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MAI-JUIN 1869.

TOPOGRAPHIE DE LA GRANDE ARMÉNIE,

PAR LE R. P. LÉONCE ALISCHAN,

TRADUITE DE L'ARMÉNIEN

PAR M. ÉD. DULAURIER.

AVANT-PROPOS DU TRADUCTEUR.

1

Le travail que je soumets ici au lecteur émane de l'un des plus laborieux, des plus savants religieux de la congrégation des Měkhitharistes de Venise, qui l'a publié à la suite de sa Géographie politique sous le titre de Topographie de la Grande Arménie, Տեղագիր Հայոց Մեծաց. L'auteur, qui a voué sa vie à une étude persévérante de l'histoire et de la géographie de son pays, et qui a eu accès à toutes les sources nationales et aux meilleures sources étrangères que la science moderne a ouvertes, y a puisé de très-abondants et utiles renseignements qu'il a su mettre très-habilement en œuvre. Nul n'était mieux préparé que lui, par sa nationalité et sa position personnelle, et par ses recherches antérieures, à établir une lumineuse comparaison entre l'état ancien de l'Arménie et sa situation présente, à faire ressortir de la

1

Venise, imprimerie du couvent de Saint-Lazare, in-4°, 1853. 2 La Topographie, comprise dans le même volume que la Géographie politique, est postérieure de deux ans au moins, puisque la préface porte la date de l'année 1304 de l'ère arménienne (1855).

XIII.

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contemplation des ruines de ce pays une vue nette de sa splendeur évanouie, à évoquer le souvenir, à retrouver le nom, oublié ou méconnu, des lieux et des monuments. Après avoir esquissé l'aspect physique du théâtre sur lequel il nous transporte', il en donne la description historique en rétablissant, au milieu des divisions récentes que les traités conclus entre la Russie, la Turquie et la Perse ont fait subir au territoire de l'Arménie, les délimitations qu'il avait reçues dans l'antiquité et au moyen âge. J'espère que le lecteur me saura gré de lui présenter, dans notre langue, un ouvrage neuf et original, et qui laisse bien loin en arrière tout ce qui a paru jusqu'ici sur le même sujet.

Ayant à reproduire une masse de noms propres, de lieux ou de personnes, je crois qu'il est indispensable de faire connaître le système d'orthographe d'après lequel je les ai transcrits. J'ai adopté la prononciation arménienne occidentale, celle qui a prévalu dans les régions à l'ouest de l'Euphrate, et qui est encore en vigueur dans tout l'empire ottoman. Ce n'est pas que je proscrive celle qui est propre aux populations de la Grande Arménie, la prononciation orientale, et que j'accorde à l'une ou à l'autre, comme l'ont fait plusieurs arménistes, une préférence exclusive; je pense que toutes les deux ont leur raison d'être philologique et historique. A mon avis, la prononciation occidentale doit être considérée comme la plus ancienne, car elle se trahit dans des mots qui proviennent incontestablement de la couche primitive de la langue, et qui sont antérieurs au fractionnement des tribus de la famille aryenne, dont les Arméniens sont issus, tandis que la prononciation orientale ne se manifeste que dans des mots de formation secondaire, c'est-àdire modifiés par l'influence du groupe iranien, auquel les

1 L'auteur a publié en français (Venise, 1861), sous le titre de Physiographie de l'Arménie, un extrait de cette description physique, dans lequel il a su parer les notions scientifiques qu'il présente de tous les attraits qu'une imagination brillante et poétique et un goût littéraire exercé peuvent créer.

Arméniens se rattachent étroitement. Afin d'obtenir dans mes transcriptions une exactitude rigoureuse, très - importante au point de vue philologique, je distinguerai, lorsque ce sera nécessaire, ces deux modes de prononciation, en plaçant un astérisque devant les mots prononcés à l'orientale, par exemple, pint pour bind, in « ferme, solide, stable », *datavor pour tadavor, Դատաւոր «juge ».

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Je vais donner l'alphabet arménien, transcrit d'après les deux systèmes, après en avoir éliminé les deux dernières lettres, le $, f, et le o, ô, dont l'introduction est comparativement récente, puisqu'elle date du x11° siècle de notre ère. Je me suis écarté le moins possible du mode habituel de transcription, qui emploie plusieurs lettres de l'alphabet romain pour rendre certaines articulations complexes de l'alphabet arménien; la crainte de trop innover et de causer de l'incertitude et de l'embarras au lecteur m'a empêché d'attribuer à chaque articulation un caractère unique et spécial, proposé et arrangé d'une manière conventionnelle. Une uniformité absolue, indispensable dans les travaux de philologie comparée, ne saurait être ici exigée, surtout si on se rappelle que les nuances qui distinguent certaines articulations du même ordre sont très-délicates et nous échappent complétement aujourd'hui.

