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ARMAND-JEAN DU PLESSIS, CARDINAL DUC DE

RICHELIEU,

né au château de Richelieu en 1585, mort à Paris en 1642.

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De la Politique. Son objet, sa fin, ses moyens, etc.

La politique est l'art de gouverner les états. Les anciens ont dit que c'était une science royale et très-divine, la plus excellente et la maîtresse de toutes les autres, et ils lui ont donné entre les disciplines pratiques le même avantage que la métaphysique et la théologie ont entre les spéculatives.

Les moyens de la politique consistent à observer exactement la religion, à rendre justice en toutes choses, à faire en sorte que les peuples se puissent maintenir dans les temps, en chassant d'un état la pauvreté et la richesse, y entretenir une juste et louable médiocrité.

La politique à trois branches principales, c'est-à-dire, trois sortes de gouvernemens légitimes, où l'on se conduit par l'autorité des lois. ....

La fin où tend la Démocratie est la liberté. Celle de l'Aristocratie est la richesse et la vertu. Celle de la Monarchie est la gloire, la vertu, la richesse et la liberté.

La tyrannie, le plus dangereux de tous les gouvernemens vicieux et illégitimes, est directement opposé à la monarchie.

La tyrannie est ennemie de la gloire, de la vertu, de la richesse et de la liberté des peuples.

La démocratie tombe aussi en oligarchie, ce qui se fait quand la lie du peuple ignorant, séduite par les mauvais orateurs, que les Grecs appelaient démagogues, conducteurs du peuple, dispose tumultuairement avec révolte et violence des affaires, sans avoir égard aux lois, ni à l'équité.

Par le moyen des oligarchies les peu

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ples quelquefois perdent leur liberté et tombent dans la servitude; Pysistrate devint par là tyran d'Athènes, et Denis, des Syracusains.

La félicité n'est pas une simple habitude, autrement un homme qui dort serait heureux; mais elle consiste dans l'action qui est le vrai usage de la vertu ; l'ame sert à nous faire vivre heureusement, car le bonheur se mesure par la vertu, et nous ne saurions être estimés heureux qu'à proportion que nous sommes estimés gens de bien. L'intention de la politique est de faire en sorte que les hommes vivent heureusement, comme je l'ai remarqué dans le précédent chapitre.

Richelieu montra beaucoup de vivacité d'esprit pendant le cours de ses études. Dés l'âge le plus tendre, il semblait avoir un pressentiment de sa grandeur future. On l'entendit plusieurs fois dire à ses jeunes camarades d'école qui voulaient l'emmener jouer avec eux, qu'il était destiné à des emplois qui ne lui permettait pas de perdre son temps; et il l'employa si bien qu'à l'âge de 22 ans il fut nommé évêque de Luçon. Il s'adonna à la prédication, et s'y fit une si grande réputation que la reine voulut l'avoir pour son grand aumônier, et bientôt le roi l'éleva aux importantes fonctions de secrétaire d'état. Après la inort du marquis d'Ancre, il se retira à Avignon pour y jouir du repos, et s'y livra à la composition de ses livres de controverse, et de plusieurs ouvrages de piété. Il fut fait cardinal en 1622, et quelque temps après, le roi le déclara son premier ministre. Pen. dant son ministère, il eut principalement deux choses en vue, d'abattre Les hérétiques et d'abaisser la maison d'Autriche. Des plaintes s'étant élevées contre lui, le roi résolut de lui ôter la conduite des affaires; mais, le même jour, il se rendit chez le roi malgré tous les efforts que firent ses ennemis pour l'en empêcher, et se justifia si bien par la force de son éloquence et de son génie, que le monarque lui accorda même une plus grande confiance qu'auparavant. Richelieu rechercha tous les genres de gloire à la fois, et son vaste génie le rendit propre à tout. Politique fin et adroit, il remua et s'assujettit en quelque sorte toute l'Europe; il cultiva, encouragea et fit fleurir les lettres et les beaux-arts, pendant qu'il fesait marcher et dirigeait des armées de toutes parts avec autant d'habilité que le général le plus expérimenté;capable de tout entreprendre, il ne s'étonnait de rien ; quand les moyens de la persuasion ne lui suffisaient pas pour faire réussir ses projets, il employait la force des armes.

C'est lui qui fonda l'Académie française.

VINCENT VOITURE,

né à Amiens en 1598, mort à Paris en 1648.

Lettre au comte d'Avaux, plénipotentiaire à Munster.

