, que l'on peut appeler le jour de la naissance de la nature humaine, parce que c'est celui où, de morts que nous étions, nous avons été ranimés à la vie; nous étions perdus, et nous avons été retrouvés; nous étions les ennemis du Seigneur, et nous sommes redevenus ses amis. Mais c'est par des hommages tout spirituels que nous devons solenniser ce saint jour, non par une joie dissolue et de profanes divertissements. Il appartient tout entier aux œuvres de la piété chrétienne. C'est celui où l'enfer a été détruit, l'arrêt de notre condamnation révoqué, le péché renversé; où les portes de l'enfer ont été brisées, où le démon a été enchaîné, où l'antique guerre qui séparait le ciel d'avec la terre a cessé, où l'homme a été réconcilié avec Dieu, la race humaine réhabilitée, ennoblie, où le soleil a éclairé le plus magnifique spectacle, où l'homme a été appelé à l'immortalité....

"

Méditez donc, dit encore ce même Père, méditez, homme, sur ce que vous êtes devenu! Si le jour où nous sommes entrés dans le monde est pour nous un jour de fête, si les esclaves rendus à la liberté célèbrent le jour de leur affranchissement par la joie des festins, par les offrandes qu'ils apportent à leurs libérateurs, que ne devons-nous pas

faire pour honorer cette solennité du dimanche, que l'on peut appeler l'émancipation et la renaissance de tout le genre humain! De morts que nous étions, nous avons été rappelés à la vie; frappés de l'auathème et marqués du sceau de la vengeance, nous avons obtenu grâce; enfants égarés loin de la maison paternelle, nous avons été ramenés dans les bras de notre Père. En reconnaissance de tant de bienfaits, l'Apôtre nous invite à manifester une sainte allégresse dans ce jour de notre rédemption, non pas en faisant couler des fontaines de vin, non en nous livrant à la dissolution des festins, mais en arrachant nos frères à l'indigence, en versant d'abondantes aumônes dans le sein des pauvres. Ce qu'il écrivait aux Corinthiens, c'est à chacun de nous qu'il l'adresse, c'est à tous les hommes qui ne sont pas encore.» (Bibliothèque choisie.)

Il est donc bien certain, par ce passage et par mille autres semblables que je pourrais citer également, que le dimanche n'est point un jour comme un autre, mais un jour de reconnaissance envers Dieu et d'œuvres saintes que nous devons rapporter à sa gloire.

Le dimanche est un jour comme un autre!.. Mais non, car s'il est, d'une manière toute particulière, le jour du Seigneur, il est également le jour de l'homme.

« Ce jour-là est pour le Chrétien un jour de résurrection, » fait observer l'écrivain que nous avons cité précédemment. « Il renait à la pure lumière de la vérité, seule digne de captiver et d'exercer son intelligence. Il s'af fermit dans sa foi; il se retrempe, en quelque sorte, dans la célébration des augustes mystères auxquels il est convié par l'Eglise, et enfin il élève son âme, dégagée des soucis de la terre, vers l'Eternel...

«Certes, cette méditation et ces prières commandées le saint jour du dimanche, ce recueillement de l'âme, le chaut des hymnes, la pompe des autels, sont en effet de puissants moyens de nous rapprocher de Dieu, et d'élever l'intelligence de ces hommes qui, chargés du poids du jour et de la chaleur, n'auraient jamais occasion de relever leur esprit courbé et appesanti; ces saintes choses sont comme les degrés de cette échelle merveilleuse que Jacob, endormi sur la pierre de Bethel (Gen. xxvIII, 12), a vue placée entre la terre et le ciel, et elles relèvent le courage du fils d'Adam, qui se laisserait aisément abattre s'il n'avait pas les occasions d'exercer les plus belles facultés de son être.

D'ailleurs, l'homme ne vit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu (Deut. vIII, 3); et cette sentence, développpée par la Sagesse lorsqu'elle dit: Ce ne sont point les fruits de la terre, Seigneur, qui nourrissent les hommes, mais c'est votre parole qui conserve ceux qui croient en vous (Sap. xvi, 26), et confirmée par le Sauveur qui l'oppose au démon pour le confondre, lorsqu'il l'engageait, pour le tenter, à changer les pierres en pains (Matth. w, 4), cette sentence, disons-nous, fait assez entendre qu'il faut à l'homme un aliment pour son

intelligence et pour son cœur. Or, il n'y a qu'à l'église qu'il peut prendre efficacement cette nourriture, en général du moins. C'est bien assez que six jours sur sept soient consacrés par lui à se procurer le pain, c'està-dire la nourriture du corps; il faut donc qu'un jour au moins soit employé à écouter el à méditer la parole divine, cette nourriture de l'esprit, cet aliment de l'âme, qui nous met en communication avec le Créateur.

Pendant six jours, le corps agit; le dimanche, du moins, ce sera le tour de l'intelligence. Libre des préoccupations du monde, dégagé des soucis de l'ambition on de la fortune, l'homme se souviendra alors qu'il a un autre héritage à recueillir, et que cet héritage est au ciel; il aspirera de tout son cœur, de toute son âme, à la possession de l'immortelle couronne qui l'attend; et si, distrait un moment de ces pensées sublimes, il jette un regard sur les jours qui vont suivre, il n'en tiendra compte que comme d'un temps de répit qui lui est accordé pour mériter de plus en plus un bonheur que la terre ne peut lui offrir... N'y a-t-il donc pas là de quoi grandir l'homme, le rappeler à sa dignité et lui apprendre à se respecter?

