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Ils ne tardérent pas à y rentrer : car ayant paffé entre les Armées de deux Généraux Romains, ils vinrent dans la Province Séquanoife, jufques à Yverdun qu'ils faccagérent. Ils allérent même une autre fois jufques à Sens, & affiégérent Autun. Julien qui venoit d'être nommé Céfar, & qui avoit le commandement des Gaules, les en chaffa. Îls y revinrent peu de tems après, prirent le bagage des troupes d'Arbetion, & eurent la hardieffe de fe mefurer avec Julien même; qui leur tua trente mille hommes à Bingen fur la Nave plus bas que Strasbourg, & fit prifonnier dans cette action Chonomard le plus puiffant de leurs Rois, qui s'étoit rendu redoutable par plufieurs avantages qu'il avoit remportés auparavant fur les Romains.

Cette perte, quelque grande qu'elle fut, ne les rebuta pas. Ils défirent encore un Général de Julien, chez les Séquanois. Ils firent enfuite la guerre à Valentinien premier, pour fe vanger de quelques mépris qu'ils lui imputoient; attaquérent & tuérent Cariéton Comte des deux Germa nies: mais ils furent défaits à leur tour, & chaffés des Gaules par Jovinus. Enfin ayant repaffé le Rhein fous l'Empire de Gratien, ce Prince leur tua trente mille hommes auprès d'Argentuaria dans la Province Séquanoife.

Ils pafférent cependant de nouveau ce fleuve & le Danube, pour s'établir dans la Réthie & dans la partie de la Province Séquanoife qui étoit à la rive droite de l'Aar, & qui a long-tems porté leur nom. Ils attaquérent enfuite les Francs qui n'étoient pas encore bien affermis, mais ils furent vaincus par un fecours particulier de Dieu, qui avoit attaché à cette circonftance, la converfion de Clovis & de fon Peuple auquel il avoit destiné la possession des Gaules. Ce Prince qui connoiffoit le génie des Allemans, & que s'il leur donnoit le tems de fe reconnoître & de fe rétablir, ils reviendroient bien-tôt à la charge, les pourfuivit jufques dans leurs Païs, dont il s'empara, & en fit une Province de fon Royaume, qui fut depuis apellée le Duché d'Allemagne.

Tant d'irruptions & de ravages, dont la plupart fe fi

Hift. Julian.

*

rent dans la Province Séquanoife, en dépeuplérent les campagnes & en ruinérent les Villes. Augufta Rauracorum, grande & belle Cité,qui étoit la plus expofée parce qu'elle étoit la plus voifine des Allemans, avoit déja été prise Eunap. Sard. pillée & brulée avant le tems de Julien, & ne s'étoit rétablie que fous la forme d'une des Villes du fecond ordre, parmi lesquelles elle a été mife dans les Notices qui ont été faites après le régne de cet Empereur. Avanche autre Cité, grande auparavant & magnifiquement bâtie, fubfiftoit encore; mais elle étoit prefque déferte, & fes *Aventicum, de- édifices à demi ruinés, ne laiffoient plus qu'une trifte fertam quidem ci- idée de fon ancienne grandeur. Les incurfions des Allevitatem, fed non ignobilem quon. mans jufques à Argentuaria, Ebrodunum & Equeftris, ont dam, ut adificia auffi caufe la ruine de ces Villes, qui ont éte réduites femiruta nunc quo- bien-tôt après à de fimples Bourgs ou à de chetifs Villages. Besançon même en fouffrit beaucoup, foit par la defolation qu'ils portoient dans fes environs & dans la Province dont elle étoit la Capitale; foit qu'ils euffent pénétré dans la Ville même. Car on voit par une lettre de l'Empereur Julien, qu'elle avoit effuyé quelque désastre * qui ne pouvoit venir que des Allemans, feuls d'entre les Barbares qui fuffent entrés jufqu'alors dans la Province Séquanoise.

que demonftrant. Anm. Marcel.lib.

15.

* Vefontio, oppi.

dum magnum

olim, & magnifitum ; nunc dirutum. Epift. ad Maxim. Philof.

cis templis orna

Cette Province fut ravagée dans le fiécle fuivant par d'autres Barbares: car les Alains, les Vandales & les Suéves y entrérent en 406. Ils affiégérent Befançon, mais ils ne purent pas le prendre. Ils traverférent enfuite les Gaules , portant par tout le fer, le feu, la fervitude & la mort,jufques dans l'Efpagne & l'Affrique où ils fe fixérent.

Ce fut alors que l'Empire affoibli par la divifion que le Grand Théodofe en avoit faite entre fes fils Arcadius & Honorius, & épuifé dans l'Occident par les guerres qu'il y avoit foutenuës contre les Nations du Nord, devint enfin leur proie. Les Vifigots après avoir pris Rome, pafférent dans les Gaules en 412. Les Bourguignons y entrérent en l'année fuivante, & les Francs ne tardérent pas à y faire des conquêtes. Chacun de ces Peuples y fon

da un Royaume, & les Empereurs le fouffrirent, foit qu'ils ne fuffent pas affez puiffans pour s'y opofer, foit qu'ils euffent befoin des armes de ces Peuples même, pour fe défendre contre d'autres ennemis qui leurs étoient plus redoutables. Tel étoit Attila, qui fondit avec quatre cent mille hommes dans les Gaules en 451, & qui y auroit éteint dès lors la domination des Romains, fans le fecours que leurs donnérent les Vifigots, les Bourguignons & les

Francs.

