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léans, auxquels il était attaché par le souvenir de son grandpère, de son oncle, architecte du prince de Joinville, et par ceux de sa propre jeunesse.»

M. l'abbé Albert Brintet communique la notice suivante sur M. Grappin, principal du collège :

« Le 21 mars 1903, M. GRAPPIN, principal du collège d'Autun, mourait subitement, et les circonstances tragiques de cette mort impressionnaient vivement la cité. Depuis sept ans placé à la tête du collège, il avait su imprimer à cet établissement, par sa direction intelligente et son dévouement à toute épreuve, une impulsion nouvelle. Il avait fait à Valence, en 1869, comme maître répétiteur ses premières armes, puis était passé au collège de Gap dans les classes élémentaires. Muni de son diplôme de licencié, il revient à Valence où, pendant dix-huit années, il occupe successivement les chaires de cinquième, quatrième et troisième classiques. Pendant ce long espace de temps, son impartialité, son amour ardent pour son devoir professionnel et une connaissance plus qu'ordinaire de la langue latine lui avaient acquis une juste renommée. En 1891, il entre dans l'administration et reçoit la direction du collège d'Embrun, puis de Montbéliard. En ses fonctions délicates il avait su montrer les solides et maîtresses qualités qui le caractérisaient, et au bout de peu de temps, l'Université lui avait confié l'important collège de notre ville.

D

» Tous ceux qui l'ont connu et ont pu vivre dans son intimité ont apprécié cet homme au cœur loyal, ennemi de la dissimulation, le père de famille tendre et ferme, le principal consciencieux et éclairé. Au milieu des temps difficiles que nous traversons, son exquise sensibilité avait pu souffrir quelques atteintes, et son désir du bien être méconnu, mais il avait l'âme profondément chrétienne, source de patience et de courage. Frappé soudainement à un âge où l'on aurait pu attendre de lui de plus précieux services encore, il a emporté l'estime, et comme l'a dit un de ses amis :

» Sa plus chère devise était le devoir seul,
» Et fier de la garder de la moindre souillure,
L'emporta sans tache aux plis de son linceul. >>

M. le président communique le programme de la soixanteonzième session du Congrès archéologique de France, qui se tiendra au Puy, du 21 au 28 juin 1904, et pour lequel toutes facilités de voyage et de séjour seront ménagées au congressiste. Il fait part aussi de l'invitation, adressée par l'Académie d'Arras à la Société Éduenne, de participer au congrès des Sociétés savantes, qui s'ouvrira le 7 juillet, à Arras, à l'occasion de l'exposition régionale du Nord.

M. le président fait part de l'invitation que l'Académie de Vaucluse a adressée à la Société Éduenne de se faire représenter et d'envoyer des délégués aux fêtes qui auront lieu à Avignon, les 16 et 17 juillet, à l'occasion du sixième centenaire de la naissance de Pétrarque. La Société a remercié l'Académie de Vaucluse et s'efforcera de répondre à cette intéressante invitation.

M. Boël fait, en ces termes, le récit de la dernière excursion de la Société Éduenne à Vézelay :

« Dans le panthéon des petits dieux, la mythologie aurait dù faire une place au génie tutélaire des touristes. Elle nous eût conté qu'un peu malin, mais point méchant, le démon gracieux des longues promenades et des excursions aimait à récompenser d'un rayon de soleil couchant le voyageur que la pluie du matin n'avait pas arrêté, et qu'il se plaisait parfois à ménager des journées semblables à celle du 23 mai 1904, où la Société Éduenne a fait un pèlerinage archéologique à Vézelay et à Saint-Père.

