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mais tous ne furent pas également modérés. Les uns, sans blâmer les Papes, sans se révolter contre les bulles, demandèrent la permission de pratiquer la règle, et surtout la pauvreté dans toute la rigueur; plusieurs Papes y consentirent, et leur laissèrent la liberté de former des communautés particulières. D'autres, moins dociles et d'un caractère fanatique, déclamèrent non-seulement contre le relâchement de leurs confrères, mais contre les Papes, contre l'Eglise romaine et contre les évêques. Ils adoptèrent les rêveries qu'un certain abbé Joachim avait publiées dans un livre intitulé l'Evangile éternel, où il prédisait que l'Eglise allait être incessamment réformée, que le Saint-Esprit allait établir un nouveau règne plus parfait que celui du Fils ou de Jésus-Christ. Les Franciscains révoltés s'appliquèrent cette prédiction, et prétendirent que saint François et ses fidèles disciples étaient les instruments dont Dieu voulait se servir pour opérer cette grande révolution.

Ce sont ces insensés que l'on nomme Fraticelles. La plupart, très-ignorants, faisaient consister toute la perfection chrétienne dans la pauvreté cynique et dans la mendicité dont ils faisaient profession. A cette erreur, ils en ajoutèrent encore d'autres, et l'on prétend que quelques-uns en vinrent jusqu'à nier l'utilité des sacrements. Il est constant qu'un grand nombre étaient des sujets vicieux, dégoûtés de leur état, préférant une vie vagabonde à la gêne et à la régularité d'une vie commune; aussi plusieurs donnèrent dans les plus grands désordres, et finirent par apostasier. Malheureusement, par la mauvaise police qui régnait alors dans l'Europe entière, cette race libertine se perpétua, causa du trouble dans l'Eglise, et donna de l'inquiétude aux souverains pontifes pendant plus de deux siècles. On fut obligé de poursuivre avec rigueur les Fraticelles à cause de leurs crimes, et d'en faire périr un grand nombre dans les supplices.

On a voulu persuader qu'au xiv siècle on condamnait au feu les Fraticelles pour leur opinion seule, et parce qu'ils soutenaient que Jésus-Christ et les apôtres n'avaient rien possédé en propre ; c'est une imposture. On les punissait de leur conduite séditieuse. L'empereur Louis de Bavière ne fut pas plutôt brouillé avec le Pape Jean XXII, que les chefs des Fraticelles se réfugièrent auprès de lui, et continuèrent à outrager ce Pape par des libelles violents. L'an 1328, ils se rangèrent du parti de Pierre de Corbière, Franciscain, que l'empereur avait fait élire antipape, pour l'opposer à Jean XXII. Si donc ce Pape les poursuivit à outrance, ce ne fut pas pour de simples opinions.

Quelques beaux esprits incrédules ont voulu jeter du ridicule sur le fond de la contestation; ils ont dit qu'elle consistait à savoir si ce que les Franciscains mangeaient leur appartenait en propre ou nom, et quelle devait être la forme de leur capuchon. C'est une plaisanterie déplacée. Il s'agissait de savoir si ces religieux pouvaient, sans violer

la règle qu'ils avaient fait vou d'observer, posséder quelque chose en propre ou en commun, et s'ils étaient obligés de conserver l'habit des pauvres, tel que saint François l'avait porté. Cette question n'aurait eu rien de ridicule si elle avait été traitée de part et d'autre avec plus de décence et de modération.

En effet, l'habit des Franciscains, qui nous paraît aujourd'hui si bizarre, était dans l'origine celui des pauvres ouvriers de la Calabre, une simple tunique de gros drap qui descendait jusqu'au-dessous du genou, et qui était liée sur les reins par une corde; un capuchon attaché à cette tunique pour se parer la tête du soleil et de la pluie; il n'était pas possible d'être vêtu plus pauvrement. On sait que dans les pays chauds le peuple marche pieds nus, et il en est de même dans nos campagnes pendant les chaleurs de l'été. Sur les côtes de l'Afrique, tout le vêtement d'un jeune homme du peuple consiste dans un morceau de toile carré, lié autour de son corps par une corde; l'habit du peuple de Tunis ressemble exactement pour la forme à celui des Capucins. Dans la Judée, les jeunes gens étaient vêtus comme les jeunes Africains. (Marc. xiv, 51; Joan. xx1,7.) En Egypte, ils n'ont d'autre vêtement avant l'âge de dix-huit ans, et les solitaires de la Thébaïde ne couvraient que la nudité. Il en est de même dans les Indes, et c'est pour cela que les sages de ce pays ont été appelés Gymnosophistes, philosophes sans habits. Il n'y avait donc rien d'affecté, rien de bizarre dans celui de saint François. Les Franciscains mitigés voulurent en avoir un plus propre, plus commode, un peu plus mondain: les spirituels ou rigides voulaient conserver celui de leur fondateur. FRUITS DU SAINT-ESPRIT. PRIT-SAINT.

