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Léon de Nole, parce que celui-ci résistoit pour n'être point réordonné. Il allègue l'exemple du pape Anastase, qui avoit confirmé les ordinations faites par l'hérétique Acacius, et les preuves dont ce pape s'étoit servi. Il ajoute que les réordinations sont un crime semblable aux rebaptisations. Enfin il parle comme nous, et ne permet pas de douter que la tradition en ce point ne demeurât alors constante, malgré quelques exemples où des particuliers paroissent ne l'avoir pas consultée. Luitprand condamne cette conduite. « Ce n'est pas là, dit-il, ce que le >> droit permet, mais ce que la rage persuade. Ce » n'est pas une erreur dans la foi, mais une violente tyrannie dans le fait.... La bénédiction, ajoute» t-il, que le ministre donne, est répandue, non par » le pontife qu'on voit, mais par celui qu'on ne voit » pas; car ni celui qui arrose, ni celui qui plante » n'est quelque chose, mais Dieu, qui donne l'ac» croissement. » Vous reconnoissez dans ces paroles le langage de la tradition. N'est-ce pas ainsi que saint Augustin parloit contre les Donatistes? Il est vrai que la passion et l'ignorance des intrus faisoit que, sans examiner les règles, ils vouloient que leurs prédécesseurs fussent regardés comme n'ayant jamais été pasteurs, et que leurs ordinations passassent pour nulles. Mais ce n'est pas une discipline qu'on puisse reprocher à l'Eglise ; c'est seulement un excès de grossièreté et une vengeance personnelle que l'Eglise a condamnée avec horreur dès ces temps-là. Les auteurs que je viens de nommer le montrent assez. De plus, Jean IX, dans un concile Romain, condamna tout ce qui avoit été fait dans

l'affaire

l'affaire de Formose. Il faut toujours conclure que ce qui s'étoit fait d'irrégulier s'étoit fait par ignorance, selon l'expression de saint Augustin. Ainsi la règle générale demeure dans son intégrité. Jamais aucun auteur catholique n'a enseigné qu'une ordination valide peut être réitérée. C'est suivant cette règle, que le concile de Nicée admet les ordinations des Novatiens, et ne veut pas qu'on les réitère (1). C'est encore par la même raison que saint Jérôme soutient, contre les Lucifériens, l'ordination des évêques ariens. C'est sur ce principe si bien développé par saint Augustin, comme nous l'avons vu, que les évêques catholiques offrirent en Afrique aux évêques donatistes de descendre de leurs chaires pour les leur céder. Il n'étoit point question de les réordonner, quoiqu'ils eussent reçu l'imposition des mains hors de l'unité catholique. Ecoutons du Moulin même. « Nous tenons, dit-il (2), que l'ordination ne » doit être réitérée, quand par cette ordination on a » reçu simplement une charge dont l'institution se » trouve en la parole de Dieu. » Puis il cite les exemples que nous avons rapportés du concile de Nicée et de saint Jérôme, contre les réordinations. C'est encore suivant la même règle invariable que l'Eglise s'est conduite dans le neuvième siècle. Let concile huitième avoit condamné l'intrusion de Photius, et avoit déclaré qu'il n'avoit rien donné dans les ordinations qu'il avoit faites, parce qu'il n'avoit rien reçu dans la sienne. Par ces paroles si fortes l'Eglise vouloit seulement témoigner son horreur de

(1) Can. VIII. Conc. tom. 1, p. 31, tre liv. de la Voc. des Pasteurs.

FÉNÉLON. HI.

