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prière, et la prière à l'étude. Apprenezi à faire des ouvrages de laine et à filer; ais ne souffrez pas qu'elle s'applique à des ouvrages de broderie d'or ou de soie. Nourrissez-la de légumes ou d'autres mets semblables, et rarement de poisson. Quand ous irez à la campagne, menez y votre le afin de l'accoutumer à ne pouvoir vivre ans vous. Que les livres divins fasse ses delices et qu'elle commence par apprendre e Psautier dont les sublimes inspirations ever ont son âme au Seigneur. Elle puisera ensuite dans les Proverbes de Salomon des egles pour bien vivre; dans l'Ecclésiaste, des maximes qui lui inspireront peu à peu le mépris du monde; et dans Job, des exemples de patience et de vertu. De là elle assera aux Evangiles, aux Actes et aux Epitres des apôtres, après quoi, elle apprendra par cœur les Prophètes, les livres de Moise, des Rois, etc., et finira par l'étude de 'Ecriture sainte, par le Cantique des cantiques, qu'elle pourra lire alors sans danger; andis qu'en commençant par cette lecture, il y aurait eu lieu de craindre qu'elle n'en edt été blessée, faute de pouvoir y pénétrer le mystère des noces spirituelles, que la ettre de ce chant sublime cache sous des termes qui ne paraissent propres qu'à insfirer un amour charnel et mondain. »

Ainsi, dès qu'il devient possible d'exercer la mémoire d'une jeune fille, Jérôme veut que l'on s'empresse de diriger vers la einnaissance de la loi chrétienne les premières lueurs de son intelligence. Pour cela qu'on lui mette en main quelques livres de notre religion, choisis du moins parmi les livres historiques de l'Ancien et du Nouveau Testament, semences fécondes, dont les fruits sont réservés à l'avenir; quel ques versets de l'Ecriture qu'elle récitera régulièrement et qui seront comme sa tâche de chaque jour, et comme un bouquet composé de fleurs cueillies dans le jardin des divines Ecritures et qu'elle offrira chaque matin à sa mère. « Que ce soient-là ses premiers joyaux, sa parure la plus chérie; les jeux habituels qui l'occupent, au moment où elle se réveille et à celui où elle s'endort. Donnez-lui en l'exemple, ajoute-t-il, et elle Vous imitera sans autre effort. » Il marque aussi qu'elle pourra lire sans crainte les Ouvrages de saint Cyprien, les lettres de saint Athanase et les écrits de saint Hilaire. Il dit à Læta que si elle trouvait qu'il lui fat difficile de suivre toutes ces règles dans l'éducation de sa fille, elle pouvait l'envoyer à Bethleem, où sainte Paule, son aïeule, et sa tante Eustochie l'éleveraient dans la vertu beaucoup plus facilement et avec bien plus de sûreté qu'elle ne le ferait elle-même à Rome. Il lui promet de contribuer pour sa part à son éducation, et assure qu'il se tiendra beaucoup plus honoré de cet emploi qu'Aristote n'avait pu l'être lorsqu'on lui confia l'éducation d'Alexandre; « parce que, dit-il, je n'instruirai pas un roi de Macédoine, destiné à périr par le poison dans la ville de Babylone; mais une servante

et une épouse de Jésus-Christ, qui doit luí être présentée pour régner avec lui dans son royaume du ciel. »

