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M. Gosse d'Ostrel, ancien député général des mêmes Etats à la Cour.

Si les époux n'étaient, ni l'un ni l'autre, nés en Artois, ils y fixèrent résolument leur domicile, en devenant propriétaires, dans la Basse-Ville, d'une des maisons bâties sur les terrains du pré Cagnon, d'après les plans de l'architecte Beffara; maison dans laquelle naquit, vécut et mourut leur fils unique, y ayant sans doute puisé cette affection pour sa ville natale qui ne se démentit jamais et qui ne s'éteignit qu'avec lui.

Le jeune Harbaville n'avait que 13 ans, lorsqu'il perdit son père (15 mars 1804). Sans nous étendre sur les soins dont fut entourée son enfance, nous ne pouvons passer sous silence le souvenir plein de gratitude qu'avait conservé notre collègue de M. l'abbé Roux ('), qui lui donna les premières leçons et lui enseigna les premiers éléments de grammaire.

Nous avons entendu nous-même M. Harbaville se féliciter, en outre, du service qu'on lui avait rendu, en faisant choix du Lycée de Douai, à peine ouvert dans les bâtiments de l'ancien collége d'Anchin, pour lui procurer une instruction solide et vraiment classique.

Ses études terminées, il venait de rentrer à Arras, lorsque sa mère lui fut enlevée (30 juin 1811).

Plus libre en apparence de suivre ses penchants, quels qu'ils fussent, au risque d'abuser de sa précoce indé

(1) M. Ambroise-Joseph Roux, chanoine réulier de l'ordre de Saint-Augustin, de la congrégation d'Arrouaise, ancien profès de l'abbaye de Chocques, nommé curé de Verquin, le 5 frimaire, an XI, et décédé en octobre 1825, était né le 13 mars 1747.

pendance, le jeune homme donna une première preuve de la solidité de son jugement et de la fermeté de son caractère, en préférant le travail aux futiles passe-temps qui séduisent et entraînent tant d'autres.

On le vit s'astreindre, pendant quelques années, à suivre l'étude de Me Arnouts, notaire, père de l'un de ses plus chers condisciples du Lycée de Douai. Cet emploi si raisonnable de ses loisirs fut heureux pour lui sous plus d'un rapport. Ce fut là, qu'à défaut d'Ecole des Chartes, il s'initia à l'art de déchiffrer les parchemins. en compulsant les vieux titres, et se familiarisa ainsi avec les textes des manuscrits des diverses époques: en attendant que, devenu maître à son tour, il pùt scruter nos archives, en recueillir et en divulguer, au profit de ses compatriotes. les plus secrets documents.

Comme distraction à ces travaux sérieux, le jeune Harbaville continuait à se livrer à la culture des lettres et avait réussi à se faire apprécier dans les salons, dans les réunions de la société, alors, comme toujours, très-élégante et fort amie des plaisirs.

En 1813, il s'unissait à l'une des familles les plus considérées de l'Artois. Me De Beugny de Pommera lui fit goûter, non seulement les douceurs d'un intérieur dans la vie de famille, mais, de plus, les charmes de la campagne, dans sa propriété de Sainte-Marguerite, douce retraite, objet de leur commune affection.

A la rentrée en France des descendants de l'antique dynastie des Bourbons, nous voyons le jeune Harbaville débuter, en 1814, dans la vie active de citoyen, comme grenadier dans la garde nationale d'Arras. Il recevait bientôt le brevet et la décoration du Lys, dédaignée de

puis; mais que plusieurs de nous ont portée et ont vu porter par des maréchaux de France, comme leurs successeurs du second empire s'honorent de placer, sur leur poitrine, la médaille militaire du simple soldat, à côté du grand cordon de la légion d'honneur.

M. Harbaville avait acquis plus de droit que d'autres à cette distinction trop prodiguée dès lors, car il fut chargé des fonctions délicates de secrétaire du conseil de discipline de la deuxième cohorte de cette même garde. Il est présumable qu'il s'en acquitta de manière à faire pressentir qu'il pourrait rendre de plus importants services; on fit bientôt de nouveaux appels à son zèle.