L'e très-bref, analogue au scheva hébreu, identique au ɛ zend, a été rendu par le è, à l'imitation d'Eug. Burnouf et d'après un usage que son autorité a consacré; seulement j'ai cru devoir introduire une distinction, que le système de l'écriture arménienne rend nécessaire, entre l'e très-bref sous-entendu graphiquement et dont l'expression orale, dans les groupes de consonnes, est sollicitée et déterminée par une loi phonique constante', et cette même voyelle exprimée

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Cette loi, dans sa formule la plus générale, est celle-ci : lorsqu'une muette est suivie d'une liquide, il y a lieu d'intercaler entre ces deux lettres l'e très-bref pour soutenir la prononciation, sans cela la plupart des mots arméniens seraient très-difficiles et même impossibles à articuler, à cause de l'accumulation des consonnes. Je citerai des mots tels que prob, qrthmndchioun,

..

la

sous sa forme apparente et par son signe spécial, le Dans la métrique, celle-ci est comptée comme plus lourde que première, dans une proportion qui peut être évaluée approximativement de à de temps. Je l'ai représentée par notre

e muet.

Les voyelles brèves 4, é, et n, o, se ramollissent au commencement des mots en ié (pę, iérek « trois », &pwq, iéraz « songe ») et wo (apnfì, woroměn « ivraie », nuiu, woděn « pied »). Les deux lettres et (devant une voyelle) correspondent aux semi-voyelles du sanskrita eta. La première, quand elle est initiale ou finale, ne se fait plus entendre aujourd'hui je l'ai remplacée par l'apostrophe, comme dans Bwght pin, 'Azguerd (Yezdedjerd), fuppy, khapepa' « trompeur ». J'ai rendu le semi-voyelle par w, exemple: Activ, Tewin (nom de ville), b, tchewial «étant parti », Lu, dewial « ayant donné », avec l'insertion de l'e destiné à marquer et à guider la prononciation 1.

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qu'il faut prononcer qěrthměndchioun, quzuu) kuwcop, zmschdnchenavor « æternum », à l'accusatif prononcé ězměschděndchenavor. y a même quelques mots tout à fait dépourvus de voyelles, comme տղը, dy'g', ', pron. deg ég «lie, salive», et à l'accusatif pluriel ququ, zdg'g's, pron. ězděg'èg'ès. L'e très-bref se produit même dans des cas où l'habitude de nos langues européennes ne nous conduirait pas à en soupçonner l'existence en arménien. C'est ainsi qu'en poésie le verbe qpt■«écrire» peut être employé à la fois comme monosyllabe, krel, et comme dissyllabe, kěrel, qpp₺L, par l'intercalation du ը. Cette loi phonique prouve que l'on ne doit transpas crire, à l'imitation de plusieurs arménistes, des mots tels que Spqwin et Upw, par Trdat et Smpat, car la combinaison du tet du s avec une liquide e, p et, m implique virtuellement la restitution, dans notre système d'écriture, de l'e très-bref intermédiaire.

1 La nature des deux semi-voyelles et n'a pas été nettement aperçue dans l'arménien jusqu'à présent. Saint-Martin rend par ov et M. Brosset s'obstine à suivre les mêmes errements. L'un et l'autre transcrivent Tovin, tchovial, dovial, dissyllabes; mais il faut n'avoir jamais scandé de vers arméniens pour ignorer que ces mots

J'ai employée pour l'i dur palatal des idiomes tartares, conformément à l'orthographe adoptée par les Arméniens en transcrivant le turk, et pour laquelle ils se guident par la véritable prononciation, écrivant que, këzël «rouge », գազըլըգ, kazëlëk « office de kadhy»,. J'ai rendu le œ ou eu turk par ö.

: قزل

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ne forment qu'une seule syllabe. Lorsque l'on veut les rendre dissyllabes, on les écrit Դըւին, չըւեալ, տըւեալ. En effet, ainsi que je l'ai dit plus haut, le représenté graphiquement est considéré comme plus lourd que le p sous-entendu. Cette lettre, comme on le voit ici, lorsqu'elle s'appuie à une voyelle qui la suit, est véritablement une semi-voyelle, un son fugitif en poésie, tout comme dans le débit oratoire ou le langage ordinaire.

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