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pur, de naif se révèle dans un long roman intitulé : Fanette, simple histoire d'une fille des champs, où, sauf le dénoûment invraisemblable et trop romanesque, la plupart des détails semblent reproduits d'après nature. Mais il est aisé de voir, dans cet ouvrage, la trace d'une main inexpérimentée, peu habile aux choses de l'art, peu versée dans les secrets de la composition, peu familiarisée avec les exigences du goût.

Messieurs, il est au cœur de l'homme un sentiment. inaltérable et profond : à travers les plus lointains souvenirs de son enfance, il entrevoit encore, penchée, attentive auprès de son berceau, souriant ou pleurant avec lui, souffrant de ses souffrances et vivant de sa vie, une femme qui long-temps fut, au monde, le seul objet de son amour et de sa tyrannie. Cette femme, esclave volontaire et toujours soumise, infatigable dans son labeur, heureuse dans tous les sacrifices, avait au front de sublimes rayonnements et s'embellissait d'une céleste transfiguration, lorsqu'au milieu de ces douleurs sans nom, léguées à la race humaine, elle mit au monde, en pleurant de joie, l'enfant bien-aimé, le fruit béni de ses entrailles!

Depuis, elle n'a cessé de lui prodiguer toutes les tendresses et tous les dévouements. Tout ce qu'il y a de noble et d'élevé dans son cœur ; tous ces germes du bien qui languissent, parfois, mais qui reprennent vie aux suprêmes moments; tout ce que la religion et l'honneur ont de plus beau; tout ce que l'âme a de plus délicat, tout ce que l'amour a de plus saint, dans son immense et divine acception.... son âme enfin, tout entière, c'est à cette femme qu'il la doit.

Si, plus tard, les lois inexorables de la nature ont rompu le lien vivant de ces saintes tendresses, leur souvenir reste immortel, comme la vérité de ces beaux vers de Florian :

Le vieillard qui va perdre un reste de lumière,
Retrouve encor des pleurs en parlant de sa mère.

Aussi, c'est avec une sympa'hique émotion que nous avons apprécié les intentions du poète, probablement bien jeune encore, dont l'inexpérience a trahi la pieuse volonté dans le poème intitulé la Mère. Mais si les palmes académiques lui manquent, il trouvera dans son coeur une récompense plus douce que les nôtres, celle d'avoir fait errer un sourire sur les lèvres maternelles, ou si, hélas! ces lèvres ne sourient plus, d'avoir un instant réchauffé, dans sa froide immobilité, le cœur qui lui donna tant d'amour!

Nous vous parlerons peu d'une légende orientale intitulée la Potion, et qui tend à justifier son épigraphe : «< Dieu a fait les nations guérissables. » L'auteur voudrait infuser à l'Orient corrompu le sang plus pur de l'Occident, et substituer à la loi de Mahomet la foi civilisatrice du Christ, de même que, suivant la légende, pour guérir le Sultan malade, on a transporté dans ses veines taries le sang vigoureux et jeune de trois de ses plus belles épouses.

Les Contrastes ou le Secret de Dieu, poème dialogué, tend, comme le précédent, à un but éminemment moral; mais il ne prend pas pour y parvenir les routes fleuries du sérail avec les tableaux, quelquefois un peu nus, qu'on

:

y rencontre c'est un dialogue entre maitre Gros-Jean et son curé. Nous n'avons pas les doutes du madré campagnard, et nous sommes fort édifiés des raisonnements de son pasteur. Mais, nous eussions préféré un bon sermon en prose, à des vers qui ont oublié d'être poétiques.

Les législateurs ne sont point infaillibles et le temps, dans son grand œuvre, efface bien souvent leurs décrets. Si la constitution du Parnasse n'était vouée, sans défense, aux plus insolentes violations, on en effacerait sans doute cette erreur de Boileau :

Un sonnet sans défauts vaut seul un long poème.

L'un de nos concurrents s'est abrité sous l'autorité de cette décision, dont il a fait son épigraphe, pour nous adresser quinze sonnets. Ils ne sont pas sans défauts; mais nous aimons à reconnaitre que quelques-uns d'entre eux ne manquent pas d'un certain mérite.

