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gey, qui lui eft parallele, mais qui étant plus élevé, joüit d'un meilleur air.

Enfin dans le tems que le Chriftianifme a fait fes plus grands progrès, les incurfions des Allemans & des Vandales, des Alains & des Huns, & l'invafion des Bourguignons avoient presque entiérement dépeuplé la Province Séquanoife. Des faints Solitaires fe font établis dans les déferts de cette Province, & les regardant comme des lieux neutres, ils fe font choifi pour Diocéfains, les Evêques qu'ils ont jugé à propos..

C'eft ce qui eft arrivé, par exemple, à l'égard de l'illuftre Monaftere de S. Claude. Ses faints Fondateurs Ro-main & Lupicin, qui ont introduit chez nous au commencement du cinquiéme fiécle la vie angélique des Peres du Défert, ont reconnu l'Evêque de Lyon pour leur Diocéfain, quoiqu'ils fuffent Séquanois de naiffance & établis dans la Province Séquanoife,parce qu'ils étoient particuliérement connus de cet Evêque, & qu'ils avoient pris dans fa Ville Epifcopale, les principes & les régles de la vie monaftique qu'on y obfervoit déja.

Ce peut être par raport à l'extenfion du Diocèfe de Lyon dans la Province Séquanoife, qu'on a dit de S. Claude & d'autres lieux de cette Province, qu'ils étoient in pago ou territorio Lugdunenfi. Mais d'ailleurs ces lieux étoient fous la domination des Rois de Bourgogne, qui avoient renverfé l'ancienne divifion faite par les Romains, & établi dans leur Royaume de nouvelles Provinces, dont ils avoient donné le gouvernement à des Seigneurs de leur Cour qu'on apelloit Comtes, à l'exemple de ce qu'avoient pratiqué les Romains fous le bas Empire. Nous en avions quatre dans le feul Comté de Bourgogne, qu'on apelloit Comtes des Scodings, des Varafques, des Portifiens, & des Amoufiens. Celui de Lyon, qui étoit l'une des Capitales du Royaume, devoit avoir un plus grand diftrict que les autres ; & comme cette Ville, qui avoit été bâtie aux confins de fa Province du côté des Séquanois, n'avoit eu d'abord qu'un petit territoire, il fut étendu confiderablement

de ce côté fous les Rois Bourguignons, & l'enceinte du Gouvernement de Lyon, fut apellée pagus Lugdunenfis ou territorium Lugdunenfe.

Quant à ce qu'Aimoin Moine de Fleuri, parlant de la fondation de l'Abbaïe de S. Marcel auprès de Chalon, dit qu'un Roi de Bourgogne la bâtit, in fuburbio civitatis Cabillonenfis, fed in territorio Segonum, faltuque Brixienfi; je réponds que cet Auteur, qui écrivoit au commencement du onzième fiécle dans un tems d'ignorance, & qui a fimplement raporté des faits, n'a guére pensé à faire la diftinction des Ségufiens & des Séquanois; & qu'on peut entendre des Séquanois,la dénomination de Segonum, qu'il a donnée au territoire dans lequel le Monaftere de S.Marcel a été édifié. Aussi M. de Valois a penfé, qu'il falloit lire Sequanorum au lieu de Segonum ; & on trouve dans l'Hiftoire du martyre de S. Marcel,qu'une des portes de Chalon, étoit apellée porta Secanica ; & dans la continuation de celle de Grégoire de Tours par Fredegaire, que Gontran fit bâtir un Monaftere & une Eglife à l'honneur de S. Marcel, dans le Fauxbourg de Chalon qui étoit fur le territoire des Séquanois: Ecclefiam Beati Marcelli, in fuburbana Cabillonenfi, fed quidem tamen Sequanum territorium, mirificè ac folerter ædificari juffit; ibique Monachis congregatis, monafterium condidit. Or fi le Païs des Séquanois comprenoit la Breffe Chalonoife, qu'est-ce qui empêche qu'il Peres Latins à comprit auffi, ce qui eft des Diocèfes de Lyon & de Mâcon, entre le Rhône & la Sône ?