-

Voy. Es

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FUITE DES OCCASIONS DU PÉCHÉ. Une des précautions que les auteurs ascétiques et les directeurs de conscience recommandent le plus aux pénitents, est de fuir les occasions qui leur ont été funestes; les lieux, les personnes, les objets, les plaisirs pour lesquels ils ont eu une affection déréglée. Ce n'est point là un simple conseil, mais un devoir indispensable, sans lequel un pécheur ne peut pas se flatter d'être converti. Le cœur n'est pas détaché du péché lorsqu'il tient encore aux causes de ses chutes; et s'il ne dépend pas absolument de lui de ne plus les aimer, il est du moins le maître de ne plus les rechercher et de s'en éloigner. Un Chrétien qui a fait l'expérience de sa propre faiblesse, doit craindre jusqu'au moindre danger; des choses qui peuvent être innocentes pour d'autres ne le sont pas pour lui. L'Ecclésiastique nous dit que celui qui aime le péril y périra (11, 27). JésusChrist nous ordonne d'arracher l'œil et de couper la main qui nous scandalise, c'est-àdire qui nous porte au péché. (Matth. v, 29):

FULGENCE (Saint) [Fabius-ClaudianusGordianus Fulgentius], né en Afrique, vers 468, de parents nobles, quitta le monde, où

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il aurait pu briller par ses talents, pour s'enfermer dans un monastère. Il fut ordonné prêtre à Rome en 500, et évêque de Ruspe, en Afrique, en 508. Son zèle contre l'arianisme déplut à Trasimond, roi des Vandales, qui l'exila en Sardaigne. Hildéric, successeur de Trasimond, le rappela en 523. Pendant

GABRIELLE DE BOURBON, fille de Louis I", de Bourbon, comte de Montpensier, épousa, en 1485, Louis de la Trémouille, tué à la bataille de Pavie, en 1525. Elle mourut au château de Thouars, en Poitou, en décembre 1516. On a d'elle plusieurs ouvrages de piété, et, entre autres : 1° L'instruction des jeunes pucelles; 2° Le temple du SaintEsprit;-3° Le voyage du pénitent; - 4° Les contemplations de l'âme dévote, etc. Gabrielle avait autant de vertu que d'esprit.

GÉRARD LE GRAND, célèbre par ses vertus, ses écrits et ses sermons, naquit à Deventer en 1340, et mourut en 1384, à quarante-quatre ans. Il institua les Clercs réguliers, appelés les Frères de la vie commune. Il donna pour directeur à ses disciples Florent Radewyns, de Deventer, qui a été le maître spirituel de Thomas A'Kempis. Nous avons de Gérard plusieurs ouvrages de piété, dont quelques uns sont imprimés parmi les œuvres de Thomas A'Kempis.

GERSON (Jean), né dans un petit village du diocèse de Reims, devint chevalier de l'Eglise de Paris. Il assista au concile de Constance, où il se distingua par plusieurs discours. Les amis de la vie contemplative trouvent en lui un maître qui leur offre de bons et nombreux ouvrages. Ils s'adressent surtout aux religieux et aux directeurs des ames. Voy. Catal.

GERSON (DE), Bénédictin de Verceil, auquel certains critiques ont attribué l'Imitation de Jésus-Christ. Voy. IMITATION. (Bibliog.) GILDAS (Saint), surnommé le Sage, né à Dumbriton, en Ecosse, l'an 520, prêcha en Angleterre et en Irlande, et y rétablit la pureté de la foi et de la discipline. Il passa ensuite en France, et s'établit auprès de Vannes, où il bâtit le monastère de Rhuys. Il en fut abbé, et y mourut le 29 janvier 570 ou 581. Il reste de lui quelques canons de discipline, insérés dans le Spicilége de dom Luc d'Achery, et un Discours sur la ruine de la Grande-Bretagne, dans la Bibliothèque des

Pères.

