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rampant, qui n'est pas même propre à faire une cheville. Ce sont néanmoins ces deux plantes sans vigueur et sans beauté, le froment et la vigne, qui soutiennent la force de l'homme et répandent la joie dans son cœur. Ce sont ces humbles plantes qui changent la terre et l'eau en pain et en vin pain et vin qui, dans nos communs repas, changés en notre corps et en notre sang, nous font vivre de la vie temporelle, et, dans les repas sacrés, changés au corps et au sang de l'Homme-Dieu, nous font vivre de la vie éternelle. Admirable transsubstantiation, qui fait participer la terre et l'eau à la nature de la plante, la plante à la nature de l'homme, et l'homme à la nature de Dieu!

La terre, sortie des ténèbres par la création de la lumière, le premier jour; entourée de son atmosphère, comme d'un manteau transparent, le deuxième, avait donc été, le troisième, dégagée du milieu des eaux et vêtue d'une robe de verdure et de fleurs. Mais le ciel y paraissait encore une solitude.

Alors Dieu dit: Qu'il y ait des luminaires dans l'étendue des cieux... Et Dieu fit les deux grands luminaires.

Dieu dit, et Dieu fit. On peut l'entendre, avec Ambroise de Milan, du Père qui dit et du Fils qui exécute 1.

Et Dieu fit les deux grands luminaires, le soleil et la lune. On peut croire que ces deux corps existaient déjà, et qu'ils sont compris dans les cieux que Dieu créa dans le principe; mais ils étaient informes et invisibles, comme l'était d'abord la terre. Ce n'est que le quatrième jour que Dieu les fit luminaires, ou lumineux.

Un des plus fameux astronomes de nos temps 2, qui a passé sa vie à examiner les astres, et qui découvert la plus considérable des nouvelles planètes avec un grand nombre de nouvelles étoiles, a pensé, d'après ses longues et nombreuses observations, que le soleil est de soi-même un corps opaque, mais entouré d'une atmosphère lumineuse et incandescente qui répand la lumière et la chaleur dans tout notre univers. Cette opinion, favorablement accueillie par les savants, est devenue plus que probable par une expérience qui montre que les rayons lumineux du soleil n'ont pas tous les mêmes propriétés que ceux d'une sphère métallique rougie au feu 3, mais bien toutes celles d'une atmosphère incandescente et lumineuse. Il se peut donc que ce vif éclat, qui fait du soleil l'œil du monde, l'agrément du jour, la beauté du ciel, la grâce de la nature, la gloire de la création 4, ne soit autre que cette lumière, cette atmosphère brillante, que Dieu

1 Her vem., 1. 4, c. 2. hecaem., 1. 4, c. 1.

2 Herschell.

9 La polarisation. - S. Ambr., in

créa au premier jour, et dont il aura revêtu cet astre au quatrième. Le second des grands luminaires est la lune. Mais il y a une grande différence entre les deux. Le soleil éclaire par lui-même comme un flambeau allumé : la lune n'éclaire que comme un miroir, qui renvoie en partie la lumière reçue d'ailleurs. La lune n'a pas plus de lumière à elle que la terre; mais, éclairée par le soleil, elle devient, comme la terre, visible et lumineuse.

Il en est de même de ces autres luminaires célestes qu'on nomme planètes ou étoiles errantes. De leur nature, elles ne sont pas plus lumineuses que la terre et la lune; la lumière qu'elles nous envoient, elles l'empruntent également du soleil. Ainsi que la lune, Dieu les fit également luminaires le quatrième jour, lorsqu'il vêtit le soleil de cette lumière créée au premier. Quant aux étoiles qu'on appelle fixes et que l'on tient pour autant de soleils, n'ont-elles été allumées que le quatrième jour, ou bien l'étaient-elles déjà auparavant? Ne sont-elles pas çes étoiles du matin dont Dieu parle dans Job 1, et qui le louaient déjà par leurs anges lorsque la terre était encore plongée dans les eaux? Peut-être que Dieu les appelle du matin, parce qu'il les rendit lumineuses les premières, et par opposition à notre soleil et à ses planètes, qu'il rendit lumineuses les dernières.

Longtemps on a cru que la lumière se répandait dans un même instant partout. Il est constaté maintenant qu'elle met huit minutes et un quart à faire le chemin du soleil à la terre, c'est-à-dire trentequatre millions de lieues; ce qui fait plus de quatre millions par minute. Or, celle des étoiles fixes qui nous paraît la plus voisine, est cependant plus de quatre cent mille fois plus éloignée de nous que le soleil. Il faudra donc à la lumière de cette étoile, pour arriver jusqu'à nous, plus de quatre cent mille fois huit minutes et un quart, ou six ans, pour le moins. Supposé maintenant qu'il y ait des étoiles mille fois plus éloignées que cette première, il faudra six mille ans à leurs rayons lumineux pour venir jusqu'à la terre. Il se peut donc des étoiles plus reculées encore dans l'espace, 'dont la lumière n'est pas encore parvenue jusqu'à nous depuis le moment de leur création. Sans doute que Dieu a pu leur donner une plus grande vitesse; mais, comme dit Thomas d'Aquin, après Augustin d'Hippone, dans la première institution de la nature, il ne s'agit point de miracle, mais de la nature des choses 2.