*

Dans l'édit. des

Lyon.

Vous ajoutez, Monfieur, que les Auteurs, qui ont écrit depuis le renouvellement des fciences, font contraires à mon sentiment; j'en connois cependant qui ont pensé à peu près comme moi. Je ne vous nommerai ni Paradin ni Gollut, vous les reprocheriez comme des Auteurs crédules & fans critique; mais je vous en citerai deux, dont chacun vaut plufieurs autres. Le premier, eft le fçavant Auteur des Notes fur Pline, qui dit : Sequani, tenuere ferè, quidquid à Dolâ Lugdunum ufque, inter Ararim & Rhodanum, terrarum interjacet.* Le fecond est le docte Cluvier, Plin. l. 484,P. 13.

*Not. in lib. 4,

qui eft allé les livres & le crayon à la main, voir les Païs dont il a parlé dans fes ouvrages. Voici ce qu'il dit dans sa Germanie antique, des limites des Séquanois, en ce qui peut concerner notre difficulté : Sequani, Arare ad oppidum ufque Gray à Lingonibus, & inde eodem amne ab Eduis ad oppidum ufque Mâcon diftinguebantur. Tandem ad Rhodani ufque confluentem, à Segufianis.Continentur nunc hifce Sequanorum finibus, Alfatia fuperior, Burgundia Comita*Germ. antiq. 1. tus, & ager Breffenfis. *

2. cap. 8.

Voilà des réclamations qui auroient interrompu la prefcription, fi elle avoit pû courir en cette matiere. Mais vous fçavez, Monfieur, qu'on ne prefcrit jamais contre la vérité; que ce qui a été vrai dans un tems, peut bien être, obfcurci, mais qu'il ne peut pas être faux; & que l'un des principaux droits de la critique, eft d'effacer les préjugés les plus anciens, en démontrant l'erreur des opinions communes. Voici quelle a été à mon avis la caufe de celle que je combats.

ça

L'invafion des Bourguignons, fut fuivie de près d'une groffiére ignorance dans tous les Païs qu'ils occupérent. Elle fit oublier jufqu'au nom desPeuples qui les habitoient, & les nouvelles divifions qu'ils firent dans leur Etat, effainfenfiblement le fouvenir des anciennes limites des Provinces. Cette confufion augmenta encore, à la dissolution du dernier Royaume de Bourgogne : car les Seigneurs qui y avoient des Gouvernements, s'y attribuérent infenfiblement la fouveraineté. Ce fut alors, qu'on vit se former les Comtés de Bourgogne, de Savoye & de Provence, le Dauphiné & plufieurs autres Etats qui n'étoient pas connus auparavant.

Lorfqu'après bien des fiécles, l'on a commencé à reprendre de l'amour pour les lettres, & à lire l'Hiftoire; chaque nouveau Peuple a recherché fa premiére origine. Mais les chofes avoient tellement changé, qu'il n'a pas été également facile à tous de la retrouver. Les paffages des anciens qui étoient clairs quand ils ont écrit, parce qu'ils étoient foutenus de l'état des lieux, ont paru obfcurs à la fuite;

cet

cet état n'étant plus le même. La vanité a augmenté l'embarras : car tel n'étoit venu que des Clients, qui a voulu defcendre des maîtres; & tel autre, qui n'avoit fait qu'une petite partie d'une Nation, a voulu faire un Peuple à part. C'est ce qui a porté les Bugiftes & les Breffans, dont les noms font nouveaux, à fe faire Brannoviens, Brannovices & Sébufiens, en abufant de quelques lieux des anciens Auteurs, alterés & mal copiés.

