Abbildungen der Seite
PDF
EPUB
[ocr errors]

» faut point attendre le témoignage des hommes quand les suffrages divins les préviennent, etc. Sa>> chez donc, mes très-chers frères, qu'il a été or» donné par moi, et par mes collègues qui étoient » présens. » Qu'on ne nous dise point que ce n'étoit qu'une ordination de lecteur. A l'occasion d'un lecteur ordonné, saint Cyprien parle généralement et sans restriction de toutes les ordinations du clergé. Remarquez qu'il ne dit pas, nous sommes obligés de compter vos suffrages; mais seulement, nous avons accoutumé de vous consulter. Ce n'étoit donc qu'une coutume de l'Eglise, qui use toujours d'une conduite douce pour faire aimer son autorité. Et quand on demandoit le suffrage du peuple, on ne faisoit que le consulter. Mais encore, pourquoi le consultoit-on? C'est, dit saint Cyprien, qu'on attendoit les témoignages humains. Vous voyez que cette consultation se réduisoit à s'assurer des mœurs de l'élu par le témoignage du peuple, et que saint Cyprien, après avoir appelé le suffrage du peuple les témoignages humains, ajoute qu'il n'a pas été nécessaire de les attendre, parce que les suffrages divins ont précédé, c'est-à-dire, ou que ce père avoit eu une révélation particulière sur ce choix comme il en avoit souvent sur les affaires de l'Eglise, ou qu'il avoit assez reconnu la vocation divine sur Aurélius par sa constance dans les tourmens et par l'intégrité de ses mœurs.

Dans l'Epître xxxiv, ce père parle avec la même autorité sur une semblable ordination de Célerin. Si M. Jurieu méprise ces élections de lecteurs, je le prie de remarquer que saint Cyprien choisit à la fin

de cette épître ces deux lecteurs avec la même autorité pour les élever au sacerdoce. Au reste, sachez, dit-il, que je les ai déjà désignés pour les honorer du sacerdoce. Il ajoute qu'ils recevront dès ce jour-là les mêmes distributions que les prêtres, et qu'il les fera asseoir avec lui, lorsqu'ils auront atteint un áge plus múr. Ainsi ce n'est point une désignation vague et incertaine; c'est un choix fixe et déterminé qui commence à s'exécuter sans attendre l'avis du peuple, et auquel il ne manque rien pour être une véritable élection. C'est encore ainsi que saint Cyprien mande au clergé de Carthage (1) de recevoir au rang des prêtres Numidicus qu'il a élevé au sacerdoce. Quand je serai présent, ajoute-t-il, il sera encore élevé à une plus grande fonction, c'est-à-dire à celle de l'épiscopat. Vous voyez que le peuple n'est pas seulement consulté. Ainsi, lorsque saint Cyprien assure qu'il ne veut rien faire que par l'avis du clergé, et même du peuple, c'est qu'il veut profiter des avis de tous, c'est qu'il ́veut, par cette condescendance paternelle, faire aimer son autorité : mais il se réserve, comme il paroît par ces exemples, de décider seul quand il le juge convenable. Enfin l'assurance qu'il donne de n'agir point d'ordinaire sans consulter, montre qu'il veut bien suivre une règle à laquelle il n'étoit pas assujetti en rigueur; et au contraire les cas où il décide seul font assez voir qu'il avoit le droit de le faire.

M. Jurieu n'a rien dit de l'Epître LXVIII du même père; mais comme il pourroit s'en servir dans la suite, il n'est pas inutile de lui montrer combien elle est contraire à ses sentimens. Elle est écrite au (1) Epist. xxxv.

[ocr errors]

