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NOTE

SUR

DEUX FRAGMENTS DE
DE POTERIE

TROUVÉS A AUTUN

I

Il y a trois ans, des ouvriers travaillant à des déblais de terrain pour la construction d'une maison, sise à Autun, boulevard de la République (aujourd'hui maison Cattin), rencontrèrent, en piochant, un fragment de poterie rouge, dite poterie samienne, qui malheureusement fut brisé sous l'outil, mais dont les débris attirèrent néanmoins leur attention par la finesse du décor et aussi parce que le nom du potier figurait sur l'un des tessons; car tous nos ouvriers savent depuis longtemps que les marques de potiers par eux découvertes trouvent toujours des amateurs.

J'ai été assez heureux pour recueillir ces débris qui, recollés par une application de plâtre à l'intérieur, constituent le beau fragment que vous avez sous les yeux.

Il appartient à un vase ou bol d'assez grandes dimensions; la portion de circonférence que nous possédons indique un diamètre de plus de 237 millimètres, et sa hauteur, si on la compare aux vases du même modèle, devait être de 0m21. Je dois le calcul de ces dimensions à l'obligeance de notre aimable collègue M. Roidot-Errard qui a bien voulu faire à notre intention le schéma de ce vase.

Ce qui rend ce morceau de poterie tout particulièrement intéressant, c'est qu'il provient de l'un des centres de fabrication les plus renommés de l'Italie antique, celui d'Arezzo, dont les vases et les débris de poterie sont aujourd'hui fort rares.

Le nôtre a pour sujet principal un lion de très belle allure, marchant à droite, la tête tournée à gauche, regardant avec complaisance un adolescent nu, assis sur son dos, le bras droit étendu et tenant en main un canthare. La crinière du lion est ornée de bandelettes se jouant agréablement dans les ondulations de cette riche parure.

L'air de fête qui se dégage du groupe semble nous indiquer qu'il appartenait au cortège d'une fête dyonisiaque. Nous savons, en effet, que ces fêtes ont fourni bien souvent des thèmes à la décoration des vases de cette époque. Peut-être est-ce le jeune Bacchus lui-même qui, la coupe en main, conduit sur ce lion superbe le cortège de ses adorateurs.

De la suite du cortège nous n'avons malheureusement que bien peu de chose, une main brandissant une lanière qui se déroule en capricieux méandres.

Mais, voici au-dessus de la panse du bol, à gauche du fragment, sur un titulus à queue d'aronde le nom de l'artiste qui a composé et exécuté le vase, Xanthus, écrit avec l'N, le T et l'H ligaturé, XANHI. Puis une belle série d'oves, soulignée par une rangée de perles vient ceindre le bol, sous un rebord formant corniche. Ce rebord n'est pas moins curieux par la mouluration dont il est composé : trois cordelières alternant avec trois moulures en creux et en doucine, sur une hauteur de 3 centimètres et demi, et reposant sur une faible corniche faisant saillie de 1 centimètre sur la panse du vase.

Dans l'introduction de son très remarquable ouvrage sur les Vases céramiques ornés de la Gaule romaine, dont notre savant vice-président, M. J. Déchelette, a bien voulu nous

donner communication, nous avons relevé de précieux renseignements, grâce auxquels nous avons pu connaître son origine.

Nous venons de dire qu'il provenait d'une des célèbres fabriques de poteries toscanes. Nous retrouvons, en effet, dans l'étude de la technique de ce vase l'habileté de procédé d'un art en pleine efflorescence. L'exécution en est admirable. Le relief des sujets, tantôt affaibli, tantôt renforcé, suivant les règles de l'art et de la perspective donne au modelé une empreinte artistique incomparable; ainsi, dans le lion, le tronc et surtout les membres inférieurs, d'un faible relief, se fondent doucement dans le galbe du vase effacés par l'énergie puissante de la tête et de la poitrine, la beauté superbe de la crinière, mises en avant par un fort relief et rehaussées par la touche délicate de l'ébauchoir. De telles œuvres reflètent évidemment l'inspiration de l'art grec. Il n'est pas jusqu'aux lèvres du vase qui n'indiquent la très grande habileté du potier, par la pureté des lignes du profil et la belle exécution des moulures.

