Abbildungen der Seite
PDF
EPUB

et les derniers chapitres d'Ezéchiel sont si obscurs, que les Hébreux ne permettent pas de les lire, non plus que le commencement de la Genèse avant l'âge de trente ans. Daniel, le dernier des quatre grands prophètes, possède au plus haut degré la science des temps et de l'histoire universelle. I parle clairement de la pierre détachée d'elle même du sommet de la montagne reoversant et détruisant tous les royaumes de la terre. David, que nous pouvons regarder comme notre Simonide, notre Pindare, notre Alcée, notre Horace, notre Catulle et notre Sévérus, chante sur sa harpe les louanges de Jésus-Christ, et célèbre la gloire de sa résurrection. Salomon, roi pacifique, bienaimé du Seigneur, nous donne des règles de conduite, nous instruit des secrets de la nature, unit l'Eglise à Jésus-Christ et chanteleur chaste alliance par un ravissant épithalame. Le livre des Paralipomènes qui est l'abrégé de tout l'Ancien Testament, est d'une telle importance qu'on se tromperait fort de croire connaître l'Ecriture sans le secours de ce livre; car il n'y a pas jusqu'aux noms et aux liaisons mêmes des mots qui ne servent à éclaircir quelque point d'histoire omis dans le livre des Rois, ou à expliquer plusieurs passages de l'Evangile. Esdras et Néhémie, envoyés de Dieu pour secourir et consoler son peuple, ne font qu'un seul livre où l'on voit le rétablissement des murailles et de la ville de Jérusalem. Le dénombrement qu'on y fait du peuple revenu en foule dans son pays, celui des prêtres, des lévites, des prosélytes et des ouvrages que l'on distribue à chaque famille, tout cela renferme de profonds mystères cachés sous l'écorce de la lettre.

« Vous voyez combien mon amour pour nos divines Ecritures m'a emporté déjà par delà les bornes d'une simple lettre. Cependant je ne suis pas encore au but que je me proposais. Je vous ai seulement fait voir quel est l'objet de nos études et de nos désirs alin de pouvoir dire avec le Roi-Prophète : Mon ame brûle sans cesse du désir de voir votre sainte loi. Après tout, nous pouvons bien nous appliquer ce mot de Socrate: Ce que je sais, c'est que je ne sais rien.

« Je vous parlerai sommairement du Nouveau Testament. On peut regarder les quatre évangélistes Matthieu, Marc, Luc et Jean comme le chariot du Seigneur. Ce sont de véritables chérubins qui ont la plénitude de la science. Tout leur corps est plein d'yeux, ils jettent des étincelles de feu, ils vont et viennent comme des éclairs quibrillent en l'air; leurs pieds sont droits et s'élèvent en haut; ils ont des ailes par derrière et volent partout; ils se tiennent l'un à l'autre, semblables à une roue emboitée dans une autre roue, et ils vont partout où les emporte l'impétuosité du SaintEsprit. Saint Paul écrit à sept églises (car plusieurs croient que l'épître aux Hébreux n'est point de lui). Il instruit Tite et Timothée de leurs devoirs, et demande à Philémon la grâce d'un esclave fugitif. Mais je crois qu'il est plus à propos de ne rien dire

de ce grand homme que de n'en pas dire assez. Les Actes des apôtres semblent ne contenir qu'une simple histoire de l'Eglise naissante; mais si nous faisons réflexion que saint Luc, medecin de profession, devenu célèbre dans toutes les Eglises par son Evangile, en est l'auteur, nous y trouverons dans chaque parole un remède propre à guérir nos maladies et nos langueurs spirituelles. Les apôtres saint Jacques, saint Pierre, saint Jean et saint Jude ont écrit sept lettres, qui contiennent en peu de paroles de profonds mystères, tout à la fois brèves et étendues; brèves pour les paroles, étendues pour le sens; et très-peu de personnes sont en état de les bien comprendre. L'Apocalypse de saint Jean renferme autant de mystères que de mots. Je n'en dis pas encore assez de cet excellent ouvrage, qui est au-dessus de toutes les louanges. Chaque mot y est susceptible de plusieurs interprétations.