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(2) Chap, in du tr. 111. du

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l'ordination illégitime de ce schismatique. La suite le montre évidemment. Par là elle exprimoit le défaut de juridiction qui étoit en sa personne et en celle de tous les ministres qu'il avoit ordonnés. Mais il parut bien dans la suite que l'Eglise, qui croyoit ces ordinations illégitimes et nulles quant à la juridiction, ne les croyoit pourtant pas nulles pour le caractère, et qu'elle persévéroit dans l'ancienne doctrine contre les réordinations; car Jean VIII, écrivant aux empereurs, déclare qu'il reçoit Photius, et le reconnoît pour patriarche de Constantinople. On ne peut point dire qu'il présuppose tacitement que Photius se fera réordonner, puisqu'au contraire il le reconnoît d'abord pour son confrère dans l'office pontifical et dans l'autorité pastorale du sacerdoce, pourvu qu'il satisfasse en demandant miséricorde. De plus, il use, dit-il, de cette condescendance, contre la rigueur des lois ecclésiastiques, pour imiter le concile Africain, qui offrit de recevoir dans leurs fonctions les clercs donatistes; et le pape Innocent, lequel, pour effacer le scandale de l'Eglise, reçut ceux qui avoient été ordonnés par l'hérétique Bonose. Vous voyez donc qu'il reçoit Photius sans réordination, comme saint Augustin nous apprend que les pères d'Afrique recevoient sans réordination les Donatistes qui avoient été ordonnés dans le schisme. Ce n'est point une chose faite sans réflexion. Elle est résolue avec les patriarches, les métropolitains, les évêques, et le clergé même de Constantinople, autrefois ordonné par Méthodius et par saint Ignace. Elle est résolue` après avoir consulté la tradition, et dans le dessein d'imiter l'Eglise d'Afrique,

- Ainsi il est manifeste que toute l'Eglise entroit alors dans la règle que saint Augustin nous marque comme une loi générale et inviolable de ne réordonner jamais ceux qui ont reçu une ordination qu'on croit valide, quoique illégitime hors de la vraie Eglise. Le pape Jean ne douta point que Photius ne fût intrus et sacrilégement ordonné, car il l'oblige à demander miséricorde; car c'est du consentement des ministres ordonnés par saint Ignace qu'il le reçoit, étant, dit-il, informé que saint Ignace est mort: car il veut que les ordinations de ce saint patriarche soient reconnues bonnes, et qu'on rende leurs siéges à tous ceux qu'il a consacrés. Il est donc manifeste, par toutes les observations que nous venons de faire, que l'ordination est un sacrement qui imprime un caractère ineffaçable, qu'on reçoit validement hors de la vraie Eglise, comme le baptême, et qu'il n'est jamais permis de réitérer quand il a été une fois conféré validement.

CHAPITRE IX.

La tradition universelle des chrétiens est contraire aux Protestuns sur l'ordination.

QUAND on a une fois reconnu que l'ordination des pasteurs est un sacrement semblable au baptême, selon saint Augustin, qui assure que personne dans l'Eglise n'en doute, et selon l'aveu de Calvin même, on est étonné que M. Claude ait osé dire dédaigneusement qu'il y a « certaines cérémonies extérieures

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qui servent à rendre la vocation plus publique, plus majestueuse et plus authentique, comme le jeûne, la prière, l'exhortation, la bénédiction et

l'imposition des mains. » A peine le sacrement de l'imposition des mains trouve-t-il chez ce ministre quelque place dans ce dénombrement après la prière et le jeûne. M. Jurieu suppose de même que l'imposition des mains n'est qu'une simple cérémonie. « Il >> faut donc savoir, dit-il (1), que pour qu'il soit permis » à l'Eglise de regarder une cérémonie comme non » nécessaire, il suffit qu'elle ne soit point commandée » comme de nécessité. Mais afin qu'on soit obligé de » croire qu'elle est esscntielle, il faut qu'il y ait un » commandement positif qui l'ordonne, sur peine de » nullité dans l'action. »

Il faudroit demander à M. Jurieu en quel endroit de l'Ecriture il trouve cette règle qu'il propose si affirmativement. De plus, quand une cérémonie est d'institution divine, quand elle est un sacrement comme le baptême, quand elle renferme la grâce du ministère, comme Calvin le reconnoît sur les paroles de l'apôtre, quand elle imprime un caractère ineffaçable, et qui ne peut être réitéré, comme saint Augustin assure que personne dans l'Eglise n'en doute, elle ne peut plus passer pour une simple cérémonie.

De plus, je vais montrer que toute l'antiquité chrétienne a regardé l'ordination comme ce qui est essentiel pour la formation des pasteurs. S'il étoit vrai, comme M. Jurieu le prétend, que les anciens Pères eussent cru que les clefs appartiennent au peuple pour les confier à qui il lui plaît, et que le (1) Syst. pag. 584.

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