Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

Après l'Écriture-Sainte, il n'y avait point de livres qu'il lût avec plus de bonheur que l'histoire des Martyrs. Il se sentit bientôt animé du désir de suivre leurs traces, et persuadé qu'il aurait l'honneur de mourir aussi pour la foi, il sortit de son monastère, où il avait séjourné sept ans. Il fit des pèlerinages à Diospolis, à Garisim et à Notre-Dame de Césarée en Palestine. Il resta deux jours dans cette dernière ville, alors soumise aux Perses, ainsi que la plus grande partie de la Syrie. Son zèle s'alluma à la vue des enchantements que quelques soldats faisaient dans les rues. Il leur parla avec force contre l'impiété de semblables pratiques. Les magistrats persans, informés de ce qui se passait, ordonnèrent qu'on l'arrêtat. Lorsqu'il fut devant eux, il leur dit qu'il avait été luimême mage autrefois, mais qu'il avait renoncé à ce vain titre, pour devenir disciple de Jésus-Christ. A peine eut-il confessé sa foi, qu'on le conduisit en prison. Il y passa trois jours, après quoi on le mena devant Marzabane, gouverneur de la ville. Il s'avoua chrétien. On voulut le gagner par les plus magnifiques promesses, il y fut insensible, aussi bien qu'à la menace du supplice de la Croix. Le gouverneur irrité ordonna qu'on le liât par un pied et par le cou à un autre prisonnier. Les Perses lui firent mille insultes; ils le chargeaient de coups comme un misérable, qui était, disaient-ils, l'opprobre de son pays; ils lui arrachaient la barbe et l'accablaient des plus pesants fardeaux.

Marzabane le fit ramener devant lui, et voulut l'obliger à prononcer les paroles usitées dans les superstitions des mages. Eh quoi, dit le Saint, pourrais-je prononcer des impiétés auxquelles il n'est même pas permis de penser? - Savez-vous, reprit le juge, que j'en écrirai au roi? - Écrivez ce qu'il vous plaira, répliqua Anastase. Je suis chrétien. - Qu'on le frappe, dit le gouverneur, avec des bâtons pleins de nœuds.

Les bourreaux se préparant à le lier, il leur dit : Cette précaution est inutile, je me sens assez de courage pour me tenir dans la posture qui vous conviendra. Puis il se coucha par terre, et reçut les coups dont on le chargeait, sans remuer ni changer de posture.

L'abbé Justin informé de tout ce que souffrait son disciple pour

la cause de Jésus-Christ, ordonna des prières dans sa communauté, et fit partir deux moines pour consoler et assister le Martyr. Le saint Confesseur était obligé de porter des pierres tout le jour; il n'avait de relâche que la nuit, et il en passait une grande partie en oraison. Sa conduite frappait extraordinairement ses compagnons. On a déclaré qu'un d'entre eux le vit une nuit rayonnant de lumière, au milieu d'un chœur d'Anges qui priaient avec lui il le fit voir aussi aux autres prisonniers. Le Saint avait coutume de prier le cou baissé, observant de ne pas remuer le pied, de peur de troubler le repos de celui qui était attaché à sa chaîne.

:

Lorsque Marzabane eut reçu la réponse de Chosroès, à qui il avait écrit la conduite d'Anastase, il fit dire au Saint que le roi voulait bien user d'indulgence envers lui, et que s'il abjurait le christianisme seulement de bouche, il lui serait libre d'embrasser l'état qu'il voudrait. « Vous pourrez même, ajouta l'envoyé, au nom du gouverneur, avoir une place parmi les premiers officiers. Si vous aimez mieux vivre en chrétien, et même en moine, on ne vous inquiètera pius, et vous ne renierez votre Christ qu'en présence d'un seul homme. >>

Anastase répondit que l'apparence même de la dissimulation lui faisait horreur, et que jamais il n'aurait la lâcheté de renier son Dieu.

Marzabane le voyant inébranlable, lui déclara qu'il avait ordre de l'envoyer au roi chargé de fers. « Il est inutile de m'entraîner, dit le Saint, puisqu'il s'agit de souffrir pour Jésus-Christ, j'irai avec joie où vous voudrez. » Le gouverneur ordonna de le faire partir avec deux autres prisonniers chrétiens.

Alors arriva la fête de l'Exaltation de la Sainte-Croix, que l'on célébrait le 14 septembre. Le receveur des tributs pour le roi était un chrétien. Il obtint pour Anastase la permission d'aller à l'Office divin. Sa présence et ses exhortations affermirent les fidèles dans leurs bonnes résolutions, ranimèrent la ferveur des âmes tièdes, et firent couler des larmes de tous les yeux. Après l'Office divin le Saint dina chez le receveur, puis il retourna à sa prison.

De là il partit de Césarée en Palestine, avec les deux prisonniers

chrétiens, suivi par le moine que l'abbé Justin avait envoyé pour l'assister. Dans tous les lieux où il passait, les chrétiens s'empressaient d'aller au-devant de lui, et de le recevoir avec les marques

du respect.

Lorsqu'il fut arrivé à Barsaloé, en Assyrie, où était alors le roi de Perse, on le mit en prison, en attendant des ordres. Chosroès l'envoya interroger par un officier, qui tâcha de l'éblouir par les plus magnifiques promesses.

