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comte Guérok, et poursuivirent leur | tié démoli, on voit un promontoire par

<chemin.

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Estant arrivé à Vannes, il monta dans la salle où estoit gisant le corps, près ‹ duquel se mit à genoux, et exhorta tout le peuple là présent à prier Dieu assemblement avec luy. La prière finie, ‹ il s'approcha du corps, et prenant la❘ teste, la luy mist sur le col, et parlant ‹ à la defuncte, luy dit tout haut: Trifine, au nom de Dieu tout puissant, Père, Fils et Saint-Esprit, je te commande <que tu te lèves sur bout, et me dies où tu as esté. A cette voix, la dame ressuscita, et dit devant tout le peuple, ‹ qu'après la séparation de son âme d'a‹vec son corps, les anges l'avoient ravie et estoient tout prests de la placer au paradis parmy les saints; mais qu'aussitost que saint Gildas l'eust appelée, son âme s'estoit réunie à son corps. › L'on voit que la légende jette une teinte mystique sur le caractère trop mélodramatique du conte, et qu'ici, comme ailleurs, elle renferme en elle plus d'un enseignement religieux. Une simple invocation donnant à une poignée de poussière la force de renverser une forteresse, n'est-ce pas un récit bien propre à donner l'idée de la puissance de la prière au paysan qui passe sous ses ruines. Longeant moi-même un jour les douves de cette vieille demeure féodale, un paysan breton, que je ne fais pas intervenir ici, je vous prie de croire, pour l'intérêt du récit, m'apprit une simple histoire qui semblait faire une vive impression sur lui en lui rappelant la brièveté de la vie. La duchesse Anne, me disait-il, voulait faire paver en pièces d'or ce château. En faisant niveler le terrain à cet éffet, elle aperçut une taupe sans mouvement, et s'étonnait beaucoup de ne pouvoir la réveiller. Par un raffinement de complaisance, ses courtisans avaient empêché l'idée de la mort d'arriver jusqu'à elle, pour qu'elle ne vint pas troubler son bonheur d'ici-bas. Les ouvriers la lui expliquèrent. Dès lors, renonçant à son projet, elle versa dans le sein des pauvres l'or qu'elle voulait employer à orner sa demeure d'un jour, afin de s'acquérir un titre à celle de l'éternité.

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Encore un souvenir avant de quitter ce vieux manoir. Du haut du donjon à moi

delà la mer. A l'horizon du golfe, vers son extrémité, est une chapelle abandonnée que la distance empêche d'apercevoir. L'un des saints dont les reliques reposent dans l'abbaye de saint Gildas, se consacra long-temps en ce lieu à la vie érémitique. On raconte sur la construction de cette chapelle des choses merveilleuses. Là les jeunes filles viennent en secret prier le ciel de bénir leurs amours; par une coutume bizarre, elles y apportent des épingles en offrande lorsqu'elles désirent voir le mariage venir consacrer leurs affections. Sans doute, la naïveté de ces jeunes filles nous fait d'abord sourire; mais en y réfléchissant, ne trouve-t-on pas quelque chose de touchant et d'éminemment utile dans ces simples amours mis sous la protection d'un saint? L'intention ne communiquet-elle pas aux moindres faits le caractère de l'invocation? Une épingle donnée en offrande peut être une aussi belle prière qu'une parole fervente. Comparez cette jeune fille de nos falaises, guidée par la légende, venant mettre ses plus chères affections sous la protection du ciel, à l'ouvrière de nos villes s'ornant l'imagination des œuvres de P. de Kock, et jugez quelle est la plus poétique et la plus salutaire de la littérature populaire d'aujourd'hui et de celle d'autrefois.

Les légendes bretonnes ne se contentent pas de converser avec le paysan dans les ruines qui bordent ses champs; sur les rochers de ses grèves elles poursuivent le marin sur les flots; elles avaient inventé les scènes maritimes bien avant nos romanciers modernes. Sans quitter ces vieilles tourelles sur lesquelles je vous ai fait monter, vous pourriez apercevoir de lourds chasse-marées bretons louvoyant au large en grand nombre; soyez sûrs qu'en passant en vue de terre, conteurs de leur naturel, les matelots de l'équipage rediront souvent les histoires traditionnelles que ces côtes leur rappellent; ils se raconteront, par exemple, que saint Gildas un jour navigua aussi sur ces mers d'une façon étrange; et cette anecdote, quelque bizarre qu'elle puisse paraître, les fera ressouvenir que la foi est toute puissante dans le péril.