<< Dites-moi, je vous prie, mon cher frère, ne vous semble-t-il pas que consacrer sa vie à ces augustes méditations, s'y vouer tout entier sans vouloir connaître ni chercher autre chose au monde, c'est goûter par avance les délices du ciel? Prenez garde que la simplicité et la bassesse apparente du langage de nos livres saints ne choquent votre délicatesse. Attribuez en la cause à l'ignorance des interprètes, ou plutôt, au dessein qu'ils ont eu de s'accommoder à la portée des esprits les plus simples et les plus grossiers. Pour inoi, je ne suis point. assez plein de moi-même ni assez entêté de mon mérite pour me flatter de posséder à fond d'aussi sublimes connaissances, et de cueillir ici-bas les fruits d'un arbre qui a sa racine dans le ciel. Mais je vous avoue que cette étude fait toute ma passion. Je ne prétends pas ici me donner pour maître; je m'offre seulement à être votre compagnon d'études. Formons-nous donc sur la terre à une science qui nous accompagnera dans le ciel. Je vous recevrai à bras ouverts; tout ce que vous voudrez savoir, je tâcherai do l'apprendre avec vous. »>

A Dardanus. - Dans une lettre à Dardanus, Jérôme s'exprime avec plus de précision sur l'Epitre aux Hébreux. « Je sais, dit-il, que les Juifs obstinés dans leur incrédulité, rejettent ces passages de saint Paul (c'est-à-dire ceux de sou Epitre aux Hébreux qui traitent de la terre promise), bien que tout ce qu'il y dit soit appuyé sur les textes formels de l'Ancien Testament. Pour ce qui est des Chrétiens, ils ne peuvent ignorer que, non-seulement toutes les Eglises d'Orient, mais encore tous les anciens écrivains ecclésiastiques, reçoivent cette lettre comme étant de saint Paul, quoique plusieurs l'attribuent à saint Barnabé ou à saint Clément. Si les Latins ne la mettent point au nombre des livres canonques, les Grecs n'y mettent pas non plus l'Apocalypse de saint Jean. Cependant, nous autres Orientaux, nous mettons l'un et l'autre dans le canon des saintes Ecritures, nous conformant en cela, nen point aux

coutumes que nous voyons aujourd'hui établies dans les Eglises, mais à l'exemple des anciens auteurs ecclésiastiques, qui les citent souvent comme les livres canoniques et non point comme des ouvrages apocryphes, d'où néanmoins ils tirent quelques passages, quoiqu'ils se servent rarement de l'autorité des auteurs profanes. »

