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des biens terrestres est un motif de frayeur et d'humiliation, et non de joie et de vanité.

Dans la cérémonie de ce jour, Jésus-Christ nous apprend à combattre un autre de nos vices, auquel nous sommes fortement attachés, et qui est le principe d'un grand nombre de nos fautes, la sensualité; passion aussi commune qu'elle est funeste, qui souille la terre, et qui peuple l'enfer. Il n'est presque personne qui n'en soit, ou plus ou moins entaché. L'amour des voluptés les plus criminelles est tellement répandu dans la classe supérieure, qu'on peut le regarder comme universel. Peu en rougissent; beaucoup en font gloire : et le péché honteux, que la simple pudeur naturelle devrait engager à cacher, presque partout se montre effrontément. Parmi ceux que des passions moins vives, qu'un naturel plus heureux, que des réflexions plus sensées, et surtout que des grâces divines plus abondantes ou mieux employées, préservent de ce détestable vice, combien en voit-on qui ne sont occupés qu'à se procurer les aisances et les commodités de la société ! C'est un des défauts que le monde reproche le plus communément, et, il faut l'avouer, avec le plus de fondement, aux dévots. Il semblerait, à voir la vie molle et sensuelle de beaucoup de personnes qui prétendent à ce titre, et qu'on ne fait pas de difficulté d'en honorer, que le secret de la dévotion consiste à allier les douceurs de la vie avec la sévérité évangélique ; à prendre des préceptes chrétiens tout ce qui ne gêne pas, et des usages mondains tout ce qui plaît; à adoucir ce que la loi divine a de rude, et à sanctifier ce que la vie mondaine a de doux, à s'abstenir des vices grossiers, mais à ne pas se charger des vertus pénibles; à être tout à la fois à Dieu par des pratiques peu onéreuses, et au monde par les jouissances agréables.

Ce n'est pas la religion que Jésus-Christ est venu apporter à la terre. Plus âgé, il portera la loi de la mortification; naissant, il commence à l'observer. Ce qu'il prescrira un jour par ses paroles, il le prêche aujour

d'hui par son exemple. A peine est-il dans son lruitième jour, et déjà le voilà livré à une opération douloureuse. H entre dans la carrière des peines et des souffrances, qu'il doit si laborieusement parcourir. Il verse aujourd'hui les premières gouttes de ce sang qu'il répandra tout entier. C'est ici le commencement de sa passion. Ce n'était pas à la circoncision de son Fils que Dieu avait attaché le salut du genre humain. Le peu de sang que Jésus-Christ répand aujourd'hui ne suffisait pas dans les décrets éternels pour la rédemption du monde. Mais le terrible sacrifice qui ne devait se consommer que sur le Calvaire, commence dans la circoncision. Quelle que soit la distance qui sépare ces deux jours, ils se réunissent dans le même but. La circoncision et la croix ne forment qu'un seul mystère. Et en quoi donc consiste cette intime connexion entre les deux actions, dont l'une commence, et l'autre termine la vie mortelle de notre Rédempteur? Ce ne sont point ici des idées particulières, de vaines spéculations : c'est la doctrine qu'enseigne l'apôtre S. Paul, éclairé par le Saint-Esprit. Je déclare, disait-il à ses disciples de Galatie, que tout homme qui se fait circoncire se rend débiteur de l'observation entière de la loi (1). L'expression est générale ; JésusChrist n'en est pas excepté. En se soumettant à la circoncision, il prenait l'engagement d'observer littéralement tout ce que la loi lui prescrivait. Mais les obligations de l'Homme-Dieu, par rapport à la loi, n'étaient pas les mêmes que celles des autres Juifs! il venait comme eux accomplir la loi, mais dans un sens différent d'eux; il venait l'accomplir en la terminant. Il était, comme le dit encore S. Paul, la fin de la loi (2). Il en était la fin pour la consommation de son sacrifice. La loi devait expirer avec lui sur la croix. Ainsi l'accomplissement de la loi était par rapport à lui, sa mort sanglante.

(1) Testificor autem rursus omni homini circumcidenti se, quoniam debitor est universæ legis faciendæ. Galat. v, 3.

(2) Finis enim legis, Christus. om. x, 4.

En s'engageant, sous le couteau de la circoncision, à remplir tout ce que la loi lui imposait, il s'engageait aux affreux tourments de sa passion. Sa circoncision est une acceptation authentique et solennelle de la mort de la croix. Il vient se présenter à cette cérémonie ayant devant les yeux les suites terribles auxquelles elle le dévoue: et comme elle est le prélude de la passion, elle en est aussi l'engagement. Jésus-Christ y devient une victime dévouée au sacrifice, déjà frappée, déjà sanglante, et sur qui le dernier coup est suspendu. Le grand mystère de la rédemption du monde, ce chefd'œuvre de la justice et de l'amour d'un Dieu, est commencé, et est aussi avancé que le permet l'enfance du Rédempteur.