clergé et aux peuples fidèles d'Espagne, sur Basilide et Martial, qui, étant tombés pendant la persécution, avoient été déposés. On avoit ordonné Sabin et Félix en leur place. Voici les paroles dont il semble d'abord que les Protestans pourroient tirer quelque avantage : « Le peuple obéissant aux préceptes divins, et crai» gnant Dieu, peut se séparer de son pasteur qui pé>> che, et ne doit point prendre de part aux sacrifices » d'un prêtre sacrilége; principalement puisqu'il a le » pouvoir, ou de choisir de dignes pasteurs, ou d'en >> refuser d'indignes; ce que nous voyons qui vient de » l'autorité divine. » Jusque-là, qui ne croiroit que saint Cyprien a jugé, comme les Protestans, que les élections des pasteurs dépendent absolument du peuple? Mais cet exemple doit montrer combien il est facile de se tromper sur les sentimens des auteurs, 'quand on s'arrête à des passages qui semblent formels, et qu'ils sont détachés de la suite. Il faut se souvenir qu'il n'est question dans cette Epître que de montrer, non au peuple seul, mais au clergé et au peuple ensemble, qu'ils peuvent abandonner un pasteur légitimement déposé pour sa chute, et en la place duquel un autre aura été mis par une ordination canonique. La suite lève toute équivoque. « Prin>> cipalement, dit saint Cyprien, puisque le peuple a » le pouvoir de choisir de dignes pasteurs ou d'en re>> fuser d'indignes; ce que nous voyons qui vient de >> l'autorité divine, qui a voulu que le pasteur fût >> choisi en présence du peuple aux yeux de tout le » monde, et qu'il fût reconnu digne et capable par » le jugement et par le témoignage public, comme le Seigneur, dans les Nombres, commanda à Moïse,

>>

[ocr errors]

» disant: Prenez Aaron votre frère, et Eleazar son » fils..... Dieu commande d'établir le prêtre devant » toute la synagogue, c'est-à-dire qu'il fait entendre » que les ordinations de pasteurs ne doivent se faire qu'avec la connoissance du peuple assistant, afin » que, le peuple étant présent, on découvre les crimes » des méchans, et on publie les vertus des bons, et » que l'ordination soit juste et légitime, étant exami» née par le suffrage et le jugement de tous. » Il ajoute « Ce qui se faisoit avec tant de soin et de précaution, le peuple étant assemblé, de peur que » quelque indigne ne se glissât dans le ministère de » l'autel ou dans la place épiscopale... C'est pourquoi » il faut observer, selon la tradition divine et l'usage » apostolique, ce qui s'observe chez nous et presque » dans toutes les provinces, que, pour bien faire une » ordination, les évêques de la province qui sont voi» sins s'assemblent devant le peuple à qui on doit or» donner un pasteur, et que l'évêque soit élu en pré>> sence du peuple, qui connoît parfaitement la vie » d'un chacun, et qui a observé leur conduite. C'est » ce que nous voyons qui a été fait chez vous dans » l'ordination de notre collègue Sabin, etc. >>

>>

[ocr errors]

Il est manifeste que ce père ne représente cette convocation du peuple que comme une coutume de la part des églises, et non pas comme une loi essentielle, suivie partout sans exception : l'exemple qu'il apporte de l'ordination d'Eleazar montre combien il étoit éloigné de penser que la présence du peuple lui donnât le droit d'élire, puisque les Israélites ne furent que les simples spectateurs de la transmission du père au fils, d'un ministère que Dieu avoit rendu successif

et indépendant de toute élection. Il dit sans cesse qu'il faut appeler le peuple par précaution pour s'assurer par son témoignage des mœurs de ceux qu'on élit.

Enfin il montre que toutes ces précautions ont été observées pour Sabin, afin de donner plus d'autorité à son ordination, et d'engager plus fortement le peuple, ébranlé par les artifices du pasteur déposé, à reconnoître toujours le nouveau pasteur dont il avoit prouvé lui-même l'élection.

. En voilà assez pour montrer que le droit d'élection réside, selon saint Cyprien, dans le corps des pasteurs, et que les peuples n'y sont admis que comme témoins que l'on consulte en esprit de paix et d'union. C'est pourquoi, quand même l'élection feroit l'essence de l'établissement des pasteurs, ils ne tiendroient point leur ministère du peuple ; et ainsi l'autorité que M. Jurieu emploie contre nous se tourneroit encore contre lui.

[ocr errors][merged small][merged small]

M. JURIEU nous cite quatre chapitres tirés de la dist. LXIII du Décret de Gratien, sans en rapporter aucune parole. Mais nous avons autant d'intérêt à les examiner en détail, qu'il en avoit de ne le faire pas. Le premier est de saint Grégoire, pape (1). Laurent, évêque de Milan, étant mort, on avoit élu Con(1) Decret. dist. LXIII, cap. x.

« ZurückWeiter »