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l'ancien droit; que, lors des travaux préparatoires du code, M. Tronchet, après avoir dit a que le mariage pouvait être célébré dans le lieu du domicile réel sans la résidence de six mois, déclara positivement qu'alors les publications seraient faites au lieu du domicile réel et au lieu de la résidence (1). Enfin, si cette doctrine peut susciter de graves objections, elle a du moins cet avantage d'être en harmonie avec un système adopté dès longtemps par l'ancienne jurisprudence, et consacré même par le droit intermédiaire.

On peut appliquer au domicile spécial du mariage, les règles du domicile légal lui-même, et dire que le domicile de mariage acquis par six mois de résidence dans une commune, ne cesse pas dès qu'on vient à discontinuer l'habitation dans cette commune. En effet, en matière de domicile, il est de principe qu'il n'y a ni perte pure du domicile actuel, ni acquisition pure d'un domicile nouveau, mais changement de domicile; c'est-à-dire qu'un domicile ne se perd que par les causes qui en font acquérir un nouveau. Le domicile de mariage, qui s'acquiert par six mois passés dans une même commune, doit donc se perdre seulement par six mois passés hors de la com

mune.

A la vérité, on ne pourrait pas appliquer ici la théorie du changement de domicile dans toute sa rigueur; le grand principe de la publicité du mariage s'y oppose. Ainsi, on ne pourrait pas dire que le domicile ne se perdra que par six mois passés dans une autre commune, de manière à ce que l'ancien domicile continue toujours jusqu'à l'acquisition d'un nouveau; car ce serait dire que deux personnes, parties d'une commune depuis cinq, dix, quinze années ou plus, sans être jamais restées six mois de suite dans le même pays, pourraient venir se marier dans cette commune où personne ne les connaît plus; ce serait là, il semble, se mettre en contradiction avec l'esprit de la loi. Mais pourquoi n'admettrait-on pas cette théorie jusqu'aux limites dans lesquelles elle s'harmonise avec la pensée du législateur ? Pourquoi ne permettrait-on pas le mariage à l'ancienne résidence pendant les six mois qui suivent le départ? Si la loi suppose que six mois sont nécessaires pour que celui qui vient habiter une commune y soit suffisainment connu, n'en résulte-t-il pas que

(1) Séance du conseil d'état, 4 vendémiaire an x.

plus de six mois seront nécessaires pour que la connaissance une fois acquise se perde?

Ainsi, en résumé, le domicile spécial du mariage durera, non pas tant qu'il ne sera point remplacé, mais tant qu'il sera légalement impossible de le remplacer, c'est-à-dire tant que six mois ne seront pas écoulés depuis le changement d'habitation. Cette doctrine si rationnelle est enseignée par un auteur d'une grande autorité, M. Coin Delisle; et nous croyons qu'elle est de nature à éviter bien des difficultés en matière de célébration de mariage.

Tout ce qui vient d'être dit sur le domicile matrimonial ne s'applique qu'aux majeurs et aux mineurs émancipés. Quant aux mineurs non émancipés, ils ne peuvent pas acquérir par eux-mêmes un domicile qui leur soit propre (art. 108). Leur mariage devra donc être célébré au domicile légal de leur père, mère on tuteur. Mais quoiqu'une résidence personnelle de six mois ne puisse être considérée comme leur acquérant un domicile pour le mariage, ils peuvent cependant jouir de l'avantage de ce domicile d'exception, par l'habitation pendant six mois, de leurs auteurs dans ce domicile exceptionnel. C'est une conséquence du principe que le pupille est censé habiter avec ceux qui administrent sa personne et ses biens. Toutefois, les déplacements fâcheux que cette règle pourrait occasionner dans certains cas, ont introduit l'usage de marier bien des jeunes gens au lieu de leur résidence; usage sans danger d'ailleurs, puisque les publications doivent être faites au lieu du domicile des parents (1).

La théorie du domicile matrimonial ne comprend pas seulement le lieu où le mariage doit être célébré; elle implique de plus la désignation de l'officier public qui sera compétent pour cette célébration.