» C'est sous la pluie que trente-deux excursionnistes 1, un peu déçus, un peu anxieux, très inondés, se réunissaient à la gare d'Autun. La même pluie déconcertante devait embrumer et noyer de ses averses le paysage, tout le temps que le train nous emportait, à travers le Morvan et l'Avalonnais, jusqu'à Sermizelle. Mais là, durant le déjeuner très bien servi à l'hôtel Fourrey, le ciel s'éclaire suffisamment. Lorsque nous montons en voitures,

1. Ont pris part à cette excursion : Mm des Abbayes, M. et MMes Charleuf, Mme de Chatillon, Me Papillon, MM. des Abbayes, Boëll, l'abbé Brintet, Bouvet, Antoine Bulliot, Joseph de Champeaux, Canet, de Charmasse, Cougnet, François et Michel Dejussieu, Duchemain, Fyot, Gadant, André Gillot, Huet, Lex, le capitaine Millischer, Olinet, Pasteur, Pierre, J. et E. Protat, Rivière, Roidot-Errard, Vernin, le capitaine Virey.

les arbres ont cessé de pleurer par toutes leurs feuilles, la route apparaît plus blanche, et l'horizon reste juste assez assombri pour donner un peu d'âpreté mélancolique à la campagne qui conduit à Vézelay.

» De très loin, la petite ville apparaît si haute et si bleue sur sa montagne, qu'il semblerait l'avoir déjà vue au dernier plan de quelque pieux tableau de quatrocentiste. Mais, à mesure qu'on approche en remontant la jolie vallée de la Cure, elle laisse son aspect mystique, pour se dessiner plus altière, découpant sur le ciel les deux tours impérieuses de son église. Et quand, aux derniers détours de la route escarpée, on la regarde, encore ceinturée de ses murs, on comprend ce qu'elle dut représenter autrefois de grandeur dominatrice, on s'explique les longues et opiniâtres luttes auxquelles ses abbés furent poussés par l'orgueil de leur souveraineté.

» Il fut, par un triste privilège de l'histoire, réservé à Vézelay de servir de théâtre à toutes les querelles qui, au moyen âge, agitèrent la société civile et le monde religieux. Augustin Thierry a popularisé l'énergie des bourgeois de cette petite ville, combattant pour leur indépendance contre l'abbaye de SainteMarie-Madeleine; il a peint, à côté d'eux, le représentant de la féodalité laique, le comte de Nevers, se faisant, par ambition et par vengeance, l'allié des gens de la commune et se servant d'eux pour humilier et ruiner les abbés de Vézelay. Mais ce n'était pas seulement la turbulence des bourgeois ou la rapacité du comte de Nevers qui inquiétaient les moines: c'étaient encore les tendances unitaires des Clunisiens prétendant imposer leur règle et leur suprématie à Vézelay comme ailleurs ; c'étaient aussi les efforts de l'évêque d'Autun pour y faire prévaloir son autorité diocésaine; c'était enfin la politique envahissante du roi de France qui, dans le conflit de tant de prétentions diverses, cherchait l'occasion d'une nouvelle conquête.

» Tous ces faits ont eu leurs chroniqueurs et ensuite leurs historiens. Ils ne nous intéresseraient que comme un très curieux chapitre de l'histoire générale du moyen âge en France, s'ils ne se rattachaient particulièrement par tout un côté à l'histoire du diocèse d'Autun, dont Vézelay fit partie jusqu'à la Révolution. >> Les premiers temps du célèbre monastère sont restés dans

