diacre, un sous-diacre et un ou deux lecteurs, tous recommandables par leur âge et par leurs vertus, et qui n'y entreront que pour célébrer la messe. Les ouvriers ne seront admis qu'accompagnés du proviseur, et encore faudra-t-il que la mère l'ait su d'avance et l'ait permis. Le proviseur, lui-même, n'entrera jamais dans le monastère que dans les cas indispensables, et encore sera-t-il toujours accompagné de l'abbesse et d'une autre sœur des plus respectables. — Les dames du monde, les jeunes personnes ou autres femmes ayant l'habit laïque ne pourront non plus y être admises. promptement, et puissent reprendre leurs abstinences accoutumées. On leur donnera tout ce qui leur sera nécessaire, et comme c'est l'ordinaire de n'avoir pas de bon vin pour la communauté, l'abbesse aura soin d'en avoir de meilleur pour les malades et celles qui auraient une santé délicate. — Votre vêtement n'aura rien de remarquable. Vous ne devez pas chercher à plaire par vos habits, mais par vos vertus, ce qui convient mieux à votre profession. Les vêtements seront confectionnés dans la communauté. Ils seront simples et honnêtes; ils ne seront ni noirs ni d'une couleur éclatante, mais de laine blanche. « Comme la mère du monastère doit prendre soin du spirituel, avoir des rapports avec les personnes du dehors, tenir la correspondance et surveiller le temporel, la prieure aura la surveillance du vestiaire, et aura soin qu'il y ait toujours des vêtements pour les sœurs qui en auraient besoin. Vous n'userez jamais d'argenterie, et il n'y en aura dans le monastère que pour le ministère de l'oratoire. Les ornements de l'oratoire seront en laine. On n'y mettra ni tableaux, ni fleurs, parce qu'il ne doit rien y avoir dans le monastère qui puisse flatter les regards. Si on fait pour l'oratoire quelque présent dont l'usage est prohibé, on le vendra et on le mettra dans la basilique de Sainte-Marie. -- «Ayez toutes beaucoup de pudeur et de réserve dans vos regards. Si vous remarquez un peu de légèreté en quelqu'une de vos sœurs, reprenez-la secrètement. Si elle méprise votre avertissement, dites-le à la mère, et ne pensez pas être malveillante quand Yous agissez avec une intention droite. Vous seriez coupables, si, par votre silence, vous laissiez périr une de vos sœurs que la correction pouvait sauver. - Si une sœur, ce qu'à Dieu ne plaise! était tellement avancée dans le mal qu'elle reçut en cachette des lettres ou de petits présents, on devrait user d'indulgence et prier pour elle, si elle avouait sa faute avec candeur; mais elle devrait être sévèrement punie, si elle la niait, quoiqu'elle fût convaincue. «On punira de la même manière celle qui fera des présents ou écrira des lettres; seule ment, si une religieuse, par affection pour ses parents, voulait leur envoyer des eulogies, elle en demanderait la permission à la mère, et, si elle l'obtenait, 'elle les ferait remettre par les portières. Si une des sœurs commettait un vol ou se laissait aller à des injures, elle devrait recevoir la discipline en présence de toute la communauté. Une religieuse, qui aura mérité d'être excommuniée et séparée de la communauté, restera dans le lieu que l'abbesse lui aura désigné, jusqu'à ce qu'elle ait demandé pardon de sa taute. « Avant tout, et pour conserver intacte votre réputation, que jamais aucun homme n entre dans l'intérieur du monastère ou dans l'oratoire, excepté les évêques, le prov.seur de la communauté, un prêtre, un L'abbesse elle-même ne pourra aller au parloir sans être accompagnée de deux ou trois sœurs. Les évêques, les abbés et autres religieux recommandables par leur sainteté, seront admis dans l'oratoire pour y prier, s'ils le demandent. La porte du monastère devra être ouverte à certaines heures convenables, aux personnes qui voudraient rendre aux religieuses leurs devoirs de politesse. Jamais, ni dans le monastère, ni dehors, vous ne donnerez de repas aux évêques, aux abbés, aux moines, aux clercs, aux laïques, aux femmes portant l'habit séculier, ui même, au proviseur. Seulement, vous pourrez admettre à votre table, et encore