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Mais, quand vous abandonnez Dieu pour croire à la parole d'un homme, quel espoir de salut peut vous rester? Si vous voulez m'en croire, car je vous regarde déjà comme un ami, faites-vous d'abord circoncire; puis observez le sabbat, les fêtes, les nouvelles lunes, comme la loi le prescrit; en un mot, faites tout ce qu'elle commande, peut-être alors trouverez-vous grâce devant le Seigneur. Si le Christ est né et demeure quelque part, il est inconnu, il ue se connaît pas lui-même et n'a aucun moyen de se faire connaître. Il faut d'abord que le prophète Élie vienne lui donner l'onction sainte et le révèle à la terre. Sur de vains bruits vous avez rêvé un Christ qui n'est que dans votre imagination, et, dupe de vous-même, vous courez aveuglément à votre perte.

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« Puisse le Seigneur vous le pardonner et vous faire grâce, ô Tryphon ! Vous blasphémez ici ce que vous ignorez. Vous croyez sur parole vos docteurs qui n'entendent pas les Ecritures, et trompé par leurs fausses interprétations, vous dites au hasard tout ce qui vous vient à l'esp it. Si vous le voulez, je vous montrerai que ce n'est pas nous qui sommes dans l'erreur. Vous comprendrez que rien n'est capable de nous empêcher de confesser le Christ; non, quand le tyran le plus farouche nous le défendrait, quand nous aurions à redouter tous les geures d'outrages. Je vous ferai voir que notre foi repose, non sur de vaines fables, sur des discours dépourvus de raison, mais sur une parole touté divine, pleine de force, riche des grâces et des dons de l'esprit de Dieu. » Et, là-dessus, l'ardent apologiste du christianisme repousse l'accusation lancée contre sa foi, par l'analogie des deux Testaments, qui établissent une même croyance dans le seul Dieu adoré successivement par les Juifs et par les Chrétiens. Après avoir démontré péremptoirement l'insuffisance de la circoncision lévitique, il en vient à la divinité de Jésus-Christ, dont il marque le double avénement; le premier, dans l'état d'obscurité, où il s'est montré pendant sa vie mortelle; le second, dans l'éclat de la gloire qui l'accompagnera au jour du dernier jugement; ce qu'il appuie par de savantes explications des psaumes', par les figures de l'ancienne loi et par les noms que lui donnent nos saintes Écritures. Il s'attache particulièrement au psaume XXI, dont il donne un savant commentaire, en l'étendant à toutes les circonstances de la Passion et de la Résurrection du Sauveur, d'où résulte le témoignage le plus décisif en faveur de Jésus-Christ, qu'il est impossible de ne pas accepter comme le Messie prédit par David. Aux reproches que Jésus-Christ était ignoré, il répond en affirmant qu'il n'existe pas une contrée du monde où il n'y ait des Chrétiens; il démontre que les prédictions faites sur la future vocation des Gentils, concernaient ce peuple nouveau, devenu, par là, le vrai peuple de Dieu, et que, dans la personne de Jésus-Christ, tous

les oracles des prophètes se trouvent accomplis. Il applique à l'Église ces paroles da Psalmiste: Uxor tua sicut vitis abundans in lateribus domus tuæ, et dit : « Vous avez tous les jours la preuve que rien ne peut ébranler, pas même intimider la foi que nous avons en Jésus-Christ. On a beau nous égorger, nous attacher à des croix, nous exposer aux bêtes, nous jeter dans les flainmes, nous éprouver par les tortures les plus cruelles; vous nous voyez fermes, intrépides dans la confession de notre foi. Plus la cruauté s'exerce contre nous, plus aussi s'accroît le nombre et la ferveur des disciples de Jésus-Christ. Nous ressemblons à la vigne qui porte des fruits à mesure qu'on la taille. »