GIRARD DE VILLETHÉRY (Jean), prêtre de Paris, mort en 1709, âgé de soixante-huit ans, enrichit l'Eglise d'un grand nombre de livres de piété. Ses traités recueillis pourraient composer un corps de morale pratique pour toutes les conditions et tous les états. Il appuie ce qu'il dit, non-seulement par les principes de la raison, mais aussi par l'Ecriture sainte, par les Pères et par les conciles. Ses principaux ouvrages sont :

son exil, saint Fulgence avait composé plusieurs ouvrages de piété, publiés en 1684, in-4°, à Paris, par le P. Sirmond. Le principal livre du saint évêque est son Traité de la prédestination de la grâce. Il mourut en 533.

G

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1° Le véritable pénitent;
ciel; 3° La vie des vierges;
2o Le chemin du
4° Celle des
gens mariés, des veuves, des religieux, des
religieuses, des riches et des pauvres; -
5o La vie des saints; ·6° La vie des clercs;
7° Traité de la vocation; 8° Le Chrétien
étranger sur la terre ;
9° Traité de la flat-
terie; 10° Traité de la médisance; -11° La
vie de Jésus-Christ dans l'Eucharistie; -12° Le
Chrétien dans la tribulation; 13° Traité
des églises et des temples; — 14° Traité du res-
pect dû aux églises; 15 La vie de saint
Jean de Dieu;
gales;
16° Traité des vertus théolo-
gales; 17° La vie des justes.

-

GIRAUDEAU (Bonaventure), Jésuite, né à Saint-Vincent-sur-Jard, en Poitou, mourut en 1774, âgé de soixante-dix-sept ans, après avoir publié quelques ouvrages. On a de lui, entre autres, L'Evangile médité, 1774, 12 vol. in-12. Ce livre de piété a eu du succès.

GNOSIMAQUES. Certains hérétiques, qui blåmaient les connaissances recherchées des mystiques, la contemplation, les exercigrwoμaxoi, ennemis des connaissances. Ils ces de la vie spirituelle, furent nommés voulaient que l'on se contentât de faire de bonnes œuvres, et que l'on bannît la méditation et toute recherche profonde sur la doctrine et les mystères de la religion. Sous prétexte d'éviter les excès des faux mystiques ils tombaient dans l'excès contraire.

plan de faire l'histoire du gnosticisme, il GNOSTICISME. Il n'entre pas dans notre nous suffit de constater le faux mysticisme mělé à toutes ses erreurs. La Divinité, selon le système religieux de Carpocrate, ne se manifeste pas dans le monde des sens, œuvre des esprits déchus. L'esprit, dégagé de toute influence terrestre, peut s'élever à la science de Dieu. Eviter tout contact avec les choses rale vulgaires, qui ne produisent qu'une de la terre, renoncer à la religion et à la mosimple légalité, mais qui ne justifient ni ne purifient; telles sont les conditions pour revenir à l'union divine, par l'essor de la lirale. Peu d'hommes arrivent à ce terme, berté et les efforts d'une vertu vraiment mocomme Pythagore, Platon et le Christ, dont restre, étaient dans un rapport intime avec les âmes, durant même leur apparition terDieu. Une vertu divine avait réveillé en eux la réminiscence de leur vie antérieure, et les avait rendus capables de s'élever au-dessus de l'horizon borné de la vie commune et d'arriver à l'adoration du vrai Dieu. Tous les hommes du reste ont la même destination.

Carpocrate se fit de nombreux partisans en Egypte et à Rome. Son fils Epiphane propagea surtout sa doctrine dans l'ile de Céphalonie, enseignant, ainsi que Platon, la communauté des femmes et des biens, comme le vrai moyen d'honorer la Divinité.