très-rarement, les religieuses de la cité qui auront une grande réputation de vertu et honoreront votre monastère. Si cependant une femme venait de loin pour voir sa fille dans la communauté, on pourrait l'inviter à partager le repas des sœurs, si elle était pieuse et si l'abbesse y consentait. << Si on vient rendre visite à l'une des sœurs, en lui permettra d'aller au parloir, accompagnée de l'une des plus anciennes religieuses. On ne fera pas d'aumônes quotidiennes à la porte du monastère; si Dieu vous donne la faculté de secourir les pauvres, l'abbesse chargera le proviseur des aumônes du monastère. » S. Césaire termine sa règle par ces paroles: « Nous vous avions composé une règle dès la fondation de votre monastère, et nous avons été obligé plusieurs fois de la modifier. Mais après avoir fait l'expérience de ce que vous pouviez faire, nous avons fixé aujourd'hui définitivement ce que nous avons cru possible, raisonnable, utile à votre sanctification. Nous avons tellement adouci cette règle, que nous vous croyons capables, avec le secours de Dieu, de l'accomplir parfaitement. Nous vous conjurons, en présence de Dieu et de ses anges, de n'y jamais rien changer. » Après avoir composé cette règle, Césaire l'envoya au Pape Hormisdas qui l'approuva. CHAIR (MOUVEMENT DE LA). Voy. APPÉTITS, MORTIFICATION. CHAMPION (Pierre), Jésuite, né à Avranches, en Normandie, le 19 octobre 1631, entra dans la société à l'âge de vingt ans, et y professa les humanités. Il partit ensuite pour les missions d'Amérique, puis revint en France et mourut à Nantes le 28 juin 1701. Ses ouvrages ascétiques sont: 1° La vie et la doctrine spirituelle du P. Louis Lallemand, Jésuite. Paris, 1694, in-12.; - 2 La vie des fondateurs de retraites, etc. Nantes, 1698, in-12. Il a en outre publié les Lettres spirituelles et les Dialogues du P. Surin. (Voir ce nom.) - CHAPELETS. Ce sont plusieurs grains attachés les uns aux autres et qui servent à compter les pater et les ave qu'on récite en l'honneur de Dieu ou de la sainte Vierge. Dans la basse latinité, ils ont été nommés capillina, et chez les Italiens corona; ils contiennent cinq dizaines de grains et les rosaires en ont quinze. L'usage de réciter le chapelet n'est pas fort ancien. Quelques-uns le font remonter à Pierre l'Ermite; le rosaire fut institué par saint Dominique. Il y a un chapelet du Sauveur composé de trente-trois grains, à l'honneur des trentetrois ans que Notre-Seigneur a passé sur la terre; il a été imaginé par le P. Michel, de l'ordre des Camaldules. Ces divers instruments de dévotion ont été mis en usage afin qu'aucun travail de mémoire n'empêche les affections du cœur de monter vers Dieu avec la prière vocale. CHAPITRE. Un moyen qui contribue puissamment au bien de la vie religieuse et a la conservation de la discipline dans les monastères, c'est la célébration des chapitres. Là s'assemblent les supérieurs avec les religieux députés par les communautés, pour régler, corriger, modifier, décider tout ce qui peut concourir à l'avantage de la vie monastique et à la conservation de la discipline régulière. C'est dans ces chapitres que les fautes commises contre la règle sont punies par des peines régulières; que les supérieurs rendent compte de leur administration, et reçoivent une nouvelle institution ou sont maintenus dans leur charge; c'est là encore que sont discutés, examinés et éclaircis les points douteux de la règle. On comprend donc combien les chapitres sont utiles au bien de la vie monastique. Aussi leur institution date-t-elle de l'institution même des monastères. Saint Pacôme, qui avait fondé plusieurs communautés, réunissait chaque année les abbés et les supérieurs, traitait avec soin des affaires importantes de l'ordre, rétablissait la paix et l'union, quand elles étaient altérées; nommait des supérieurs pour maintenir la paix dans les monastères, etc., ainsi qu'on peut en juger par sa Règle, ch. 27. Le concile de Latran, de l'an 1215, ordonne de célébrer ces chapitres tous les quatre ans. Benoît XII prescrit également, en 1336, la tenue des chapitres