Le diable, dit Albert-le-Grand, por

‹ Se voyant dans ce danger, il se recommanda à Dieu et acheva ses primes; puis, ayant osté son manteau ou froc, se mit dessus, et en attacha le bout à son bourdon pour cueillir le vent, s'en servant de voile, et cingla en cette sorte jusques à la coste d'Hy(bernie. >

Dans une autre scène de mer, relative à saint Bieuzi, ce ne sont plus des démons, mais bien des anges qui forment un équipage surnaturel. C'était un dimanche, le saint disait la grand'messe à ses paroissiens assemblés; il entend tout

seigneur qui perce la foule; il vient trouver le saint prêtre à l'autel, et le prie d'interrompre l'office divin pour se rendre en toute hâte à son manoir. Sans doute il craint pour la vie d'une épouse, d'une fille chérie ; vous n'y êtes pas : l'un de ses chiens est atteint de la rage; il veut que le saint vienne le guérir par un miracle. Sur son refus formel, il lui assène sur la tête un grand coup de son épée, qui l'entr'ouvre et y reste enfoncée. Le meurtrier s'enfuit effrayé de son crime; mais le saint breton, sans s'en émouvoir, le glaive enfoncé dans sa plaie qui ruisselle, continue à offrir avec recueillement le sacrifice de la croix.... L'office achevé, il se dirige expirant vers la côte de Baden. Là, sur la grève, il trouve un vaisseau mystérieux; les matelots sont des anges, qui le conduisent jusqu'aux pieds de saint Gildas pour recevoir sa dernière bénédiction et mourir.

tant envie au saint et à ses religieux, ‹ les inquiétoit de spectres et de fantosmes, ne les laissant aucunement en paix. Mais voyant qu'il ne profitoit rien ‹ à cause de la diligence que le saint abbé portoit à garantir ses moynes de ses embusches, il résolut de jouer d'un ‹ autre ressort et de perdre le saint pour plus aisément venir à bout des autres; pour à quoi parvenir il depescha ‹ à Blaret quatre démons accoustez en moynes qui se disoient religieux de ‹ saint Philibert (avec lequel saint Gildas avoit contracté une estroitte amitié ‹ lorsqu'il alla en Hybernie), lequel, di-à-coup un tumulte dans l'église : c'est un soient-ils, estoit nouvellement décédé, et qu'on ne fesoit que l'attendre pour l'inhumer; partant le suplioient de ‹ s'embarquer hativement dans un ves‹ seau qu'ils avoient ammené. Le saint abbé alla à l'église faire sa prière, et ‹ sceut par révélation qui estoient ces ‹ faux moynes; neanmoins il le dissimula pour lors, et ayant pris le livre ‹ des évengiles qu'il avoit escrit de sa < propre main, il le mit reverement dans une petite caisse qu'il cacha en son ‹ sein au desceu de ces faux moynes, prit ‹ son breviaire, son chapeau, son manteau et son bourdon, et s'embarqua, et les ancres levées, les voiles tendües, le vesseau s'élargit en pleine mer; de sorte que, sur l'heure de prime, ils se ‹ trouvèrent avoir perdu terre de veüe ‹ de toutes parts. Alors saint Gildas dit: ‹ Or ça, frères, que l'un de nous tienne ‹ le gouvernail, et les autres disent les primes, et pour plus hativement nous en acquitter, baissons la vergue du grand mast. Ces faux frères lui repli‹ quèrent : Si vous retardez tant soit < peu notre course, vous n'arriverez pas ‹à temps au monastère. N'importe, repond saint Gildas, ne manquons pour cela de rendre nos devoirs à Dieu. Alors l'un d'eux se mettant en colère contre le saint, luy dit brusquement: Ah! que tu nous romps la teste avec tes primes. Saint Gildas voyant qu'il ne gaignoit rien, commença le Deus in adjutorium, s'estant jetté à genoux, et tout à l'instant la barque disparut et tout son attirail, et les quatre moynes, ‹et le saint se trouva seul sur les vagues de la mer.