Cette désignation résulte de l'article 75, qui donne à l'officier d'état civil qualité pour procéder aux formalités du contrat civil, dans la maison commune.

Elle résulte, en outre, de l'art. 165, aux termes duquel le mariage doit être célébré publiquement devant l'officier civil du domicile de l'une des parties.

L'officier d'état civil, c'est-à-dire, aux termes de la loi du 28 pluviôse an vIII, ou le maire ou l'adjoint qu'il a délégué à cet effet; en son absence, celui des membres du conseil-mu

1, Hutteau d'Origny, tit. 7, chap. 4.

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nicipal désigné par la loi pour remplir ses fonctions, voilà donc le ministre de la loi en ce qui concerne le mariage; mais de plus le seul compétent, c'est seulement le fonctionnaire qui a ce caractère dans la commune où est faite la célébration. Tout autre officier civil serait sans caractère, et par conséquent sans compétence, s'il était attaché à une autre commune, fût-il même celui du domicile de l'un des contractants; car les pouvoirs que chaque officier de l'état civil tient de la loi n'existent que dans la commune à laquelle il appartient; c'est là seulement que sont déposés les registres sur lesquels il a le droit d'inscrire les actes de l'état civil, et par conséquent l'acte de mariage qu'il vient de célébrer. Rien ne compromettrait plus la validité ou plutôt l'existence même du mariage qu'une célébration faite par un individu sans caractère public à cet effet (1).

La constitution de 1791 avait proclamé que le mariage n'était considéré que comme contrat civil: s'emparant de ce principe dont aucune loi n'avait encore réglé l'application pratique, plusieurs personnes contractèrent des mariages. devant divers officiers publics comme des notaires et mème des huissiers; ces mariages furent validés par la loi du 25 septembre 1792; cette loi voulut seulement que les époux fussent tenus, dans la huitaine de sa publication, de déclarer leur mariage devant l'officier civil de la municipalité où il en était dressé acte: un avis du conseil d'état, du 18 germinal an xr, décide que ces mariages sont valables, bien que cette déclaration prescrite par la loi de 1792 n'ait pas été faite. Ce texte précis du code a mis fin à toutes ces hésitations antérieures.

On a prétendu que ni les textes, ni les principes, ni la raison, n'imposent à l'officier de l'état civil l'obligation de célébrer le mariage dans les limites seulement de sa commune.

- Les textes: L'art. 165, qui a surtout pour but de régler la compétence, prescrit la célébration « devant l'officier de l'état civil de l'une des parties, » et ne dit pas un mot du lieu de la célébration. L'art. 74, qui s'en occupe, pose à cet égard non pas une règle de droit, mais bien plutôt une règle de procédure qui n'est même garantie par aucune sanction. Bien différents sont les textes qui interdisent à certains officiers publics d'instrumenter hors des limites de leur territoire.

(1) Zachariæ, Valette sur Proudhon.

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L'art. 68 de la loi du 25 ventôse an xi, pour les notaires! la déclaration du 1,, mars 1730 pour les huissiers! nous n'avons ici rien de pareil. Les principes: D'une part, si l'officier de l'état civil exerce une juridiction quelconque, ce n'est assurément qu'une juridiction volontaire; or, il est de règle ancienne que l'exercice de cette juridiction n'est pas circonscrit dans de certaines limites (1); on pourrait même avec vérité soutenir que l'officier de l'état civil n'exerce en pareil cas aucune juridiction proprement dite; d'autre part, les parties ne sont pas obligées d'employer le ministère du notaire ou de l'huissier de leur domicile; elles peuvent, partout où elles se trouvent, se servir de l'officier ministériel du lieu. Au contraire, on ne peut se marier que devant l'officier de l'état civil de son domicile, et on comprend dès lors très bien comment la compétence des premiers est purement territoriale, tandis que celle du second est personnelle. En vain on objecte que les maires, en leur qualité d'administrateurs et d'officiers de police judiciaire, ne peuvent agir hors de leur territoire il suffit de répondre que leurs fonctions d'officier de l'état civil sont tout à fait distinctes de leurs autres fonctions. La raison enfin et l'intérêt de la société exigent qu'un mariage qui réunit d'ailleurs toutes les conditions de validité requises puisse être célébré; et la loi serait imprévoyante et injuste, si dans le cas d'urgence elle ne permettait pas à l'officier de l'état civil d'aller le célébrer même en dehors de son territoire. Un homme, père d'un enfant naturel, est sur son lit de mort dans l'hospice d'une commune qui n'est celle ni de son domicile, ni du domicile de la mère de son enfant; l'officier de l'état civil de leur commune arrive : il est là, et il ne pourrait pas célébrer le mariage qui doit légitimer la femmeet l'enfant ! et personne autre que lui pourtant n'a qualité pour le célébrer! Un tel résultat n'est pas admissible (2).