généraux, provinciaux et particuliers. Les chapitres généraux sont ceux où s'assemblent les préfets de toutes les provinces, comme chez les Mendiants, et chez les religieux des ordres qui sont divisés en certaines congrégations. Les chapitres provinciaux, chez les Mendiants, sont ceux où se réunissent les préfets des monastères d'une province. Enfin les chapitres particuliers sont ceux qui ont lieu chaque semaine pour le bien de la discipline, dans les monastères bien réglés. Quant à la manière dont ces chapitres doivent être célébrés, il faut suivre en cela les constitutions de cha que ordre; ce qui importe le plus, c'est que ces réunions aient toujours pour but le bien seul de la religion. chanoine régulier de Sainte-Geneviève, et CHAPPONEL D'ANTESCOURS (Raimond), prieur-curé de Saint-Eloi de Roissy, s'est fait connaître par ses Recherches historiques sur l'ordre canonique. On a de lui un ouvrage ascétique intitulé: Examen des voies inlerieures, 1700, in-12. Il y prémunit ses lecteurs contre les illusions des quiétistes. Sa mort est arrivée en 1700. CHARITÉ. - La charité est une verlu théologique divinement infuse, par laquelle nous aimons Dieu pour lui-même et pardessus tout, et toutes les autres choses pour Dieu. 1° C'est une vertu; car la charité rend l'homme bon et ami de Dieu; elle est, d'après saint Paul, la vertu la plus excellente de toutes, puisqu'elle arrive jusqu'à Dieu, et qu'elle demeure en lui: Ces trois vertus, la sent; mais la charité est la plus excellente foi, l'espérance et la charité demeurent à prédes trois (I Cor. xIII, 13). -2° Théologique divinement infuse, selon ces paroles: L'amour de Dieu a été répandu dans nos cœurs par le Saint-Esprit qui nous a été donné (Rom. v, 5). -3° Pour lui-même, c'est-à-dire, à cause de ses perfections. 4° Et par-dessus tout, c'est-à-dire au-dessus de toutes les choses créées.-5° Et tout le reste pour Dieu.. a En effet, dit saint Augustin, nous aimons Dieu et le prochain; mais nous aimons. Dieu pour lui-même, et nous-mêmes et le prochain pour Dieu.» (L. VHI De Trin., c. 8.) Ces deux amours, dit saint Grégoire le Grand, sont deux anneaux et une seule chaîne, deux actions et une seule vertu, deux œuvres et une seule charité. » (Moral;, 1. vII, fait aimer quelqu'un est identique à celui c. 10.) Et assurément le sentiment qui nous qui nous fait aimer son image. Il y a diverses sortes de charité. Elle est ou habituelle, et se définit l'habitude infuse par elle-même des actes de charité, rendant capable d'une manière permanente de produire des actes de charité; ou actuelle, et se définit, selon saint Augustin, le mouvement même de l'ame, pour jouir de Dieu à cause de lui-même, et de soi-même et du prochain à cause de Dieu; ou appréciative; c'est celle qui fait préférer Dieu à toutes les créatures; ou intensive; c'est celle qui non-seulement aime Dieu par dessus tout, mais de plus produit pour luimême certains degrés de ferveur, par un vif el puissant effort du cœur et de la volonté. La charité est encore affective, quand elle ne réside que dans le cœur, et effective quand elle se manifeste par des œuvres. Il est encore une autre division vulgaire, que nous croyons devoir mentionner ici. Quand elle se rapporte à Dieu, la charité s'appelle charité envers Dicu; et quand elle regarde le pros. C'est Dieu qui est l'objet matériel premier de la charité, selon ces paroles: Vous aimerez le Seigneur votre Dieu, voilà le premier et le plus grand commandement (Matth.xxII); l'objet matériel secondaire, c'est nous-mêmes, et notre prochain. Car c'est le propre de l'amitié parfaite de ne pas aimer seulement les personnes avec lesquelles on est en commerce d'amitié, mais aussi celles qui sont liées avec nos amis. Or les créatures intellectuelles, capables de la béatitude, sont, pour ainsi dire, en relations intimes avec Dieu. L'objet formel et le motif, c'est la bonté divine, en tant qu'aimable en elle-même et pour elle-même. De là nous voyons que l'amour de charité diffère de l'amour de concupiscence, en ce qu'ils ont un motif différent. La charité est supérieure à