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Fausse humilité, orgueil'. Levez le rideau. Vous avez beau faire; si faut-il on croire, ou nier, ou douter. N'aurons-nous donc pas de règle? Nous jugeons des animaux qu'ils font bien ce qu'ils font : n'y aura-t-il point une règle pour juger des hommes? Nier, croire, et douter bien sont à l'homme ce que le courir est au cheval".

50.

Notre religion est sage et folle. Sage, parce qu'elle est Ja plus savante, et la plus fondée en miracles, prophéties, etc. Folle, parce que ce n'est point tout cela qui fait qu'on en est; cela fait bien condamner ceux qui n'en sont pas, mais non pas croire ceux qui en sont. Ce qui les fait croire, c'est la croix, ne evacuata sit crux'. Et ainsi saint Paul, qui est venu en sagesse et signes, dit qu'il n'est venu ni en sagesse ni en signes, car il venait pour convertir, Mais

riverait-il si les hommes avaient péri tous? Il n'y aurait donc plus de règle.

1 « Orgueil. Cette humilité, qui n'ose rien décider par elle-même, qui dit qu'elle ne peut que s'en rapporter à l'autorité, est fausse. C'est réellement un orgueil, qui ne veut pas se soumettre à la raison.

α

la voir.

Le rideau.

Le rideau que vous mettez sur la vérité, pour ne pas

3 « De règle. Pour déterminer quand il faut croire, quand nier, quand douter.

« Pour juger des hommes. » Pour juger s'ils font bien aussi ce qu'ils ont à faire, qui est de croire, nier et douter.

• « Au cheval. » Voir I, 10. Nier, croire et douter bien, c'est la logique tout entière. La logique est donc l'art essentiel de l'homme, suivant Pascal, parce que Pascal est avant tout un raisonneur, un esprit.

Il est clair que Pascal en veut à ceux qui tâchaient d'accabler le jansénisme par l'autorité et par le nombre, et qui ne trouvaient d'autre réponse aux objections que de dire. Il n'est pas question de juger, mais de s'en rapporter à ceux qui ont jugé.

• « Ceux qui en sont. Voir le paragraphe 42 de cet article.

9 « Sit crux. » Voir le paragraphe 42 de l'article xxiv.

« Ni en signes. » 1 Cor, 1, 22 : « Les Juifs demandent des signee > [des miracles], et les Grecs de la sagesse. Nous, nous prêchons le » Christ crucifié, scandale pour les Juifs, folie pour les Gentils. » Cepen

ceux qui ne viennent que pour convaincre1 peuvent dire qu'ils viennent en sagesse et signes.

51.

La loi obligeait à ce qu'elle ne donnait pas. La grâce donne ce à quoi elle obiige.

52.

Ce que les hommes, par leurs plus grandes lumières, avaient pu connaître, cette religion l'enseignait à ses enfants.

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Que Je hais' ces sottises, de ne pas croire l'Eucharistie, etc...! Si l'Évangile est vrai, si JÉSUS-CHRIST est Dieu, quelle difficulté y a-t-il là?

54.

Le juste agit par foi dans les moindres choses: quand il

dant le texte ajoute : Mais pour les élus d'entre les Juifs et les Grecs, » le Christ est la vertu même de Dieu [cette vertu divine dont les signes >> ne sont que la manifestation], et la sagesse de Dieu.» L'expression d'étre venu en sagesse est prise du verset premier du chapitre suivant: Veni, non in sublimitate sermonis aut sapientiæ. Dans la seconde épître aux Corinthiens, XII, 12, Paul dit au contraire : « Les marques de mon » apostolat ont paru parmi vous, en patience à tout souffrir, en signes, en » prodiges et en vertus surnaturelles. »

1 « Pour convaincre. Comme Pascal lui-même, et en général les apologistes de la religion. C'est-à-dire que l'apôtre, qui veut convertir,`ne peut compter que sur la grâce, et non sur les miracles ni sur les raisons mais le chrétien n'en a pas moins des raisons et des miracles à faire va→ Joir, quand il ne s'agit que de confondre les incrédules.

La loi obligeait. » Ce fragment s'explique par le chapitre VII de l'épitre aux Romains, où Paul oppose ainsi la loi du judaïsme à la grâce de Jésus-Christ. Voir surtout le verset 7: « La loi est-elle donc péché? > non certes, mais je n'ai connu le péché que par la loi. La concupiscence me restait inconnue, si la loi ne m'eût dit : « Tu n'auras pas de concu▸ piscence. » Ainsi la loi, en créant l'obligation, créait le péché : la grâce détruit le péché, en donnant la force de remplir l'obligation.

« Que je hais. » Nal, plus que ce grand logicien, ne devait dédaie gner ceux qui croient à moitié, comme les protestants.

reprend ses serviteurs, il souhaite leur conversion par l'esprit de Dieu, et prie Dieu de les corriger, et attend autant de Dieu que de ses répréhensions, et prie Dieu de bénir ses corrections. Et ainsi aux autres actions.

... De tout ce qui est sur la terre, il ne prend part qu'aux déplaisirs, non aux plaisirs. Il aime ses proches, mais sa charité ne se renferme pas dans ces bornes, et se répand sur ses ennemis, et puis sur ceux de Dieu.

55.

Pourquoi Dieu1 a établi la prière.

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1° Pour commu

Objection.

Cela est ab

niquer à ses créatures la dignité de la causalité2. 2o Pour nous apprendre de qui nous tenons la vertu. 3° Pour nous faire mériter les autres vertus' par travail. Mais on croira qu'on tient la prière de soi. surde, car puisque, ayant la foi, on ne peut pas avoir les vertus*, comment aurait-on la foi'? Y a-t-il pas plus de distance de l'infidélité à la foi que de la foi à la vertu?