une obscurité profonde. Nous savons cependant que, jusqu'à la fin du onzième siècle, ses relations avec l'évêque diocésain ne cessèrent pas d'être bonnes. Vers 970, un évêque d'Autun ajoutait aux libéralités du fondateur de l'abbaye les dîmes de quatre églises situées dans son diocèse. Plus tard, lorsqu'en 1027, les Clunisiens essayèrent de s'annexer Vézelay par la force, les moines expulsés et fugitifs n'eurent pas de protecteur plus énergique que l'évêque d'Autun. La lutte éclata seulement en 1103, sous l'abbé Artaud. Un prélat impérieux et agressif, Norgaud, entreprit d'obtenir que les abbés de la Madeleine lui fissent profession d'obéissance, en renonçant à leur prétention de ne relever directement que de Rome. Devant leur refus, il imagina de tarir la source où l'abbaye puisait la majeure partie de ses richesses : il défendit aux fidèles de se rendre en pèlerinage à l'église de Vézelay et de déposer des offrandes au tombeau où l'on disait que les reliques de sainte Madeleine avaient été déposées, au temps de Girard de Roussillon. Il fallut une bulle de Pascal II pour trancher le conflit en faveur de l'abbaye. Néanmoins, ce fut encore l'évêque d'Autun qui bénit l'abbé Baudoin, en 1129, Albéric à Auxerre, en 1132, et Ponce de Montboissier, en 1138. Avec ce dernier, Humbert de Bâgé, croyant être plus heureux que Norgaud, recommença la lutte. Elle dura quinze ans, jusqu'au jour où, sans attendre la sentence du pape Anastase, l'évêque fit proposer la paix. Cependant le débat subit encore des péripéties étranges repris vers 1180, il donna lieu à une série de bulles pontificales, qui toutes proclamèrent l'indépendance absolue de l'abbaye vis-à-vis de l'autorité diocésaine. A partir de 1245, les moines furent légalement fondés à dire en vérité qu'ils étaient << dans le diocèse, mais non du diocèse d'Autun. » Il en fut ainsi, même après 1537, lorsque l'abbaye eut été sécularisée et réduite au rang de simple collégiale, jusqu'en 1673, où un prélat bien en cour, M. de Roquette, obtint du conseil d'État un arrêt rendant aux évêques les droits hiérarchiques qu'ils n'exerçaient plus depuis six cents ans.

>> Au temps des guerres de religion, la situation de Vézelay, autant que son renom, excitaient encore les convoitises des deux partis catholiques et huguenots. Déchue de sa richesse et de sa puissance d'autrefois, ce n'est plus aujourd'hui qu'un grand

village morne et presque désert. Les maisons qui dominent le rempart de l'est, là où s'élevaient sans doute les demeures bourgeoises qu'habitèrent de riches changeurs, laissent voir par leurs vitres brisées le délabrement résultant de leur long abandon. Quand on traverse la ville, par la rue principale qui monte de la porte de Barle jusqu'à l'église, c'est à peine si la présence d'un gendarme, immobile devant l'ancien « Hôtel de la Maréchaussée, » suffit à témoigner que tout être vivant n'a pas depuis longtemps déserté ces lieux. Ce sont les choses et les gens des temps passés qu'évoque cette rue Saint-Étienne. Voici, à gauche, la maison aux fenêtres surbaissées où, en l'année 1519, naquit le célèbre réformateur, lettré, controversiste, logicien, raisonneur, Théodore de Bèze. Un autre logis ramène à des pensées moins austères. C'est celui où l'un de ses anciens maîtres a fait inscrire autour de l'encadrement des fenêtres cette devise : « Comme Colombe, humble et simple seray; à mon nom, mes meurs conformeray. » Plus ancienne, mais moins modeste est une autre inscription gravée au-dessus de la porte. Non quantum sed quod bene, dit-elle aux passants qui s'arrêtent devant elle. Conveniant rebus nomina faxo suis: « Ne regardez pas au prix, mais plutôt considérez le confort de mon hospitalité; je ne mentirai pas aux promesses de mon enseigne. » Luxueuse hôtellerie, sans doute, la maison Colombe devait s'ouvrir aux pèlerins de qualité qu'attiraient les reliques de sainte Madeleine, à la noble suite des puissants seigneurs venant rendre visite à l'abbé, aux marchands opulents qui trouvaient périodiquement à échanger leurs denrées et leur monnaie aux foires de Vézelay. Mais que pouvait bien être cette autre petite maison, qu'une érudition plus municipale que scrupuleuse menace de faire écrouler sous le fardeau des souvenirs historiques? Ici, nous dit une première plaque commémorative, ici logea Louis VII, quand saint Bernard prêcha la croisade, en 1146; ici encore, ajoute une seconde plaque, vinrent tomber les boulets huguenots que vous voyez fichés dans la muraille. En vérité, c'est beaucoup d'illustration pour une seule maison.

» Cela, heureusement, ne suffit pas pour distraire l'archéologue du spectacle de la majestueuse église dressant, non loin de là, sa façade grandiose. Après tout ce qui en a été si parfaitement 28

TOME XXXII.

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