A Gaudence.-Les règles que saint Jérôme prescrit à Gaudence, qu'il traite de frère, et qui diffère par conséquent du célèbre évêque de Bresse du même nom, sont à peu près les mêmes que celles que nous venons d'analyser. Gaudence avait une fille nommée Pacatule, qui ne faisait encore que bégayer. Aussi, lui dit-il, que cette enfant, n'étant pas en état de profiter de sa lettre, il la lui réserve pour la lui faire lire dans un âge plus avancé. Il remarque qu'il y avait des mères qui, après avoir consacré leurs filles à Jésus-Christ, avaient coutume de les vêtir d'une robe brune et d'un manteau noir, et de leur enlever tout ce qu'elles avaient de plus précieux; a conduite fort sage, dit-il, parce qu'une jeune fille ne doit pas s'accoutumer à porter dans sa jeunesse des ornements qu'elle sera obligé de quitter daus un âge plus avancé. » Il lui fait observer que l'étude de la loi divine doit précéder toute autre science, et commencer à faire l'occupation chérie de sa jeunesse, l'ornement de sa mémoire et la plus belle parure de son esprit. A quoi bon charger l'imagination et la mémoire d'un enfant de tant de connaissances stériles ou dangereuses, jusqu'à les épuiser même par des études prématurées ? Quand on leur enseigne avec tant de scin les absurdes mensonges de l'ancienne mythologie, se peut-il que des parents chrétiens leur laissent ignorer les principes de cette science divine, sans laquelle toute sagesse humaine n'est elle-même qu'erreur et vanité. A tous ces contes de vieilles, croyezvous qu'un enfant ne préfère pas les paroles de l'Apôtre, qui contiennent des enseignements si sublimes et si profonds? Tout ce que l'on fait, tout ce que l'on dit en présence des enfants, qu'on ait soin de le rapporter à Jésus-Christ, centre de toute la religion; en choisissant parmi les discours de l'HommeDieu ce qui est plus proportionné à leur âge, plus accessible à leur imitation. « De près, de loin, surveillez vous-même les études de votre fille, ses jeux, ses habillements, sa nourriture, ses études, afin qu'elle ne soit pas exposée à rien apprendre qu'elle sera obligée d'oublier plus tard. Qu'elle s'accoutume à faire par amour ce qu'elle fait par devoir, et qu'elle regarde l'étude plutôt comme un divertissement auquel elle s'applique par inclination et non par nécessité; ses jeux, en écartant tous les divertissements où règnent le désordre et la confusion; ses vêtements, parce que la modestie chrétienne repousse tout excès; elle ne veut ni le faste des parures, ni la malpropreté, ni la recherche de la mise, ni la négligence; sa nourriture, en évitant avec soin tout ce qui peut servir d'excitant à la sensualité. >>

A Démétriade. - Et qu'on ne croie pas que le solitaire de Béthléem, qui donne de si beaux conseils à l'enfance, n'en ait point pour la jeunesse parvenue à l'âge de puberté, c'est-à-dire au moment où elle court tous les

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dangers qu'amènent avec elles les passions. Ecoutez comme il parle à la vierge Démétriade, jeune fille de distinction, qui, après la prise de Rome par les Goths, s'était réfugiée en Afrique, où elle avait reçu le voile des mains d'Aurélius, évêque de Carthage. « Le seul, et le plus important conseil que je vous donne, lui dit-il, c'est d'aimer la lecture de l'Ecriture sainte, et de prendre garde de laisser tomber aucune mauvaise semence dans votre cœur. Lorsque vous étiez dans le siècle, vous preniez plaisir aux choses du siècle; mais aujourd'hui que vous avez quitté le monde, que vous vous êtes élevée par de nouveaux voeux au-dessus des engagements de votre baptême, et que vous avez fait pacte avec Dieu contre votre ennemi, en lui disant : Je renonce à toi, Satan; je renonce à ton siècle, à tes pompes, à tes œuvres; ne rompez point ce traité qui fait votre force. Armez-vous souvent du signe de la croix pour vous mettre à couvert des coups de l'ange exterminateur. Ayez sur les mouvements de votre cœur une attention continuelle. Joignez à cette vigilance la pratique du jeûne; non de ces jeûnes excessifs qui accablent tout à coup un corps faible et délicat, et qui ruinent la santé avant même qu'on ait commencé à jeter les fondements d'une vie parfaite. La véritable vertu a ses bornes; elle cesse d'être vertu, dès qu'elle ne garde plus ni règle, ni mesure. Jeûnez donc, de manière qu'en mortifiant les désirs de la chair, vous soyez toujours en état de veiller et de vous appliquer régulièrement aux exercices de la lecture et de Ja psalmodie. Le jeûne n'est pas la vertu parfaite; il n'est que le fondement des autres.