Quelquefois aussi l'influence de ces traditions religieuses enfle les voiles des navires de nos côtes pour les guider vers quelque pélerinage célèbre. Si, par exemple, vous vous trouviez, à un certain jour de l'année, sur les grèves du Morbihan, le golfe aux trois cents flots, vous pourriez voir les habitans de ce petit archipel breton dirigeant processionnellement vers sainte Anne leur flotille pavoisée, en chantant sur les vagues un cantique guerrier en souvenir de l'abordage d'un vaisseau sarrasin par un navire de guerre monté par des Français et des Bretons. Les Français furent tués jusqu'au derhier; mais les Bretons, ayant fait un vœu à la mère de la Vierge, cou

lèrent à eux seuls le vaisseau mécréant, | lettrée; le saint, lui seul, recueille l'ad

sans qu'aucun d'eux fût blessé; et chaque année les marins du golfe exécutent fidè lement le vœu de cette procession marine, faite il y a des siècles par leurs ancêtres.

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miration de l'humanité tout entière, Ce, pendant nous lisions dernièrement dans les Lettres d'un voyageur, d'un illustre pseudonyme, le regret éloquemment exprimé de voir la gloire délaisser toujours la vertù pour ne s'attacher qu'au génie, Bien des lecteurs sans doute se sont laissé aller à admettre cette pensée, séduits par le style prestigieux qui l'ex¬ prime, sans songer qu'elle ne pouvait avoir de réalité dans l'époque catholique. Un saint, en effet, dans son acception humaine, n'est-ce pas l'homme devenu à jamais célèbre par la vertu? L'apothéose de l'homme orgueilleusement puissant n'est-elle pas remplacée dans le monde nouveau par la canonisation du chrétien humblement vertueux? Comment donc peut-on déplorer de voir la vertu rester éternellement dans l'ombre après que le Christianisme l'a entourée de tant de lu,

Nous sommes loin d'avoir rapporté toutes les légendes que renferme un horizon rétréci; leur accumulation sur ce point si borné fait juger de leur multiplicité. Ce que nous en avons cité peut faire entrevoir leur caractère distinctif. Les légendes de la Bretagne sont loin de renfermer toutes les richesses poétiques des légendes chrétiennes de l'Orient; mais elles présentent de remarquables exem ples d'énergiques vertus, un caractère tranché d'utilité pratique. La croix de granit de ses sentiers, le men-hir de ses landes, un rescif, une ruine isolée, sont pour le paysan, pour le marin breton, autant de pages éloquentes où ils relisent sans cesse ces simples poésies qui culti-mineuses auréoles? vent leur esprit en édifiant leurs âmes, gravent dans leur cœur les vérités les plus hautes, les principes les plus purs, tout en flattant les caprices de leur imagination.

Deux grands hommes ont vécu dans ces lieux dont nous avons rapporté quelques légendes ; saint Gildas, auteur des livres précieux de Excidio Brittaniæ et Acris correctio, qui eurent une grande influence sur son époque, et Pierre Abailard, furent également abbés du monastère de saint Gildas de Rhuis, Le souvenir du philosophe, et même de l'amant célèbre, s'est complétement effacé de la mémoire du peuple; la vie du saint est écrite dans ses traditions en caractères ineffaçables, et même nous avons vu les nombreuses populations protestantes du pays de Galles, chez lesquelles il passa, il y a douze siècles, en faisant le bien, s'incliner de respect à son nom. C'est que la gloire du saint est la seule gloire.complète d'ici-bas; l'homme illustre n'est connu que de cette petite portion du genre humain que l'on nomme la classe