'Au fond, la nature n'est qu'un miracle continuel. On le voit plus souvent que son exception; mais on ne comprend pas mieux l'un que l'autre.

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2 S. Th. q. 67, a. 4, ad. 3. S. Aug., 1. 2, sup. Gen. ad. litt.,

Ainsi la lumière, incompréhensible dans son essence, inexplicable dans sa vitesse, nous paraît une, indivisible et d'une seule couleur. Cependant elle se multiplie et se divise en plusieurs couleurs différentes, pour varier à l'infini le tableau de la nature entière. Dans l'arc-en-ciel, le même rayon du soleil est divisé par une goutte d'eau en sept couleurs principales: le rouge, l'orangé, le jaune, le vert, le bleu, l'indigo, le violet, qui sont dans les mêmes rapports entre elles que les sept notes de la musique. Cette division de lumière et cette multiplication de couleurs, on peut s'en donner à volonté le spectacle, y ajouter même la soustraction et l'addition. Un rayon du soleil, reçu sur le côté d'un triangle de verre, dans une chambre obscure, se divise dans les sept couleurs de l'arc-en-ciel. Au moyen d'autres verres en forme de lentilles, on peut prendre ces couleurs une à une, les écarter, les réunir, les mélanger, et former ainsi diverses nuances. Réunies toutes les sept, elles forment le blanc : toutes absorbées, c'est le noir, qui n'est ainsi que l'absence de toute couleur. Maintenant, on ne sait par quel inexplicable mécanisme la surface des métaux, des pierres, du bois, des fluides; l'écorce, les feuilles, les fleurs des arbres et des plantes, sont disposées de manière à ce qu'en décomposant les rayons du soleil, elles en renvoient à nos yeux telle ou telle couleur, et en absorbent telle autre. De là, l'incarnat de la rose, le jaune doré de l'orange, le jaune blanchâtre des blés mûrs, le vert du printemps, le bleu de la voùte céleste, le bleu de l'indigo et le teint modeste de la violette avec leurs nuances infinies. Ou bien elles nous les renvoient toutes, et ce sera la blancheur du lis; ou bien elles ne nous en renvoient aucune, et ce sera le noir de l'ébène. Ainsi le même rayon de lumière, absorbé, réuni, divisé, laissera voir et le noir et le blanc, et toutes les couleurs qui remplissent l'entre-deux : image créée de la lumière incréée qui est la vie, le bien, et qui éclaire tout homme venant en ce monde. Ses divins rayons, absorbés et comme annulés par l'un, ne laissent voir en lui que l'absence de la lumière, l'absence du bien, l'absence de la vie, les ténèbres, le mal, la mort. Fidèlement réunis dans un autre, ils y font briller l'image ressemblante de toute la splendeur, de toute la vie, de toute la perfection divine. Dans les autres, conservés en partie suivant les dispositions de chacun, ils font reluire des traits plus ou moins éclatants de l'éternelle beauté. Cette divison et cette infinie variété de couleurs, harmonisées avec le blanc qui les rassemble toutes, et le noir qui en est la totale absence, font de la nature entière un vivant tableau où l'on ne peut assez admirer l'éternel peintre. Cette division et cette infinie variété de grâces et de vertus, combinées avec la splendeur des parfaits qui les réunissent toutes, et les ténèbres du

réprouvé qui n'en a gardé aucune, feront de tout l'ensemble des intelligences créées, une ineffable harmonie, dont l'éternité ne suffira point à considérer toutes les merveilles.

Il paraîtrait que la lumière et la parole créées sont encore, l'une par ses sept couleurs principales, l'autre par ses sept principaux tons, une ombre et comme un écho de la lumière et de la parole incréées. Le nombre de sept revient trop souvent dans l'Écriture, pour qu'il n'y ait pas quelque mystère. Dieu fait et sanctifie l'univers en sept jours; devant son trône se tiennent debout sept anges ou esprits; devant son arche sainte étincelait le chandelier d'or à sept branches; l'année de la rémission était annoncée par les sept trompettes du Jubilé; le livre éternel est fermé de sept sceaux; l'agneau qui les rompt nous est représenté ayant sept cornes ou rayons, et sept yeux ou esprits divins, qui sont envoyés sur toute la terre 1; ce soleil de justice se communique par sept sacrements ou sept irradiations différentes; l'Esprit de charité, qui en est inséparable, se communique par sept dons ou rayons différents.

