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l'ancienne adoration du soleil, il les supplanta adroi tement dans le cœur du peuple.

Ce fait, qui, si l'on considère la circonstance des troubles de la Grèce, devient extrêmement remarquable, et qui par lui-même est un très grand évènement", a à peine été recueilli des écrivains. Cependant les conséquences durent en être vivement senties. Si la science des hommes demeure en tout temps la même, et qu'il soit permis de raisonner de l'effet de passions, d'après la connoissance de ces passions, on peut hardiment conjecturer que l'insurrection de la Babylonie', peut-être même celle de l'Ionie, par des causes maintenant impossibles à découvrir, provinrent de ces innovations'. Qui sait jusqu'à quel degré elles n'influèrent point sur le sort des armes dans la guerre médique, et par conséquent sur la destinée des Perses? Ces réformes sacerdotales de Darius et de Joseph dans leurs états, presqu'au moment de l'abolition de la monarchie en Grèce et en France, présentent un des rapports les plus intéressants de l'histoire.

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a De tous les rapprochements présentés dans l'Essai, voilà le plus curieux et le fait historique le moins observé. (N. ED.)

1. HERODOT., lib. III, cap. CLX-CLXI.

2. Il est impossible qu'un ordre religieux de la plus haute antiquité, et qui gouvernoit le peuple à son gré, se laissât massacrer, proscrire, sans mettre en usage toutes les ressources de sa puissance. Et puisque Lucien nous apprend que de son temps les mages existoient dans tout leur éclat en Perse, il faut en conclure qu'ils obtinrent la victoire sur Darius. D'ailleurs, Pline et Arrien parlent des mages tout-puissants sous Xerxès, et de ce prince lui-même, comme d'un grand sectaire du second Zoroastre.

Ce dernier prince n'eut pas plus tôt touché aux hochets sacrés, que les prêtres, alarmant les villes des Pays-Bas, leur persuadèrent qu'on en vouloit à leur liberté, lorsqu'il ne s'agissoit que de quelques couvents de moines inutiles. La révolte du Brabant a eu les suites les plus funestes. Le peuple, dompté seulement par la force des armes, froid dans la cause de ses maîtres, qu'il regardoit comme ses tyrans, loin d'épouser la querelle des alliés, a présenté aux François une proie facile. Observons encore la réaction de la justice générale : le clergé flamand soulève les Brabançons contre leurs souverains légitimes, pour sauver quelques parties de ses immenses richesses; les républicains arrivent et s'emparent du

tout a.

Une guerre malheureuse venoit de désoler la Perse, de ruiner l'Allemagne. Darius, dans son expédition de Scythie, avoit perdu une armée florissante '. -Les états de Joseph s'étoient épuisés pour seconder son entreprise contre la Porte. Mais ici se trouve une différence locale essentielle. Les troupes persanes, en se rendant par la Thrace aux bords de

• Il y a quelque chose d'assez bien jugé dans ces remarques, c'est dommage qu'elles soient gâtées par la manifestation d'un es'prit anti-religieux. Qu'il y ait eu des moines inutiles, tout le monde en convient : on peut être encore un très bon catholique en convenant avec Fleury, et tant d'autres saints prêtres, que les abus s'étoient glissés dans le clergé; mais je ne veux point avoir recours à cette défense, et j'aime mieux dire ce qui est vrai: c'est que dans le paragraphe qui fait le sujet de cette note, l'écrivain étoit imbu des doctrines de son siècle. (N. ED.)

1. STRAB., lib. VII, pag. 3o5; HEROD., lib, IV, cap. MCCCXLI.

l'Ister, se rapprochèrent de la Grèce. — L'armée autrichienne, en se jetant sur la Turquie, s'éloignoit au contraire des frontières de France. Cette chance de position a décidé en partie du succès de la guerre présente. Car, ou les empereurs se fussent déclarés plus tôt contre la république, et l'eussent trouvée moins préparée; ou les François eux-mêmes n'auroient su pénétrer dans le Brabant. Autres données, autres effets.