Commentaires sur l'Ecriture. Mais en dehors de ses lettres que l'on peut à bon droit considérer comme des commentaires, dans lesquels il résout, avec autant de solidité que d'érudition, les diverses questions qui lui étaient adressées de toutes parts sur les passages les plus difficiles de la Bible, Jérôme se livrait encore activement à d'immenses travaux sur nos Ecritures. On peut dire qu'il avait été suscité de Dieu pour travailler sur nos livres sacrés et pour en renouveler par toute l'Eglise le goût et l'intelligence. On ne se servait guère avant lui d'autre version que de celle connue sous le nom d'Italique, assez mauvaise traduction des Septante. Celle-ci ne se rencontrait plus elle-même dans son ancienne pureté. Com:me il y en avait autant d'exemplaires différents que de provinces chrétiennes, la version des Septante, commune autrefois à toutes les Eglises, s'y trouvait visiblement altérée et corrompue. Non content de la corriger, Jérôme, profondément versé dans la connaissance de la langue sacrée, réforma le texte grec des Septante d'après l'hébreu, qu'il appelle la vérité hébraïque, donnant une version nouvelle de tous les livres reconnus canoniques. Il y ajouta les deux livres de Judith et de Tobie, mit à la tête de chacun d'eux de savantes préfaces, en forme d'apologies, en s'aidant des Hexaples d'Origène. Son travail sur le Nouveau Testament n'était pas moins nécessaire. Il n'y avait pas moins de différences dans les traductions latines du Nouveau Testament que dans celles de l'Ancien; et l'on peut dire qu'il y avait presque autant de versions différentes que de manuscrits répandus dans l'Eglise. Ce sont les doctes travaux de l'infatigable Jérôme qui nous ont valu en grande partie la version que nous employons aujourd'hui sous le nom de Vulgate. Nous disons en grande partie, car à mesure que les copies de cette version se sont multipliées dans l'Occident, où elle a prévalu, il s'y est glissé, dans les différents exemplaires, des fautes qui ont obligé à la retravailler à diverses reprises. Mais, pour le fond, c'est toujours l'ouvrage de Jérôme. Il fut invité à s'y livrer par le Pape Damase. Lui seul pouvait l'exé cuter. Un pareil travail exigeait une science consommée et la plus laborieuse application. Pour cela, il s'ensevelit plus que jamais dans sa retraite de Bethleem; il y reprit avec ardeur l'étude de cette langue hébraïque qui, après avoir été dans sa jeunesse une sorte de frein et de pénitence imposée à son imagination trop ardente, fut une des Occupations de sa vie et fit en partie le caractère de son éloquence. Il acheta chèrement alors les leçons d'un savant Israélite,

qui n'osait le voir que dans la nuit par crainte d'irriter ses compatriotes, en leur paraissant livrer à un Chrétien, à un étranger les mystères de l'idiome sacré. Ce secours et une opiniâtreté de travail plus grande que l'impatience qu'il éprouvait parfois, le rendirent enfin maître de cette langue difficile, dont les rudes aspirations remplacèrent pour lui, dit-il, l'harmonieuse éloquence qu'il avait tant aimée. A tous les livrés de l'Ancien et du Nouveau Testament, outre ses préfaces, il joignit des commentaires ou dissertations, la plupart en forme de lettres, dans lesquels il expose l'historique de ces livres, réfute ou prévient les objections, éclaircit les difficultés, dévelop, e les sens anagogiques, et n'omet rien de ce qui peut contribuer à l'instruction ou à l'édification de ses lecteurs Saint Augustin, qui s'était effrayé d'abord de l'immensité de l'entreprise, la jugeant sans doute au-dessus des forces d'un seul homme, n'attendit pas sa pleine exécution pour changer de langage et pour en féliciter à la fois, et son auteur, et la religion à qui il rendait un aussi éminent service.

Nous allons essayer de donner une idée de quelques-uns de ces commentaires. La matière est si abondante que nous sommes forcés de faire un choix. Le lecteur comprendra sans peine que, resserrés dans des limites aussi étroites, nous ne puissions nous astreindre à les analyser tous. Des noms hébreux.

-

Dans le tome II des

OEuvres du savant docteur, après des prolégomènes assez étendus, dans lesquels l'éditeur rend compte de son dessein et défend ce Père contre les attaques de certains critiques des derniers siècles, on trouve de suite les traités qui regardent l'Ecriture sainte en général, et qui en expliquent quelques passages particuliers, depuis la Genèse jusqu'aux prophètes. Le premier est intitulé Des noms hébreux. Jérôme y donne l'étymologie de tous les noms propres qui se rencontrent dans l'Ancien et le Nouveau Testament, en suivant dans cette explication l'ordre des livres de l'Ecriture. Il y comprend même l'Epitre attribuée à saint Barnabé, parce qu'autrefois on la lisait dans l'église pour l'édification des fidèles. Son premier dessein avait été de se borner à traduire le Livre des noms hébreux de Philon, augmenté par Origène; mais la confusion extrême qui régnait dans ces livres et ces différences essentielles qu'il rencontra entre les divers exemplaires, le firent changer d'avis. Ii crut qu'il valait mieux sur ce sujet composer un Ouvrage nouveau que d'en reproduire un ancien avec tous ses défauts. Profitant donc du travail de Philon et d'Origène, il y ajouta le sien, en corrigeant et changeant les mots altérés par les copistes ou mal expliqués par les auteurs. Dans la préface placée en tête de ce vocabulaire étymologique, il avertit le lecteur qu'il suppléera aux omissions qui pourraient lui échapper dans son livre des questions hébraïques. Nous citerons pour exemple son explication à sainte