Cet ouvrage, que nous regrettons de ne pouvoir analyser plus longuement, est semé de temps en temps de maximes très-utiles pour la direction des mœurs; nous en citerons seulement quelques-unes : « Vous vous imaginez célébrer le saint jour du dimanche en le passant à ne rien faire; combien vous êtes loin de l'esprit de son institution, qui commande de s'abstenir de tout péché, d'éviter le parjure, la fraude, la fornification. Telle est la manière de le célébrer la plus agréable au Seigneur..... La circoncision du Juif ne fut qu'un signe distinctif; la circoncision du Chrétien, qui lui est conférée par le baptême, est un sacrement qui le sanctifie..... La même voix qui, autrefois, appela Abraham, nous a appelés en nous commandant de quitter notre ancienne manière de vivre. Et de même que le saint patriarche a cru aux promesses de Dieu, de même, nous autres Chrétiens, en vertu de la foi que nous avons en Dieu, nous avons renoncé à toutes les choses du monde. Les vrais Israélites c'est nous, nous qui sommes devenus les enfants d'Abraham, d'Isaac et de Jacob, nous qui avons la connaissance du vrai Dieu par Jésus-Christ crucifié...... Quiconque ne vit pas conformément aux saintes règles établies par Jésus-Christ, a beau se dire Chrétien; il ne l'est pas..... Nous connaissons des gens qui, si on les laissait faire, damneraient l'univers tout entier. Ils n'ont à prononcer que des seu tences de condamnation; et il ne tient pas à eux que les portes de l'enfer ne s'ouvrent à leur commandement. Hommes atrabilares, qui interprètent les évangiles au gré de leurs passions?..... Nous ne sommes que chair; il n'y a en nous que faiblesse; c'est pourquoi nous avons besoin de recourir au céleste médecin, qui seul peut guérir nes ames..... Celui qui veut bien vivre doit éviter de voir et d'entendre. bien des choses, ou, s'il ne peut en éluder la rencontre, il a besoin de se boucher les oreilles et les yeux. »>

Saint Justin termine son dialogue par cette conclusion : « Tryphon, après un mo ment de silence, me dit: Vous voyez qu'il ne vous a pas fallu faire un grand effort pour entrer en conversation avec nous? Je ne puis vous répendre combien ce

tretien m a été agréable, et je suis persuadé que tous ceux qui m'entourent ont partagé re plaisir. Assurément, il nous a été plus utile que nous n'aurions osé l'espérer; s'il 1, nous était possible d'en jouir plus souvent, nous retirerions beaucoup plus de fruits en score de cette manière d'approfondir les divines Écritures. Mais vous êtes sur le point 8. de partir; vous n'attendez plus que le mioment de mettre à la voile; quand vous nous aurez quittés, ne perdez pas notre souvenir; pensez à nous comme à des amis. - Si je n'étais obligé de vous quitter, répondis-je, voilà les entretiens que je voudrais voir s'établir tous les jours entre nous: mais au moment de m'embarquer, avec la permission et le secours de Dieu, je vous recommande de ne rien négliger dans l'intérêt de votre salut, pour vous affranchir de vos docteurs, et de savoir leur préférer le Christ du Dieu tout-puissant.-Après ces mots, ils me quittèrent en me souhaitant un heureux voyage, et une navigation exempte de tout danger. - Je formai pour eux à mon tour les vœux les plus ardents. Puisque vous comprenez si bien, leur dis-je, que la raison a été donnée à l'homme pour lui servir de guide, tout re que je puis vous souhaiter de plus heureux, c'est que vous sachiez faire un bon usage de cette raison, pour arriver à reconnaître, comme nous, que Jésus est le Christ

de Dieu. »

Lettre à Diognète.-On n'est pas généralement d'accord que cette lettre soit de saint Justin; mais il n'est pas démontré non plus qu'elle ne lui appartienne pas. Ce qu'il y a de certain, c'est que l'auteur, quel qu'il soit, ne peut pas être éloigné du temps où vécut le saint martyr. Tillemont le croit antérieur; si sa conjecture était vraie, l'ouvrage n'en serait que plus précieux. Quoiqu'il ne soit pas venu tout entier jusqu'à nous, il ne laisse pas de renfermer plusieurs choses très-utiles et très-importantes pour la religion chrétienne. L'apologiste répond aux principales accusations dirigées contre les Chrétiens. «Ils n'adorent pas les dieux du paganisme, disait-on: Parce qu'ils ne les reconnaissent pas pour des dieux. Mais ceuxla même qui les adorent, quelle idée se font ils donc de la divinité, pour honorer comme ils font, des statues de pierre, d'airain ou de quelque matière vile où terrestre, travaillée par la main des hommes? - Les Chrétiens s'éloignent de la religion des Juifs: Parce qu'ils n'ont rien de commun avec leurs superstitions. Ils s'isolent des autres peuples. Calomnie ! Ils ne s'en séparent que dans ce qu'ils ont de criminel ou de frivole. Ils fraternisent avec tous, comme concitoyens; ils endurent tout, comme étrangers. Point de contrée étrangère qui ne soit leur patrie; point de patrie qui ne leur soit étrangere. Ils mangent en commun, mais toujours avec modestie. Ils sont dans la chair, mais ne vivent pas selon la chair; ils habitent le monde, mais ils obéissent à une législation qui leur vient du ciel. Du reste, ils sont partout soumis aux lois de l'État et aux cou

