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rapport à nous : nous sommes donc incapables de connoître ni ce qu'il est, ni s'il est 1. Cela étant ainsi, qui osera entreprendre de résoudre cette question? Ce n'est pas nous, qui n'avons aucun rapport à lui.

II.

B. Je n'entreprendrai pas ici de prouver par

de n'y pas reconnoître un dialogue régulier entre Pascal et un incrédule dont il combat les objections. J'ai cru à propos de distinguer par les lettres A et B les interlocufeurs supposés de ce dialogue. R.

Ne trouvant, ni dans l'édition des OEuvres, ni dans aucune des éditions anciennes, ces mots ni s'il est qu'on voit dans celle de Condorcet, j'examinai, en 1803, le manuscrit original des Pensées, écrit de la main de Pascal, et que l'on conserve à la bibliothéque impériale; une recherche obstinée dans ce manuscrit presque indéchiffrable n'ayant pu m'y faire découvrir ce paragraphe, je dus conclure qu'il n'y étoit pas, et que Pascal ne l'avoit point écrit. Faisant une édition nouvelle, je voulus cependant réitérer mon examen; et enfin j'ai été plus heureux cette fois, et j'ai trouvé, page 4 du manuscrit, l'article tel que l'a imprimé Condorcet, tel que l'avoit imprimé avant lui le P. Desmolets dans le tome V de la Continuation des Mémoires de littérature et d'histoire, page 310. Ainsi donc il n'y a pas cu supposition de texte; mais ces mots ne font rien pour la cause de ceux qui voudroient autoriser leurs doutes ou leur incrédulité par l'exemple de Pascal; puisque, comme je viens de le dire, ce n'est nullement sa pensée, mais une suite d'objections mises en avant tout exprès pour y répondre. R.

des raisons naturelles, ou l'existence de Dieu, ou la Trinité, ou l'immortalité de l'âme, ni aucune des choses de cette nature, non-seulement parce que je ne me sentirois pas assez fort pour trouver dans la nature de quoi convaincre des athées endurcis, mais encore parce que cette connoissance, sans Jésus-Christ, est inutile et stérile. Quand un homme seroit persuadé que les proportions des nombres sont des vérités immatérielles, éternelles et dépendantes d'une première vérité en qui elles subsistent, et qu'on appelle Dieu, je ne le trouverois pas beaucoup avancé pour son salut.

III.

A. C'est une chose admirable, que jamais auteur canonique ne s'est servi de la nature pour prouver Dieu tous tendent à le faire croire; et jamais ils n'ont dit : Il n'y a point de vuide; donc il y a un Dieu. Il falloit qu'ils fussent plus habiles que les plus habiles gens qui sont venus depuis, qui s'en sont tous servis.

B. Si c'est une marque de foiblesse de prouver Dieu par la nature, ne méprisez pas l'Écriture: si c'est une marque de force d'avoir connu ces contrariétés, estimez-en l'Écriture.

IV.

A. L'unité jointe a l'infini ne l'augmente de rien, non plus qu'un pied à une mesure infinie. Le fini s'anéantit en présence de l'infini, et devient un pur néant. Ainsi notre esprit devant Dieu;

ainsi notre justice devant la justice divine. Il n'y a pas si grande disproportion entre l'unité et l'infini qu'entre notre justice et celle de Dieu.

V.

B. Nous connoissons qu'il y a un infini, et nous ignorons sa nature. Ainsi, par exemple, nous savons qu'il est faux que les nombres soient finis : donc il est vrai qu'il y a un infini en nombre. Mais nous ne savons ce qu'il est. Il est faux qu'il soit pair, il est faux qu'il soit impair; car, en ajoutant l'unité, il ne change point de nature: cependant c'est un nombre, et tout nombre est pair ou imil est vrai que cela s'entend de tous nombres

pair;

finis.

