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péril même. Vous devez croire qu'il est bienséant à des vierges d'être timides, puisque vous voyez la très-sainte Vierge être même troublée à l'aspect d'un ange (1) et ce qui doit vous obliger à craindre toujours, c'est que l'Epoux, que vous donne le saint apôtre, n'a pas moins de jalousie que d'amour pour

vous.

Voulez-vous voir qu'il a de l'amour? écoutez le divin Psalmiste: « Le roi, dit-il, désirera votre » beauté (2) ». Voulez-vous voir qu'il a de la jalousie? « Je suis jaloux de vous, dit l'apôtre, de la jalousie » de Dieu ». Voyez que cet excellent maître des Gentils, vous montrant l'amour de Jésus, pour exciter votre confiance, vous parle en même temps de sa jalousie, pour vous retenir toujours dans la crainte. De là vient qu'en lisant le sacré cantique, nous remarquons deux regards du divin Epoux : il y a un regard qui admire, et c'est le regard de l'amant ; il y a un regard qui observe, et c'est celui de la jalousie. Que vous êtes belle, ô fille du prince, dit l'Epoux à la chaste épouse (3) ! Cette ardente exclamation ne vient-elle pas d'un regard qui admire? c'est ce que j'appelle le regard de l'amant. Voulez-vous voir le regard du jaloux? « Mon bien-aimé est venu, dit

l'épouse, regardant par les fenêtres, guettant >> par les treillis (4) ». Ne voyez-vous pas le regard qui observe? c'est le regard de la jalousie. Aimez le regard de l'amant; craignez le regard de la jalousie, qui vous veille et qui vous observe.

Chères Sœurs, votre bien-aimé est jaloux de la − (3) Cant. vII. 1, 6. — (4) Ibid.

(1) Luc. 1. 29. (3) Ps. XLIV. 12. —

11. 9.

jalousie la plus délicate : s'il voit que votre cœur se partage, il se pique et il se retire; il vous veut posséder tout seul. C'est pourquoi, en le choisissant pour époux, vous vous êtes entièrement dépouillées: vous avez joint à la sainte virginité une pauvreté désintéressée, qui ne laisse rien sur la terre que vous puissiez justement estimer à vous. Vous abandonnez même votre volonté; et quittant ce qui est le plus en votre pouvoir, ne déclarez-vous pas devant Dieu, que vous ne vous retenez aucun bien au monde ? Vous confirmez, par la religion de nos vœux, ces généreuses résolutions; et ces vœux ne sont-ce pas des contrats sacrés, par lesquels vous cédez à Dieu, et lui transportez en fonds tout ce que vous êtes? Votre profession est un sacrifice; et les vœux que vous prononcez sont un glaive spirituel, qui vous immole au Sauveur des ames.

Vivez donc, mes très-chères Sœurs, comme des victimes volontairement consacrées : humiliez-vous sous la main de Dieu, et ne souffrez pas que l'orgueil prostitue votre virginité à Satan, qui est le prince des esprits superbes. Ah! sans doute vous n'ignorez pas jusqu'à quel point l'orgueil est à craindre, et que c'est le plus dangereux de nos ennemis. C'est celui qui lâche le dernier prise, et qui sait même profiter de la déroute de tous les autres. Que dis-je, de la déroute de tous les autres? il profite de sa propre défaite. C'est le seul de nos ennemis de la défaite duquel il est dangereux de se réjouir, parce qu'en se réjouissant de l'avoir vaincu on le rétablit dans ses droits, et souvent même on lui augmente ses forces. Lorsque nous pensons quelquefois avoir si bien ré

glé notre vie, que nous avons surmonté jusqu'à l'orgueil même, c'est là, dit saint Augustin, qu'il lève la tête: « Et de quoi triomphes-tu, nous dit-il? je » vis encore, et c'est ton triomphe qui me donne la » vie » Ecce ego vivo, quid triumphas? et ideo vivo, quia triumphas (1); ou plutôt ton triomphe, c'est moi-même.