toutes les autres vertus; elle peut toujours s'accroître, et l'acte de charité nous est de grave obligation. Saint Thomas même enseigne (2-2, q. 24, a. 8) que la charité peut être parfaite en celte vie, soit alors que l'homme met tous ses soins à ne s'oceuper que de Dieu et des choses divines, en négligeant tout le reste, autant que le comportent les besoins de cette vie; cette perfection n'est pas commune à tous ceux qui ont la charité; soit alors qu'il place habituellement son cœur tout entier en Dieu, de manière à n'avoir aucune pensée, aucun vouloir contraire à l'amour divin : cette perfection convient à tous ceux qui ont la charité. Saint Thomas, saint Bernard et saint Bonaventure nous donnent les différents degrés de la charité envers Dieu. 1° Languir utilement: Je languis d'amour (Cant. 11, 5); 2° Chercher Dieu sans cesse: Cherchez le Sei gneur et fortifiez-vous (Ps. CIV, 4); 3° agir sans relâche Jacob servit pour Rachel, et tout ce temps lui paraissait peu de chose, à cause de la grandeur de son amour (Gen. XXIX, 20). 4° Tout supporter avec un courage infatigable: Heureux ceux qui souffrent persécution pour la justice. (Matth. v," 10). 5° Désirer avec impatience: Mon âme désire d'entrer dans la maison du Seigneur, et elle est presque en défaillance (Ps. LXXXIII, 3). 6° Courir avec empressement : J'ai couru dans la voie de vos commandements, lorsque vous avez élargi mon cœur (Ps. CXVIII, 32); 7° Montrer une énergie pleine d'audace: Qu'y a-t-il pour moi dans le ciel? et que désiré-je sur la terre, sinon vous, mon Dieu! Ma chair et mon cœur ont été dans la défaillance, 6 Dieu! qui êtes le Dieu de mon cœur et mon partage pour toute l'éternité ( Ps. LXXII, 25 et 26). 8° Lier cet amour par des liens indissolubles: Jésus-Christ est toute ma vie (Phil. 1, 21); 9° Brûler d'une douce ardeur Mon cœur s'est échauffé au dedans de moi (Ps. xxxvIII, 4); 10° Une ressemblance compiète avec Dieu, autant du moins qu'il est permis à la créature icibas: C'est ainsi que vous deviendrez participants de la nature divine (II Petr. 1, 4). C'est par ces différents degrés que l'homme devient le principe des opérations surnaturelles et moralement parfaites, en raison desquelles il est assimilé à la manière surnaturelle d'agir de la nature divine, et il se détourne des œuvres de concupiscence et de corruption. 1° L'exercice de la charité envers Dieu est un des meilleurs moyens d'avancer dans la perfection. On le prouve : 1° par l'Ecriture sainte, qui fait surtout consister la perfection chrétienne, dans la charité. Et au-dessus de tout cela (c'est-à-dire, des autres vertus, que l'Apôtre venait de recommander), ayez la charité, qui est le lien de la perfection (Coloss. 1, 14). Voici le premier et le plus grand commandemeni: Vous aimerez le Seigneur votre Dieu de tout votre cœur, de toute votre âme et de tout votre esprit (Matth. XXII, 37). Enfin, c'est par la charité que Dieu habite en nous: Dieu est la charité, et celui qui demeure dans la charité demeure en Dieu et Dieu en lui (I Joan. iv, 16). La charité est donc absolument nécessaire pour l'avancement spirituel. 2° Par les saints Pères. «Comme la cupidité est la racine de tous les maux, de même la charité est la racine de tous les biens.» (S. AUGUSTIN, Serm. 39, De Temp.)-« Notre cœur est l'autel de Dieu, sur lequel nous devons toujours entretenir une flamme ardente; car il est nécessaire d'allumer sans cesse à ce feu la flamme de la charité pour le Seigneur.» (S. GRÉGOire, 1. XXXIV Mor., c. 7.) — « Dieu veut que nous le craignions comme notre Seigneur, que nous l'honorions comme notre Père, que nous l'aimions comme notre époux. Parmi ces obligations, quelle est la plus importante? C'est l'amour..... A Dieu seul l'honneur et la gloire; mais Dieu n'accep tera ni l'un ni l'autre, s'ils ne se sont rendus agréables par le miel de l'amour.» (S. BERNARD, serni. 