La doctrine de Basilide consistait dans un dépouillement de tout ce qui est physique et corporel, afin que l'âme put s'élever, dans la contemplation immédiate, à l'évidence divine, et que la volonté libre et dégagée fit le bien sans contrainte de la loi extérieure. Mais on n'arrive, à cette pureté parfaite dans le royaume de la lumière, que par une série de métempsycoses. La morale des basilidiens fut d'abord un ascétisme d'une sévérité extrême, qui se relâcha dans la suite. Il est question des basilidiens jusqu'au Iv siècle.

Marcion imposait aux croyants, qu'il n'admettait qu'après un long et sévère catéchuménat, une conduite morale très-sévère; l'abstinence du mariage, de tout plaisir, de toute joie, de tout aliment non indispensable, en se fondant sur un évangile altéré de saint Luc et sur de fausses lettres de l'apôtre. saint Paul.

Ces idées de contemplation immédiate, cette continence affectée, ces austérités et ces abstinences du gnosticisme se retrouvent plus ou moins mêlées aux erreurs de Manès et de Montan. (Voy. MANICHÉISME et MONTANISME.)

GOBINET (Charles), principal du collége du Plessis, docteur de Sorbonne, naquit à Saint-Quentin, et mourut à Paris, en 1690, à soixante-dix-sept ans. Il instruisit la jeunesse confiée à ses soins, par ses exemples et par ses ouvrages. Les principaux sont : 1° Instruction de la jeunesse, in-12; -2° Instruction sur la pénitence et sur la sainte communion, in-12.

GONNELIEU (Jérôme DE), né à Soissons, en 1640, Jésuite en 1657, mort à Paris, en 1715, parcourut avec succès la carrière brillante de la chaire, et celle de la direction, moins éclatante, mais aussi difficile. La pureté de sa vie répondait à ses enseignements. Ses ouvrages, fruits de sa piété et de son zèle, sont en grand nombre. Le plus connu est son Imitation de Jésus-Christ, avec réflexions et prières, in-12.

GOURDAN (Simon), né à Paris, en 1646, entra dans l'abbaye de Saint-Victor en 1661, et y mena une vie édifiante. Il y mourut en 1729, laissant plusieurs ouvrages de sa composition. On a de lui, entre autres, des ouvrages ascétiques remplis d'onction. Sa Vie a été publiée en 1756, à Paris, in-12.

GOUVERNEMENT RELIGIEUX.-On pourrait d'abord nous demander pourquoi nous osons traiter cette matière. Essayer nonseulement de tracer la ligne de conduite aux supérieurs en religion, mais encore relever les défauts de leur administration, n'est ce pas embarrasser la marche des supérieurs, scandaliser les inférieurs, leur fournir des thèmes de critique et des motifs de s'affranchir de la sainte obéissance. Voilà l'objection

:

que se propose Schram dans sa Théologie mystique, et il répond par ces graves paroles Le Sauveur du monde, en publiant dans l'Apocalypse les fautes des sept prélats d'Asie, et en les faisant connaître à la face de l'univers, a cru que le spectacle de leurs qualités et de leurs vices serait un exemple utile à la catholicité.

Il est bon que les supérieurs répréhensibles voient leurs défauts dépeints au naturel, afin que, se connaissant bien eux-mêmes, ils reviennent aux règles tracées par les anciens; il est bon encore que les candidats indignes de la prélature, qui ne rougissent pas de regarder par la fenêtre de l'ambition pour pénétrer dans la cour de la religion, comprennent que leur conduite trouve des censeurs. Ensuite le même auteur, prenant Godinez pour principal guide, entre en matière, et nous reproduisons fidèlement son travail.