Marcelle des noms différents que la langue hébraique donne à Dieu. Le premier est El, qui, selon les Septante, signifie Dieu, et selon Aquila Fort. Le second, Eloim, et le troisième Eloë, doivent également se traduire par Dieu. Le quatrième, Sabaoth, ou Dieu des vertus selon les Septante, et selon Aquila Dieu des armées. Le cinquième, Elion, c'est-à-dire Très-Haut. Le sixième, Eser leje, qui veut dire celui qui est. Le septième, Adonai, signifie Seigneur. Le bui tième, la, veut dire Dieu. Le neuvième Tetragrammon ou ineffable, et enfin le dixième, Saddai, qu'Aquila traduit par Robuste et Tout-puissant. Il donne en même temps l'explication de certains mots hébreux conservés dans les versions latines, comme Alleluia, Amen, Maran-Atha, Ephod et quelques autres. Alleluia signifie Louez le Seigneur. Amen est un terme usité pour marquer que l'on ajoute foi à une chose et qu'on désire qu'elle s'accomplisse, en sorte qu'on peut le traduire par ce terme latin fiat et en français Que cela soit ainsi. Maran-Atha est un mot syriaque qui signifie: Notre-Seigneur vient. Quant au mot Diapsalme, qui se rencontre assez souvent dans les Psaumes, il remarque que par ce terme grec dont l'équivalent hébreux est Sela, les uns entendent un changement de vers, d'autres une pause et d'autres encore un changement d'air. Pour lui, il n'adopte aucune de ces opinions et croit, avec les interprètes hébreux que Sela ou Diapsalme siguitie toujours. Du moins c'est ainsi qu'Origène a traduit ce terme et il cite cette traduction à l'appui de son sentiment. Dans une lettre à sainte Marcelle, il donne l'explication de l'éphod et du téraphim dont il est parlé dans les livres des Rois et des Juges. Cette sainte désirait savoir, non-seulement ce qu'était l'éphod dont Samuel était ceint lorsqu'il paraissait devant le Seigneur, mais encore pourquoi dans le livre des Juges, l'éphod et le téraphim sont pris pour une même chose, quoiqu'i paraisse impossible de confondre l'éphod, qui est une espece de vêtement avec le téraphim, qui est une tigure en relief. Jérôme répond que selon la force du terme hébreu, l'ephod est une sorte de ceinture qui retenait les vêtements soit des prêtres ou des lévites. Celle de Samuel était de lin, ainsi que celle des quatre-vingt-cinq prêtres, et il n'y avait que le Souverain Pontife qui portât un éphod tissu d'or, ou de quelque autre matière précieuse. Il ajoute que si l'éphod et le téraphim sont pris pour une même chose dans quelques exemplaires du livre des Juges, c'est une faute des Interprètos latins, qui ont cru que l'éphod et le téraphim étaient une figure coulée en fonte avec l'argent que Michas rendit à sa mère et qu'elle voua au Seigneur. Il croit que par le mot de téraphim employé dans le livre des Juges, on doit entendre des ouvrages de diverses couleurs et de différentes formes; de sorte qu'après avoir élevé dans sa maison un temple pour son Dieu, Michas se serait fait aussi les vêtements sacerdotaux, compris sous le nom d'éphod, et

les autres ornements des prêtres, marqués par le terme téraphim.