83, in Cant.) 3° Par la raison. D'abord la perfection consiste principalement dans la charité envers Dieu, et cette charité, qui forme le plus grand précepte, est la reine de toutes les autres vertus. Ensuite sans elle nous ne pouvons rien, pas même acquérir le moinmême je parlerais le langage des hommes et dre mérite pour la vie éternelle. Car, quand des anges.... si je n'ai pas la charité, tout cela m'est inutile. (I Cor. xi, 1.) Enfin parmi toutes les vertus, la charité est celle qui se rapporte plus parfaitement à Dieu : elle réside et repose en lui. Les saints Pères et les écrivains ascétiques nous indiquent les différents motifs d'aimer Dieu, tirés de la souveraine bonté de Dieu, de l'amour qu'il nous porte, des bienfaits de la création, de l'incarnation et de la rédemption, de notre conservation et de notre gloire future, etc. On les trouve dans saint Augustin, dans saint Thomas, saint Bonaventure et saint François. Nous avons dit qu'il faut aimer Dieu appréciativement par-dessus tout. Puisqu'il est aimable par-dessus tout, quoi de plus raisonnable de l'estimer plus que toute chose et de lui être si fermement attachés, non-seulement d'esprit ou spéculativement, mais aussi de corur ou pratiquement, que nous soyons prêts à tout perdre plutôt que son amitié? Car c'est là ce qu'exige de nous l'amour de tout notre cœur. Le Catéchisme romain dit que l'amour de Dieu doit étre preferé à toute chose, à tel point qu'il n'est pas permis de pécher, même pour sauver sa vie. C'est là la contrition efficace et véritable (De pænit. c. 5). Aussi ne faut-il pas écouter les théologiens de Louvain et quelques Français modernes, qui prétendent qu'une certaine intensité d'amour déterminée, outre la perfection appréciative, est nécessaire pour la contrition parfaite. C'est tout au plus si l'on peut admettre quelque intensité indéterminée dans quelque moindre degré, pour que la contrition soit appréciativement efficace; quoique la ferveur et l'intensité de l'amour devenant de plus en plus vive soit d'une très-grande utilité pour la perfection. Or, l'amour de Dieu, ainsi appréciativement parfait, doit renfermer la volonté efficace d'observer tous les préceptes divins: Celui-là m'aime qui garde mes commandements et qui les observe Joan.XIV, 21); volonté non pas efficace effectivement, soit qu'elle agisse ou qu'elle commande, de manière que toute action s'accomplisse en effet; mais efficace affectivement, c'est-à-dire, actuellement déterminée à remplir tous les préceptes dont l'observation se présentera, et par suite de cette détermination habituelle, refusant son consentement à tout grave péché. C'est ce que doit nous procurer la considération de la grandeur de Dieu, l'affermissement de notre espérance en Dieu, d'humbles prières, la mortification et l'abnégation de soi-même. Bien qu'il soit louable pour les âmes parfaites de descendre à un cas particulier, comme de souffrir plutôt le martyre que de pécher, ce qui indique le plus parfait amour ae Dieu, cependaut pour les faibles, dit saint Thomas (Quodlib. 1, c. 9), cette application particulière de l'amour a quelque chose de difficile qui n'est ni nécessaire ni convenable; à moins que, comme le remarque Louis Dupont (t. I Christ. perf., c. 3), il ne s'agisse de tentations sur des choses qui se présentent fréquemment et qui ont été antérieurement pour nous une cause de chute. Si alors le tentateur présente à notre esprit des cas extraordinaires et excessivement difficiles, il suffit en général de prendre la résolution d'être fidèle à Dieu, avec sa grâce, en toute circonstance, et de mépriser ainsi les menaces de notre ennemi furieux. Concluons de là qu'il peut bien se faire que l'amour de Dieu soit efficace affectivement sans l'être effectivement, parce que celui qui possède maintenant un amour affectif, peut bientôt, par suite de la fragilité. humaine, manquer à cet amour, et à son effet qui consiste dans l'observation des commandements. De sorte que, outre la grâce requise pour posséder l'amour de Dieu par-dessus tout, il faut une nouvelle grâce requise pour persévérer longtemps, sans commettre de faute grave. Toutefois tomber bientôt dans le péché mortel, ou y retomber fréquemment, est une marque que l'acte d'amour n'a pas été assez affectivement efficace, et que même il a manqué tout à fait; car il n'est pas naturel de voir le cœur de l'homme passer si facilement d'une extrémité à l'autre, de la plus profonde vénération pour Dieu au mépris de Dieu pour les choses les plus viles. Les actes d'amour de Dieu sont: 1° de se réjouir de tout son cœur de ce que Dieu est Dieu et tout notre bien, et de souhaiter qu'il soit reconnu, aimé, loué, adoré par toutes les créatures, et que sa volonté soit faite et glorifiée, parce qu'il est Dieu et qu'il est digne de tout amour. 