Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

politique préposé à la garde des lois fondamentales et de la monarchie.

L'irresponsabilité absolue du pouvoir suprême aura beau être mise en thèse par des légistes et des courtisans qui ont beau jeu sous les princes irresponsables, l'intérêt évident des monarques et des nations est que l'on renonce à cette fiction constitutionnelle, qui n'entrera jamais dans la conscience des peuples. Dire à un souverain : Quoi que vous fassiez, quoi que vous entrepreniez, nul ne vous pourra rien, quelle insulte au sens commun ! quel appel aux révolutions!

Les esclaves eux-mêmes de l'Asie n'ont pas voulu admettre un dogme aussi servilement absurde. Leur constitution politique, comme a dit M. de Maistre, consiste à dire à leurs despotes Faites tout ce que vous voudrez, et lorsque nous serons las, nous vous égorgerons (1).

[ocr errors]

Faudrait-il déférer le jugement de ces causes majeures à un tribunal présidé par le pape en personne ou par un légat, comme au moyen âge ? Outre que nous sommes bien loin des institutions et de l'esprit de ces siècles de foi, je crois qu'une telle attribution n'irait ni aux intérêts de l'Église, ni aux intérêts des nations catholiques, ni aux intérêts même, bien compris, de la monarchie, et je n'en donnerai pas d'autre raison que celle-ci : Les souverains pontifes demandent peu aux princes, et les énormités seules attireraient leur animadversion (2). Quand les princes en sont venus à commettre des énormités, il est trop tard, les révolutions sont là.

Pour empêcher donc le remède terrible, pire que les maux, que les princes eux-mêmes, complétant l'œuvre de la reconstitution monarchique, avisent aux meilleurs moyens d'organiser un corps politique, peu nombreux, indépendant, chargé d'enregistrer les lois, avec le droit de remontrance, de veiller à la garde des lois fondamentales, et aussi, en cer

(1) Du Pape, liv. II, ch. 11.

(2) Ibid., ch. IV.

tains cas extrêmes, de poser au jury national, réuni dans chaque chef-lieu de province, et délibérant à huis clos, ces questions: Est-ce le cas de dire au prince : « Sire, la nation appelle votre successeur; ne résistez pas à ses vœux bien connus, et ne nous obligez pas à prononcer votre déchéance! >>

Ce serait, à ce que je crois, le moyen de n'avoir jamais ni déchéances à prononcer, ni révolutions à subir.

Hélas! autant que tous, et plus que tous, les princes ont besoin d'appeler la crainte au secours de la sagesse! Il faut qu'ils puissent répondre à leurs passions et à celles de leurs entours: Ce que vous me demandez-là est impossible! Quand ils ne voient plus au-dessus d'eux que le ciel, rien n'est plus facile que de détourner leurs yeux du ciel. Qu'elles sont belles et vraies, ces paroles de Bossuet à Louis XIV : '« Qui peut tout, tourne ordinairement sa puissance contre luimême (1)!

>>

(1) Sermon sur la Résurrection, prêché devant le roi.

LIVRE IV.

INFLUENCE SOCIALE DE L'INDUSTRIE.

CHAPITRE I.

Données du christianisme en matière industrielle et économique.

L'industrie est la connaissance de nos rapports nécessaires avec la nature matérielle.

Rien de plus mystérieux que nos rapports avec l'univers physique. Si l'homme avait dû les découvrir, il les chercherait encore; car ils rayonnent du fond inconnu de notre propre nature au fond encore plus inconnu de la nature universelle. Dieu nous a épargné ces recherches impossibles, en nous donnant dans sa loi les bases de la science industrielle.

La question capitale de la science industrielle ou économique est celle-ci : La terre est-elle le tout de l'homme, le terme de son existence, ou n'en est-elle que le commencement, un lieu d'épreuve, d'éducation, pour s'élever à une existence supérieure?

Vous connaissez la solution chrétienne. Vous inspire-t-elle des doutes? Approfondissez-la et dissipez vos doutes; car aussi longtemps qu'ils subsisteront, vous ne ferez que rêver en science économique, et les rêves en cette matière peuvent être suivis d'un réveil fâcheux.

Repoussez-vous franchement cette solution, en disant avec les libres penseurs Notre foi aux promesses de la vie future est trop faible pour que nous renoncions aux jouissances de la vie présente? Il ne me reste plus qu'à vous donner un conseil d'ami.

Puisque vous appartenez à la religion des jouissances,

songez à défendre les objets de votre culte contre les entreprises de vos coreligionnaires. Dérobez quelques heures au plaisir pour vous exercer au maniement des armes, à l'art de soutenir un siége, d'opérer une retraite, etc., attendu que la religion des jouissances a, comme toute autre religion, une tendance nécessaire à s'universaliser et à s'élever de la vie domestique à la vie publique.

Or, voici ce que je vous annonce pour le jour (demain peut-être) où l'on inaugurera solennellement dans votre ville ou votre bourg le culte des jouissances. Des dévots iront frapper à la porte de votre sanctuaire, et exigeront qu'on en transporte les idoles sur la place. La demande sera de toute justice, s'ils sont nombreux et bien armés, et l'impiété de votre refus appellerait un châtiment terrible. Si vous êtes le plus fort et que vous les mettiez en fuite, ou que vous les jetiez sur le carreau, vous serez dans votre droit; mais vous devez veiller à ce que les fuyards ou d'autres ne viennent pas, avec du fer et des torches, user du droit qu'ils auront de vous offrir en holocauste au dieu de la vengeance et du plaisir.

Vous devriez le voir, si vous étiez capables de voir quelque chose, messieurs les libres penseurs : chaque religion a ses inconvénients. Quand, à force d'ignorance et de sophismes, on est parvenu à s'affranchir de la crainte des jugements du Dieu des dieux, voilà que l'on tombe sous le jugement encore plus impitoyable des libres penseurs en guenilles. Ne dirait-on pas que le monde a été expressément bâti pour l'épreuve de ceux qui s'appliquent à penser en religion, et pour le supplice de ceux qui ne songent qu'à se panser?

Que si vous admettez la solution chrétienne avec la puissance de conviction et d'application que lui donne l'Église catholique (1), la science industrielle ou économique est vite trouvée; elle est tout dans ces trois mots Travaillez, économisez, donnez.

(1) Voy. plus haut, liv. II, ch. vr.

« ZurückWeiter »