Des lieux hébreux. L'éditeur met à la suite de cet ouvrage un Dictionnaire géogra phique intitulé Des lieux hébreux dont il est fait mention dans l'Ancien Testament. Dans la préface, Jérôme avertit que ce travail est d'Eusèbe de Césarée et qu'il n'a fait que le traduire du grec en se donnant néanmoins la liberté d'en retrancher tout ce qui lui paraissait indigne d'être conservé et d'y ajouter ce qu'il croirait utile. Cet ouvrage contient toutes les notions géographiques nécessaires pour l'intelligence de l'Ecriture sainte; et on doit d'autant plus aisément ajouter foi à ce qu'Eusèbe et saint Jérôme rapportent de la situation des lieux, qu'ayant vécu tous deux dans la Palestine, ils étaient mieux informés que personne de ce qu'ils en ont écrit. Eusèbe avait suivi dans sa géographie sacrée l'ordre de l'alphabet grec; saint. Jérôme pour l'approprier au plus grand nombre, la distribue suivant l'alphabeth latin en la traduisant. Ce Père parle d'une autre description de la terre sainte, dans laquelle Eusèbe avait distingué tous les sorts ou partages de chaque tribu, avec une peinture de la ville et du temple de Jérusalem, expliquée par un petit discours, mais il ne dit point qu'il l'ait traduite en latin et nous ne l'avons plus en aucune langue. Cet ouvrage a pour suite naturelle la lettre que Jérôme écrivit à Fabiole sur les quarante-deux stations du peuple d'Israël dans le désert. Il donne une explication littérale de chaque lieu où campèrent les Israélites, et l'accompagne ordinairement d'une instruction morale, dans laquelle il nous représente ces différents campements comme la figure du chemin qui conduit au ciel.

Questions hébraïques. Le livre intitulé: Questions ou traductions hébraïques sur la Genèse, renferme les sentiments de quelques Juifs, de plusieurs des anciens interprètes Grecs et même de quelques Latins sur différents passages de ce livre. Il paraît par la préface placée en tête, que Jérôme avait déjà beaucoup d'ennemis et que plusieurs měme censuraient ses ouvrages. Mais il s'en console par l'exemple des grands hommes de l'antiquité, Térence, Virgile, Cicéron, à qui on avait fait de leur vivant les mêmes reproches qu'on lui adressait alors. Le but qu'il se propose dans cet écrit est de faire voir la pureté du texte hébreu, en réfutant ceux qui le croyaient corrompu, et de donner les étymologies des choses, des noms et des pays marqués dans la Genèse. Toutefois il a soin de déclarer qu'en cela son intention n'est point de décrier la version des Septante. Il remarque seulement que JésusChrist et les apôtres ayant cité, comme de l'Ancien Testament, divers passages qui ne se trouvent point dans les exemplaires ordinaires qui portent le nom des Septante, on doit regarder comme plus authentiques les exemplaires où se rencontrent les mêmes passages cités dans le Nouveau Testament. Il ajoute, sur le rapport de Josèphe qui a ra

conté l'histoire des Septante, dans son douzième livre des Antiquités Judaïques, que ces interprètes n'ont traduit en grec que les cinq livres de Moïse, et qu'en effet cette traduction est plus conforme au texte hébreu, que ne l'est celle des autres livres de l'Ancien Testament. Il soutient encore que les traductions d'Aquila, de Symmaque et de Théodotien sont très-différentes du texte original. Il promet de faire de semblables questions hébraïques sur tous les livres de l'Ancien Testament; mais nous n'avons de lui que celles qu'il fait sur la Genèse. Mais c'est assez nous arrêter sur ces ouvrages, qui n'étaient que des préludes à des travaux plus sérieux.