« J'en dis autant de la chasteté : elle peut bien nous servir comme de degré pour nous élever au comble de la perfection; mais, seule et séparée des autres vertus, elle ne saurait jamais couronner une vierge. Laissez aux gens du monde l'enjouement et la plaisanterie; un air grave et sérieux sied bien à une personne de votre caractère. Je crois qu'il est fort inutile de vous donner des conseils contre l'avarice, puisque vous êtes d'une famille où l'on sait tout à la fois posséder et mépriser les richesses. Quelque puisse être celui à qui vous ferez part de vos biens, n'envisagez en lui que ses besoins et sa pauvreté, et mettez toute votre gloire à apaiser la faim des malheureux. Depuis que vous vous êtes consacrée à Dieu par le vœu d'une perpétuelle virginité, vous avez perdu tous les droits que vous aviez sur vos biens; c'est à votre aïeule et à votre mère à les gouverner; mais, après leur mort, vous pourrez agir selon vos vues, c'est-à-dire, selon les ordres du Seigneur, qui ne vous rendra que ce que vous aurez dépensé en bonnes œuvres. Que les autres emploient leurs revenus à bâtir des églises et à les orner, j'y consens et je ne blame nullement l'emploi qu'ils font de leur bien; mais le vôtre doit servir à revêtir Jésus-Christ dans la personne des pauvres, à le visiter dans

les malades, à le nourrir dans ceux qui ont faim, à le recevoir dans ceux qui n'ont pas de retraite, et surtout dans ceux qu'une même foi a rendus comme nous domestiques du Seigneur; à entretenir les monastères de vierges, à prendre soin des serviteurs de Dieu, et de ces pauvres d'esprit, qui, occupés nuit et jour à servir le Seigneur, imitent sur la terre la vie que les anges mènent dans le ciel. Outre le temps que vous devez don ner à la psalmodie et à la prière, aux heures de tierce, sexte, none et vêpres, à minuit et au matin, ménagez-vous encore certains moments pour vous appliquer à la lecture de l'Ecriture sainte; mais ne cherchez dans cet exercice que votre propre instruction. Entremêlez les occupations domestiques aux exercices religieux; appliquez-vous a quelques ouvrages de laine, à filer, à faire du tissu; en variant ainsi le temps, vous parviendrez à le multiplier, et il vous paraitra court lorsqu'il sera rempli par tant de diverses occupations. » Jérôme exhorte ensuite cette jeune vierge à s'attacher inviolablement à la foi du Pape Innocent, disciple et successeur d'Anastase, et à ne recevoir aucune doctrine étrangère. H lui conseile d'éviter la société des femmes engagées dans les liens du monde et du mariage, de peur que leur condition et leurs discours De soient pour elle un dangereux appas an péché. Il lui recommande surtout de fuir, comme la peste de l'innocence, les jeunes gens qui, par la recherche de leur mise, ne respirent que la vanité et le plaisir. Il fui fait remarquer, en finissant, qu'il n'y a point de nations sur la terre qui n'ait eu des écrivains et des orateurs pour faire dans l'Eglise l'éloge de sainte Agnès.

A deux dames gauloises. La sollicituda que le saint docteur portait aux vierges s'e tendait aussi sur les veuves. Nous en avons déjà touché quelques mots dans la lettre de conseils qu'il écrivit à de jeunes dames romaines, pour les engager à ne pas se remarier. Celle dont nous reproduisons ici quel ques fragments est adressée à deux dames gauloises, la mère et la fille, dont la conduite réciproque avait alarmé la susceptibilité pudique du vertueux solitaire. Cette lettre est une preuve que son zèle n'était, ni retenu par les obstacles, ni borné par les distances; mais qu'en remontant sans peine de la fille à la mère il savait les confondre ensemble, quand les reproches étaient éga lement mérités. « J'ai appris, d'un de nos frères venu de la Gaule, que sa mère et a sœur, la première veuve, et la seconde vierge, demeuraient dans une même ville, mais séparées d'habitation, et que là, sous le prétexte d'avoir de la compagnie ou de régler leurs affaires, elles retenaient chez elles quelques ecclésiastiques; d'où il résultait un scandale plus grand que celui de leur séparation. Je gémis en apprenant ces dé tails; et, comme, en les écoutant, je gardais un silence plus expressif que les paroles, J'ai, me dit-il, une grâce à vous demander; c'est d'écrire à ces dames, pour les rappro

cher l'une de l'autre. La belle commission que vous me dounez-là, répliquai-je. Qui, moi, un étranger, un inconnu, je prétendrais déterminer une réconciliation qu'un fils et un frère n'a pu obtenir! Il insista je finis par céder à ses sollicitations.

