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mention à l'autel, il n'en falloit pas davantage à un esprit aussi ardent et aussi excessif que Tertullien, pour conclure que les laïques destinés à faire quelquefois certaines fonctions qui étoient ordinairement réservées aux prêtres, telles que le baptême, et la présentation des offrandes, devoient être exempts, comme les prêtres, de la souillure des secondes noces. Peut-être même comprenoit-il en général, dans cette expression, l'usage que les fidèles avoient alors, à cause des persécutions, de distribuer entre eux la communion domestique. En ce sens ils étoient prêtres pour eux-mêmes. Les fidèles qui offrent conjointement avec le prêtre dans la célébration solennelle de l'eucharistie, doivent sans doute continuer d'offrir lorsqu'ils communient; car Jésus-Christ n'est jamais dans le sacrement que pour nous y servir de victime. Comme cette communion domestique étoit donc sans doute une offrande, il pouvoit encore se faire que dans une famille le père ou le plus âgé distribuoit le pain sacré aux autres, comme le père Petau l'insinue. Le père faisoit en ce cas la fonction de diacre, qui étoit, selon le langage de saint Cyprien, offrir; car ce saint docteur parle ainsi : « La solennité étant >> achevée, comme le diacre commença à offrir le » calice à ceux qui étoient présens (1). » Mais le mot de sacrifier ou de consacrer, qui représenteroit ce que nous appelons messe, ne se trouve ici en aucun endroit. Cependant les mots mêmes de sacrifier et de consacrer, qui seroient bien plus décisifs que celui d'offrir, ne signifient pas toujours l'action réservée au prêtre. Saint Cyprien se sert du terme de (1) De Lapsis, pag. 189.

sacrifice pour marquer les offrandes du peuple. « Vous venez, dit-il (1), sans sacrifice à la fête du » Seigneur.» Saint Ambroise (2), faisant parler saint Laurent diacre à saint Sixte, le fait parler comme ayant consacré avec ce saint Pape. Il est manifeste néanmoins que cette expression se réduit à dire qu'il l'avoit servi dans la célébration des mystères. A combien plus forte raison peut-on croire que Tertullien, bien plus exagérant que saint Cyprien et saint Ambroise, aura usé d'une manière équivoque du terme d'offrir, qui est beaucoup moins fort que ceux de sacrifice et de consacrer.

On nous dira encore peut-être que ces deux termes, baptiser et offrir, étant mis ensemble, ont une force particulière ; qu'il est vrai qu'offrir, étant seul, est équivoque, mais que, joint à baptiser, il signifie toujours la consécration. Il suffit de répondre que Tertullien, ayant besoin d'éblouir le lecteur par les termes les plus outrés, a mis tout exprès le terme d'offrir qui est équivoque, et qui dans le fait particulier ne signifioit point la consécration, avec celui de baptiser, pour donner en gros, par ces deux termes joints, l'idée des principales fonctions des prêtres qu'ils signifioient ordinairement. Cet excès d'expression est bien plus facile à croire d'un homme si excessif, que le fait impossible et incroyable que les Protestans veulent qu'il ait supposé comme manifeste.

Enfin nos frères oseroient-ils opposer Tertullien, qui, dans les endroits obscurs, ne dit rien pour eux, (2) De Officiis Min. lib. 1,

(1) De Opere et Eleem. pag. 242. cap. XLI, n. 214: tom. 11.