tumes des lieux. Ils enchérissent encore par leur genre de vie sur la sévérité des lois. Ils aiment tout le monde, et tout le monde les persécute. On les méconnait, on les condamne, on les traîne à la mort; mais la mort est pour eux le principe d'une vie nouvelle. Ils sont pauvres et ils répandent des largesses. On les décrie, et les opprobres dont on les charge font leurs titres de gloire. Tout en déchirant leur réputation, on ne peut leur refuser l'hommage dû à l'innocence des mœurs. On les maudit; ils ne s'en vengent que par des bénédictions. Bien qu'irréprochables, on les punit comme des scélérats. Les Juifs unis aux païens les combattent avec acharnement, et leur haine ne saurait articuler rien de précis. Pour tout dire, en un mot, les Chrétiens sont dans le monde ce que l'âme est dans le corps; de même que celle-ci est distincte du corps dans lequel elle réside; de même les Chrétiens habitent le monde, disséminés sur tous ses points, mais sans appartenir au monde.

« La doctrine qu'ils professent, ce ne sont pas les hommes qui la leur ont donnée. Elle leur vient de Dieu, qui l'a fait connaître, non par le ministère d'un ange, mais par l'organe de sou Verbe. Il l'a envoyé sur la terre, non comme un monarque qui vient imposer à des sujets un joug tyrannique, mais comme un roi tout débonnaire, qui met loyalement son fils en possession de ses États; mais comme un Dieu sauveur qui ne demande que des hommages libres et volontaires. Avant sa venue personne ne connaissait Dieu. Et d'où aurait-on appris à le connaître? Etait-ce à l'école des philosophes qui n'ont jamais su publier que des contradictions et des mensonges? il n'y avait que lui qui pût se découvrir aux hommes. Il se manifeste par la foi, à qui seul il est donné de le voir. Toujours bon, toujours miséricordieux, quand les hommes ne mériteraient que sa colère, il conçut en leur faveur le dessein le plus généreux, le plus ineffable pour l'exécution duquel il s'est associé son divin Fils. Longtemps il l'avait retenu caché; mais quand le moment est enfin arrivé de révéler au monde les conseils préparés dès le commencement, c'est alors que les bienfaits de la divine Incarnation se sont manifestés et répandus sur nous. Jésus-Christ est venu prendre nos péchés. Dieu lui-même nous a donné son propre fils pour être le prix de notre rédemption. Il a substitué l'innocent et le juste à la place des criminels. Oubliant toutes les offenses dont nous nous étions rendus coupables, il a fait de celui qui était sans péché la rançon de ceux qui en étaient couverts; et le Dieu immortel a satisfait en mourant pour les hommes condamnés à la

mort.

« Qu'est-ce qui pouvait couvrir nos péchés, si ce n'était sa justice? Comment la rébellion des serviteurs pouvait-elle être expiée. autrement que par l'obéissance du fils? O échange incompréhensible! O surprenant

artifice de la sagesse de Dieu! Un seul est frappé et tous sont délivrés; le juste est déshonoré et les coupables en même temps remis en honneur; l'innocent subit ce qu'il ne doit pas, et il acquitte tous les pécheurs de ce qu'ils doivent; l'iniquité de plusieurs est cachée dans un seul juste, et la justice d'un seul fait que plusieurs sont justifiés.

