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modèle, ils seront des médiateurs toujours suppliants entre le ciel et la terre; comme lui encore ils serviront de père, de mère, de frère, de sœur aux pauvres et aux malades, aux veuves et aux orphelins, aux ignorants et aux pécheurs, aux vieillards et aux enfants abandonnés. Leur charité vierge conservera plus d'habitants à la terre, en enfantera plus au ciel que n'aurait pu faire leur fécondite conjugale. Une seule chose diminuera: le nombre des coupables et des malheureux.

« Dieu dit encore : Voilà que je vous ai donné toutes les plantes répandues sur la surface de la terre et qui portent leur semence, et tous les arbres fruitiers qui ont leur germe en eux-mêmes, pour servir à votre nourriture; et à tous les animaux des champs, et à tous les oiseaux du ciel, et à toute bête rampante sur la terre et en qui est une âme vivante, j'ai abandonné en pâture toutes les espèces d'herbages. Et il en fut ainsi 1. >>

De ces paroles certains interprètes ont conclu que, dans l'origine, Dieu ne permettait point l'usage de la chair, mais seulement des fruits et des légumes. On peut douter de cette conclusion. Dieu venait d'accorder formellement à nos premiers ancêtres la domination sur les oiseaux du ciel, sur les poissons de la mer et sur tous les animaux terrestres. Or, de quoi aurait servi cette domination à l'homme sur la plupart des animaux, en particulier les oiseaux et les poissons, s'il ne lui avait été permis d'en manger? Que si Dieu ajoute l'usage que l'homme peut faire pour lui-même de certaines plantes, la raison en est peut-être qu'il n'en avait pas encore parlé, et que, comme un bon père, il voulait enseigner à nos premiers parents jusqu'aux détails de leur nourriture. Il se peut néanmoins qu'il voulût aussi leur recommander de se nourrir d'abord plus volontiers de fruits et de légumes, jusqu'à ce que les espèces d'animaux les plus utiles se fussent assez multipliées pour ne plus risquer d'être détruites.

Nos premiers ancêtres ainsi formés, unis et bénis, n'étaient vêtus que de grâce et d'innocence. Tels qu'ils étaient sortis de la main de Dieu, ils n'avaient à rougir de rien, ils n'avaient à se défendre contre aucune intempérie de saison. Dans leurs personnes, la chair ne convoitait point contre l'esprit, mais lui était parfaitement soumise, comme l'esprit était soumis à Dieu. Le corps et l'âme formaient comme une lyre harmonieuse où tout était d'accord, où tout résonnait la louange du Créateur. Il en était autant de la nature entière : elle offrait partout les beautés et les délices d'un printemps comme divin.

<< Alors Dieu considéra tout ce qu'il avait fait, et voilà qu'il était

1 Gen., 1, 29 et 30.

très-bon 1. Déjà les jours précédents, ayant considéré chaque partie de son ouvrage, il l'avait trouvée bonne, conforme à l'éternelle idée qu'il en avait dans l'entendement, propre au but qu'il s'y proposait et à la place qu'il lui destinait dans le plan général de sa providence. Mais quand il vit tout ce plan réalisé, quand il considéra l'ensemble de ses œuvres, l'ordre, la beauté, l'harmonie des diverses parties entre elles, les suites admirables qui en résulteraient pour le temps et pour l'éternité, cet ensemble se trouva non-seulement bon, mais très-bon, mais très-excellent pour remplir les vues de l'éternelle sagesse.