Nous arrivons à un ouvrage qui pourrait bien être une épave du concours de Macon, où l'on avait proposé, pour le prix de poésie, le sujet national de ce vaillant Gaulois qui lutta contre César, et sut éclairer d'une trace lumineuse l'abaissement de nos défaites. J'ai nommé Vercingetoria: Quelques belles strophes, un noble élan de patriotisme signalent parfois ce poème dont l'ensemble n'est pas à la hauteur d'un sujet si magnifique. J'aimerais pourtant à vous signaler quelques lignes du portrait de notre glorieux ancêtre :

Au mépris du danger il joignait la prudence;
A l'égal de César il avait la constance,

L'éloquence du fer et celle de la voix;
Rival, souvent heureux, de ce grand capitaine,
Il balança long-temps la puissance romaine,
Politique, orateur et soldat à la fois.

Plus loin, au milieu des douleurs de la captivité et de la mort, le poète montre son héros presque consolé :

Qui soutint son grand cœur?

C'est qu'une voix d'en haut lui criait : « espérance!
La Gaule reprendra sous le beau nom de France,
Par l'idée et le fer, son rôle de vainqueur! »

Il y a vingt ans, alors que ses juvéniles adorations s'adressaient à la muse, sous l'empire d'une admiration bien légitime, le poète qui nous fait part aujourd'hui de son réveil, avait senti tressaillir en lui toutes les fibres du cœur, aux accords puissants et mélodieux du violon de Thérésa Milanollo. Nous aussi, nous l'avons entendue cette enfant véritablement sublime; nous aussi, nous avons gardé, vivace et profond, le souvenir de ses regards ardents, de son pâle visage et de ses accents inspirés. Nous sommes donc heureux de nous associer à cet hommage du poète envers la grande artiste. Ils étaient l'un et l'autre dignes de se comprendre, car la musique et la poésie sont deux charmantes sœurs, et l'auteur des quatre pièces intitulées Au Bord du Danube, où vit le souvenir de Thérésa Milanollo, est assurément de la famille de ces chantres harmonieux qu'inspirent les pâles clartés de la nuit et qui exhalent leur plainte mélancolique aux échos silencieux et attendris.

Il nous a semblé trouver en lui certaines conson

nances, et comme un air d'étroite parenté avec le lauréat de notre concours, bien que, moins parfaites que le volume dont nous aurons tout à l'heure à vous entretenir, les Bords du Danube n'aient fait qu'approcher, sans l'atteindre, de la supériorité que vous exigez pour justifier vos récompenses.

Mesdames, si l'on vous disait que la vieillesse avec ses blancs cheveux et ses rides que la beauté, dit-on, redoute par-dessus tout, est la période la plus heureuse de la vie, et constitue, par rapport aux autres, celle qu'on peut appeler par excellence l'âge d'or, vous vous récrieriez sans doute, et le vilain mot grec de paradoxe sortirait très-certainement de vos lèvres roses et dédaigneuses. C'est pourtant la thèse que s'est donnée l'un de nos concurrents, dont la parole alerte et facile, trop abondante, ce semble, et qui aurait parfois besoin d'être plus chatiée, révèle pourtant un athlète avec lequel on doit compter, et qui serait, ma foi, fort capable de nous convertir à son opinion. Mais il n'a rempli que la moitié de sa tâche, dans deux chants qui correspondent à l'âge de fer, pour l'enfance, et à l'âge d'airain pour la jeunesse! La jeunesse que les poètes comparent si volontiers au printemps, dont elle a toute la fraîcheur, toutes les promesses, hélas aussi ! et toute la brièveté ! Nous avons tous, ici, franchi les derniers seuils qui nous tenaient à elle; pour beaucoup, ses rêves se sont évanouis en laissant de vains regrets! Puisse l'année prochaine, l'auteur qui nous promet les derniers chants de son poème, nous démontrer que dans l'âge mûr et dans la vieillesse, nous possédons en réalité, tout ce que la trompeuse n'a pas sù nous donner. Mais pour arriver à

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