Sur les douze petits prophètes.-Jérôme Jérôme ne suivit point dans ses Commentaires sur les douze pelits prophètes l'ordre des temps auxquels ils ont prophétisé, ni celui qu'ils gardent dans nos bibles; mais il y travailla à mesure que ses amis l'en priaient : il remarque dans son prologue sur Zacharie, que ce prophète avait déjà été commenté par Origène, par Didyme et par saint Hippolyte; mais qu'ils s'étaient contentés du sens allégorique, et n'avaient dit que trèspeu de choses pour l'intelligence de l'histoire. Dans celui qu'il a mis en tête de Malachie, il rapporte les différentes opinions sur ce prophète, que quelques-uns confondaient avec Esdras. Les commentaires de saint Jérôme sur les douze petits prophètes sont divisés en vingt livres, savoir: trois sur Osée; un sur Joël; trois sur Amos; un sur Abdias; un sur Jonas; deux sur Michée; deux sur Habacuc; un sur Sophonie; un sur Aggée; trois sur Zacharie; un sur Malachie. Cassiodore n'en connaissait pas davantage.

-

Sur Isaie. Le Commentaire sur Isaïe est dédié à la vierge Eustochie. Dans la lettre qu'il lui adresse, Jérôme remarque qu'il ne considère pas seulement Isaïe comme un prophète, mais comme un évangéliste et un apôtre, puisqu'il renferme dans son livre tous les mystères du Seigneur, sa naissance d'une vierge, les merveilles de sa vie, l'ignominie de sa mort, la gloire de sa résurrection, la propagation de son Eglise par toute la terre, entin tout ce qui est contenu dans l'Ecriture, et qui peut être redit par une langue humaine ou compris par l'esprit humain. Isaie parle avec tant de clarté de toutes ces choses, qu'il semble composer plutôt une histoire du passé qu'une prophétie de l'avenir. Il combat l'opinion de Manteau, qui s'imaginait que les prophètes avaient parlé dans un moment d'extase, de sorte qu'ils ne savaient ce qu'ils annonçaient. Il soutient, au contraire, que devant enseigner les autres, ils devaient comprendre eux-mêmes ce qu'ils avaient à leur dire. Il trouve de grandes difficultés à donner un commentaire complet sur Isaïe, parce qu'aucun des Latins ne l'a encore entrepris, et que ceux d'entre les Grecs qui l'ont expliqué, comme Origène, Eusèbe de Césarée et Didyme, ne l'ont fait qu'en partie. Les commentaires d'Apollinaire ne sont, pour ainsi