Nous répondrons à cette argumentation que d'abord, pour ce qui regarde les textes, les art. 74 et 165, en prescrivant le mariage au lieu où l'un des époux aura son domicile, et devant l'officier civil du domicile de l'une des parties, supposent bien certainement que cet officier civil est à son poste dans sa commune, là où se trouvent les registres sur lesquels les actes doivent être signés sur-le-champ (art. 75); qu'il est enfin au lieu du domicile de la partie. La désignation de l'officier

(1) L. 2, de off. proconsulis. (2) Vazcille, t. 1, p. 251.

public emporte avec elle la désignation même du lien de la célébration. Dans l'opinion adverse, sur quoi se fonde la distinction faite entre la juridiction contentieuse et volontaire, distinction qui, juste à certains égards, n'est nullement reproduite dans les textes actuels? Si le maire de Marseille n'est pas maire à Paris, ce qui résulte des principes de notre droit public, comment serait-il à Paris officier d'état civil, en cessant d'y être maire? s'il n'y peut recevoir un acte de naissance ou de décès même d'un Marseillais, ce que reconnaissent les adversaires de l'opinion que nous soutenons, comment aurait-il le droit d'y célébrer un mariage? De ce que la partie peut se servir indifféremment de tous les notaires, et ne peut se marier que devant l'officier de l'état civil de son domicile, il ne s'ensuit pas qu'elle soit renfermée à cet égard dans une rigueur excessive, puisqu'en définitive un mariage peut encore se célébrer dans quatre endroits différents. Il n'y a donc past de milieu entre ces deux règles: ou il faut admettre que le mariage pourrait être valablement célébré par un officier de l'état civil tout à la fois incompétent ratione loci, et ratione personarum, c'est-à-dire qui marierait, hors de sa commune, deux personnes qui n'auraient ni l'une ni l'autre, ni domicile, ni résidence dans la commune de cet officier public (car la logique de l'erreur veut qu'on aille jusque là); ce qui est inadmissible, puisque ce prétendu maire ne serait, et quant au lieu et quant aux personnes, qu'un simple particulier; ou il faut dire, comme nous le croyons, que si les deux parties, ayant chacune le domicile requis pour le mariage, peuvent choisir entre deux officiers de l'état civil, ce n'est qu'à la condition de se marier devant l'officier compétent, c'est-à-dire exerçant sa juridiction au lieu où se célèbre le mariage. Serait donc irrégulier le mariage célébré dans une commune où habite l'un des contractants, mais devant celui des deux officiers civils qui n'y exerce pas ses fonctions.

Le domicile matrimonial, l'officier public compétent, une fois désignés, il reste à faire connaître le lieu même de la célébration; c'est, d'après les textes, la maison commune : les parties ne pourraient forcer l'officier civil de les marier ailleurs. Toutefois, malgré des opinions contraires sur ce point, j'inclinerais à penser que des motifs graves et légitimes, dont il est le juge, pourraient l'autoriser à célébrer un mariage dans un autre lieu de sa commune, sur la demande qui lui en serait faite, sauf à suppléer à l'absence de cet élément de publicité

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