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M. Miorac de Kerdanet et M. l'abbé Tresvaux ont fait une œuvre éminem, ment utile en rééditant les ouvrages épui, sés d'Albert-le-Grand et de dom Lobineau, et en les enrichissant, l'un, d'observations savantes, l'autre d'éloquentes méditations. Un complément nécessaire à leurs travaux, c'eût été une traduction bretonne de ces légendes. Un grand nombre de nos paysans savent lire, mais seulement leur vieux langage celtique, Un jeune prêtre de talent travaillait à cette bonne œuvre lorsque la mort est venue l'interrompre. Espérons que sa pensée trouvera un continuateur; l'œu¬ vre en est digne. On a coutume de renfermer dans des châsses d'argent les ossemens de saints, qui, promenés au milieu des populations, sont quelquefois un remède à des maux physiques; un livre dans lequel on a recueilli leurs vertus n'est-il pas comme une châsse précieuse renfermant leurs reliques morales, qui peuvent aussi guérir bien des plaies de l'ame?

JULES DE FRANCHEVILLE.

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Editions de la Société de l'histoire de France.

DE LA CONQUESTE DE CONSTANTINOBLE,

PAR JOFFROI DE VILLEHARDouin et henRI DE VALENCIennes.

Édition faite sur des manuscrits nouvellement reconnus et accompagnée de notes et commentaires; par M. PAULIN PARIS, membre de l'Institut,

Le plus féodal et le plus chevaleresque de nos chroniqueurs nationaux, Joffroy de Villehardouin et Froissard, sont, des écrivains du moyen âge, ceux qui se sont fait la meilleure part dans l'admiration | des étrangers. Le premier fut le père de notre histoire en langue française, en ce sens qu'il a composé en français la première chronique importante dont nous ayons conservé l'original. Le second est connu par ses merveilleux récits de prouesses, de nobles faits d'armes et de vie de châteaux, par l'abandon inimitable de son style conteur et la richesse inépuisable de son coloris. Mais ce n'est point là ce qui leur a mérité à chacun la faveur particulière dont nous parlons. S'ils l'ont obtenue l'un et l'autre à deux siècles d'intervalle; c'est par d'autres motifs; c'est parce, qu'ils ont eu l'heureuse idée d'écrire nos annales au moment même et sur les lieux où elles se confondaient avec les annales des peuples voisins. De là l'intérêt général qu'ils ont su donner à leurs ouvrages, et la préférence dont ils ont toujours été l'objet de la part des étrangers.

Par les mêmes moyens que Froissard se rendit cher à l'Angleterre à la fin du quatorzième siècle, au commencement du treizième Villehardouin n'avait pas moins bien mérité de l'aristocratie vénitienne. Aussi la sérénissime et dominante république n'oublia point la Relation de la prise de Constantinople en 1204, par les barons français réunis à ses vaillans soldats. Après avoir partagé avec la France la gloire de cette aventureuse expédition, il ne lui restait plus qu'à s'associer à la renommée littéraire du chro niqueur français en essayant de publier la première édition de son ouvrage.

C'est ce que fit le sénat de Venise en 1573, après que François Contarini, son envoyé dans les Pays-Bas, eut découvert un manuscrit du seigneur Joffroy de Villehardouin, mareschal de Champagne et de Romanie. Mais les difficultés de cette première publication lui ayanț bientôt paru insurmontables, il se vit forcé de l'abandonner, et la copie du précieux manuscrit resta déposée dans les archives de Saint-Marc. En 1585, Blaize de Vigenère, gentilhomme bourbonnais attaché au duc de Nevers, fit im primer à Paris, pour la première fois, cette relation de la prise de Constanti, nople. Le vieux langage du chroniqueur y était accompagné d'une traduction mo. derne généralement fidèle, et de courtes observations historiques dont le savant Du Cange devait profiter soixante-douze ans plus tard. Mais d'abord une seconde édition de Villehardouin parut à Lyon en 1601, avec une épître au roi très chrétien Henri IV. Grâce à ces deux éditions et au mouvement réorganisateur imprimé parce sage monarque, la science de l'histoire nationale s'éclaira d'un jour tout nouveau, et avec elle l'histoire de l'Europe chrétienne au moyen âge.