« Aussitôt que vous aurez appris à connaître Dieu, quelle douce joie remplira votre cœur; combien vous voudrez aimer le Dieu qui vous a prévenu de tant d'amour. En commençant à l'aimer, vous lui ressemblerez par la bonté. « Quoi! un homme ressembler à Dieu ? » Ne soyez pas surpris d'un pareil langage; oui, lui ressembler avec sa grâce, non par sa toute-puissance et la souveraine autorité de sa domination, ni par son inépuisable magnificence; mais être miséricordieux envers le prochain, bienfaisant à l'égard de ses inférieurs, partager ses biens avec les indigents, c'est en être la providence, c'est imiter Dieu luimême. C'est alors que vous comprendrez que le monde tout entier ne forme qu'une sorte de république gouvernée par Dieu; alors vous serez initié dans le langage des mystères de Dieu..... Moi-même, je ne vous parle pas de choses qui me soient étrangères ni opposées à la droite raison; moi-même ayant eu le bonheur d'être le disciple des saints apôtres, la doctrine que j'eu ai reçue, je la transmets fidèlement à ceux qui se rendent dignes d'être les disciples de la vérité. » Cette dernière phrase semble confirmer l'opinion de Tillemont qui incline à penser que l'auteur de cette lettre était antérieur à saint Justin.

OUVRAGES SUPPOSÉS.-On a attribué à saint Justin plusieurs ouvrages dont la critique a démontré la supposition; nous nous contenterons d'en indiquer les titres, sans discuter aucune des raisons qui les ont fait rejeter. De ce nombre est un Traité contre Aristote, quoique Photius nous assure que le saint apologiste avait composé des discours pleins d'une logique vive et pressante contre les principes de ce philosophe; mais ces discours ne réfutaient que les deux premiers livres de la physique, tandis que le traité en question contient la réfutation de plusieurs autres ouvrages. Photius marque encore parmi les écrits de saint Justin un traité intitulé: Brèves solutions de quelques difficultés formées contre la piété. Cet écrit ne subsiste plus, et c'est apparemment pour en réparer la perte qu'on lui a attribué un autre écrit sur des matières semblables avec ce titre Réponse de saint Justin aux orthodoxes sur cent quarante-six questions importantes. Mais on peut dire que ceux qui ont pris cette liberté se sont trahis eux-mêmes, et ont découvert presque à chaque page leur imposture. On convient aussi que le traité intitulé: Exposition de la vraie foi, ou de la sainte et consubstantielle Trinité, n'est point de saint Justin. Le titre seul en est une preuve, puisque ce ne fut que longtemps après l'époque du saint martyr, qu'on fit

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usage dans l'Eglise du terme consubstantiel. Il suffit de lire la lettre à Zène et à Serène, pour se convaincre qu'elle est supposée, quoique le protestant Scultet et quelques catholiques la lui attribuent. Elle est adressée à des moines et traite de matières qui ne conviennent ni au caractère ni à l'époque du saint martyr.

OUVRAGES Perdus. Le traité intitulé De la Monarchie, ou de l'Unité de Dieu, n'est pas venu tout entier jusqu'à nous. Eusèbe en cite plusieurs autres dont il ne nous reste plus que les titres, de ce nombre est celui intitulé Le Chantre ou Le Psalmiste, et un autre contre les gentils, où il s'étendait beaucoup sur un grand nombre de questions agitées entre les Chrétiens et les philosophes, et dans lequel il traitait de la nature des démons. Nous avons encore une partie de cet ouvrage sous le titre de Discours aux païens, et nous en avons rendu compte en son lieu. Saint Justin en avait composé un autre sur la nature de l'âme. C'était une espèce de recueil dans lequel il se proposait d'examiner diverses opinions des philosophes, en promettant de les réfuter dans un autre ouvrage où il développerait son sentiment sur les mêmes questions. De ces deux écrits, Eusèbe n'avait vu que le premier, et on ne sait si le second fut jamais composé. Du reste, nous n'avons ni l'un ni l'autre, et il paraît qu'ils étaient perdus dès le temps de Photius, puisqu'il n'en dit rien. Nous avons perdu également tout ce que saint Justin écrivit contre les hérétiques. Ses ouvrages sur cette matière étaient de deux sortes. Il y en avait un contre toutes les hérésies, comme le témoignent saint Jérôme et Photius, et un autre contre Marcion. Ce dernier est cité par saint Irénée, et le saint martyr cite lui-même le premier dans sa grande Apologie, en offrant de le présenter à l'empereur. Eusèbe, après avoir donné la liste des principaux ouvrages de saint Justin, dit qu'il en avait composé encore plusieurs autres qui étaient entre les mains de tout le monde; nous ne nous arrêterons pas à signaler la fausseté de la plupart de ceux qui lui sont attribués, en dehors de cette liste que nous venons de donner.