L'univers a été créé pour deux fins : une première et principale, la gloire de Dieu, par la manifestation de ses perfections infinies; une seconde et secondaire, l'éternelle félicité des créatures libres. Cette dernière dépend de la libre volonté de ces créatures mêmes. Mais qu'elles veuillent ou qu'elles ne veuillent pas, elles contribueront toutes à la première, elles contribueront toutes à manifester éternellement les adorables perfections de Dieu, sa magnificence à récompenser la vertu fidèle, sa miséricorde à pardonner au repentir, sa justice à punir le crime impénitent, sa sagesse et sa puissance qui font servir à ses desseins les obstacles mêmes. Tout, du côté de Dieu, sera bien, même le mal ou le péché de la créature libre, car ce péché sera ou expié par la créature ou puni par le Créateur; et un péché expié ou puni n'est plus un désordre, mais le rétablissement éternel de l'ordre, mais un bien. Lors donc que, dans l'éternité, nous pourrons contempler avec Dieu l'ensemble de ses œuvres, éternellement nous répéterons: Et voilà que tout était très-bien et très-bon, et voilà que tout est très bon et très-bien.

<< Ainsi donc furent achevés les cieux, la terre et tout ce qu'ils renferment. Et il y eut un soir et un matin : et ce fut le sixième jour. » Un autre vient ensuite, auquel l'Écriture ne donne ni matin ni soir, ni commencement ni fin : c'est le septième, qui apparaît là comme le jour de l'éternité; jour où Dieu se repose de toutes ses œuvres, où il cesse d'en faire aucune nouvelle, parce que tout y est consommé; jour où Dieu se repose dans l'homme, dit saint Ambroise, surtout dans ce Fils de l'homme, objet de ses infinies complaisances, qui dès lors, comme éternelle sagesse, était en lui et avec lui, réglant et gouvernant toutes choses, se réjouissant chaque jour de voir que tout était bon, et faisant dès lors ses délices d'être avec les enfants des hommes 3. Ce jour est pour Dieu même un jour de fête. Il le bénit et le sanctifie. Il y fait la dédicace de ce temple que nous appe

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lons l'univers, y consacre le premier homme prêtre et pontife, et, dans sa personne, celui de ses fils qui est en même temps le Fils de Dieu, le pontife éternel, l'Agneau qui a été immolé dès l'origine du monde, et en qui sa miséricorde nous a choisis avant les siècles temporels.

Unissons-nous au Créateur, unissons-nous à notre éternel pontife, unissons-nous à ses saints anges pour aller bénir et sanctifier ensemble ce jour qui n'a ni soir ni matin, ce jour où Dieu se reposera en nous et où nous nous reposerons en Dieu. En attendant, disons, à la vue de tant de merveilles, disons et redisons avec David dans une de ses hymnes sur la création: 0 mon âme, bénis le Seigneur! Seigneur mon Dieu, que vous êtes grand dans votre magnificence! Je chanterai le Seigneur durant ma vie, je célébrerai mon Dieu tant que je serai. Bénis le Seigneur, ô mon âme 1.

1 Ps. 103, sur la Création. Outre les auteurs nommément cités dans ce premier livre, on y a mis encore à profit VALMONT DE BOMARE, dans son Dictionnaire d'histoire naturelle, et BERNARDIN DE SAINT-PIERRE, dans ses Études et ses Harmonies de la nature.

LIVRE DEUXIÈME.

ENTRE 4000 ET 6000 ANS AVANT L'ÈRE CHRÉTIENNE.

Accord des anciennes traditions avec Moïse.-Chute de l'homme. Promesse du rédempteur.

