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moins longue de folies gouvernementales, le Monarque éternel fera ce que fait le chef d'un État quand une commune au lieu de s'administrer en paix, se déchire de ses propres mains. Pour sauver les familles, Dieu interdira la nation.

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XIV. La juste délimitation du pouvoir politique est donc ce qui intéresse souverainement une nation chrétienne; car il y va de sa vie religieuse et politique. La question de la forme du gouvernement a bien son importance relative, mais elle ne vient qu'après. Avant de parler des formes diverses que revêt le pouvoir politique dans son exercice, disons quelque chose de ce qu'il doit faire, quel que soit l'habit qu'il porte.

CHAPITRE II.

Ce que le pouvoir souverain ne doit pas faire.

Le premier devoir du souverain est de respecter assez ce que Dieu, la nation et le temps ont fait, pour ne pas entreprendre de le refaire.

Il est temps, ce semble, que les hommes qui tiennent à l'honneur de gouverner des peuples toujours chrétiens par quelque bout, daignent méditer un peu les grosses vérités suivantes, s'ils ont encore un reste de foi chrétienne. Que s'ils sont libres penseurs, je n'ai rien à leur dire, sinon que je prie Dieu de leur donner le loisir nécessaire pour sortir de leur ignorance.

I. La religion chrétienne est l'œuvre du Verbe éternel fait chair, expiré au Calvaire pour le salut de tous. C'est par elle qu'il lui a plu d'appeler toutes les générations humaines à la connaissance de la vérité et à la pratique de cette loi parfaite de liberté, qui doit les conduire à l'éternelle délivrance du mal. C'est par elle qu'il a parlé, qu'il parle à tous, souverains et sujets, et qu'il a voulu, comme dit Bossuet, tout décider, c'est-à-dire donner des décisions à tous les états, à plus forte raison à celui d'où dépendent tous les autres (1).

Nulle puissance ne peut donc, sans crime de lèse-divinité et de lèse-humanité, reviser l'œuvre divine. Quand de grands coupables entreprirent cette œuvre de l'enfer, au xvre siècle, quels maux terribles on eût évités, si les états généraux des pays menacés, assemblés extraordinairement, eussent dit à ces princes Pour toucher à la religion de Jésus-Christ, il est indispensable, sires, que préalablement vous soyez crucifiés, enterrés, que vous ressuscitiez ensuite, et encore se

(1) Politique tirée de l'Écriture sainte, discours préliminaire au Dauphin.

rait-on en droit de se moquer de vous, la foi au Dieu ressuscité nous ayant guéris de la foi aux revenants! Renoncez donc à ces sacriléges folies, sinon on vous donnera des suc

cesseurs.

II. La religion chrétienne n'est qu'un drapeau qui, des mains de mille sectaires religieux, passera à celles de Mazzini et des autres saccageurs de la société, si on la sépare du sacerdoce auquel Jésus-Christ l'a confiée, en lui disant : Toutepuissance m'a été donnée au ciel et sur la terre: allez donc, enseignez toutes les nations, les baptisant au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit; leur enseignant à observer toutes les choses que je vous ai commandées. Et voilà que je suis avec vous tous les jours, jusqu'à la consommation des temps (1).

III. Le sacerdoce catholique ne peut remplir sa divine mission dans chaque Etat et dans l'universalité des États, qu'autant qu'il jouit d'une grande liberté dans son gouvernement intérieur, et surtout dans le choix de ses premiers ministres.

Les gouvernants doivent être bien convaincus de ceci : tout avantage qu'ils croient obtenir contre les libertés ecclésiastiques et l'indépendance du sacerdoce, tourne tôt ou tard à leur ruine, parce que cela affaiblit singulièrement dans les peuples la vénération pour le sacerdoce, et parce que cela blesse au cœur le Pontife éternel, de qui relèvent tous les gouvernements.

Quand les chefs d'États catholiques ont fatigué le ciel par leurs efforts pour nationaliser leur clergé, et qu'ils ont dit longtemps: Nos évêques, notre épiscopat, notre Église, etc., le ciel dit Eh bien! protégez vos évêques, vos églises, contre le chef que je leur ai donné, et qu'ils soutiennent vos trônes! Et alors les trônes protecteurs volent en poussière avec les siéges épiscopaux.