Il serait trop long de rapporter ici les jugements qui ont été portés sur cet illustre Père. Photius, cité par la plupart des écrivains postérieurs, rend hautement justice à sa profonde érudition. « Seulement, ajoutet-il, saint Justin a cru indigne de lui de me ler à la beauté naturelle de sa philosophie des couleurs étrangères; et, bien que son élocution soit énergique et savante, rien n'y ressent l'art de l'orateur. Il néglige les grâces du langage, et n'emprunte d'ornements que ceux de la vérité. En effet, en considérant les écrits de saint Justin sous un point de vue purement littéraire, on remar que qu'en général le style de cet écrivain est dur, traînant, embarrassé, souvent obscur et presque inintelligible, et qu'il est bien loin d'avoir les deux qualités principales de la langue grecque, la politesse et l'harmonie.

JUS

DICTIONNAIRE DE PATROLOGIE.

Cependant ce que Photius appelle l'élégance du langage nous intéresse peu. Il nous est bien plus important d'y rencontrer avec saint Jérôme un autre genre de perfection, la substance d'une doctrine toute céleste, une générosité vraiment apostolique, la gravité des sentences et des mouvements qui annoncent la force et le courage d'un martyr. Néanmoins on ne peut disconvenir que son Dialogue avec Tryphon offre beaucoup de passages entassés pour des preuves, beaucoup de fautes qui viennent de l'ignorance du sens littéral de l'Ecriture. On prétend qu'il n'a pas bien expliqué les difficultés des Juifs, parce qu'il n'était pas assez instruit de la langue sainte. Il croyait avec plusieurs anciens que les anges déchus étaient unis à des corps plus subtils que ceux des hommes, quoique réels, et qu'ils ne souffriront la peine du feu qu'après le jugement dernier. Il prétendait que Platon et d'autres philosophes anciens avaient puisé dans les livres des Hébreux un certain nombre de vérités touchant la création du monde, le déluge, etc., et même, sur la naissance virginale du fils de Dieu, des prophéties qu'ils ont mêlées d'erreurs et de vaines imaginations poétiques. (Voyez l'analyse des deux Apologies de saint Justin par TAMBURINI; Rome, in-8°, 1780; et la Défense des Pères accusés de platonisme, du P. BALTUS; Paris, in-4, 1711.)

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La première édition des OEuvres de saint Justin a été donnée par Robert Estienne en 1551, à Paris d'après un manuscrit de la bibliothèque du roi; on n'y trouve pas le second discours contre les Grecs ni la lettre à Diognète. Henri Estienne les publia en 1592, avec une traduction latine. Dom Maron a recueilli tous les ouvrages de saint Justin, et les a fait paraître en grec et en latin; Paris, in-folio, 1742, édition qui est la meilleure et qui contient en outre les écrits d'Athénagore, de Théophile d'Antioche, d'Hermias et de Tatien. On retrouve aussi les œuvres de saint Justin dans la collection donnée à Wurtzbourg, par Oberthur, 3 vol. in-8', 1777. Parmi les traductions françaises on remarque celles de Jean Maumont, de l'abbé Chanut, et surtout celle publiée par M. de Genoude, Paris, in-18, 1842, et dont nous nous sommes servi pour nos citations.

JUSTINIEN, qui succéda, en 526, à l'empereur Justin, son oncle, sur le trône des Césars, a rencontré dans la postérité comme parmi ses contemporains des panégyristes et des censeurs. L'éclat de ses grandes qualités n'a couvert qu'à peine les faiblesses et les erreurs que l'on est en droit de lui reprocher. La plus capitale fut sa passion de dogmatiser, qui l'engagea dans les plus fausses Conséquences. Que Justinien, aidé par le génie de Trébonien, et les lumières de ses évêques, se fût contenté de prêter l'appui de sa royale autorité aux règlements de la discipline ecclésiastique, il occuperait un rang honorable entre Théodose le Grand et Charlemagne. Ce n'était pas assez pour son

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ambition. Comme s'il eût cru être à lui seul JUS l'Eglise universelle, il eut la prétention d'en vouloir déterminer les dogmes, approfondir les mystères de l'essence divine, étendre sa suprématie jusque sur le siége apostolique et réformer un concile général. D'autre part celui qui lui assure la reconnaissance de tous les âges et lui a mérité une gloire immortelle, c'est la réforme de la jurisprudence romaine conçue et exécutée par ses soins. noms de Code, de Pandectes, d'Institutes et Le recueil de législation si célèbre sous les de Novelles, est l'ouvrage de ce prince.