Je dois d'abord vous prévenir, Mesdames, Let je vous supplie d'être bien persuadées que je suis loin, en vous écrivant, d'imaginer rien qui soit injurieux à votre réputation. Tout ce que j'appréhende, c'est que vous donniez à d'autres lieu de soupçonner que vos affections se portent ailleurs. S'il avait pu entrer un moment dans ma pensée que vous eussiez de criminels attachements, je me garderais bien de vous écrire; on ne parle pas à des gens qui ne peuvent pas entendre. Le seul motif qui me fait prendre la plume, c'est que, même sans avoir aucun reproche à vous faire, on peut le croire, et c'est assez pour vous compromettre. Les noms de mère et de fille supposent les rapports les plus tendres, un échange mutuel de services, les plus doux nœuds de la nature, et l'union la plus intime après celle qui nous engage à Dieu. Ce n'est pas un mérite de s'aimer; c'est un crime de se hair. Jésus-Christ était soumis à ses parents; il respectait comme sa mère celle qui tenait la vie de lui-même. Vous le voyez, au moment de la mort, recommander à son diseiple celle dont il n'avait jamais cessé de prendre soin pendant sa vie.

« Vous, Mademoiselle, vous vous croyez trop à l'étroit auprès de celle qui a pu vous porter dans son sein. Vous y êtes bien restée durant l'espace de neuf mois; et, aujourd'hui vous ne sauriez demeurer avec elle un seul jour sous le même toit? Est-ce qu'il vous est devenu impossible de soutenir ses regards? Est-ce que vous craignez d'avoir pour témoin celle qui, vous ayant nourrie et élevée jusqu'à l'âge où vous êtes, vous connaît mieux que personne au monde ? Si Vous êtes innocente, qu'avez-vous à redouler de sa surveillance? Si vous ne l'êtes pas, pourquoi ne pas chercher dans un légitime mariage, un asile qui vous sauve du naufrage où vous courez inévitablement? Je vous crois exempte de toute faute mettez donc votre honneur en sûreté. Quelle nécessité ya-t-il pour vous d'habiter une maison où vous êtes chaque jour dans l'alternative de vaincre ou d'être vaincue? Dort-on bien tranquillement près d'une vipère? Elle ne vous mordra pas; mais vous devez le craindre. On gagne bien plus à ne pas connaître le péril qu'à y échapper. Dans le premier cas, nulle inquiétude; dans l'autre, il faut être sur le qui-vive. On jouit, loin du danger, du bonheur de l'ignorer; ailleurs, il faut s'en garantir. Peut-être m'allez-vous Jire que votre mère mène une conduite dissipée, toute mondaine. Quand cela serait, vous n'en auriez que plus de mérite à ne pas a quitter. Rappelez-vous les soins qu'elle a donnés à votre enfance..... Mais en supposant qu'il ne soit pas possible de vivre ensemble, que ne vous mettez-vous dans la,

société des vierges, dont la vie sainte assure la régularité de la vôtre en vous présentant des émules de chasteté ? Pourquoi, au contraire, vivre loin de votre mère pour vous attacher à un homme qui, de son côté peutêtre, a aussi sa mère et sa sœur, loin desquelles il vit? Oh! pour celui-là, dites-vous, je n'ai pas à me plaindre de son humeur. Mais d'où vient donc cette liaison? Si c'est vous qui êtes allé le chercher, je commence à deviner pourquoi vous avez quitté votre mère. Si la rencontre ne s'en est faite que depuis votre séparation d'avec elle, vous me donnez à penser ce qui vous manquait dans la compagnie de votre mère..... Vous me répondrez que vous avez pour vous le témoignage de votre conscience; que Dieu, qui vous voit, rend justice à vos sentiments; que vous vous embarrassez peu du qu'en dira-t-on. A cela je vous répliquerai par ce mot de l'Apôtre: Qu'il faut avoir soin de faire le bien, non-seulement devant Dieu, mais aussi devant les hommes. Que l'on vous blâme de vivre en chrétienne, de mener une vie chaste, de vous être séparée de votre mère pour entrer dans une communauté; bien loin de vous montrer sensible à de pareils reproches, faites-vous en un titrede gloire.