De plus, l'homme qui a prié le dimanche sera heureux tout le reste de la semaine. Le travail ne lui pèsera pas tant. Il l'acceptera avec résignation; il se souviendra qu'il doit souffrir sur cette terre d'exil, puisque telle a été la condamnation de nos premiers parents, et il continuera avec patience et courage le chemin qui lui reste à parcourir. Ainsi, le dimanche se trouve placé sur la route de la vie pour ranimer le Chrétien, et pour lui donner les forces nécessaires afin de finir sa course.

Comme un voyageur fatigué s'assied à l'ombre des arbres qui bordent le chemin, T'homme qui veut reprendre de la force sur la route si souvent mauvaise et aride de la vie, ira se mettre à l'ombre de l'autel et gouter les douceurs d'un saint et digne repos. Il y serait seul qu'il y puiserait déjà beaucoup de soulagement et de quiétude; mais, à jour fixe, au jour du dimanche, il y trouvera toute la famille assemblée, et ce sera avec son père et sa mère, avec son frère et sa sœur, avec sa femme et ses enfants, qu'il se délassera. Un tel repos ne vaut-il pas ieux que tous les autres ?..

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Le dimanche est un jour comme un autre !.. Non, vous dirai-je encore: car, s'il est le jour de Dieu et le jour de l'homme, d'une manière spéciale, il est de la même manière, le jour de la société.

Qui, cela est évident, si le dimanche, » dit encore l'auteur que nous citions tout à Theure, produit infailliblement, en faveur dies individus, tous les bienfaits dont nous venons d'esquisser le tableau, il n'est pas moins certain qu'il exerce sur toute la soété l'influence la plus heureuse et la plus salutaire; il moralise les hommes, surtout les classes ouvrières; leur inspire des senliments honnêtes, des habitudes d'ordre, des Pots purs et simples, des vertus domestiques réelles et nombreuses; en un mot, il

les civilise donc il est et ne peut être que très-avantageux à la société, qui n'est autre chose que la réunion des individus qu'il amène ainsi à la pratique du bien, c'est-à-dire à l'observance des devoirs religieux et moraux.

« En raisonnant ainsi du particulier au général, il est clair qu'il n'y a pas à s'élendre beaucoup sur les avantages sociaux de l'institution du dimanche, il suffit d'en appeler au bon sens de chacun, et à la bonne foi de ceux qui veulent se faire les antagonistes de ce saint jour. Néanmoins, on peut s'arrêter à quelques considérations générales, et il y a d'ailleurs, sur ce point, des avœux qui ont été faits par des hommes non suspects et dont nous ne devons pas négliger le témoignage.

« Tous les publicistes, exempts de passions et qui ne prennent pour guide que la raison, avouent que les jours enlevés par la religion au travail manuel pour les consacrer à des œuvres spirituelles seront toujours une institution précieuse aux yeux d'une politique éclairée. « Il est certain que ces « jours ont contribué, plus qu'on ne peut « dire, à civiliser les peuples de l'Europe. « Dans les temps de l'anarchie féodale, ils << suspendaient, par des trêves fréquentes, « les guerres particulières que la puissance « civile ne pouvait réprimer. Ils rappro<< chaient, à des époques marquées, les habi<< tants de divers cantons, divisés par des << animosités invétérées; et les rassemble<<ments qui se formaient en ces occasions « contribuaient infiniment au progrès du «< commerce et à la splendeur des villes, << dont nos ancêtres dédaignaient le sé« jour... » (Duvoisin.)

« Ce rapprochement des hommes entre eux, que procure la sanctification du dimanche, est donc un bienfait social immense. C'est le seul moyen de faire naître et d'entretenir la fraternité universelle, tant recommandée dans l'Evangile, et dont on fait beaucoup de bruit sans vouloir considérer que la religion l'a prêchée elle-même la première et qu'elle seule la met en pratique.

« Dans cette assemblée des fidèles d'une même ville, sous le rapport purement humain, il y a en effet un grand avantage. Ces réunions apprennent à la famille à se connaître. Tels hommes qui ne se rencontreraient jamais se trouvent ensemble une fois toutes les semaines, sous les regards du Dieu qui lit dans les cœurs. S'il y a au fond de l'âme de ces Chrétiens qui doivent se voir aux pieds des autels quelques pensées de rancune ou de haine, cette haine et cette rancune, comme de mauvais esprits, abandonneront le cœur qui les avait accueillies, elles s'enfuiront pour ne pas paraître devant celui qui chasse les démons. N'en doutons pas, bien des hommes qui se seraient détestés toute leur vie apprennent à ne plus se haïr en priant ensemble: appelant Dieu notre Père, ils sont forcés de prendre entre eux des sentiments fraternels.

« Ainsi, sous les seuls rapports de société et de paix, la célébration du dimanche est

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