Le rayon solaire se divise pour multiplier les couleurs; il se brise encore et se détourne de sa route pour opérer d'autres merveilles. Si l'astre commandé de Dieu pour présider au jour apparaissait ou disparaissait tout d'un coup. nous serions éblouis le matin de sa subite splendeur, et surpris le soir des plus profondes ténèbres. Il ne le fera point; mais, à l'imitation de l'éternelle lumière et sagesse, dont il est un emblème, s'il atteint d'une extrémité à l'autre avec force, il disposera aussi tout avec douceur. Son apparition triomphale sur l'horizon sera précédée de l'aurore, et son coucher suivi du crépuscule. Plus d'une heure avant de nous envoyer directement ses rayons, il les lancera au haut de notre atmosphère, d'où des particules vaporeuses nous les renverront brisés et affaiblis. Ce n'est pas tout. Ces mêmes rayons, lancés obliquement dans les parties élevées et rares de l'air qui nous entoure, se courberont vers les parties plus basses et plus denses pour se rapprocher davantage de nous : comme nous voyons se courber et se rapprocher de nous l'image d'un bâton plongé obliquement dans l'eau. C'est au moyen de ces quelques rayons brisés et de ces quelques atomes d'air ou de vapeur, que Dieu nous amène doucement des ombres de la nuit à la clarté du jour, et de la clarté du jour aux ombres de la nuit, à travers les teintes graduées de l'aurore matinale et des crépuscules du soir. C'est encore à cela que nous devons ce bel azur, ce bleu suave de la voûte céleste. Plus on s'élève sur les hautes montagnes, plus on voit le ciel, de bleu devenir

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noir. Il est telle hauteur où le soleil ne resplendit plus avec son éclat ordinaire, et où les étoiles s'aperçoivent en plein midi, non plus étincelantes, mais ternes. L'air au-dessus, est trop subtil pour réfléchir vers nos yeux la lumière des astres et la diriger en tout sens. Plus bas, cette lumière, réfléchie par un air et des vapeurs moins déliés, mêlant sa blancheur au noir qui est au-dessus, produit cette teinte intermédiaire qui charme la vue et qui semble nous entourer comme une voûte bleue parsemée de clous d'or. Ces mêmes atomes de vapeur et d'air ont encore commission de Dieu de se passer l'un à l'autre la blanche lumière du soleil, et de la transporter ainsi partout, jusque dans les appartements où le soleil ne pénètre jamais directement. Que de mystères et de merveilles dans ce que nous voyons tous les jours!

« Les cieux racontent la gloire de Dieu, et l'étendue annonce l'œuvre de ses mains. Le jour en transmet le mot au jour, la nuit en révèle la science à la nuit. Il n'est point de discours, point de langage dans lequel on n'entende leur voix. Son éclat s'est répandu sur toute la terre leurs paroles ont retenti jusqu'aux extrémités du globe. Dans leur enceinte, il a dressé un pavillon au soleil. Semblable au nouvel époux qui sort de son lit nuptial, il s'élance comme un géant dans sa carrière; il part de l'extrémité des cieux, et revient en tournant à cette extrémité rien ne se dérobe à sa chaleur 1. »

Dieu a réuni dans le soleil, et la lumière qui éclaire et colore, et la chaleur qui fait vivre et croître les plantes. Mais déjà auparavant la lumière et la chaleur existaient; déjà les plantes se peignaient des couleurs de l'une et s'animaient de la vie de l'autre. Le soleil n'en est la source, mais seulement un réservoir; il n'est pas la lumière, mais seulement un luminaire.

pas

Ici revient une question fort agitée parmi les anciens ces luminaires célestes sont-ils animés ou non? Il y en a eu pour, il y en a eu contre, il y en a eu dans le doute. L'ange de l'école, saint Thomas, a concilié ces divers sentiments avec une admirable justesse. Les astres ne sont point animés à la manière du corps humain, avec qui l'âme qui le vivifie ne compose qu'un seul individu, l'homme; mais ils sont animés à la manière d'un navire que meut et que dirige le pilote. Or, ceux qui disaient avec Platon, que les astres sont animés, l'entendaient en ce dernier sens, et ceux qui soutenaient qu'ils ne l'étaient pas, l'entendaient dans le premier. Il y a de la différence dans les paroles, mais pour la chose même il n'y en a point; ou s'il y en a, c'est très-peu 2.

1 Ps. 18, d'après l'hébreu. - 2 Sum. pars 1, q. 70, a. 3. c.

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