« Quel mal y a-t-il donc à vivre dans la compagnie d'un homme consacré à Dieu ?— Un tel homme ne sépare jamais une fille d'avec sa mère; il honore l'une et respecte l'autre. Si cet homme, quel qu'il soit, je ne cherche pas à le connaître, est de même âge que vous, il doit respecter votre mère à l'égal de la sienne. S'il est plus âgé, qu'il: vous traite comme sa fille, en exerçant sur vous l'autorité d'un père. Vous exposeriez et sa réputation et la vôtre si vous lui témoigniez plus d'attachement qu'à votre mère; vous laisseriez croire que c'est votre jeunesse qui a déterminé son choix. C'est l'avis que j'aurais à vous donner si vous n'étiez pas la sœur d'un homme engagé dans la vie religieuse, et si vous ne trouviez pas au sein de votre famille les secours dont Vous pouvez avoir besoin. Mais hélas ! pourquoi faut-il qu'un étranger vienne partager votre cœur avec une mère et un frère, surtout quand cette mère est veuve, et quand ce frère est religieux ? J'aurais voulu n'avoir pas à vous rappeler que vous êtes fille et sœur. Si je vous parais trop exigeant, et qu'à tout prendre, vous ne puissiez vous accommoder avec une mère, votre frère peut vous en dédommager. Si lui-même était d'une humeur peu traitable, croyez bien que vous auriez toujours plus à espérer du côté de votre mère. Vous êtes émue, vous pålissez je vois la rougeur s'imprimer sur votre visage; je vous devine. Il n'y a que l'attachement donné à un mari qui l'emporte sur celui qui est dû à une mère et à un frère.

« Vous m'allez dire. D'où me connaissezvous? Et comment, à la distance où nous sommes l'un de l'autre, votre attention a-t-elle pu se porter sur moi? Comment ?

Je le tiens de vos frères, qui m'en ont parlé les yeux pleins de larmes. Et plût au ciel que ces rapports fussent infidèles! Mais, croyez-moi, on ne pleure guère quand on dit faux. On ne voit pas sans douleur, à la tête de votre maison, un jeune intendant, à la fois pourvoyeur et maître, affectant de se rendre nécessaire, redouté des autres domestiques, qui ne le ménagent pas dans leurs plaintes intéressées. On est plus porté à croire le mal que le bien; et ce qui se débite dans la maison fait bientôt là rumeur publique. Vos domestiques seraientils plus discrets à votre égard, quand vos propres parents ne vous épargnent pas? Si vous méprisez les avis que je vous donne, souffrez que j'élève ici ma voix avec une généreuse liberté pour vous dire : Pourquoi vous emparez-vous du serviteur d'autrui ? Pourquoi enchaînez-vous à votre service celui qui appartient à Jésus-Christ? etc.....

« Et vous aussi, madame, si votre âge vous met à couvert des traits de la médisance, c'est pousser trop loin la vengeance que de compromettre votre vertu. Ne donnez pas à votre fille le funeste exemple de s'éloigner de sa mère, en vous éloignant vous-même de votre fille..... Si elle craint de revenir auprès de vous, allez chez elle. >> A Furia. Citons encore quelques passages de la lettre de Jérôme à Furia. Cette dame de l'ancienne et illustre maison des Camille, avait été mariée au fils de Pétronius Probus, consul en 371, et lui-même il avait été consul, ainsi que chacun de ses autres frères. Cette union ne fut pas heueuse; Furia y trouva beaucoup d'amertume, et son mari la laissa veuve et sans enfants. Résolue de ne plus s'engager, elle écrivit à Jérôme, le príant de lui donner une règle de conduite qui l'aidat à vivre sans perdre la couronne de la viduité, et en se maintenant dans toute la pureté que demande cet état. Ce pieux directeur, qui ne la connaissait que par ses lettres, se fit un devoir de satisfaire à ses désirs, quoiqu'il prévît qu'il allait s'attirer par là l'indignation de toute sa famille, qui lui conseillait de se remarier pour ne pas laisser éteindre la race illustre dont elle était issue. Le premier avis qu'il lui donne est de ne point se rendre aux sollicitations de ses parents. << Honorez votre père, lui dit-il, pourvu qu'il ne vous détache pas de votre véritable père qui est Dieu. Mais, s'il vient à oublier ce qu'il doit au Seigneur, alors suivez le conseil que vous donne le prophète : Ecoutez, ma fille, oubliez votre peuple et la maison de votre père, et le roi désirera de voir votre beauté, parce qu'il est le Seigneur votre Dieu.» Est-il rien de plus beau qu'une âme qui mérite d'être appelée fille de Dieu? Vous avez connu par votre propre expérience combien d'ennui et de chagrins le mariage traîne après lui. Craignez-vous que la famille des Furius vienne à manquer? Tous ceux qui ont été mariés dans cette famille ont-ils eu des enfants? Et ceux qui en ont eu, les ont-ils trouvés dignes de leur nais