Cependant ces nouveaux alliés, profitoient de toutes les circonftances pour s'agrandir. Les Bourguignons & les Vifigots, occupérent les Païs de leur voifinage qui étoient le plus à leur bienféance. Les Francs s'emparérent du refte des Gaules, & les Romains n'y avoient plus rien vers la fin du cinquième siècle. Il n'y avoit même plus d'Empereur en Occident.

Quelques Villes affectionnées à l'Empire, lui demeurérent attachées jufques à la fin, quoiqu'elles fuffent environnées de Barbares, mais qui ne croyoient pas être en état de les forcer, ou qui gardoient encore des mesures avec les Empereurs. Befançon fut du nombre : car les Bourguignons étoient déja répandus dans la Province Séquanoife, lorfque Galla Placidia qui gouvernoit l'Empire d'Occident pour Valentinien troifiéme fon fils, vint dans cette Ville en 445 pour recevoir des Reliques de S. Etienne, que Théodofe le jeune Empereur d'Orient y envoyoit à fa priere, fuivant que nous l'aprenons par nos légendes.

Rhenan. rer.

Mais enfin, quand les Partifans de l'Empire d'Occident eurent perdu toute efpérance de le voir rétablir, les Villes firent des capitulations. Ce fut probablement par celle Germ. lib. 2. de Befançon avec les Bourguignons, que cetteVille conferva la franchise & les immunités dont elle a joui dans la fuite; & auffi-tôt qu'elle fut paffée fous la fouveraineté des Bourguignons, la Province Séquanoife perdit jufqu'à fon nom, & ne fut plus regardée que comme une partie du Royaume de Bourgogne.

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PREMIERE DISSERTATION.

MONSIEUR,

J'ai lû l'Hiftoire des Séquanois que vous m'avez envoyée, & j'ai vû avec plaifir, comment vous y relevez la gloire de notre Nation par des faits que vous avez prouvés, ou qui s'induifent avec affez de vraisemblance de ceux qui font certains. Vous me faites honneur en me demandant la critique de cet Ouvrage, & je fouhaiterois fort de mériter la bonne opinion que vous avez de moi; mais je crains de vous la faire perdre, fi je ne vous fais pas de bonnes objections. Je vais cependant vous en propofer quelques-unes: car j'aime encore mieux paffer dans votre efprit pour peu habile, que de m'expofer au reproche d'avoir fui le travail que vous attendez de moi.

Je trouve beaucoup de difficulté dans ce que vous dites, que le Canton de Bafle, la Breffe & le Bugey, étoient de l'ancien Païs des Séquanois. Les Rauraques qui habitoient ce Canton, font nommés par les Auteurs comme un Peuple particulier; & Céfar le fupofe, quand il dit, qu'ils fe joignirent aux Helvétiens pour paffer dans la Xaintonge. Il fupofe du moins, qu'ils faifoient une partie de la Nation Helvétique.

les

Ce grand Capitaine qui connoiffoit fi bien les Gaules, puifqu'il les avoit conquifes & parcouruës plufieurs fois pendant les dix années de fon gouvernement, dit que Allobroges s'étendoient au deça du Rhône. Il nomme les Habitants du Bugey & de la Breffe, Brannoviens, Brannovices & Sébufiens; & il les qualifie Clients de ceux d'Autun. Il me paroît qu'on ne peut pas douter qu'il ait parlé des Bugiftes & des Breffans, quand il a dit que les Ségufiens font les premiers qu'on trouve au delà du Rhône, en fortant de la Province Romaine : car c'est la fitua

tion

tion de la Breffe & du Bugey. Plufieurs paffages de Stra bon, soutiennent auffi ce fiftême. Or les Ségufiens étoient certainement dans la dépendance des Eduois, & par conféquent ils n'étoient pas Séquanois.

Vous fçavez encore, Monfieur, qu'une partie de la Breffe eft des Diocèfes de Chalon & de Mâcon, & une autre partie de celui de Lyon, qui comprend d'ailleurs une portion confiderable du Bugey, comme Lagneux, S. Sorlin, S. Rambert, Poncin, Cerdon & Nantua. D'ailleurs plufieurs Bourgs de la Breffe & du Bugey, font dits être in pago ou territorio Lugdunenfi, dans les titres anciens. Aimoin parlant de l'Abbaye de S. Marcel lez-Chalon, dit qu'elle fut fondée in territorio Segonum, c'est à dire chez les Ségufiens. Les Cartes qui nous repréfentent l'état ancien des Gaules, placent les Sébufiens dans le confluent de la Sône & du Rhône, ou mettent les Ségufiens aux deux bords de la Sône. Les Auteurs modernes que j'ai lûs,. les placent de même.. Je conviens cependant que ceux qui ont écrit les derniers. & qui font les plus habiles, ne parlent pas de Brannovices, Brannoviens & Sébufiens: mais ils leur fuftituent les Ségufiens dans la Breffe & le Bugey.. Vous avez adopté, Monfieur, le fyftême de Cluvier, fuivant lequel les Germains & les Gaulois parloient la même langue. Cependant on lit dans les Commentaires de Céfar, qu'Ariovifte Roi des Germains avoit apris la langue Gauloife depuis qu'il étoit dans les Gaules; d'où je conclus que ce n'étoit pas fa langue maternelle; & il y a des paffages dans Tacite & ailleurs, qui parlent des langues Gauloife & Germanique, comme de deux langues differentes. Je ne doute pas que vous n'ayez prévû ces objections, & je fuis perfuadé que vous les réfoudrez par de: bonnes réponses. J'ai l'honneur d'être, &c..

G

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