On peut donc bien connoître qu'il y a un Dieu sans savoir ce qu'il est : et vous ne devez pas conclure qu'il n'y a point de Dieu, de ce que nous ne connoissons pas parfaitement sa nature.

Je ne me servirai pas, pour vous convaincre de son existence, de la foi par laquelle nous la connoissons certainement, ni de toutes les autres preuves que nous en avons, puisque vous ne voulez pas les recevoir. Je ne veux agir avec vous que par vos principes mêmes ; et je prétends vous faire voir, par la manière dont vous raisonnez tous les jours sur les choses de la moindre conséquence, de quelle sorte vous devez raisonner en celle-ci, et quel parti vous devez prendre dans la décision de cette importante question de l'existence de Dieu.

A. Cependant il est certain que Dieu est, ou

qu'il n'est pas; il n'y a point de milieu. Mais de quel côté pencherons-nous? La raison, ditesvous, ne peut rien y déterminer. Il y a un chaos infini qui nous sépare. Il se joue un jeu à cette distance infinie, où il arrivera croix ou pile. Que gagerez-vous? Par raison, vous ne pouvez assurer ni l'un ni l'autre ; par raison, vous ne pouvez nier aucun des deux.

B. Ne blâmez donc pas de fausseté ceux qui ont fait un choix; car vous ne savez pas s'ils ont tort, et s'ils ont mal choisi.

A. Je les blâmerai d'avoir fait, non ce choix, mais un choix; et celui qui prend croix, et celui qui prend pile, ont tous deux tort : le juste est de ne point parier.

B. Oui, mais il faut parier: cela n'est pas volontaire; vous êtes embarqué, et ne point parier que Dieu est, c'est parier qu'il n'est pas. Lequel choisirez-vous done? Voyons ce qui vous intéresse le moins vous avez deux choses à perdre, le vrai et le bien; et deux choses à engager, votre raison et votre volonté, votre connoissance et votre béatitude: : et votre nature a deux choses à fuir, l'erreur et la misère. Pariez donc qu'il est, sans hésiter; votre raison n'est pas plus blessée en choisissant l'un que l'autre ; puisqu'il faut nécessairement choisir. Voilà un point vuidé; mais votre béatitude? Pesons le gain et la perte ; en prenant le parti de croire, si vous gagnez, vous gagnez tout; si vous perdez, vous ne perdez rien. Croyez donc, si vous le pouvez,

A. Cela est admirable : oui, il faut croire; mais

je hasarde peut-être trop.

:

B. Voyons puisqu'il y a pareil hasard de gain et de perte, quand vous n'auriez que deux vies à gagner pour une, vous pourriez encore gager. Et s'il y en avoit dix à gagner, vous seriez imprudent de ne pas hasarder votre vie pour en gagner dix à un jeu où il y a pareil hasard de perte et de gain. Mais il y a ici une infinité de vies infiniment heureuses à gagner, avec pareil hasard de perte et de gain; et ce que vous jouez est si peu de chose et de si peu de durée, qu'il y a de la folie à le ménager en cette occasion.

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Çar il ne sert de rien de dire qu'il est incertain sí on gagnera, et qu'il est certain qu'on hasarde; et que l'infinie distance qui est entre la certitude de ce qu'on expose et l'incertitude de ce que l'on gagnera égale le bien fini, qu'on expose certainement, à l'infini qui est incertain. Cela n'est pas ainsi tout joueur hasarde avec certitude pour gagner avec incertitude; et néanmoins il hasarde certainement le fini pour gagner incertainement le fini, sans pécher contre la raison. Il n'y a pas infinité de distance entre cette certitude de ce qu'on expose et l'incertitude du gain; cela est faux. Il y a à la vérité infinité entre la certitude de gagner et la certitude de perdre. Mais l'incertitude de gagner est proportionnée à la certitude de ce qu'on hasarde, selon la proportion des hasards de gain et de perte; et de là vient que, s'il y a autant de hasards d'un côté que de l'autre, la partie

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