dire, que des sommaires du contenu de cha que chapitre, de sorte qu'on n'en peut tirer beaucoup d'éclaircissements. Jérôme divise le sien en dix-huit livres, précédés chacun d'un prologue également dédié à la vierge Eustochie, qu'il consultait volontiers sur la manière de disposer son ouvrage. On voit par le prologue du 1x livre qu'il était quelquefois obligé de s'interrompre par divers embarras qui lui survenaient. Il tomba même malade après avoir expliqué les cinquante premiers chapitres, et il reconnait dans le prologue qui commence son xiv livre, que le Seigneur qui regarde la terre et la fait trembler, après l'avoir frappé tout à coup d'une maladie violente, lui avait rendu la santé aussitôt après, comme si, dit-il, il avait eu dessein de m'avertir et non de m'affliger, de me corriger plutôt que de me punir. Il conjure Eustochie, dont les prières l'avaient assisté pendant sa maladie, d'implorer pour lui de nouvelles grâces du Seigneur, afin qu'éclairé par le même esprit qui a révélé aux prophètes les choses à venir, il puisse percer l'obscurité de leurs prédictions, entendre la parole de Dieu et dire avec un de ces voyants: Le Seigneur m'a donne une langue savante, afin que je sache comment je dois parler. I explique dans ce commentaire le texte hébreu et même celui des Septante, pour satisfaire ceux qui, sans. cela, auraient regardé sou ouvrage comme; imparfait. Il est cité par Cassien, qui, à l'oc casion de ce travail, regarde saint Jérôme comme le maître des Catholiques et celui des docteurs dont les écrits brillent partout , Sur Jérémie. - Jérémie fut le dernier des prophètes que Jérôme entreprit d'expliquer quoiqu'il ent promis de le faire aussito qu'il aurait fini ses Commentaires sur Ezé chiel. Il adressa cet ouvrage à Eusèbe, mais en l'avertissant qu'il ne ferait qu'un trèscourt commentaire, dans lequel il ne comprendrait, ni l'Epitre attribuée à Jérémie parce qu'elle ne se trouve point dans le texte hebreu, ni le livre de Baruch, qui ne se lit que dans les Septante. Il y travailla à diverses reprises, soit qu'il fût dérangé par les soins qu'il donnait à son monastère de Bethleem, soit à cause de la nécessité où il se trouvait de s'opposer à l'hérésie des pélagiens, et de répondre aux calomnies qu'ils répandaient contre lui. Il n'eut pas même le loisir de l'achever, et n'expliqua que les trente-deux premiers chapitres de cette prophétie, qui en comprend cinquantedeux. Ce commentaire est divisé en six vres, qui ont chacun leur prologue. Cassiodore assure qu'il n'en a pu retrouver davantage, quoique l'on crût que Jérôme en avait composé vingt. Ce Père affirme en générai du prophète Jérémie, qu'autant i parait simple, aisé et naturel dans ses paroles, autant il est profond par la majesté des sens qu'elle renferme.

[ocr errors][merged small]

même de suspendre presque entièrement l'étude de l'Ecriture sainte, à cause du grand nombre de fugitifs qui abandonnaient Rome pour se réfugier à Bethléem, où l'on voyait arriver tous les jours des troupes d'hommes et de femmes qui, tombés du faîte de la fortune et de l'opulence, en étaient réduits à demander l'aumône. Comme ses moyens ne lui permettaient pas de les soulager tous, il joignait ses larmes aux leurs, leur rendant tous les devoirs de la charité qui dépendaient de lui, s'efforçant de réduire en pratique les paroles de l'Ecriture, et s'appliquant moins à écrire des vérités saintes qu'à pratiquer de bonnes œuvres. Ce Commentaire est divisé en quatorze livres. Dans le troisième, Jérôme remarque que Jérémie prophétisait à Jérusalem en même temps qu'Ezechiel à Babylone, et qu'ils s'envoyaient réciproquement leurs prophéties, afin de montrer, par cette union et cette parfaite conformité de paroles et de menaces entre deux hommes séparés par d'aussi longues distances, que ceux à qui s'adressaient ces prédictions étaient d'autant plus coupables de ne pas s'y rendre, qu'il était visible qu'il n'y avait que l'esprit de Dieu qui put en être l'auteur. Il remarque encore que, par une tradition en usage parmi les Hébreux, il n'était pas permis de lire le commencerent ni la fin de la prophétie d'Ezéchiel, le Commencement de la Genèse, ni le Cantique des cantiques, avant d'avoir atteint l'âge néessaire pour exercer les fonctions sace.loales, c'est-à-dire l'âge de trente ans, où l'on ouvait seulement commencer à comprene le sens mystérieux de ces diverses pares de l'Ecriture. On ne voit pas sur quoi ouvait être fondée cette tradition à l'égard e la prophétie d'Ezéchiel, puisque Dieu lui vait ordonné de l'annoncer sans distinction toutes sortes de personnes.