si on se donne la patience de l'examiner de près, à Tertullien qui, dans les endroits clairs et dans des ouvrages entiers, a pour but de décider en notre faveur? Oseront-ils opposer Tertullien Montaniste à Tertullien défenseur de l'Eglise dans son livre des Prescriptions? Que nous dit-il dans ce livre révéré de tout le christianisme, où son glaive, comme saint Augustin le dit de saint Cyprien, a tranché par avance les hérésies de tous les siècles? Il nous assure que c'est le propre des hérétiques de vouloir exciter la curiosité des fidèles, et de dire sans cesse: Cherchez dans les Ecritures, et vous trouverez. « Nous devons croire, » dit-il (1), véritable et enseigné par le Seigneur ce » qui est de l'ancienne tradition.... Si quelque hérésie » se vante d'être apostolique, nous lui disons qu'elle » aille chercher son origine, qu'elle examine l'ordre >> et la succession de ses évêques qui descendent de la » source; qu'ils nous montrent des évêques établis >> par les apôtres dans l'épiscopat, et qui aient con» servé chez eux cette semence apostolique. » Voilà la succession du ministère par laquelle Tertullien décide. Combien étoit-il éloigné de dire qu'il n'étoit pas question d'examiner la mission et la succession du ministère, puisque deux ou trois faisoient une église, et que chacun étoit prêtre pour soi-même ! Mais écoutons encore sa vraie doctrine. «Suivant » la règle que l'Eglise a reçue des apôtres, les apôtres de Jésus-Christ, et Jésus-Christ de Dieu, » il ne fant point admettre les hérétiques à dispu» ter contre nous sur les Ecritures, puisqu'ils n'ont >> point d'Ecritures, et qu'elles ne leur appartien() De Præscript. cap. xx1, xxxII.

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» nent pas........... Ils n'ont aucun droit de se les approprier. Nous leur disons : Qui êtes-vous? quand et » d'où êtes-vous venus? que faites-vous dans notre » bien, vous qui n'êtes pas des nôtres ? L'Ecriture est » mon bien; j'en suis de temps immémorial en pos» session ; je la possède le premier; j'ai une origine » assurée; je suis héritier des apôtres (1). » C'est ce qui a fait dire à M. Jurieu que saint Cyprien tenoit de Tertullien son opinion cruelle sur l'unité de l'Eglise. Voilà donc, de son propre aveu, Tertullien, qui bien loin de donner les clefs aux laïques pour se conduire eux-mêmes dans les besoins, ne veut pas même écouter, sur la doctrine des Ecritures, quiconque n'est pas dans la parfaite unité de foi sous le ministère successif qui vient des apôtres sans interruption.

Enfin, quand même Tertullien auroit dit ce que les Protestans lui font dire, ils n'auroient pour eux que Tertullien, contraire à lui-même, et tombé de sa première sagesse jusqu'aux plus monstrueuses visions; ils n'auroient point la consolation d'avoir pour eux un homme qui fût dans la communion de toutes les anciennes églises du christianisme: ainsi ils n'en auroient pas moins contre eux la tradition universelle. Mais cet avantage même, si misérable et si indigne de leur être envié, ne leur reste pas, comme nous venons de le voir.

(*) De Præscript. cap. xxxvI.

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CHAPITRE XI.

Des endroits où saint Augustin a parlé des clefs données au peuple.

M. JURIEU prétend trouver dans saint Augustin, que les clefs appartiennent au peuple, et il cite divers endroits de ce père qu'il croit décisifs. Nous allons voir qu'il n'en peut rien conclure.

Saint Augustin, dans son traité L sur saint Jean, parle ainsi de saint Pierre et de Judas (1): « Un mé>> chant représente le corps des méchans, comme » Pierre le corps des bons: car si la figure de l'Eglise » n'étoit pas dans la personne de Pierre, le Seigneur >> ne lui diroit pas : Je te donnerai les clefs, etc.... » car lorsque l'Eglise excommunie, l'excommunié est » lié dans le ciel.... Si donc cela se fait dans l'Eglise, » Pierre, quand il a reçu les clefs, a représenté la » sainte Eglise. Si dans la personne de Pierre les bons qui sont dans l'Eglise ont été représentés, les mé>> chans qui sont dans l'Eglise ont été représentés en » la personne de Judas. »

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Le but de saint Augustin est de montrer que quand Jésus-Christ dit : Vous ne m'aurez pas toujours, il parle à tous les méchans en la personne de Judas, comme il parle à tous les bons en la personne de saint Pierre, quand il dit : Je te donnerai les clefs, etc. Ainsi saint Augustin suppose, dans sa comparaison, que les clefs ont été données, non-seulement

(1) In Joan. Ev. tract. L, n. 12; tom. III, part. 2.

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