Les communautés sont souvent gouvernés selon les inclinations capricieuses de leurs supérieurs. Le prudent Godinez commence par faire l'observation suivante: La plupart de ceux qui sont constitués en des fonctions éminentes se laissent aller au penchant naturel de leur condition ou de leur inclination: celui qui est cruel se livre à ses petites vengeances; le cupide amasse de l'or; le vain poursuit les louanges; celui qui est doux, par caractère, se montre toujours affable et facile; le sot fait des choses précipitées et inconsidérées; l'ignorant, s'il voit qu'on s'adonne aux études ecclésiastiques et religieuses, s'empresse de dire qu'il faut servir Dieu en esprit et en vérité, que la religion demande l'humilité et non des lettres qui enflent les hommes d'orgueil, comme si les religieux lettrés et humbles n'étaient pas les colonnes de la religion. Si un religieux savant parvient à la direction, il méprise les simples, et dit qu'un esprit sans lettres est une épée imprudente qui frappe à tort et à travers sans discernement; un supérieur austère et rigide croit que la communauté est perdue si on n'y voit pas abonder les austérités et les pénitences; au contraire, un supérieur doux et bienveillant assure qu'on ne doit pas conduire les enfants de Dieu par la rigueur, comme si la rigueur n'était pas quelquefois de saison. Il y a des supérieurs qui détournent le sens des constitutions et des règles, selon les goûts de leurs penchants, ils trouvent toujours quelque article qui justifie leur manière de voir. Si le supérieur est jeune, ardent et bon religieux,'il sera communément trop confiant dans son sentimentet ses forces; s'il est, par nature, solitaire et mélancolique, il voudra'que tout le monde aime la solitude et le silence absolu; s'il a un caractère porté à la critique, il se jouera avec les paroles mordantes et les calomnies: il croira facilement les fautes d'autrui et sera précipité dans leurs punitions; il aimera mieux punir que de corriger, et ne se mettra pas en souci de la paix. Les supérieurs soupçonneux seront continuellement crucifiés de pensées noires ils savent plus de

torts qu'ils ne peuvent en corriger, et cela les accable. Mais ceux qui ont la sagesse se plaisent à paraître ignorer ce qu'ils ne peuvent changer, et ainsi ils demeurent en paix avec eux-mêmes et avec les autres. Enfin, chaque prélat gouverne ordinairement selon son humeur et son inclination, bonne ou mauvaise.

Maintenant parcourons les différentes espèces de défauts qui se glissent dans le gouvernement religieux.

Le premier, c'est la faiblesse d'intelligence et de jugement. Ceux-ci, quoiqu'ils aient continuellement les yeux sur les règles d'un bon régime, à peine peuvent-ils saisir quelque chose de bon; ce n'est que par hasard que quelquefois ils comprennent le bien, l'entreprennent et l'exécutent naturellement et résolument.

Le second défaut est la politique humaine. Les politiques gouvernent en religion, comme on gouverne les choses humaines dans la région politique, par la finesse et les calculs de la prudence séculière ils s'éloigent ainsi de la sincérité et de la vérité que requiert le régime des enfants de Dieu. Dieu alors a coutume de leur lâcher la main, car ne demandant conseil que de leur propre prudence et non de son esprit saint, ils s'écartent du chemin droit et deviennent .a risée des bons.

Le troisième est le gouvernement purement spéculatif. C'est le gouvernement des habiles, des argutieux, qui discourent à perte de vue; ils font de belles spéculations dans le gouvernement, et partent de là pour condamner la manière de gouverner des autres, quoique dans la pratique ils soient très-ignorants et incapables; lorsqu'ils étaient sujets ils savaient bien critiquer les supérieurs et vanter leurs propres principes; depuis qu'ils gouvernent, les choses vont encore plus mal. Critiquer c'est chose facile, mais gouverner avec bon sens, raison et sagesse, c'est une chose trèsdifficile.

Quatrième défaut : La gravité affectée. Ceux qui ont ce penchant font de la politique avec gravité pour s'acquérir une plus grande considération. Lorsqu'ils deviennent supérieurs, sous prétexte de dignité, ils ajoutent à leur personne une gravité étudiée qui les rend odieux à leurs subordonnés ; ils sont prompts à exiger les égards dus à leur personne, lents à rendre aux autres les politesses qu'ils leur doivent leur esprit et leur jugement est étroit, et ils comptent peu d'amís.

Cinquième défaut : Une vigilance indiscrète. Certains supérieurs mal disposés envers leurs inférieurs, minutieux, s'enquérant de tout, voulant tout savoir, même les plus petits défauts de leurs subordonnés, ne savent pas ignorer bien des choses auxquelles ils ne peuvent porter remède. Ils sont à charge à eux-mêmes et aux autres, leur habileté à découvrir les petits défauts les rendent tristes et affligés: mais les supérieurs bons, qui ne craignent pas d'ignorer

certaines choses sont pacifiques et indulgents; ils produisent plus de fruits.