constitutions ou ordonnances choisies des Le Code de Justinien est le recueil des empereurs précédents depuis Adrien, avec quelques lois faites par lui-même dès son arrivée à l'empire. A ce premier travail, il joignit bientôt après un recueil des meilleurs morceaux des anciens jurisconsultes, rangés sous certains titres, auxquels il donna le ces livres plus utiles, il y fallait une intronom de Pandectes ou Digestes. Pour rendre duction, et c'est à quoi servent les Institutes qui sont comme la clef de la jurisprudence romaine, oul explication méthodique de ses principes. Enfin il corrigea son Code; et, abrégeant la première édition, il publia la seconde telle que nous l'avons encore. Après blia depuis un grand nombre d'édits, qui tous ces règlements de justice, Justinien pudonna le nom de Novelles. furent recueillis après sa mort, et à qui l'on

innovations annuelles dans les lois. Plusieurs Le règne de Justinien fut marqué par des de ses actes furent abolis par lui-même; quelques-uns ont été rejetés par ses successeurs; beaucoup ont été effacés par le temps. Montesquieu blame avec raison ces altérations successives, qui jettent dans l'ouvrage une confusion embarrassante Elles sont attribuées à la cupidité, tant du prince luiqu'à celle de Trébonien, dont le génie, même qui vendaít ses jugements et ses lois, les affaires et toutes les connaissances du comme celui de Bacon, embrassait toutes siècle, mais dont les vertus et les talents, comme ceux du chancelier d'Angleterre, fubasse flatterie et d'une avarice insatiable. rent souillés par le reproche mérité d'une d'Aguesseau, Ferrand, conviennent tous Le chancelier de Lhopital, Hotman, Ferrière, coup de choses imparfaites, obscures, incerque, dans cet immense recueil, il y a beautaines, contradictoires.

les étudier est celui de Domat, si connu sous Le meilleur livre dans lequel on puisse le titre de Lois civiles. Ce savant jurisconsulte a classé les lois dans un si bel ordre, a si bien présenté leur développement, si bien élagué tout ce qui n'était que subtil ou spécieux, qu'en le lisant on a des lois romaines nent pas toujours à l'examen. Cela vient du une idée de perfection, qu'elles ne soutienvaste plan que Domat s'était formé, et que l'on peut voir en tête de son ouvrage. C'est la meilleure introduction à l'étude du droit, par la série et les conséquences des maximes d'équité qui y sont renfermées.

Les lois de Justinien sont encore aujourd'hui respectées et suivies par des nations qui n'ont entre elles aucun rapport de dépendance. Grand nombre de ces lois règlent la discipline et les mœurs; et c'est particulièrement sous ce rapport qu'elles nous intéressent. On peut voir dans l'ouvrage de dom Ceillier, ou dans la Bibliothèque d'Ellies Dupin, le catalogue et le sommaire de celles de ses ordonnances qui concernent la jurisprudence ecclésiastique. Nous nous contenterons d'en mentionner quelques-unes des plus importantes.

Il est défendu aux évêques de quitter leurs églises pour venir à la cour, sous quelque prétexte que ce soit, à moins qu'ils n'en aient obtenu de l'empereur une permission expresse. L'absence des évêques, dit-il, est cause que le service divin se fait sans dignité et sans édification; que les affaires des églises sont mal administrées, et leurs revenus employés en vaines dépenses, nonseulement par les prélats, mais par les clercs et les domestiques qui les accompagnent.

Par une autre loi, il est défendu aux évêques, en exécution des canons, de disposer par testament, par donation, ou par quelque autre sorte d'aliénation, des biens qu'ils anraient acquis depuis le commencement de leur épiscopat, à moins qu'ils n'en eussent hérité de leurs père et mère, oncles ou frères. Après cette défense, le législateur entre dans le détail de plusieurs précautions sages pour la sûreté générale des biens ecclésias tiques, tels que le compte qu'on doit exiger des économes et l'administration des hôpitaux, qui était alors une fonction ecclésiastique.