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Munissez-vous, mes Sœurs, contre ce poison qui a gâté les plus grandes ames, et ruiné les vertus les plus éminentes. Etudiez la science de l'humilité, qui est la vraie science des enfans de Dieu. C'est elle qui vous ouvrira les secrets célestes; c'est par elle que les grandeurs de Jésus vous sont accessibles; c'est elle qui mérite d'obtenir de Dieu ce qu'elle ne peut jamais exprimer assez: c'est elle qui vous bâtira sur la terre un édifice spirituel, dont le faîte s'élevera jusqu'aux cieux; où les vierges saintement soumises, étant associées avec les saints anges, chanteront avec eux aux siècles des siècles, devant le trône de l'Agneau sans tache, la gloire éternelle et indivisible du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Amen.

(1) De Nat. et Grat. n. 35; tom. x, col. 142.

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SERMON

POUR UNE PROFESSION.

Quel est le monde auquel il nous faut renoncer. Combien ce renoncement doit être étendu dans une religieuse. Avec quel soin elle doit persévérer dans la guerre qu'elle déclare au monde, et éviter les moindres relâchemens. Obligation que sa vocation lui impose, d'avancer toujours, et de tendre sans cesse à la perfection.

Si quis vult post me venire, abneget semetipsum, et tollat crucem suam quotidie, et sequatur me.

Si quelqu'un veut venir après moi, qu'il renonce à soiméme, qu'il porte sa croix tous les jours, et qu'il me suive. Luc. IX. 23.

Vous avez désiré, ma très-chère Sœur, d'entendre de moi, en ce jour, une exhortation chrétienne espérant peut-être que ce grand prédicateur des cœurs donneroit par sa vertu quelque prix à mes pensées, parce qu'il les verroit naître d'une charité fraternelle. Il faut, s'il se peut, satisfaire ce pieux désir; et pour faire de mon côté ce qui sera nécessaire, je tirerai des paroles de notre Sauveur, que je vous ai récitées, trois instructions importantes qui vous pourront servir, avec la grâce de Dieu, pour tout le reste de votre vie. Seulement je vous conjure de joindre vos prières aux miennes ; afin qu'il plaise

à cet Esprit qui souffle où il veut (1), de répandre sur mes lèvres ces deux beaux ornemens de l'éloquence chrétienne; je veux dire la simplicité et la vérité. Après quoi, pour une plus claire intelligence de cet entretien, je vais tâcher de vous expliquer l'intention de notre bon Maître dans le lieu que je viens d'alléguer.

Comme un sage capitaine, se préparant à une expédition difficile, déclare à ceux qui viennent servir sous ses ordres, à quelles conditions il les reçoit dans ses troupes de même le sauveur Jésus étant descendu du ciel pour faire la guerre à Satan, pour inviter tous les hommes à cette entreprise, il propose en peu de mots les qualités nécessaires pour pouvoir être rangés sous ses étendards. «< Quiconque, » dit-il, désire venir après moi, c'est-à-dire, qui» conque me veut reconnoître pour son capitaine, » il faut, poursuit-il, qu'il renonce à soi-même »; Abneget semetipsum: « puis, qu'il prenne une gé» néreuse résolution de porter sa croix tous les » jours », et tollat crucem suam quotidie; « et qu'il » me suive enfin par mille embarras de périls, de

supplices et d'ignominies » ; et sequatur me. C'est en abrégé ce qu'il faut quitter, et ce qu'il faut faire à sa suite: voilà les lois et les ordonnances de cette milice. C'est pourquoi je me suis résolu d'appliquer à l'état que vous allez embrasser les ordres généraux de Jésus-Christ notre chef, et de vous faire voir dans le sens littéral de mon texte, selon le dessein que je vous ai déjà proposé; premièrement, jusqu'à quel point votre condition vous oblige de renoncer au

(1) I. Joan. 11. 8.

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