Sur Daniel. - Le Commentaire sur Daniel st adressé à Pammaque et à Marcelle. 11 it dans la préface qu'il ne veut pas explijuer ce prophète mot à mot, comme il avait ait pour les autres, mais seulement éclairir les endroits difficiles et passer sur le reste. Ce commentaire est extrêmement Court, et saint Jérôme le fit ainsi parce qu'on lui avait reproché de s'être trop elendu sur les autres. Néanmoins il se départit de cette réserve à propos des deux dernières visions de Daniel, sur lesquelles il se crut obligé de donner des développements à cause de leur obscurité. Le philoSophe Porphyre, ennemi déclaré de la religion chrétienne, avait osé soutenir que les prophéties de Daniel n'étaient point de relui dont elles portent le nom, mais d'un inconnu qui demeurait dans la Judée sous le règne d'Antiochus Epiphane; ajoutant que ce qu'il avait dit des événements qui précédaient le règne de ce prince était plutôt un récit du passé qu'une prédiction de l'avenir et que le reste du livre ne contenait que des mensonges, parce que cet mposteur s'était mêlé de prédire une foule de choses qu'il savait ne devoir jamais arDICTIONN. DE PATROLOGIE. II!

river. Mais Eusèbe de Césarée, Apollinaire et Méthodius, ont soutenu la vérité de ces prophéties avec autant d'esprit que de solidité. C'est pourquoi Jérôme se crut dispensé

de le faire de nouveau. Il se contente d'avertir dans sa préface sur Daniel, qu'aucun des prophètes n'a parlé si ouvertement de Jésus-Christ. Il n'a pas seulement écrit que le Christ devait venir dans le monde, ce qui lui était commun avec les autres prophètes, mais il a encore marqué le temps précis auquel il devait venir, la suite des rois qui précéderaient sa venue, le nombre exact des années et les signes évidents auxquels on pourrait le reconnaître. Porphyre, comme les autres, était forcé de le confesser, en voyant que tout ce que Daniel avait prédit de Jésus-Christ était arrivé; mais surmonté par la vérité de l'histoire, il crut qu'il ne lui restait plus d'autre parti à prendre que de nier l'authenticité de la prophétie, et de soutenir que ce qui y est annoncé de l'Antechrist à la fin du monde, s'était accompli sous le règne d'Antiochus Epiphane. Jérôme avertit encore dans sa préface que les Eglises lisaient les prophéties de Daniel, non selon les Septante, mais suivant la version de Théodotion; et il prie ses lecteurs de l'excuser, parce que pour en expliquer les dernières parties, il a été obligé de recourir aux auteurs profanes qu'il avait abandonnés depuis longtemps. Cassiodore parle de ce commentaire comme d'un travail divisé en trois livres, mais il est sans division dans les imprimés et n'a qu'un seul prologue. Saint Augustin, qui le trouvait écrit avec beaucoup de soin et d'érudition, y renvoie ceux qui seront curieux de connaître les raisons qui ont porté les anciens à expliquer les quatre monarchies de Daniel par les quatre empires des Assyriens, des Perses, des Macédoniens et des Romains.

Sur saint Matthieu. Eusèbe de Crémone, qui se trouvait dans le monastère de Bethleem, en 394, s'étant déterminé assez brusquement à retourner en Italie, demanda à Jérôme, environ quinze jours avant son départ, une explication de saint Matthieu, qui, en peu de paroles renfermât beaucoup de sens, et qui expliquât particulièrement ce qu'il y avait d'historique dans cet Evangile. Le dessein d'Eusèbe était de s'en entretenir pendant son voyage. Jérôme était malade depuis trois mois et commençait à peine à marcher. Il était d'autant moins en état de se livrer à cette étude, qu'Eusèbe demandait en peu de jours un travail qui eût exigé des années. Mais le pouvoir qu'il avait sur l'esprit de Jérôme l'emporta. Cet ardent solitaire aima mieux courir le risque de mécontenter les savants par un ouvrage moins réfléchi que de refuser à un ami ce qu'il lui demandait. Reprenant donc ses études interrompues par ses infirmités, il travailla avec une telle diligence au commentaire qu'Eusèbe souhaitait qu'il fût achevé en peu de jours. Jérôme néanmoins ne le regarda que comme une esquisse, se

26

« ZurückWeiter »