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il n'y a que Dieu seul qui soit nécessaire, que tout le reste change, tout le reste passe, qu'il n'y a que notre grand Dieu qui soit immuable; je fais ce raisonnement en moi-même. S'il n'y a qu'un seul être qui soit nécessaire en lui-même, il n'y a rien aussi, à l'égard des hommes, qu'une seule opération nécessaire, qui est de suivre uniquement cet un nécessaire car il est absolument impossible que notre repos puisse être assuré, s'il ne s'appuie sur quelque chose qui soit immobile. Plus une chose est réunie en elle-même, plus elle approche de l'immutabilité. L'unité ne donne point de prise sur elle, elle s'entretient également partout: au contraire la multitude cause la corruption, ouvrant l'entrée à la ruine totale par la dissolution des parties. Il faut donc que mon cœur aspire à l'unité seule, qui associera toutes mes puissances, qui fera une sainte conspiration de tous les désirs de mon ame à une fin éternellement immuable: Porrò unum est necessarium.

Je m'élève déjà, ce me semble, au-dessus de toutes les créatures mortelles; animé de cette bienheureuse pensée, je commence à découvrir la stabilité que me promet le sauveur Jésus dans la troisième partie de mon texte: Maria optimam partem elegit, quæ non auferetur ab ea : « Marie a choisi la meilleure

partie, qui ne lui sera point ôtée ». Oui, si nous suivons fortement cet un nécessaire, qui nous est proposé dans notre Evangile, nous trouverons une assurance infaillible parmi les tempêtes de cette vie.

Et comment, me direz-vous, chères Sœurs, comment pouvons-nous trouver l'assurance; puisque

nous gémissons encore ici-bas sur les fleuves de Babylone, éloignés de la Jérusalem bienheureuse qui est le centre de notre repos? Saint Augustin vous l'expliquera par une doctrine excellente, tirée de l'apôtre. « Nous ne sommes pas encore parvenus au » ciel; mais nous y avons déjà envoyé une sainte >> et salutaire espérance » : Jam spem præmisimus, dit saint Augustin (1); et ce grand homme nous fait comprendre quelle est la force de l'espérance, par une excellente comparaison. Nous voguons en la mer, dit ce saint évêque; mais nous avons déjà jeté l'ancre au ciel, quand nous y avons porté l'espérance, que l'apôtre appelle l'ancre de notre ame (2). Et de même que l'ancre, dit saint Augustin, empêche que le navire ne soit emporté; et quoiqu'il soit au milieu des ondes, elle ne laisse pas de l'établir sur la terre: ainsi quoique nous flottions encore ici-bas, l'espérance qui est l'ancre de notre ame, et que nous avons envoyée au ciel, fait que nous y sommes déjà établis.

C'est pourquoi je vous exhorte, ma très-chère Sœur, à mépriser généreusement la pompe du monde, et à choisir la meilleure part qui ne vous sera point ôtée. Non certes, elle ne vous sera point ôtée; votre retraite, votre solitude, vous fera commencer dès ce monde une vie céleste : ce que vous commencerez sur la terre, vous le continuerez dans l'éternité. Dites-moi, que cherchez-vous dans ce monastère ? Vous y venez contempler Jésus, écouter Jésus avec Marie la contemplative; vous y venez pour louer Jésus, pour goûter Jésus, pour aimer uni(1) In Ps. LXIV, n. 3; tom. 1v, col. 603. — (2) Hebr. vI. 19.

quement ce divin Jésus : c'est pour cela que vous séparez votre cœur de l'empressante multiplicité des désirs du siècle. Que font les [saints dans le ciel? Ils jouissent de Dieu dans une bienheureuse paix, qui réunit en lui tous leurs désirs; ils le contemplent avec une insatiable admiration de ses grandeurs; ils l'aiment avec un doux ravissement, qui leur fait toujours trouver de nouvelles délices dans l'objet de leur amour; et le saint transport, dont ils sont animés, ne leur permet pas de se lasser jamais de le louer et de célébrer ses miséricordes. Voilà, ma chère Sœur, le modèle de la vie que vous allez embrasser. Qu'elle est aimable! qu'elle est heureuse! qu'elle est digne de votre empressement et de remplir tous vos jours!]