« La pauvreté de l'habit que je porte, dit le Saint, annonce assez le mépris que je fais des pompes mondaines. »

Le lendemain, l'officier revint à la prison dans l'espérance que les menaces seraient plus efficaces que les promesses: il se trompa encore. « Seigneur, lui dit le Saint, il est inutile que vous vous tourmentiez de la sorte. Je suis, par la grâce de JésusChrist, incapable d'être ébranlé; exécutez donc ce que vous avez résolu à mon égard. »

L'officier irrité le condamna à être cruellement flagellé; ce qui fut exécuté trois jours de suite; il ordonna ensuite qu'on l'étendit sur le dos, et qu'on lui mit sur les jambes une grosse pièce de bois, sur les extrémités de laquelle on fit encore monter deux hommes robustes. La patience et la tranquillité d'Anastase étonnèrent le juge. Il alla trouver le roi, lui rendit compte de ce qui se passait, et lui demanda de nouveaux ordres.

Pendant son absence, le geôlier qui était chrétien, mais trop faible pour abandonner une profession qui ne convenait guère à un disciple de Jésus-Christ, permit aux fidèles de visiter Anastase. Ils accoururent en foule dans la prison; chacun s'empressait de baiser les pieds et les chaînes du Martyr; on emportait comme quelque chose de saint ce qui avait seulement touché son corps, et même les instruments de son supplice.

L'officier étant de retour, fit battre Anastase de nouveau, mais toujours inutilement. On cùt dit, à voir la constance du Martyr, que son corps était insensible. On le pendit ensuite par une main, après lui avoir attaché un gros poids aux pieds; il resta deux heures en cet état, sans que ni les promesses ni les menaces que l'on mit encore en œuvre pussent l'ébranler.

Enfin le juge, désespérant de le vaincre, alla encore trouver le roi, qui ordonna de faire mourir le patient, et avec lui les autres prisonniers chrétiens.

Aussitôt les deux compagnons d'Anastase, et soixante-six autres chrétiens furent étranglés. On voulut qu'Anastase fùt témoin de leur exécution; on se flattait de l'espoir que cet horrible spectacle l'ébranlerait. On employa encore d'autres moyens pour le faire rentrer dans la religion des Perses; mais ils furent tous sans succès. « Je m'attendais, dit-il aux bourreaux, à un genre de mort plus cruel. Je pensais qu'on mettrait mon corps en pièces; mais puisque Dieu m'appelle à lui par une voie si facile, le sacrifice que je lui fais de ma vie ne me coùte rien; je le prie seulement de l'accepter. »

A peine eut-il cessé de parler, qu'on l'étrangla comme les autres; on lui coupa ensuite la tête, le 22 janvier, l'an de JésusChrist 628.

Saint Anastase avait prédit la chute prochaine du tyran Chosroès. La prédiction se vérifia dix jours après son martyre, lorsque l'empereur Héraclius entra en Perse. Le corps du Saint, qu'on avait jeté aux chiens avec ceux des autres fidèles, fut respecté par ces animaux voraces. Les fidèles le rachetèrent et l'enterrèrent dans le monastère de Saint-Serge, qui n'était pas éloigné, et qui a fait donner le nom de Sergiopolis à la ville de Barsaloé. Le moine qui l'avait suivi rapporta sa tunique en Palestine; son corps y fut aussi transféré dans la suite. Quelques années après, on le porta à Constantinople, et de là à Rome 1.

Les reliques de saint Anastase ont été illustrées de miracles insignes. On raconte que lorsqu'elles traversaient Césarée, une dame nommée Arêta qui faisait profession de christianisme, refusa de les aller saluer, disant que rien de bon ne pouvait venir de la Perse. On ajoute que la nuit suivante, le Saint lui apparut et lui reprocha ses préventions; elle s'excusa. Mais atteinte aussitôt de vives douleurs, elle reconnut sa faute au bout de quatre jours, se fit porter à la châsse du Saint et recouvra la santé. Là

1 Extrait en partie de Godescard.

elle vit, avec surprise, une image très-révérée du Martyr, qui ressemblait si exactement à sa vision qu'elle en fut effrayée.

Cette image ancienne a toujours été l'objet d'un culte, que le second concile de Nicée a formellement autorisé, en permettant sa reproduction. On la garde à Rome avec grand respect, dans l'église qui porte le nom de saint Vincent et de saint Anastase. Les nombreuses copies qui en ont été faites se trouvent dans plusieurs églises. On en voit une spécialement à Saint-Pantaleon de Troyes, et les personnes pieuses croient que son aspect est favorable à la santé du corps et à la paix de l'âme.

On révère à Aix-la-Chapelle quelques os de la tête de saint Anastase. Une multitude d'églises se disent en possession de quelques-unes de ses reliques. Mais dans la plupart il s'agit d'un autre Saint du même nom; car, à côté de saint Anastase de Perse, honoré le 22 janvier, les martyrologes mentionnent saint Anastase le Sinaïte, évêque d'Antioche, fèté le 21 avril; saint Anastase, pape, le 27 du même mois; saint Anastase, martyr, fêté à Camerino, le 11 mai; le 30 du même mois, saint Anastase, évêque à Pavie; le 14 juin, saint Anastase, prêtre à Cordoue; le 15 juillet, saint Anastase, évêque à Naples; le 21 août, saint Anastase, martyr à Salone; le 16 octobre, saint Anastase de Doydes, ermite; le 19 décembre, saint Anastase, martyr à Nicomédie; etc.

S. VINCENT, S. ORONTE, S. VICTOR ET Ste AQUILINE,

MARTYRS.

Nous croyons pouvoir ajouter ici le nom de la femme héroïque, qui a donné à Dieu par le martyre, son fils, son époux, elle-mème et les deux hôtes de son fils.

Victor le Lévite se préparait dans la prière à recevoir les saints ordres qui devaient l'attacher de plus en plus à la sainte Église. Il habitait la maison de ses parents dans la petite ville de Roda, en Catalogne, non loin de Girone où sévissait la persécution. Élevé par Aquilina, sa pieuse mère, il ne vivait que pour Dieu et en Dieu, lorsque deux chrétiens, qui fuyaient la persécution, vin

« ZurückWeiter »