(1) Saint Matthieu, ch. XXVIII, v. 18-20.

On me dira: Blåmeriez-vous donc le droit de patronage octroyé par les concordats?

-Non, je n'aurai jamais la témérité de blâmer ce que fait l'Église, ni de dire avec certains esprits inflexibles : Mieux vaudrait la guerre qu'une paix aussi fâcheuse. L'Église est la plus patiente, la plus tolérante des mères; elle n'éteindra jamais la mèche qui fume encore; et alors même qu'on lui ôte le moyen de sauver une nation, elle accepte celui qu'on lui laisse de sauver beaucoup d'âmes.

Mais ce que je trouve très-déplorable, c'est que, après les leçons que nous avons reçues et celles qui sont imminentes, les gouvernements qui traitent aujourd'hui avec le chef de l'Église persistent à lui faire les conditions les plus onéreuses et à lui dire : Vos prédécesseurs ont accordé cela à tel gouvernement; nous exigeons la même chose, sinon ! - On ne m'ôtera pas de l'esprit que ces gouvernements se préparent un brûlant avenir.

On me dira encore: Voudriez-vous donc réserver au pape et à sa cour le choix de nos évêques, ou reporter le feu de la division dans le sanctuaire par le rétablissement des élections ecclésiastiques?

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En faisant des vœux pour la cessation des abus modernes, je suis loin de désirer la restauration d'aucun des anciens abus. Ne pouvant exprimer ici des vues de détail sur ce grave sujet, je me borne à une considération générale.

Le gouvernement de l'Église, à ne l'étudier même que du point de vue historique, mérite quelque confiance. Voilà dix-huit siècles qu'il résiste aux plus furieux orages, et maintient dans l'unité religieuse un domaine sur lequel le soleil ne se couche pas. C'est incontestablement le plus difficile, le plus étendu et le plus ancien des gouvernements. Croire à sa sagesse n'est donc point faiblesse d'esprit; et je vous avouerai que, pour ma part, j'y crois un peu plus qu'à la sagesse de nos gouvernements modernes les plus éclairés, attendu que j'en ai vu trépasser un bon nombre, et que j'en

tends très-distinctement le glas de plusieurs autres. D'où je conclus que, si on avait enfin le bon sens de laisser à l'Église une de ses plus précieuses libertés, elle saurait la réglementer à la satisfaction commune des amis de la religion et de la tranquillité des États.

Vous craignez les abus des élections ecclésiastiques ordonnancées par l'Église ? Et vous ne craignez pas ceci : Le patronage royal appelle le patronage bourgeois ; le patronage bourgeois appelle le patronage démocratique social. Les patrons royaux choisiront de bons sujets; les patrons bourgeois, de bons citoyens; les patrons démocrates socialistes, des hommes de leur couleur. Qu'y a-t-il au bout de tout cela? Le coup de grâce pour votre Église et votre État.

Vous êtes donc pour la séparation de l'Église et de l'État ?

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Non, certes; car l'État n'étant qu'un mot vide de sens, s'il n'exprime pas le corps même de la nation, séparer l'Église de l'État chez une nation encore catholique, c'est dire à cette nation Renonce à ta foi religieuse, ou sors de l'État !

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Si, faute de connaître la langue politique, vous confondez le gouvernement avec l'État (ce qui est une erreur assez commune et des plus pernicieuses), et que vous désiriez savoir si j'opine pour la séparation complète du gouvernement civil et du gouvernement ecclésiastique, je répondrai : Non, parce que c'est une impossibilité pratique. Figurez-vous donc un gouvernement civil, qui dit à une nation encore chrétienne: Moi, je suis pur de tout préjugé religieux, je vais donc vous gouverner comme si vous étiez des corps sans âme ! Ce que je demande, et ce que la plupart demandent, tout en s'exprimant mal, par ces mots de séparation de l'Eglise et de l'Etat, c'est ce que le Fondateur de l'Église et de nos États chrétiens a établi dès l'origine; c'est la distinction complète et l'indépendance réciproque, dans les limites par Lui fixées, du gouvernement ecclésiastique universel et des divers gouvernements civils de la chrétienté.

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