C'est en mettant fin à la loi, que Jésus-Christ l'accomplit; mais en la terminant, il en établit une nouvelle. En renversant la Synagogue, il élève l'Eglise. Elle devait tomber, cette loi toute figurative, lorsque les figures qu'elle contenait seraient réalisées. Une loi adoptée à un seul pays devenait insuffisante, lorsque le descendant de Jessé, élevé pour être un signe à tous les peuples, serait obéi et invoqué par eux (1). Une loi, dont les principales dispositions tendaient à séparer la race d'Abraham, et à l'empêcher de se confondre avec les nations, n'avait plus d'objet, quand toutes les nations bénies dans la race d'Abraham seraient réunies en une seule, devenue tout entière le peuple de Dieu (2). Dès le temps où il publiait au nom de Dieu cette loi, Moïse en annonçait le terme aux Israélites. Il leur déclarait dès-lors, qu'un jour le Seigneur susciterait dans leur nation, et du milieu de leurs frères, un autre prophète; et il leur ordonnait de l'écouter (3). Une suite

(1) In die illa radix Jésse, qui stat in signum populorum, ipsum gentes deprecabantur. Isa. xi, 10.

(2) Et benedicentar in semine tuo omnes gentes terræ. Genes.

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18.

(3) Prophetam de gente tua, et de fratribus tuis.... suscitabit tibi Dominus Deus tuus: ipsum audies. Deut. xvIII, 15.

d'oracles préparait les Juifs à voir cette abrogation de leur loi. Jérémie avait annoncé aux maisons d'Israël et de Juda qu'il viendrait des jours où Dieu ferait avec elles un pacte nouveau, différent de l'ancien; un pacte qui serait une loi donnée à leur intérieur, et gravée dans leurs cœurs (1). David avait prédit la fondation d'un sacerdoce, qui serait selon l'ordre de Melchisédech (2). Malachie avait prophétisé, avec la fin des sacrifices actuels, l'immolation et l'oblation universelle en tout lieu, et dans toute nation, d'une victime pure (3). Daniel avait fixé l'époque où le Christ ayant été mis à mort, son peuple qui l'aurait méconnu ne serait plus, et où la ville sainte serait détruite, ainsi que son sanctuaire, par un peuple qui devait venir avec son chef (4). Les docteurs de la Synagogue étaient les dépositaires de cette loi, mais ils ne la connaissaient pas; ils l'enseignaient, mais ils ne la comprenaient pas. C'est le grand Apôtre, inspiré par l'Esprit saint, qui nous en donne l'intelligence. Il développe tout le plan de l'Ancien-Testament, en disant que tout ce qui arrivait aux Israélites était figuratif (5); que leur loi ne présentait que l'ombre des biens futurs, et n'en don

(1) Ecce dies venient, dicit Dominus; et feriam domui Israel et domui Juda fœdus novum : non secundum pactum, quod pepigi cum patribus eorum.... sed hoc erit pactum, quod feriam cum domo Israel. Post dies illos dicit Dominus: Dabo legem in visceribus eorum, et in corde eorum scribam eam. Jerem. xxx1, 31, 32 et 33.

(2) Juravit Dominus, et non pœnitebit eum; ta es sacerdos in æternum secundum ordinem Melchisedech. Psalm. cix, 4.

(3) Non est mihi voluntas in vobis, dicit Dominus exercituum : et manus non suscipiam de manu vestra. Ab ortu enim solis usque ad occasum, magnum est nomen meam in gentibus, et in omni loco sacrificatur, et offertur nomini meo oblatio munda. Malach. 1,

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(4) Post hebdomades sexaginta duas occidetur Christus et non erit ejus populus, qui eum negaturus est. Et civitatem, et sanctuarium dissipabit populus cum duce venturo. Daniel. 1x, 26.

(5) Hæc autem omnia in figura contingebant illis. I ad Cor. 1,

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nait pas la réalité (1). Avec cette maxime tout s'explique, tout devient clair dans l'ancienne alliance. Le peuple hébreu n'avait été choisi, formé, conservé, que pour donner au monde le Messie. Tout, dans son gouvernement, dans ses mœurs, dans sa religion, était relatif au Messie. Non-seulement on voit l'ensemble de l'économie Mosaïque dirigé vers ce seul objet; mais en considérant toutes ses parties, on est frappé de leur rapport intime. La loi était la figure de la loi que devait donner le Messie; le sacerdoce, de son sacerdoce; les sacrifices, de son sacrifice; les cérémonies, de ses sacrements. Tous les grands hommes d'Israel sont ses précurseurs. Dans les principaux traits de leur vie, sont tracées d'avance et annoncées les actions du Messie. Parcourez, les livres de l'Ancien Testament à la main, toute la suite de l'histoire judaïque, vous ne trouverez pas un seul trait qui n'ait pour but le Messie, qui ne serve, ou à préparer sa venue, ou à le prédire, ou à le figurer. Il en était ainsi de la circoncision: comme tout le reste de la loi cérémonielle et civile, elle devait être abrogée; et pour le sentir, il suffit de remonter à son institution. Dieu l'avait prescrite à Abraham et à sa postérité, pour être un signe, renouvelé de génération en génération, de la promesse faite à ce patriarche. promesse était que de lui descendrait le libérateur du genre humain. Le libérateur arrivé, la promesse accomplie, le signe devient inutile. Quand ce qui avait été promis est exécuté, que sert d'en conserver la marque et le garant? Mais en étant abolie, comme le reste de la loi, la circoncision devait être remplacée. Considérons donc le divin Rédempteur comme le consommateur d'une loi, et le fondateur d'une autre nous le verrons, sous le premier rapport, abrogeant la circoncision légale qu'il reçoit; sous le second, établissant une circoncision bien plus parfaite dont il donne l'exemple.

Cette

(1) Umbram enim habens lex futurorum bonorum, non ipsam imaginem rerum. Ad Heb. x, 1.

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