Le sixième défaut est un esprit de réforme prématurée. C'est une espèce d'hommes réformateurs de la petite espèce, Zélés à contre-temps, qui pour enlever un petit abus ne comptent pour rien de troubler toute une communauté. Ils sont aussi impudents que chagrins; ils abandonnent facilement les affaires qu'ils ont embrouillées, et c'est en cela que consiste toutes leurs réformes.

Septième défaut : L'avarice, ce sont des hommes misérablement tenaces qui, en mesurant mesquinement les vivres, remplissent la communauté de murmures; personne ne peut vivre avec eux, pour leurs mœurs abjectes et sordides.

Le huitième défaut est la prodigalité; ceux là sont immodérément magnifiques et prodigues. S'ils font construire, ils ont en vue des monuments plus brillants qu'utiles et nécessaires, ils songent à se bien placer dans l'opinion de la postérité. Il faut se garder de confier aux hommes de ce caractère, ou les finances, ou le gouvernement, car ils perdront l'or, et ruineront le gouvernement.

Le neuvième défaut est la superbe et l'ambition. Les supérieurs qui penchent de ce côté sont pleins d'impétuosité et de colère, ils aiment à satisfaire leur vanité et leur ambition, au prix de l'obéissance et même de l'humiliation d'autrui ils se plaisent dans les disputes et les litiges; objets, tour à tour de crainte et de haine, ils finissent quelquefois d'une maniere tragique.

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Dixième défaut : La colère. Ceux qui ont ce penchant sont impérieux dans le commandement, irascibles dans la réprimande, faisant toujours triompher leur propre manière de voir. Ils ont plus d'aptitude à gouverner une province qu'une communauté d'enfants de Dieu.

Le onzième défaut est le manque de zèle. Hommes bons, si vous voulez, humains, simples, sous l'autorité desquels les consciences vivent tranquilles, ils n'ont ni la force ni la conception de faire faire des progrès dans le bien, et de réprimer le mal, et enfin ils perdent tout.

Le douzième défaut est la pusillanimité. Certains supérieurs sont faibles de cœur, et la moindre difficulté les trouble: ils sentent vivement les défauts de leurs subordonnés, sans avoir le courage de les combattre. Ils peuvent avoir un assez bon gouvernement, s'ils sont aidés par des hommes plus eapables.

Treizième défaut : l'obstination. Il y a certaines personnes tellement amies de leur propre sentiment, qu'elles ne peuvent souf frir qu'on en émette un opposé devant elles; et comme elles sont trop impérieuses, elles rencontrent peu de monde qui leur obéisse promptement: elles sont réservées à éprouver bien des échecs et à avoir bien des ennemis.

Quatorzième défaut : La commodité de la chair. C'est le défaut de quelques hommes ardents, enflés, superbes, qui usent du com

autres au sien. Ces hommes, ayant Dieu en aide, expédient facilement les choses.

mandement, comme de la verge de leur puissance; ils flattent leurs affections, recherchent les délices, les amitiés, les agréments de la vie et l'ambition; ils donnent à leurs amis des marques publiques de leurs affections, et obséquiosítés, ils veulent en être environnés ceux-ci sont liés par des vices ostensibles et par beaucoup de péchés secrets.

Le quinzième défaut, c'est d'être accusateur. C'est le travers de certains supérieurs qui exagèrent les défauts des autres, qui ajoutent foi trop légèrement aux propos accusateurs; et pour qu'un remède leur plaise, il faut qu'il ressemble à un supplice ces hommes-là sont cruels, vindicatifs, à l'intention sinistre; ils n'ont ni jugement, ni entrailles.

Seizième défaut : L'importunité. Avec ce défaut on a des hommes à paradoxes, qui gouvernent selon le caprice de l'humeur qui prévient bien ou mal. S'il leur vient à l'esprit de faire quelque chose à leur manière, ils ne consulteront ni les goûts de leurs amis, ni les inconvénients qui vont surgir, pourvu que leur volonté se fasse.

Dix-septième défaut : L'ignorance. Certains spirituels ne tiennent aucun compte de la science, et ils sont ignorants jusqu'à la stupidité lorsqu'ils ne pensent qu'à être purement spirituels. Ces hommes-là sont propres à devenir saints, mais non propres au gouvernement: il ne suffit pas d'être un bon religieux, pour devenir un bon prélat.