sance? C'est tomber dans le ridicule que de se promettre un bien qui manque à tant d'autres, ou qui leur échappe malgré eux. Vous me direz peut-être : à qui donc laisserai-je les grands biens que je possède? A Jésus-Christ qui ne peut mourir. Votre famille en sera désolée, mais les anges vous en sauront bon gré. » Il lui conseille ensuite d'être toujours en garde contre les discours empoisonnés des domestiques et de certaines femmes qui, dans les avis qu'elles donnent, cherchent moins l'avantage des autres que leur propre intérêt. Il l'exhorte aussi à se refuser tout ce qui peut flatter la délicatesse de la nature, de peur de tomber dans les désordres de ces veuves dont parle saint Paul, qui paraissent vivantes au dehors, mais qui sont mortes inté rieurement, parce qu'elles vivent dans les délices. « A l'âge où vous êtes, ne buvez que de l'eau; mais si quelque infirmité vous oblige d'user du vin, suivez la règle que saint Paul prescrit à Timothée. »> Les autres conseils qu'il lui donne se réduisent à des conseils de sobriété et de charité, les mêmes à peu près que ceux que nous avons déjà eu occasion de rapporter plusieurs fois; puis il ajoute : « N'abusez point de la li berté que vous accorde le veuvage pour paraître souvent en public, précédée d'une foule de serviteurs. Recherchez la société des vierges et des veuves qui font profession de piété. Si vous ne pouvez vous dispenser de parler à des hommes, n'affectez point de le faire à l'écart et sans témoins. » Il lui propose d'imiter l'exemple d'Eustochie, sa parente, afin que Rome possédât ce que l'on trouvait à Bethléem. Il détruit ensuite tous les prétextes dont on se servait ordinairement pour autoriser les secondes noces, et lui fait un détail frappant des chagrins qu'i y a à essuyer dans un second mariage. It Jui rappelle ce que l'Ecriture dit des veuves qui, soit sous l'Ancien, soit sous le Nouveau Testament, se sont rendues recommandables par leurs vertus. « Mais, ajoute-t-il, pourquoi chercher dans les histoires anciennes des exemples de femmes vertueuses? N'y en a-t-il pas plusieurs à Rome dont la vertu pourrait vous servir de modèle? Vous trouverez en sainte Marcelle, toute seule, un modèle accompli de toutes les vertus portées jusqu'à la perfection. » Cet exemple était d'autant plus propre à faire impression sur Furia, que Marcelle était veuve et qu'elle n'avait vécu que sept mois avec son mari.

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prunté plusieurs passages, nous serons sobres de citations. Nous nous bornerous seulement à reproduire ce qu'il dit du mariage en le comparant avec la virginité, pour montrer qu'il ne le condamne pas, et qu'une telle accusation ne s'explique que par la haine que lui portaient les ennemis qu'il avait dans Rome. « Préférer l'un, ditil, n'est pas déprécier l'autre. On n'établit pas de comparaison entre ce qui est mal et bien. Les femmes mariées peuvent se faire honneur de l'être, mais après les vierges. Dieu a dit: Croissez et multipliez et peuplez la terre. Que ceux-là donc croissent et multiplient qui doivent peupler la terre. Les personnes qui comme vous ont embrassé le parti de la virginité, appartiennent au ciel. Remarquez bien que le commandement, Croissez et multipliez, n'a commencé d'avoir sou exécution qu'après que l'homme, chassé do paradis, eût été dépouillé de la justice originelle, et couvert de feuilles de liguier, indice des désirs déréglés qu'inspire le marage. Que ceux-là s'engagent dans ses liens qui ont été condamnés à manger leur pain à la sueur de leur front, à cultiver une terre ingrate qui ne leur rend que des ronces et des épines, et où leur senience est étouffée parmi des herbes parasites. La mienne me rend au centuple. Tous ne sont pas capables de cette résolution; mais seulement ceux qui ont reçu ce don. Il est des eunuques qui le sont par nécessité, moi par choix. Eve était vierge dans le paradis terrestre. Le mariage ua commencé qu'après que nos premiers parents eurent besoin de se couvrir de peaux de bêtes. Vous habitez un paradis, maintenez votre prérogative, et dites avec le roi prophète Retourne, 6 mon âme, au lieu de ton repos. Une preuve sensible que la virgimité est comme naturelle à l'homme, et que le mariage n'est que la suite et l'effet de sa désobéissance, c'est que le mariage produit des enfants vierges, et qu'il donne dans son fruit ce qu'il a perdu dans sa racine. Il sortira un rejeton de la racine de Jessé, et une fleur naitra de sa racine. Ce rejeton est 1 Mère de Notre-Seigneur, rejeton simple, pur, franc, qui n'est mêlé d'aucun germe etranger, et qui, seul, sans secours d'aucune autre créature, a produit son fruit par une f condité semblable en quelque façon à celle de Dieu même. Je loue les noces, je loue le mariage, mais c'est parce qu'il produit des vierges, comme le buisson épineux qui produit des roses, comme la terre qui produit l'or, comme la nacre où se forment les perls. Qui met la main à la charrue compte- ne pas la quitter? Et s'il travaille, n'estce pas pour se reposer après? On ne saurait avoir plus de respect pour le mariage qu'en amant beaucoup les fruits qu'il produit. O mère, pourquoi envier le bonheur de votre le? C'est vous qui l'avez nourrie de votre ait et de votre propre substance; vous qui l'avez formée de votre propre chair, qui l'avez vue croitre sur votre sein, qui l'avez conservée vierge, en l'environnant de vos maternelles sollicitudes. Vous lui en voulez