A ce que je vois, vous autres plénipotentiaires, vous vous divertissez admirablement à Munster; il vous y prend envie de rire en six mois une fois. Vous faites bien de prendre le temps, tandis que vous l'avez, et de jouir de la douceur de la vie que la fortune vous donne. Vous êtes là comme rats en paille, dans les papiers jusqu'aux oreilles, toujours lisant, écrivant, corrigeant, proposant, conférant, haranguant, consultant dix ou douze heures par jour, dans de bonnes chaises à bras, bien à votre aise, pendant que nous autres, pauvres diables, sommes ici marchant, courant, tracassant, jouant, causant, veillant et tourmentant notre misérable vie. Mais avec tout votre bon temps, monseigneur, dites vrai ; ne fait-il pas plus sombre à Munster, depuis que Mme. de Longueville n'y est plus? Au moins fait-il plus clair et plus beau à Paris depuis qu'elle y est. Vous nous l'avez renvoyée plus belle, plus aimable et plus habile que nous ne vous l'avi. ons donnée. Je voudrais que vous pussiez ouïr tout ce qu'elle dit de vous, et avec quelle estime et quelle amitié elle en parle ; elle m'a commandé de vous faire de sa part mille complimens du meilleur cæur du monde. Votre italien, au reste, et son élégance m'ont surpris. Tout de bon, monseigneur, vous m'effrayez; mais dans quel abîme êtes-vous allé chercher, et par quel art savez-vous tirer des beautés et des grâces toutes fraiches et toutes nouvelles ? J'eus honte, en vérité, de ce que mon valet me vit éclater de rire en lisant une lettre qu'il avait entendu que l'on me donnait de la part de M. d'Avaux, ce monsieur d'Avanx si grave, si sérieux, si important dans l'esprit de tout le monde.

Voiture jouit d'une grande célébrité dans son temps, comme écrivain en prose et en vers, et comme bel esprit; mais aujourd'hui on ne le lit presque plus, et il mérite peu d'être lu: son style en vers comme en prose, est plein d'affectation, de jeux de mots puérils et de plaisanteries froides et de très-mauvais goal. Nous ne le citons ici que parce que son nom se rattache, en quelque sorte, à l'histoire de notre literature. L'Académie française dont il était membre prit le deuil à sa mort, honneur qu'elle n'a jamais plus accordé depuis. Il ne faut cependant pas oublier que Voiture a été un des premiers à écrire notre langue avec pureté, chose si rare dans son temps, qu'il fut comparé à Horace, et même long-teinps après sa mort :

“Et qu'à moins d'être au rang d'Horace ou de Voiture,
On rampe dans la fange avec l'abbé de Pure.” (1)

BOILEAU.

Quelques critiques ont blåmé le poète sur ce passage.

(1) Michel de Pure naquit à Lyon au commencement du seizième siécle. Il a traduit Quintilien ; l'Histoire des Indes, du P. Maffee; l'Histoire Africaine, de Bigalo; et la vie de Léon X., de Paul Jove.

FRANÇOIS, DUC DE LA ROCHEFOUCAULD,

né en 1603, et mort à Paris en 1680.

Réflexions Morales.

L'amour-propre est le plus grand des flatteurs.

La philosophie triomphe aisément des maux passés et des maux à venir, mais les maux présens triomphent d'elle.

Il faut de plus grandes vertus pour soutenir la bonne fortune que la mauvaise.

Si nous n'avions point de défauts, nous ne prendrions pas tant de plaisir à en remarquer dans les autres. Si nous n'avions point d'orgueil, nous ne nous plaindrions pas de celui des autres.

Il semble que la nature, qui a si sagement disposé les organes de notre corps pour nous rendre heureux, nous ait aussi donné l'orgueil pour nous épargner la douleur de connaître nos imperfections.

Ceux qui s'appliquent trop aux petites choses, deviennent ordinairement incapables des grandes.

La bonne grâce est au corps ce que le bon sens est à l'esprit.

Tout le monde se plaint de sa mémoire, et personne ne se plaint de son jugement. On ne donne rien aussi libéralement que

des conseils. Il est aussi facile de se tromper soi-même, sans s'en apercevoir, qu'il est difficile de tromper les autres sans qu'ils s'en aperçoivent.

On n'est jamais si aisément trompé, que quand on songe à tromper les autres. La finesse est la

marque

d'un petit esprit.

On parle peu quand la vanité ne fait pas parler.

Bien écouter et bien répondre est une des plus grandes perfections qu'on puisse avoir dans la conversation.

C'est le caractère des grands esprits de faire entendre en peu de paroles beaucoup de choses ; les petits esprits, au contraire, ont le don de parler beaucoup, et de ne rien dire.

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