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du troupeau d'Hermès. Ce corps tout couvert de peintures symboliques et d'emblèmes, placé dans un cercueil de bois de sycomore, désormais sujet d'Osiris, roi des morts, attendait la grande année dans les immenses nécropoles. Quand le cadavre tombe en poussière, l'âme s'envole de migration en migration jusque dans le corps le plus abject. De là ce culte pour les animaux sacrés qui se retrouve dans toute l'Égypte : à Thèbes, la cité d'Ammon (1), le bélier; à Panopolis, à Hermopolis, le bouc; à Lycopolis, le chien, le loup, le chacal; à Bubostis, le chat; à Tachompso, le crocodile. Chaque famille, chaque foyer domestique avait ses animaux sacrés, l'ibis, le faucon, le serpent, tous embaumés sous les bandelettes sacrées avec le même

soin que le corps de l'homme. Parmi ces animaux, les trois bœufs, Mnevis, Onuphis et Apis, étaient revêtus d'une sainteté particulière : l'Égypte entière était en fête lorsqu'elle avait trouvé le bœuf Apis (2); l'Égypte était en deuil lorsqu'il mourait dans le temple de Memphis. Ce n'était, au reste, que pro

(1) Appo. Mille explications ont été données sur la destinée et les attributs d'Ammon par M. Champollion jeune. (Antiquités égyptiennes.) Il le considère comme le dieu de la théocratie.

(2) L'empereur Adrien, dans une de ses épîtres, dit la joie folle des Égyptiens qui ont trouvé le bœuf Apis. M. Champollion jeune écrit Hapi au lieu d'Apis. Plutarque, dans un article Osis et Osiris, exprime les idées de l'école d'Alexandrie sur les religions de l'Égypte.

cessions bruyantes des multitudes, et Alexandrie, comme Rome, passait sa vie à des célébrations populaires de son culte religieux (1), la pensée, la joie, la distraction de tous.

Mais dans aucune de ces formes religieuses on ne voyait se révéler les lois d'une grande morale. Aussi, en dehors de cette vaine sagesse des prêtres de l'Égypte ou de l'Inde, avait surgi une multitude de systèmes philosophiques dont le but était de parler à l'intelligence de l'homme, Rome voyait encore les débris du système de Pythagore, qui se mélait plus que tout autre aux croyances de l'ancien monde. Les pythagoriciens partaient de l'idée d'unité, comme base de toute philosophie: la forme se réduit à la ligne droite ou à la courbe; les nombres sont les signes de la quantité et des qualités. Parmi les nombres, les pairs sont les plus parfaits, parce qu'ils supposent l'harmonie, et le cercle, c'est l'infini; cet infini est le feu, essence de la divinité, source de la chaleur et de l'âme; l'àme est l'ensemble de la vie, universelle et par

(1) Il faut consulter sur la religion de l'Égypte le Panthéon égyp– tien de Jablanski, en le comparant à la symbolique de Kreutzer. Jablanski est la source où toute l'érudition moderne va puiser. Rien n'est plus lautif et plus frivole que le grand ouvrage de la commission d'Egypte. M. Champollion jeune s'était trop absorbé dans les hiéroglyphes pour embrasser la généralité religieuse de l'Égypte. Cependant son travail est capital.

tout dans la nature; celle de l'homme en est une émanation; la vertu, c'est l'harmonie de toutes les proportions; le vice est le désordre dans l'ensemble de l'être (1).

Le système d'Aristote fait de la matière la cause première et puissante de toutes les sensations; les éléments forment le monde et le mouvement la vie; Dieu l'avait donné une fois pour toujours; il avait lancé la matière dans l'espace d'une manière si réglée, que chaque être avait reçu inflexiblement l'impulsion vers le but que se proposait la nature. L'âme était une substance avec trois facultés : sentir, désirer et vouloir; facultés tellement inhérentes à la matière, qu'elles en étaient inséparables. Ces facultés, Aristote les présentait comme trois âmes distinctes; l'âme pensante seule se réunissait à la Divinité, comme une parcelle du feu au grand foyer de lumière. Ainsi, dans le système de Pythagore comme dans celui d'Aristote, aucune destinée particulière et privilégiée pour l'homme, qui n'est qu'un fragment détaché de la matière (2).

(1) Brucker, t. II, p. 88, de Philosophis pythagoram sectam resurcitantibus. Je crois que Brucker, avec moins d'esprit systématique que les modernes, avait lu les sources mieux qu'eux tous.

(2) Les trois âmes d'Aristote sont l'âme sensitive, l'âme végétative, l'âme raisonnable. La théorie de l'immortalité de l'âme est enveloppée de si grandes obscurités, qu'on n'a pu jamais savoir si Aristote l'avait

Dans les théories de Platon (1), la destinée de l'humanité était plus belle et plus grande; les idées ne venaient pas d'une seule source toute matérielle (les sensations); il y avait un mobile plus actif, plus pur que les sens : c'était l'esprit, l'intelligence; et cette partie si belle, si élevée de l'homme, devait avoir sa cause exclusive, à raison de sa puissance et de sa grandeur; cette cause, c'était Dieu. Quant aux corps, ils n'étaient que la matière déterminée par la forme. Le monde éternel se modifiait sans s'éteindre et périr. Au centre de son action incessante se trouvaient deux àmes l'une intelligente, l'autre grossière, sources du bien et du mal; le mal ne peut venir de Dieu; la nature en est la source et la cause. Dieu luimême est l'unité dans la triplicité de son essence. La morale n'était que les rapports de l'homme avec les lois de l'esprit, avec les mille révélations de l'intelligence; et si l'âme était immortelle, c'est qu'elle formait comme un fragment du monde intellectuel. A travers les poétiques et obscures images, le système de Platon répondait mieux aux besoins moraux de l'humanité; mais, à l'époque

enseignée. Mosheim l'a parfaitement analysée, t. I, p. 66. On sait toute la popularité d'Aristote au moyen âge.

(1) Platon, au point de vue chrétien, a été parfaitement analysé par Mosheim, liv. Jer.

d'Auguste, il était relégué dans les écoles d'Orient et de la Grèce (1).

Deux systèmes paraissaient spécialement alors dominer la grande Rome: c'étaient les doctrines d'Epicure et des stoïciens, rattachées par des liens très-sensibles. La théogonie d'Épicure se résumait dans le vide, et dans ce vide les atomes groupés par le hasard; l'homme était comme le produit de cet accouplement fortuit. Nature et Dieu, c'était la même idée; un Dieu éternel, immobile, sans action sur ce monde méchant. La morale venait du plaisir, moins dans le cercle étroit de la jouissance sensuelle, que du plaisir qui naît de la satisfaction intime du bien. A ce point de vue, la vertu est la plus grande des jouissances, le vice la plus triste des douleurs. Dans le système des stoïciens, l'esprit ou l'àme exerce une telle puissance sur la nature, que celle-ci obéit et se tait sous les empreintes du plaisir ou de la douleur, à ce point que, lorsque le fardeau de la vie est trop lourd, la volonté est toujours là pour s'en délivrer.

(1) L'étude de Platon est essentielle pour ceux qui veulent apprécier et juger l'histoire des doctrines de l'Église. Voyez l'ouvrage de Balthus, Défense des Pères de l'Église accusés de platonisme. L'opinion de l'ancien monde était que Platon avait reçu la science des prêtres égyptiens « Plato Egyptum peragravit et a sacerdotibus barbaris numeros et cœlestias acciperet. » Cicer., De Finibus, v. 25.

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