d'avoir mieux aimé être l'épouse d'un monarque que d'un plébéien. Plaignez-vous donc que, par cette alliance, elle vous ait introduite dans la famille de Dieu!

Quant aux vierges, dit l'apôtre saint Paul, je n'ai point reçu de commandement du Seigneur. Pourquoi? Parce que ce n'était point par un commandement exprès du Seigneur, mais par son propre choix que cet apôtre avait embrassé la virginité. On a prétendu que saint Paul avait été marié, cette opinion est démentie par son témoignage. Je voudrais, dit-il, que tous les hommes fussent en l'état où je suis. Et plus bas: Quant aux personnes qui ne sont point mariées ou qui sont veuves, je vous déclare qu'il leur est avantageux de demeurer en cet état, comme j'y demeure moi-même. Pourquoi donc n'a-t-il pas reçu de commandement du Seigneur? Parce qu'il y a plus de mérite à faire co qu'on n'est point obligé. Faire de la virginité un commandement précis et rigoureux, c'eût été attenter au mariage, aller contre le vœu de la nature, vouloir que les hommes fussent des anges sur la terre, et condamner en quelque sorte l'ouvrage du Créateur.

« Elie et Elisée ont vécu vierges, ainsi que plusieurs autres prophètes, Jérémie entre autres à qui il a été dit: Ne vous mariez point. Dieu qui l'avait sanctifié dans le sein de sa mère, lui défend le mariage. L'approche de la captivité était un motif de plus pour le lui défendre; ce que saint Paul insinue par ces paroles: Je crois qu'il est avantageux, à cause des fâcheuses nécessités de la vie présente, de ne point se marier. Quelles sont-elles ces nécessités qui repoussent les plaisirs du mariage? C'est, ajoutet-il, que le temps est court, et qu'en conséquence, ceux qui ont des femmes soient comme s'ils n'en avaient pas. Nous aussi, nous sommes à la veille de voir arriver Nabuchodonosor. Le lion est déjà sorti de sa tanière, dois-je me marier pour donner des esclaves à la tyrannie, et pour mettre au monde des enfants à qui s'appliquent ces lamentables paroles: La langue de l'enfant qui était à la mamelle s'est attachée à son palais dans sa soif extrême. Les petits ont demandé du pain, et il n'y avait personne pour le leur rompre.

« Autrefois, chez le peuple de Dieu, il n'y avait que des hommes seulement qui fissent profession de la continence. Eve n'en continuait pas moins d'enfanter dans les douleurs. Mais depuis qu'une autre Vierge a conçu le Fruit de vie, le Dieu fort, le Père du siècle futur, la sentence de malédiction a été cassée. Eve fut un principe de mort; Marie une source de vie; et parce que la virginité a commencé par une femme, elle s'est soutenue avec plus d'éclat parmi les femmes. Le Fils de Dieu en venant dans le monde a voulu s'y faire une famille nouvelle, et se donner des anges pour le servir sur la terre, comme il y en à qui l'adorent dans le ciel. Alors, on a vu une chaste Judith couper la tête d'Holopherne, Jacques

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