-

1 « Pourquoi Dieu. » Il est également vrai, d'après la doctrine janséniste, premièrement, que Dieu donne sa grâce à qui la demande; secondement, qu'il ne la donne qu'à qui il lui plaît, qu'aux prédestinés à qui il a résolu de toute éternité de la dorner. Donc nul ne peut la demander que les prédestinés, ou en d'autres termes, que ceux qui l'ont déjà. Mais alors pourquoi faut-il qu'ils la demandent, et à quoi bon la prière? Voilà la difficulté.

2 « De la causalité. » Car le juste se trouve ainsi être cause, dans une certaine mesure, du bien qu'il fait, puisque la grâce de le faire ne lui est donnée que par suite de sa prière. Dieu l'associe à la dignité de la cauBalité.

3 a Les autres vertus. Les autres que la prière, car la prière est déjà une vertu, puisqu'elle est un acte de foi, d'espérance et d'amo «Par travail. » Far le travail même de la prière.

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« Avoir les vertus. » C'est ce que les Jésuites reconnaissaient.

« Aurait-on la foi? » Et par conséquent comment prierait-on?

<< Y a-t-il pas. » Racine a dit encore, contraint par la gêne du vers

est vrai :

Vois-je pas, au travers de son saisissement,

Un cœur dans ses douleurs content de son amant!

Dieu ne doit que suivant ses promesses. Il a promis d'accorder la justice aux prières': jamais il n'a promis les prières qu'aux enfants de la promesse2.

$6.

M. de Roannez disait : Les raisons me viennent après, mais d'abord la chose m'agrée ou me choque sans en savoir la raison, et cependant cela me choque par cette raison que je ne découvre qu'ensuite. Mais je crois, non pas que cela choquait par ces raisons qu'on trouve après, mais qu'on ne trouve ces raisons que parce que cela choque'.

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57.

Il n'aime plus cette personne qu'il aimait il y a dix ans. Je crois bien: elle n'est plus la même, ni lui non plus. Il était jeune et elle aussi; elle est tout autre. Il l'aimerait peut-être encore, telle qu'elle était alors.

58.

Craindre la mort hors du péril, et non dans le péril, car il faut être homme.

↑ « Aux prières. » « Demandez et vous recevrez. » Matth., VII, 7.

<< De la promesse.» Aux élus. Expression de saint Paul, Rom., XI, 8. Dieu a promis d'adopter les fils d'Abraham, mais non pas ses fils selon la chair. Les vrais fils d'Abraham, ce sont ceux qui suivent Jésus-Christ. C'est à ceux-là que s'appliquait la promesse faite à Abraham, ils sont les fils de la promesse, filii promissionis. Il y a opposition entre ces deux mots, la justice, la promesse. Dieu ne doit la justice qu'à ceux à qui il a donné, par pure faveur, de la mériter. Nous sommes au plus profond des obscurités de la grâce.

3 • Cela choque. » Cette pensée est bien sceptique. Si on eût dit à Pascal Vous êtes janséniste, parce que cette dure doctrine flatte votre humeur; vous croyez ensuite trouver des raisons à l'appui, vous vous trompez; vous ne trouvez ces raisons que parce que la passion a pris les devants, comment Pascal eût-il répondu?

a Il n'aime plus.

ragraphe v, 47.

Il faut rapprocher cette pensée de celle du pa

3 « Craindre la mort. Il explique dans quel sens la religion veut qu'on craigne la mort. Il faut étre homme, c'est-à-dire, homme de co

Mort soudaine seule à craindre, et c'est pourquoi les confesseurs demeurent chez les grands,

59.

Il faut se connaître soi-même quand cela ne servirait pas à trouver le vrai3, cela au moins sert à régler sa vie', et il n'y a rien de plus juste.

60.

Quand notre passion nous porte à faire quelque chose, nous oublions notre devoir. Comme on aime un livre on le lit, lorsqu'on devrait faire autre chose. Mais pour s'en souvenir, il faut se proposer de faire quelque chose qu'on hait; et lors on s'excuse sur ce qu'on a autre chose à faire, et on se souvient de son devoir par ce moyen.

61.

Que je hais ceux qui font les douteurs de miracles! Montaigne en parle comme il faut dans les deux endroits. On voit en l'un combien il est prudent', et néanmoins il croit en l'autre et se moque des incrédules.

1 « Il faut se connaître. C'est le célèbre principe de la philosophie grecque, Γνώθι σεαυτόν.

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8

«Trouver le vrai. » Comme les philosophes en ont la prétention.

α Régler sa vie. Mais comment peut-on régler sa vie si on n'a pas une vérité pour servir de règle? Pascal essayait-il douc, comme Kant l'a fait depuis, de séparer la raison pratique et la raison pure? Il se montre ailleurs plus conséquent et plus absolu, quand il pense que l'homme n'a que faire de la science de l'homme non plus que de toute autre science (VI, 23.) 4 « De plus juste. Que de prétendre à régler sa vie.

« Pour s'en souvenir. » De son devoir, comme si la phrase, Commi on aime un livre, était entre parenthèses.

· «Par ce moyen. » Pour s'analyser si bien, il ne faut pas seulement, je crois, être un observateur très-fin; il faut encore avoir une conscience très-scrupuleuse, qui fait la chasse aux mauvaises pensées obstinément « Que je hais ceux. En titre, Miracles.

« Prudent. » C'est-à-dire circonspect, ne croyant pás légèrement. Voir le chapitre 41 du livre III des Essais

? « En l'autre. » Voir le chapitre 26 du premier livre.

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