2° De produire trèssouvent un acte d'amour de Dieu. 3° De faire présider l'amour de Dieu à tous les mouvements et les battements de notre cœur, à tous nos pas, toutes nos pensées, nos paroles, nos actions et nos œuvres, de manière à ne rechercher en toute chose que la gloire de Dieu, que sa volonté et son amour. 4° De chercher à faire connaître, aimer, et glorifier Dieu de tout le monde, et à faire accomplir sa volonté en toute chose. 5° De s'offrir tout entier à Dieu, de lui sacrifier sa vie et de verser tout son sang pour son amour. 6° D'avoir toujours Dieu présent à l'esprit, de vivre, de s'entretenir avec lui, de s'unir à lui, de le louer, de s'humilier soi-même, de lui rendre grâces, de le bénir, de l'adorer, de se résigner tout à fait à sa volonté, et d'accepter avec reconnaissance tout de sa main. 7° De déşirer souvent de jouir de Dieu dans la céJeste patrie. Ici se placent naturellement les erreurs du molinosisme et du quiétisme, dont on trouvera l'exposition à chacun de ces articles. Nous y renvoyons le lecteur. Le désir de jouir de Dieu est-il un acte de charité? Oui, quand il tend à jouir de Dieu pour la gloire de Dieu même. C'est bien plus, un acte de charité parfaite, parce que la jouissance de Dieu est la consommation de la charité. C'est pour cela que saint Augustin définit la charité un mouvement de l'âme à jouir de Dieu pour lui-même. De même c'est un acte de charité que de chérir la bonté divine, comme nous donnant les moyens d'accomplir la volonté de Dieu et de parvenir à notre fin dernière. En effet, c'est chérir Dieu à cause des bienfaits qu'il nous accorde, mais en ne considérant ces bienfaits que comme la communication de la bonté de Dieu; c'est enfin chérir la bonté de celui qui nous donne ses faveurs. La charité héroïque envers Dieu se reconnaît, selon Benoît XIV (De serv. Dei beatif. 1. 1, c. 23), par les actes extérieurs suivants : le zèle du culte et de l'honneur divin, le désir de mourir pour être entièrement réuni à Dieu, la joie intérieure manifestée extérieurement quand on parle de Dieu, la paix dans les adversités, la joie quand il arrive de souffrir quelque chose pour Dieu aussi saint Maxime loue la charité de saint Pierre, parce que, placé sur le navire, il considère le Seigneur, et conduit par son amour, descend dans la mer. (Hom.4.) Sainte Agnès répondit à un jeune homme qui l'aimait éperdument: Retirez-vous de moi.., je ne puis abandonner celui auquel je suis unie par les liens de la charité. Saint Jérôme nous propose un noble exemple d'amour de Dieu par-dessus tout, quand il nous montre sainte Paula sortant de la ville pour aller visiter les lieux saints, et méprisant l'amour de ses enfants à cause de son vif amour pour Dieu. (Ep. ad Eustoch.) Saint Laurent disait au tyran: Vous perdez votre temps....., vos flammes ne pourront vaincre la flamme de la charité de Jésus-Christ. (Saint LÉON, Serm. de saint Laur.) Quand ces actes sont produits fréquemment, d'une manière prompte et empressée, avec joie dans les difficultés, au péril de la vie ou des richesses, ils dénotent une charité héroïque, ainsi que le montre Laurea (in ш, t. II, d. 32), et procèdent du don de sagesse. La charité se reconnaît encore par la tension continuelle de l'esprit en Dieu, par de fréquents entretiens sur Dieu, par une considération continuelle de la bonté divine et des mystères de notre religion, surtout de la passion du Seigneur, par les méditations en vue d'exciter l'amour de Dieu, par un grand déplaisir de l'absence de Jésus-Christ, par une observation très-exacte de ses préceptes et de ses conseils, par