Joseph étant mort à Vienne, son frère Léopold, grand-duc de Toscane, lui succéda. Celui-ci, accoutumé, dans une position moins élevée, à un horizon peu étendu, ne put saisir l'immensité de la perspective, lorsqu'il eut atteint à de hautes régions. La nature l'avoit doué de cette vue microscopique qui distingue les parties de l'infiniment petit, et ne sauroit embrasser les dimensions plus nobles du grand. Il porta cependant avec Darius quelques traits de ressemblance : l'amour de la justice et la connoissance des lois. Mais le prince perŝan considéra ses sujets du regard du monarque qui dirige des hommes', et le prince germanique de l'oeil du maître qui surveille un troupeau. L'un possédoit la chaleur et la libéralité du chef qui donne'; l'autre la froideur et l'économie du dépositaire qui compte..

1. PLUT., Apopht., tom. 11, pag. 173.

2.

HEROD., lib. III, cap. cxxxII, etc.; lib, vi, cap. cxx.

3. Je juge ici d'après le livre des Institutions toscanes de Léopold, imprimé en italien, et que j'ai eu quelque temps entre les mains; en outre, sur ce que j'ai appris en Allemagne touchant cet empereur, et dans plusieurs conversations avec des Florentins; enfin par l'histoire générale de

Tels étoient les monarques et l'état des deux empires, lorsque la révolution républicaine de la Grèce, et celle de la France, firent éclater la guerre médique dans l'ancien monde, la guerre présente dans le monde moderne. Nous allons essayer d'en développer les causes *.

l'Europe à cette époque. La justice cependant m'oblige de dire que j'ai trouvé des Allemands grands admirateurs des vertus de Léopold.

a Me voilà à la fin de ce qui forme dans cette édition (celle de 1826), le premier volume de l'Essai. Jamais coupable ne s'est imposé pénitence plus rude. Il ne faut pas croire que je n'ai pas souffert en me traitant comme je viens de le faire. Je défie la critique la plus malveillante d'aller au delà de la mienne, car je n'ai pas plus ménagé mon amour-propre que mes principes; je m'épargnerai encore moins dans les notes du second volume.

Néanmoins qu'il me soit permis à présent de demander au lecteur ce qu'il pense de ce qu'il vient de lire? Est-ce là ce livre qui devoit révéler en moi un homme tout autre que l'homme connu du public? Que voit-on dans l'Essai ? est-ce un impie, un révolutionnaire, un factieux, ou un jeune homme accessible à tous les sentiments honnêtes, impartial avec ses ennemis, juste contre lui-même, et auquel, dans le cours d'un long ouvrage, il n'échappe pas un seul mot qui décèle une bassesse de cœur ? L'Essai est certes un très méchant livre; mais si l'on ne veut, si l'on ne doit accorder aucune louange à l'auteur, peut-on lui refuser de l'estime?

Littérairement parlant, l'Essai touche à tout, attaque tous les sujets, soulève une multitude de questions, remue un monde d'idées, et mêle toutes les formes de style. J'ignore si mon nom parviendra à l'avenir; je ne sais si la postérité entendra parler de mes ouvrages; mais si l'Essai échappoit à l'oubli, tel qu'il est en lui-même cet Essai, et tel qu'il est surtout avec les notes critiques, ce seroit un des plus singuliers monuments de ma vie.

C.

. 505.

CHAPITRE LXI.

Influence de la Révolution républicaine de la Grèce sur la Perse

et de

la Révolution républicaine de la France sur l'Allemagne. Causes immédiates de la guerre médique de la guerre républicaine. L'Ionie 1 Le Brabant.

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Les différentes colonies que les Grecs avoient fondées sur les côtes de l'Asie-Mineure étoient tombées peu à peu sous la puissance des rois de Lydie3. Celle-ci ayant été à son tour renversée par Cyrus, les villes d'Ionie passèrent alors sous le joug de la Perse3.

Elles ne connurent cependant que le nom de l'esclavage. Leurs maîtres leur laissèrent leur ancien gouvernement populaire, et n'exigeoient d'elles qu'un léger tribut '; mais les habitants de ces cités, incapables de modération, ne connoissoient pas de plus grand tourment que le repos. Amollis dans le luxe et les voluptés, ils n'avoient conservé de la pureté de leurs mœurs primitives qu'une inquiétude toujours prête à les plonger dans les malheurs

1. Je comprends, sous le nom général de l'Ionie, l'Ionie proprement dite, l'Éolide et la Doride.

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