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série d'horreurs : la destruction de la famille, l'esclavage, la décrépitude et la démoralisation des enfants, l'ivrognerie des hommes, la prostitution des femmes, la décadence universelle de la moralité et de la vie (1)? »

J'ai la confiance que, avec du courage et de la réflexion, on arriverait à la solution désirable: Sauvez les hommes et les machines en ne sacrifiant plus les hommes aux machines, mais en mettant les machines au service des hommes.

Au reste, homines politiques qui me ferez l'honneur de me lire, vous ne pouvez l'ignorer le problème est là, pressant, irrésistible, prêt à se résoudre par le feu et le sang. Si vous ne voulez pas de cette affreuse solution, hâtez-vous d'en trouver une autre.

Si on ne fait rien ou si on ne fait que des riens, alea jacta est... L'Europe recueillera les dignes fruits des systèmes religieux, politiques, économiques qu'elle oppose depuis trois siècles à la science sociale, dont le Christ l'avait créée à si grands frais la dépositaire, le modèle et l'apôtre.

(1) Études, etc., t. I, p 581.

RÉSUMÉ.

Nul être n'est autant que l'homme insocial par ses vices, social par sa nature, a dit un grand homme (1).

Élever l'homme en l'aidant à s'affranchir de ses faiblesses et de ses vices, tel est donc le but suprême auquel doivent marcher de concert la religion, la politique, l'industrie.

Unique affaire de la société en ce monde, la bonne éducation des hommes exige, avant tout, une foi inébranlable à l'existence d'un monde meilleur. Rien de plus visible, en effet, que la tendance ultramondaine de nos facultés, et l'impossibilité de trouver dans les limites de notre planète l'espace nécessaire à leur complète évolution.

Nous aspirons à la plénitude de la lumière, à la science universelle. Or, nos lumières sont pleines de ténèbres. Nos investigations scientifiques les plus profondes aboutissent invariablement à cette donnée: L'essence des êtres, fondement de la science universelle, est un mystère impénétrable.

Nous aspirons à la toute-puissance. Or, rien de si faible, de si borné que notre pouvoir. La résistance à nos volontés est universelle. Nulle part elle n'est plus forte, plus persévérante que dans le gouvernement de nous-mêmes. Qui d'entre nous ne doit pas dire, comme Job: Pourquoi suisje devenu mon propre oppresseur (2)?

Nous aspirons à la richesse, à l'universalité des jouissances.

(1) Homo factus est unus, sed non relictus est solus. Nihil enim est quam hoc genus tam discordiosum vitio, tam sociale natura. Saint Augustin, De Civitate Dei, lib. XII, cap. xXVII.

(2) Job, ch. vII, v. 20.

Or, la richesse nous remplit de convoitise tant que nous ne l'avons pas, de sollicitudes et de craintes quand nous l'avons. On en est possédé bien plus qu'on ne la possède. Veut-on en bien user, elle est une charge. Point de jouissances qui ne soient suivies du dégoût, et dont l'abus n'enfante la souffrance.

Cette incessante opposition de l'homme à lui-même, ce perpétuel désaccord de sa pensée, de ses désirs, avec tout ce qu'il voit, tout ce qu'il éprouve, ne peut s'expliquer que par ce fait, que nous avons constaté dans le premier livre : L'âme humaine est à la poursuite de l'infini; pour elle, nul repos tant qu'elle n'aura pas trouvé l'infini.

De là cette loi, que les pouvoirs quelconques employés au gouvernement des hommes ne doivent jamais perdre de

vue :

Les hommes sont essentiellement révolutionnaires. Il n'y a que deux moyens de les empêcher de devenir révolutionnaires ou éteindre en eux toute vie morale, ou éclairer leurs voies et diriger leurs mouvements vers l'infini.

:

Le premier moyen, l'esclavage, est, pour le moment, impossible en Europe. Il ne pourrait renaître, sur cette terre transformée à fond par la pensée chrétienne, qu'à la suite d'effroyables bouleversements. Mais qui oserait affirmer que ces bouleversements sont impossibles?

Nous n'avons eu jusqu'ici que des révolutions politiques, locales, superficielles. OEuvre des passions nobiliaires et bourgeoises, naturellement modérées et conservatrices, ces mouvements n'ont, en général, rencontré dans les masses qu'un sentiment de répulsion. Cependant, que de sang, que de ruines!

Aujourd'hui, la fermentation est dans les bas-fonds de la société ; elle agite l'Europe entière; elle la déborde de toutes parts; elle met en jeu des passions affreuses, qui épouvantent les agitateurs eux-mêmes. Si tant de forces de destruction triomphent des forces qu'on leur oppose, ne fût-ce que

durant quelques mois, que laisseront-elles debout? N'exécuteront-elles pas ce jugement du Seigneur sur les habitants de la terre d'Israël : Il n'y a plus de vérités, il n'y a plus de miséricorde, il n'y a plus de science de Dieu sur cette terre. La malédiction, et le mensonge, et l'homicide, et le vol, et l'adultère, l'ont inondée, et le sang a touché le sang (1)!

Ce jugement serait-il trop rigoureux? Non; sous un Dieu juste, les châtiments sont proportionnés aux bienfaits dont on abuse. Or, bien plus que la race d'Abraham, la famille de Japhet est la race choisie, la nation élue.

Quelle fut la mission des enfants d'Isaac et de Jacob, depuis que Dieu les eut mis en possession de la Terre promise, à force de prodiges? Ce fut de préparer, pendant quinze siècles, la naissance du christianisme universel.

Quelle fut la mission de l'Europe, depuis que le chef des conquérants spirituels du monde établit son quartier général dans la ville des Césars et l'y fixa à jamais par son glorieux martyre? Ce fut la conquête de l'univers à la loi du Christ.

L'entreprise étant immense, au lieu d'une nation, le ciel en choisit cent, et les prépara de longue main à l'unité religieuse par l'unité de la domination romaine. Le travail d'élaboration religieuse et politique dura aussi quinze siècles, et coûta au ciel et à ses ministres des merveilles supérieures à celles qui illustrèrent la sortie de l'Égypte, le Sinaï et les

vallées de la Palestine.

Quel prodige que celui de la conversion de l'empire universel, quand on a un peu étudié les mœurs, les lois et les institutions de cette époque de sang et de fange !

Quel prodige, pas plus difficile, sans doute, mais bien autrement long, que la conversion et la civilisation de ces hordes de barbares qui, du ve au XIe siècle, ne cessèrent de ravager l'Europe?

Quels prodiges que ceux qui protégèrent le travail de ci

(1) Osée, ch. IV, v. 1-2.

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