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CHAPITRE XII.

DES PRIÈRES POUR LES MORTS.

HEZ les anciens, le cadavre du pauvre ou de l'esclave étoit abandonné presque sans honneurs ; parmi nous, le ministre des autels est obligé de veiller au cercueil du villageois comme au catafalque du monarque. L'indigent de l'Évangile, en exhalant son dernier soupir, devient soudain (chose sublime!) un être auguste et sacré. A peine le mendiant qui languissoit à nos portes, objet de nos dégoûts et de nos mépris, a-t-il quitté cette vie, que la religion nous force à nous incliner devant lui. Elle nous rappelle à une égalité formidable, ou plutôt elle nous commande de respecter un juste racheté du sang de Jésus-Christ, et qui, d'une condition obscure et misérable, vient de monter à un trône céleste : c'est ainsi que le grand nom de chrétien met tout de niveau dans la mort;

et l'orgueil du plus puissant potentat ne peut arracher à la religion d'autre prière que celle-là même qu'elle offre pour le dernier manant de la

cité.

Mais qu'elles sont admirables ces prières ! Tantôt ce sont des cris de douleur, tantôt des cris d'espérance : la mort se plaint, se réjouit, tremble, se rassure, gémit et supplie.

Exibit spiritus ejus, etc.

« Le jour qu'ils ont rendu l'esprit, ils retournent à leur terre originelle, et toutes leurs vaines pensées périssent 1. »

Delicta juventutis meæ, etc.

<< O mon Dieu, ne vous souvenez ni des fautes de ma jeunesse, ni de mes ignorances 2! »

Les plaintes du Roi - prophète sont entrecoupées par les soupirs du saint Arabe.

« O Dieu, cessez de m'affliger, puisque mes jours ne sont que néant! Qu'est-ce que l'homme pour mériter tant d'égards, et pour que vous y attachiez votre cœur?...

>> Lorsque vous me chercherez le matin, vous ne me trouverez plus 3.

>>> La vie m'est ennuyeuse; je m'abandonne aux

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plaintes et aux regrets... Seigneur, vos jours sont-ils comme les jours des mortels, et vos années éternelles comme les années passagères de l'homme 1?

>> Pourquoi, Seigneur, détournez-vous votre visage, et me traitez-vous comme votre ennemi? Devez-vous déployer toute votre puissance contre une feuille que le vent emporte, et poursuivre une feuille séchée 2?

>> L'homme né de la femme vit peu de temps, et il est rempli de beaucoup de misère; il fuit comme une ombre qui ne demeure jamais dans un même état.

>> Mes années coulent avec rapidité, et je marche par une voie par laquelle je ne reviendrai jamais 3.

>> Mes jours sont passés, toutes mes pensées sont évanouies, toutes les espérances de mon cœur dissipées... Je dis au sépulcre : Vous serez mon père; et aux vers: Vous serez ma mère et

mes sœurs. »

De temps en temps le dialogue du Prêtre et du choeur interrompt la suite des cantiques. Le Prétre. «Mes jours se sont évanouis comme

· Office des Morts, IIo leç.

2 Ibid. IVe leç.

3 Ibid. VII leç.

la fumée; mes os sont tombés en poudre. » Le Chœur. « Mes jours ont décliné comme

l'ombre. >>

Le Prétre. « Qu'est-ce que la vie? Une petite

vapeur.»

Le Chœur. « Mes jours ont décliné comme l'ombre. >>

Le Prétre. « Les morts sont endormis dans la poudre. >>

Le Chœur. « Ils se réveilleront, les uns dans l'éternelle gloire, les autres dans l'opprobre, pour y demeurer à jamais. »

Le Prétre. « Ils ressusciteront tous, mais non pas tous comme ils étoient. >>

Le Chœur. « Ils se réveilleront. >>

A la Communion de la Messe, le Prêtre dit:

« Heureux ceux qui meurent dans le Seigneur; ils se reposent dès à présent de leurs travaux, car leurs bonnes œuvres les suivent. »

Au lever du cercueil, on entonne le psaume des douleurs et des espérances. «< Seigneur, je crie vers vous du fond de l'abîme; que mes cris parviennent jusqu'à vous. »>

En portant le corps, on recommence le dialogue: Qui dormiunt; « Ils dorment dans la poudre; -Ils se réveilleront. >>

Si c'est pour un prêtre, on ajoute : << Une vic

TOME XIII.

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time a été immolée avec joie dans le tabernacle du Seigneur. >>

En descendant le cercueil dans la fosse: « Nous rendons la terre à la terre, la cendre à la cendre, la poudre à la poudre. >>

Enfin, au moment où l'on jette la terre sur la bière, le Prêtre s'écrie, dans les paroles de l'Apocalypse: Une voix d'en-haut fut entendue, qui disoit: Bienheureux sont les morts! Et cependant ces superbes prières n'étoient pas les seules sés: de même qu'elle avoit des voiles sans taches et des couronnes de fleurs pour le cercueil de l'enfant, de même elle avoit des oraisons analogues à l'âge et au sexe de la victime. Si quatre vierges, vêtues de lin et parées de feuillages, apportoient la dépouille d'une de leurs compagnes, dans une nef tendue de rideaux blancs, le Prêtre récitoit à haute voix, sur cette jeune cendre, une hymne à la virginité. Tantôt c'étoit l'Ave, maris stella, cantique où il règne une grande fraîcheur, et où l'heure de la mort est représentée comme l'accomplissement de l'espérance; tantôt c'étoient des images tendres et poétiques, empruntées de l'Écriture: Elle a passé comme l'herbe des champs; ce matin elle fleurissoit dans toute sa gráce, le soir nous l'avons vue séchée. N'est-ce pas là la fleur qui lan

que l'Église offrit pour les trépas

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