La Province Séquanoife avoit été démembrée à plufieurs reprises. La puiffance & le luftre de Befançon, étoient beaucoup diminués, parce qu'il n'y réfidoit plus, comme fous l'Empire Romain, des Magiftrats qui commandaffent à une grande Province, & que cette Ville étoit éloignée du féjour de fon Souverain. Lyon au contraire, devenu dans peu de tems la Rome des Gaules, & l'une des plus belles Villes de l'Empire, s'étoit foutenu après l'invafion des Bourguignons, parce qu'ils l'avoient choifi pour l'une des Capitales de leur Royaume, & qu'ils y réfidoient. Son heureuse fituation pour le commerce, y avoit confervé l'abondance & le concours des Peuples. La gloire de cette Ville celebrée par un grand nombre d'Auteurs, excitoit fes voifins qui habitoient le conAluant du Rhône & de la Sône, à y prendre part. Après avoir tenté de se faire Brannoviens, Brannovices ou Sébufiens, ils fe font dit Ségufiens pour avoir Lyon à leur tête; & ils y ont encore été engagés, parce qu'on lit dans Pline que les Ségufiens étoient un Peuple libre ; ce qui ne doit cependant pas être entendu d'une liberté originaire, mais d'une exemption du tribut, accordée par un privilége, qui n'étoit pas fort rare dans les Gaules fous l'Empire Romain; ou, comme l'entend M. de Valois, de ce que les Ségufiens cefférent d'être Clients des Eduois, depuis que Lyon fut leur Capitale & Colonie Romaine.

*

C'est ainfi qu'on a dépouillé les Séquanois, & qu'on les a réduits au Comté de Bourgogne, qui ne fait que le tiers de leur Païs, tel qu'il étoit avant Augufte; fous

K

*Plin. lib. 4.

cap. 17:

lequel il avoit encore été augmenté de près de moitié, par la jonction qui y fut faite de celui des Helvétiens, aufquels on donna auffi dès lors le nom de Séquanois. Mais comme on les a dépouillés fans titre, & à ce qu'il me femble, fans raison, j'ai crû qu'il étoit du devoir d'un bon Compatriote, de rétablir leurs anciennes limites, & je ne fais en cela, ni tort ni injure aux Habitants des Païs que je révendique; car le nom de Séquanois que je leur donne, eft au-deffus de ceux que je leur conteste.

J'oubliois de vous obferver, Monfieur, que l'Anonime qui a écrit au fixiéme fiécle, les vies des trois premiers Abbés de S. Claude, dit qu'ils étoient d'Ifernore dans la Province Séquanoife, intrà Galliam Sequanorum oriundi; & que S. Romain le plus ancien des trois, a introduit la vie cénobitique dans le Païs des Séquanois, en établisfant un Monastere à Condat qui porte aujourd'hui le nom de S. Claude. Ante quem, nullus omninò Monachorum, intrà Galliam Sequanorum, religionis obtentu, aut folitariam, aut confortialis obfervantia, fectatus eft vitam. Or Ifernon dans le Bugey, & S. Claude dans le Comté de Bourgogne, ont toujours été du Diocèfe de Lyon. D'où je tire une nouvelle preuve que l'étendue de ce Diocèse, ni de ceux de Chalon ou de Mâcon, ne prouve rien contre celle que je donne à la Province Séquanoife.

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Il me refte, Monfieur, pour achever de répondre à votre Lettre, à juftifier le plan que j'ai pris, d'expliquer autant qu'on le peut raifonnablement faire, nos anciens noms Celtiques par la langue Allemande.

Vous m'oppofez d'abord cet endroit de Céfar, où il dit, qu'il envoya Valerius Procillus à Arioviste pour conférer avec lui, parce qu'il étoit affuré de la fidélité de cet Envoyé, qui fçavoit parfaitement la langue Gauloife, & qu'Ariovifte s'étoit accoutumé à la parler depuis le tems qu'il étoit dans les Gaules: C. Valerium Procillum, propter fidem & Gallica linguæ fcientiam, quâ multum Arioviftus longinquâ confuetudine utebatur, ad eum

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