Dernier défaut : La propre complaisance. C'est celui de certains hommes présomptueux, pleins d'eux-mêmes, qui se complaisent dans leur jugement, leur esprit et leurs talents. Ils vont au but quand la route est facile et sans obstacle; mais les affaires difficiles leur sont des occasions de chutes: du reste, ils sont ignorants, à petites idées et difficultueux; et, avec leur tête étroite, ils se croient capables de gouverner le monde. Venons maintenant aux qualités du bon gouvernement:

Bien gouverner est un don pratique que nous apportons en naissant, et dont le complément et la perfection s'acquièrent par une longue expérience des affaires et de la connaissance des hommes. Le fondement de ce talent est une nature tranquille et douce, une bonne intelligence, plus vraie que pointilleuse; enfin il faut un jugement qui ait de la maturité.

Voici la série des qualités qui conviennent aux supérieurs.

La première est la prudence. Il n'est pas toujours nécessaire d'avoir des qualités brillantes et un grand génie pour gouverner; souvent la prudence supplée les autres qualités, si on a un jugement posé et bon. Alors, en agissant lentement, en usant de conseils à propos, on finit par bien gouverner.

La seconde qualité est l'humilité. Le supérieur humble se défie beaucoup de luimême et se confie beaucoup en Dieu, prenant conseil d'autrui dans les choses douteuses et difficiles; il préfère le conseil des

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La troisième qualité est une vieillesse expérimentée. Les anciens, qui ont beaucoup vu, qui ont assez de jugement pour comparer les choses entre elles, trouvent dans les choses passées une expérience qui leur fait pressentir, et même connaître avec une espèce de science conjecturale les choses à venir. Ils parlent peu, agissent beaucoup, corrigent les choses présentes, se préservent des accidents à venir; ce sont de bons et grands administrateurs.

La quatrième qualité est l'éminence de la doctrine. Certains supérieurs sont en même temps doctes et spirituels, d'un esprit étendu, aux talents distingués, et pour enseigner et pour gouverner: ils sont aptes à conduire de grandes affaires; mais ils courent un danger, celui de l'absolutisme et de la ténacité: quand on a ces qualités, il est rare qu'on ne s'attribue ce qui ne nous est point dû.

La cinquième qualité est la sainteté. Il y a des hommes d'une sainteté non médiocre et amis de Dieu s'ils sont doués de talents assez ordinaires, la grâce les fortifie et les rend capables; mais si ces personnes sont d'un esprit faible, d'un petit jugement, ils seront saints dans l'ordre surnaturel; mais en tant que manquant de vue et de jugement, ils restent dans l'ordre naturel, incapables de gouvernement.

La sixième qualité est le zèle. S'il se trouve des supérieurs qui soient en même temps et prudents et enflammés du désir du bien commun, Dieu allume dans leur cœur le zèle pour le progrès de la religion; en sorte qu'il surmonte courageusement les difficultés pour arriver à un si noble but. Cependant il n'est pas rare que les supérieurs qui ont ces qualités aient quelques taches d'imprudence.

La septième qualité est l'expérience. On trouve quelques hommes, atteignant à peine l'âge de trente ans, ayant un jugement calme et bon, songeant à laisser d'eux-mêmes un bon souvenir; mais ils agissent, tantôt avec prudence, tantôt avec imprudence; ils se fatiguent la tête aussi bien pour les petites choses que pour les grandes on peut les employer utilement pour conduire les petites communautés, et s'ils profitent de l'expérience des autres, ils deviennent capables de conduire les grandes communautés.

La huitième est le bon exemple. Avec cette qualité, de donner le bon exemple, on fait beaucoup pour l'avancement spirituel des âmes que l'on a à conduire, pourvu qu'on ne soit pas d'ailleurs dépourvu des autres qualités. Car la pratique des vertus, l'assiduité à bien faire toutes choses dans les exercices de religion, soutient le courage des inférieurs, et de tels hommes font oublier bien des petits défauts qu'on pourrait du reste leur reprocher.

La neuvième qualité est la charité et l'affabilité. C'est la qualité qui accompagne ordinairement certaines personnes de condi

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