Dans une des Novelles, la simonie est proscrite avec une sévérité qui fait comprendre à quel point les abus étaient déjà montés en ce genre. On condamna les coupables à la perte de la dignité qu'ils avaient voulu obtenir, et de celle qu'ils possédaient antérieurement, ainsi qu'à la restitution du prix sacrilége, au profit de l'église. Les laïques sont condamnés à payer le double de la restitution, et à l'exil perpétuel.

Dans une longue suite de Novelles, il est pourvu à la liberté des élections épiscopales, aux ordinations, à la police extérieure de l'Eglise, au régime des monastères, aux funérailles, aux donations en faveur des églises et des particuliers, aux procédures et jugements ecclésiastiques, aux nouvelles constructions d'édifices religieux, à l'administration de leurs biens, au droit d'asile.

Justinien imagina le système des incorrup. tibles, qui soutenaient que Jésus-Christ, en se faisant homme, n'avait adopté que ce qu'il y avait de bon et d'heureux dans notre nature, mais qu'il ne s'était point soumis à ces dégoûtantes infirmités et à ces perpétuels besoins dont la nature nous a imposé le jong. Cette hérésie, qui renouvelait en la modifiant l'erreur de Marcion et de Praxéas, eut peu de sectateurs, et fut bientôt abandonnée. Justinien, après avoir eu le ridicule d'être

père de cette hérésie, eut la honte d'en devenir malgré lui le déserteur.

Il fut plus heureux dans l'affaire des trois chapitres. On nommait ainsi trois écrits de Théodoret, évêque de Cyr, d'Ibas et de Théodore de Mopsueste, que l'on accusait à tort de favoriser l'erreur de Nestorius, parce que l'on n'y adoptait pas toute la doctrine de saint Cyrille d'Alexandrie. Ces écrits avaient été adoptés par le concile de Chalcédoine. Théodoret surtout était révéré dans l'Eglise; et leurs auteurs étaient morts depuis plusieurs années. Quelques personnes prétendirent y trouver des propositions qui favorisaient la duplicité des personnes en Jésus-Christ. L'empereur se mit à la tête de ces zélateurs, et demanda la condamnation des trois chapitres. Vigile, qui tenait alors le siége de Rome, représentait en vain qu'il était scardaleux de flétrir des écrits avoués dans un concile œcuménique; que les propositions que l'on y blamait étaient susceptibles d'un meilleur sens. Justinien resta inflexible, et il exigea un sixième concile général, où les trois chapitres furent condamnés, et leurs auteurs frappés d'anathème.

de son règne, l'an 566. âgé de quatre-vingtJustinien mourut la quarantième année quatre ans. C'est lui qui a fait bâtir à Coustantinople l'église de Sainte-Sophie.

vers

JUSTINIEN, évêque de Valence. - Saint Isidore de Séville remarque comme un fait extraordinaire qu'il y eut en Espagne, sous le règne de Théodius, c'est-à-dire l'an 535, quatre frères issus de la même mère, et tous quatre évêques et auteurs. Le premier s'appelait Justinien et fut évêque de Valence; le second, nommé Juste, gouverna l'Eglise d'Urgel; mais on ignore, et le titre des évêchés occupés par les deux autres, qui s'appelaient Hébridius et Elpide, et le sujet des ouvrages qu'ils avaient composés.

Justinien, évêque de Valence et l'aîné de ces quatre frères, avait écrit un traité contenant diverses réponses aux questions d'un nommé Rusticus. La première était sur le Saint-Esprit, et établissait sa divinité contre les Macédoniens; la seconde, contre les partisans de Bonose qui enseignaient que Jésus-Christ était fils de Dieu, non par nature, mais par adoption. Dans sa troisième réponse sur le baptême institué par JésusChrist il montrait qu'il n'est pas permis de le réitérer. Il établissait dans la quatrième une distinction indispensable entre le baptême de saint Jean et celui de Jésus-Christ; et enfin, sa cinquième réponse avait pour but de montrer que le Fils de Dieu est invisible, tout aussi bien que le Père et au même titre. Cet ouvrage n'est pas venu jusqu'à nous.

JUVENAL succéda à Prayle sur le siége de Jérusalem, vers l'an 420 ou 424. Peu de temps après il consacra Pierre, premier évêque des Sarrasins campés dans la Palestine, parmi lesquels saint Euthyme avait opéré un grand nombre de conversions. Le 7 mai de l'an 428, il bénit l'Eglise de la

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