Moïse et les prophètes sont les vrais Pères de l'histoire. Sans Moïse et les prophètes, et sans le Christ qui en est le complément, l'histoire humaine serait ce qu'était le monde à son origine, un chaos informe et vide, un je ne sais quoi sans corps ni âme. Dix siècles avant que l'antiquité profane nous offre aucune histoire un peu suivie, Moïse le premier débrouille ce chaos, y crée la lumière, y distingue des jours ou des époques. Moïse le premier lui donne un corps organique et vivant, un ensemble qui embrasse tous les siècles et tous les peuples; le premier il nous découvre le souffle de vie qui anime ce vaste corps, la divine Providence qui surveille tout le genre humain, comme une mère son fils, pour le conduire de l'enfance à l'adolescence, de l'adolescence à l'âge viril, et le mettre en état de remplir ses grandes destinées. Après Moïse, les prophètes développeront de plus en plus cette histoire vivante de l'humanité : ils l'écriront même d'avance; ils écriront des siècles d'avance la succession, la durée, les révolutions de ces grands empires qui feront converger toutes les choses humaines vers un même centre, l'avénement du Christ, d'où rejailliront des torrents de lumière et de vérité sur le passé, le présent et l'avenir. Quand les prophètes auront achevé d'écrire ainsi l'histoire future, cinq ou six siècles avant la venue du Christ, alors seulement apparaîtront les écrivains profanes pour enregistrer les faits isolés, recueillir les fragments de vérités; faits et fragments qui à eux seuls ne présenteraient qu'un amas de décombres, mais qui, dans Moïse, les prophètes et le Christ, trouvent leur ensemble, comme les pierres d'un même édifice. Ces pierres éparses, que de nos jours on déterre de toute part, nous tâcherons de les rapporter à leur place convenable. A mesure que Moïse et les prophètes nous auront fait le récit de quelque évé

nement principal, nous en signalerons les vestiges dans les traditions des principaux peuples. Sans doute, et Moïse et les prophètes et les apôtres nous suffisent; dans leurs écrits, Dieu rassasie nos âmes de toutes les vérités nécessaires; mais de ce divin banquet il est tombé illeurs quelques fragments. Suivant le précepte du Seigneur, nous les recueillerons, de peur qu'ils ne périssent.

En ceci, d'ailleurs, nous ne ferons que suivre l'exemple et même que reproduire les paroles des Pères et des docteurs de l'Église. Voici comme leur tradition avec la science des modernes se trouve résumée par un prélat de France, distingué par sa doctrine, plus encore que par sa haute dignité, le cardinal Gousset, archevêque de Reims, en sa Théologie dogmatique, édition de 1849. Dans son chapitre de la croyance générale, touchant l'unité de Dieu, il s'exprime en ces termes :

<< Toutes les nations ont conservé une idée plus ou moins distincte de l'unité de Dieu. « Il faut, dit Bergier, ou que cette idée ait été gravée dans tous les esprits par le Créateur lui-même, ou que ce soit un reste de tradition qui remonte jusqu'à l'origine du genre humain, puisqu'on la trouve dans tous les temps aussi bien que dans tous les pays du monde 1. « D'abord les chrétiens et les juifs n'ont jamais adoré qu'un seul Dieu, le Créateur du ciel et de la terre; et le Dieu des juifs est le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob, le Dieu des natriarches. Pendant près de deux mille ans, les descendants d'Adam n'ont pas eu d'autre Dieu que le Tout-Puissant. Ce n'est que peu avant la vocation d'Abraham que l'idolâtrie s'est introduite, ne se développant que progressivement chez les différents peuples, sans jamais devenir générale, rigoureusement parlant. Le vrai Dieu a eu des adorateurs en tout temps; de tout temps il s'est rencontré, même parmi les gentils, des justes qui n'ont pas fléchi le genou devant les idoles. qui n'ont point offert leur encens aux démons, que les païens honoraient comme des dieux, diï gentium dæmonia 2. Nous voyons dans la Genèse, que Melchisedech, roi de Salem, et Abimélech, roi de Gerare, chez les Chananéens, adoraient le même Dieu que les patriarches; que, dans l'Arabie, Job, les rois ses amis, Jéthro, beau-père de Moïse, ne reconnaissaient point non plus d'autre Dieu. C'était encore la religion des Assyriens d'une époque moins éloignée de nous, puisque les habitants de Ninive, capitale de l'Assyrie, touchés des menaces que le prophète Jonas leur fit de la part du Dieu d'Israël, se convertirent au Seigneur 3.

« On trouve la croyance de l'unité de Dieu, la notion d'un Être

1 Dictionnaire de théologie, art. Dieu. 2 Ps. 95.

3 Jonas, c. 2.

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