Mais acheverons-nous ce discours sans parler de la divine Marie, dont nous célébrons aujourd'hui la nativité bienheureuse? Allons tous ensemble, mes très-chères Sœurs, allons au berceau de Marie, et couronnons ce sacré berceau, non point de lis ni de roses, mais de ces fleurs sacrées que le SaintEsprit fait éclore; je veux dire, de pieux désirs et de sincères louanges. Regardons l'incomparable Marie comme le modèle achevé de la vie retirée et intérieure; et tâchons de remarquer en sa vie, selon la portée de l'esprit humain, la pratique des vérités admirables que son Fils notre Sauveur nous a enseignées.

SERMON

PRECHE

A LA VÊTURE D'UNE NOUVELLE CATHOLIQUE,

LE JOUR DE LA PURIFICATION.

Grandeur de la miséricorde que Dieu avoit fait éclater sur elle. La multitude des Eglises, cette Eglise unique et première que les apôtres avoient fondée. Combien il est nécessaire de demeurer dans son unité : son éternelle durée, justifiée contre les sentimens des protestans. Erreurs monstrueuses, et absurdités qui résultent du systême de cette Eglise cachée qu'ils ont voulu supposer. La perfection de l'Eglise dans l'unité.

Vocavit vos de tenebris in admirabile lumen suum.

Il vous a appelée des ténèbres à son admirable lumière. I. Petr. II. 9.

MA très-chère Sœur en notre Seigneur Jésus-Christ; après les grandes miséricordes que Dieu a fait éclater sur vous, je ne puis mieux commencer ce discours que par des actions de grâces publiques, remerciant sa bonté paternelle qui vous a miraculeusement délivrée de la puissance des ténèbres, pour vous transporter au royaume de son Fils bien-aimé.

En

En effet, n'est-il pas bien juste, ô grand Dieu, que votre sainte Eglise catholique vous loue et vous glorifie dans les siècles des siècles? Car qui n'admireroit la profondeur de vos jugemens, ô éternel Roi de gloire, qui, pour la punition de nos crimes, ou pour quelque autre secret conseil de votre sainte providence, ayant permis qu'en ces derniers temps l'Eglise chrétienne fût déchirée par tant de sortes de schismes, et par tant de lamentables divisions, ne perdez pas pour cela les ames que vous avez choisies; mais qui, étant riche en miséricorde, savez les éclairer, même dans le sein de l'erreur, et selon votre bon plaisir les attirez par des ressorts infaillibles à la véritable croyance. C'est ce que vous avez fait paroître en cette jeune fille, élevée dans le schisme et dans l'hérésie, que vous avez regardée en pitié, ô Père très-clément et très-bon. On la nourrissoit dans une doctrine hérétique; mais vous avez voulu être son docteur. Vous lui avez ouvert les yeux, pour voir votre admirable lumière : vous avez voulu faire paroître qu'il n'y a point d'âge qui ne soit mûr pour la foi, et que l'homme est assez savant quand il sait écouter vos saintes inspirations. Et voici qu'étant instruite de la véritable doctrine, que nous avons reçue de nos pères par une succession de tant de siècles, touchée en son cœur d'un extrême dégoût de ce monde trompeur, et d'un chaste amour de votre cher Fils, qu'elle désire choisir pour son seul Epoux, elle se vient présenter devant vos autels, afin que vous ayez agréable qu'elle soit admise aujourd'hui à l'épreuve d'une vie retirée. Bénissez-la, Seigneur, et soyez loué à jamais des grâces BOSSUET. XVII.

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