les extases, les ravissements, et les autres signes extérieurs au moyen desquels Dieu daigne manifester parfois la charité intérieure de ses serviteurs. quitter envers vous; car si je ne suis pas digne de vous aimer, vous êtes, Seigneur, bien digne d'être aimé de moi... Je vous chérirai donc de toute manière, car ce que vous avez fait pour moi est sans mesure.... Il n'est pas bien grand, l'amour qui met une mesure dans son action ou qui cherche à trouver la mesure qu'il y doit mettre. Car la mesure de l'amour est de faire tout saus mesure, et sa raison de n'en examiner aucune. L'amour spirituel n'a ni loi, ni raison, ni mesure; il est lui-même la loi, la mesure et la raison supérieure. » (Serm, de S. Magdal.) La même vertu théologique de charité, qui mène à l'amour de Dieu, conduit aussi à l'amour du prochain; car il est dit : Nous avons reçu de Dieu ce précepte que celui qui aime Dieu, aime aussi son frère (1. Joan iv, 21). Quant à la raison et à la manière d'aimer le prochain, saint Thomas nous les enseigne. (2-2, p. 44, c. 7.) Laraison de l'aimer, c'est que nous devons aimer les autres avec charité, parce qu'ils sont nos proches, en tant qu'ils sont comme nous l'image naturelle de Dieu et aptes à sa gloire. La manière est que nous devons aimer notre prochain pour Dieu, comme nous devons nous aimer nous-mêmes pour Dieu; que nous ne devons nous réjouir que du bien et jamais du mal du prochain, et cela, non pour notre utilité ou notre plaisir, mais avec le même sentiment qui nous fait désirer le bien pour nous-mêmes: cet amour du prochain doit même s'étendre jusqu'à nos ennemis. C'est par la même espèce de charité qu'on aime Dieu et le prochain, Dieu pour luimême et le prochain pour Dieu, car la raison formelle d'aimer le prochain, c'est Dieu. Ce que nous devons aimer dans le prochain, c'est qu'il soit en Dieu et qu'il s'attache à lui comme à sa fin dernière, c'est par con à cause de sa bonté infinie. De sorte qu'ainsi le motif formel d'aimer le prochain, c'est la bonté infinie de Dieu aimable en lui et pour lui. Donc, si quelqu'un aime son prochain à cause des bienfaits qu'il en a reçus ou de quelques éclatantes qualités naturelles ou surnaturelles, ce n'est plus qu'un amour naturel, à moins que l'on ne considère ces qualités comme des participations de la perfection divine, et que l'on n'aime uniquement en elles que la perfection même de Dieu. Puisque la charité envers Dieu est abso-séquent que Dieu soit aimé, loué et glorifié lument nécessaire pour notre avancement spirituel, et que Dieu par lui-même est infiniment aimable, aimons-le donc autant qu'il nous est possible, efforçons-nous de l'aimer de tout notre cœur et d'un amour infini. En effet, comme dit saint Thomas: « Malgré tous vos efforts, vous ne pourrez jamais l'y renfermer, parce qu'il est plus grand que tout votre cœur.» (in Matth. XXII.) « Voulez-vous apprendre de moi, dit saint Bernard, pourquoi et comment on doit aimer Dieu ? Voici ma réponse : la cause de l'amour de Dieu, c'est Dieu; la manière de l'aimer, c'est de l'aimer sans mesure. »> (Tr. de dilig. Deo, c. 1.) « L'épouse court avec empressement, attirée par l'odeur de vos parfums, elle aime avec ardeur, et semble encore ne pas rendre assez d'amour pour celui qu'elle reçoit, même lorsqu'elle s'est livrée tout entière à l'amour.... Et en effet, comment reconnaître un amour si grand et si précieux? » (Ibid., c. 4.) Concluons donc avec saint Thomas de Villeneuve : «Seigneur, vous m'avez accordé le don de votre amour, accordez-moi de pouvoir m'ac Notre prochain le plus proche, c'est nousmêmes. L'homme doit donc s'aimer lui-même par un acte intérieur de charité. Dieu est digne, comme infiniment bon, d'être aimé par tous d'un amour de bienveillance; donc l'homme doit aussi exiger pour lui-même cet amour à cause de Dieu. Or, c'est là s'aimer soi-même d'un amour de charité. Donc, l'homme doit s'aimer lui-même pour Dieu. L'homme doit avoir pour lui-même plus de charité que pour le prochain. Car il est dit (Matth. xxII): Vous aimerez votre prochain comme vous même; cet amour de soi |