Rien d'étonnant, après cela, que l'artiste ait tenu à signer en belle place cette œuvre magistrale C'est de lui que nous allons maintenant nous occuper, et à ce sujet M. Déchelette nous fournit dans son ouvrage les plus utiles indications.

Les poteries d'Arezzo étaient, nous l'avons dit, réputées parmi les plus célèbres de l'Italie. Pline et Martial nous l'ont appris dans leurs écrits, et vous avez sous les yeux une preuve probante de cette affirmation. Nombreux furent donc les potiers qui dotèrent Rome et l'empire de ces beaux vases qui, à l'imitation des Grecs, furent des objets de luxe, les riches bibelots de cette époque. Les fragments de vases épigraphiques, comme le nôtre, malheureusement trop rares, nous ont conservé les noms des officines, ceux des affranchis et des esclaves, car le chef de l'industrie, le maitre de l'officine, ne travaillait pas seul; il était secondé par ses affranchis et ses esclaves, artistes modestes, mais

souvent très habiles, passés maîtres en leur art, qui contribuaient au renom de l'officine et lui valaient la faveur dont elle jouissait près de la riche clientèle.

C'était le cas de celui qui nous occupe, Xanthus. Celui-ci n'était qu'un simple esclave appartenant à l'officine de Cneïus Atteius. Or, il résulte des recherches faites par M. Oxé, archéologue, à Crefeld, que l'atelier de Cneïus Atteius, dont on n'a pu encore retrouver les vestiges, mais qui est très connu par les produits sortis de ses fours, florissait sous Auguste.

Nous sommes donc en présence de l'un des premiers témoins de la construction d'Augustodunum et aussi de sa grandeur.

Déjà les fouilles du Beuvray nous avaient révélé que les légions romaines n'étaient pas arrivées les premières en Gaule, marchands romains et produits de l'Italie les avaient certainement devancées, puisque sous les ruines du vieil oppidum gaulois furent retrouvés plusieurs menus fragments de vases arétins.

Quoi qu'il en soit ce témoin de l'antique grandeur de notre vieille cité, de même que ceux, que l'on place encore de nos jours sous les pierres délimitant les héritages, vient nous prouver que les Romains qui, sous Auguste, fondèrent la ville, avaient apporté à la cité naissante, non seulement les marbres dont leurs architectes bâtirent et ornèrent temples, palais et thermes, mais encore leurs foyers avec tous les riches attributs qui les décoraient.

Mieux donc encore qu'une médaille, ce fragment de vase vient confirmer une date et faire concevoir l'importance primitive de la cité.

Mais bientôt instruits par leurs vainqueurs, les Gaulois, prompts à s'initier aux arts et à s'assimiler les procédés de l'industrie, fabriqueront eux-mêmes les belles poteries sigillées, les vases à décors incisés, les riches vases décorés à la barbotine. Désormais non seulement la Gaule

romaine sera amplement fournie par ses propres artisans, mais encore elle ne tardera pas à rendre l'Italie tributaire des produits de son industrie fictile.

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N. B. La réunion et le classement en une seule vitrine des débris de poteries trouvés à Autun et appartenant à la Société Éduenne, a permis de reconnaître que nous possédions déjà deux menus fragments anépigraphiques de vases d'Arezzo.

II

Voici maintenant un autre fragment de vase trouvé dans ce même quartier des Cités, qui n'a pas encore rendu tous les objets antiques cachés dans son sol.

Avec lui nous entrons franchement dans le domaine de la haute fantaisie. Il n'est plus question de belles traditions grecques ni de la savante ordonnance de la décoration classique. C'est le burlesque qui s'étale, comme si nos pères les Gaulois, que hantaient toujours des idées d'indépendance, épris aussi de cette gaieté parfois un peu grosse et quelque peu sceptique, avaient voulu se venger des figures maniérées des Dionysos, des Demeter et des Hermès.

Plus de trois siècles au moins nous séparent de l'époque où le vase d'Arezzo a été apporté à Augustodunum car celui-là est vraisemblablement de la fin du troisième siècle ou du quatrième.

Nous avons eu recours une fois de plus au précieux ouvrage de M. Déchelette. Mais les poteries de ce genre, assez rares, ne sont pas représentées par de nombreux

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