M. Taranget, l'éminent recteur de l'Académie de Douai, avait été à même de distinguer le brillant élève, le lauréat du lycée de cette ville: il le désigna pour faire partie du comité gratuit et de charité du canton d'Arras. Le président, le vénérable abbé Rambure applaudit avec chaleur à ce choix « désiré, disait-il, par tous les membres du comité. »>

On fut ainsi de plus en plus à portée de reconnaître, chez ce jeune homme, qui, dans l'état d'indépendance où le plaçaient sa fortune personnelle et son mariage, eût pu jouir des douceurs de l'oisiveté: le goût de l'étude favorisé par une vive intelligence, une instruction précoce, une maturité au-dessus de son âge; ne nous étonnons pas si des succès de société dus à ses premiers essais littéraires lui assignèrent promptement un rang élevé dans l'estime de ses concitoyens.

Aussi fut-il jugé « digne de coopérer aux travaux ho»> norables qui, n'ayant que l'utilité publique pour but, >> avaient motivé le rétablissement de l'ancienne Acadé» mie d'Arras. » (Lettre d'avis du secrétaire perpétuel.)

A l'époque (28 avril 1820) où M. Harbaville fut élu membre résidant, sur la présentation de MM. Thellier de Sars, Salentin et Martin, l'usage, ni la règle, ne s'étaient encore introduits de faire, lors de sa réception, un discours de remercîment à la compagnie. Le nouvel associé pouvait donc éviter de s'engager (nous allions dire de se compromettre) par des protestations de zèle et de loyal concours, trop souvent oubliées peu après. Loin d'adopter cette prudente réserve, il consignait avec empressement dans une lettre officielle, ses sentiments de reconnaissance, et pénétré des devoirs qu'elle lui imposait, «< il acceptait » la tâche honorable de partager les utiles travaux de » l'Académie. » Nous sommes tous témoins de sa fidélité à remplir cet engagement, de ses efforts continus pour justifier les espérances qu'on avait fondées sur lui.

Les premiers travaux de M Harbaville semblaient révéler des penchants fort disparates, en apparence, mais, en réalité, susceptibles d'alliance, où l'on pouvait reconnaître la part de l'imagination séduite par les charmes de la poésie et la part de la raison comprenant l'utilité hors ligne du premier des arts, de l'agriculture.

La surabondance de sève, l'effervescence du sang qui jettent le trouble, aux jours de la jeunesse, dans les riches natures, trouvent un puissant dérivatif, s'allègent et se calment, peu à peu, au moyen des effusions de la veine poétique; il en fut ainsi pour M. Harbaville.

Il n'était point encore inscrit sur les listes de l'Académie, qu'il lui offrait et qu'elle insérait dans le tome II de ses mémoires l'Ode sur les malheurs de Parga. N'étaitce point payer le premier tribut de sa muse à la Grèce, à la patrie de nos premiers rêves, selon l'expression

pittoresque de lord Biron? C'était, en outre, une noble protestation....

Plusieurs de nos collègues se rappelleront l'émotion, l'indignation qu'excita dans toute l'Europe et surtout en notre France, la vente faite aux Turcs, par le gouvernement d'un peuple qui se dit chrétien, d'une peuplade chrétienne, seule restée libre parmi les Grecs.

Le poète partage et traduit cette impression publique, dans les vers suivants :

...

Dans le soudain transport, qui m'agite et m'inspire,
Pour célébrer Parga, muse accorde ma lyre...

Peins-moi ses habitants, fugitifs, éperdus,
Bannis de leur patrie... et par l'Anglais avare,
A l'Ottoman barbare

Indignement vendus :

Où sont-ils, ces héros, admirés d'âge en âge,
Modèles de sagesse, exemples de courage?

Ils dorment dans la tombe et la Grèce est en deuil...

Noble berceau des arts, des muses, de la gloire,
Terre de souvenirs que retrace l'histoire,
Tu gémis de porter d'avides conquérants.

Qu'un espoir consolant vous apparaisse encore,
De jours plus fortunés je vois briller l'aurore,
Vos tyrans confondus expieront vos malheurs
Et la triste Parga, trahie, abandonnée,
Dans l'Europe indignée,

Trouvera des vengeurs.

Notons que ces vers prophétiques étaient inspirés au jeune poète six années avant la bataille de Navarin,

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