La narration de Villehardouin parut un foyer de lumières où chacun pouvait prendre la clarté qui lui manquait. Paul Ramusio, fils du fameux auteur des navigations, y puisa largement pour les annales de l'Italie, et le jésuite d'Outreman pour celles de la province de Flandre. Ce dernier, dans sa Constantinopolis belgica, poursuivit au-delà des limites du vieil historien le récit des exploits et de la domination des Français dans la | Grèce. Enfin parut le travail de Du Cange, qui fit oublier tous ses devanciers en re

produisant leurs meilleurs commentaires et joignant à leurs découvertes les résultats ‹ de son ardente patience et de son admirable sagacité dans la recherche et dans l'emploi de tous les monumens inédits ou peu connus (1). ›

jours patiemment étudiés, ne comblent pas le défaut de bonnes cartes que notre savant critique ne pouvait, plus que les contemporains, consulter comme nous

en

avons aujourd'hui la commodité. Ajoutons qu'au début de sa grande course littéraire Du Cange n'avait pas l'immense | lecture qui lui fut nécessaire pour composer son admirable Glossarium ad scriptores mediæ et infimæ latinitatis. ›

‹ Ce que l'on doit le plus louer dans son édition de Villehardouin, dit M. P. Paris, c'est l'érudition avec laquelle l'auteur compulse et met en usage les écrivains du Bas-Empire. La collection dite Tout ce qui manquait à Du Cange, la byzantine s'imprimait alors à l'impri- | M. Paulin Paris l'a eu à sa disposition. merie royale; l'Histoire de l'empire de | Et d'abord Du Cange lui-même, avec tous Constantinople dut naturellement en for- les fruits de son érudition; puis l'édition mer l'une des parties. Mais si les secours mieux élaborée de Villehardouin, pufournis par Nicétas, Acropolis, Nicé- bliée en 1822 par D. Brial, dans le Rephore Grégoras et quelques autres, suf-cueil des historiens de France; enfin la fisaient bien pour attester jusqu'à l'évi- | découverte de deux manuscrits nouveaux dence la bonne foi, la sincérité, le bon sens de Villehardouin, il fallait d'autres secours pour résoudre avec la dernière précision les problèmes topographiques; les difficultés que présentaient la lecture des noms propres et la nécessité de rattacher aux personnages cités les indications historiques que d'autres documens pouvaient fournir. C'est là, il faut en convenir, la partie faible du travail de Du Cange; la topographie du vieux chroniqueur est généralement assez mal éclairée ; les autorités byzantines n'y sont pas toujours invoquées à propos, et les monumens historiques de l'Occident tou

(1) Le plan et l'étendue du travail de Du Cange sont indiqués par le titre sous lequel il le fit paraîtré. Ce fut son premier ouvrage, et il avait plus de quarante ans quand il l'acheva : « Histoire de l'empire de Constantinople sous les empereurs français, divisée en deux parties, dont la première contient l'histoire de la conqueste de la ville de Constanti

nople par les Français et les Vénitiens; écrite par Geoffroy de Villehardouin, revue et corrigée en ceste édition sur le Msc. de la Bibliothèque du Roi, et illustrée d'observations historiques et d'un glossaire pour les termes de l'auteur à présent hors d'usage; avec la suite de cette histoire jusques en l'an 1240, tirée de l'histoire de France Msc. de Phillips Mouskes, chanoine et depuis évêque de Tournay. La seconde contient une histoire générale de ce que les Français et les Latins ont fait de plus mémorable dans l'empire de C. P. depuis qu'ils s'en rendirent maîtres, jusques à ce que les Turcs s'en sont emparez; justifiées par les écrivains du temps et par plusieurs chroniques, chartes et autres pièces non encore publiées. — Paris, de l'imprimerie royale, 1657. » 1 vol. in-fe de 332 pages.

et tous les secours de la science moderne. C'est ainsi qu'il a profité du perfectionnement des cartes géographiques pour l'indication des lieux et la concordance de leurs noms anciens et nouveaux; car une des grandes difficultés du texte de Villehardouin, que n'avait pu résoudre aucune édition antérieure, était dans l'intelligence de sa topographie. Le chroniqueur champenois, comme tous ses contemporains d'Occident, ignorant le grec ancien et moderne, avait écrit en roman les noms de lieux et de personnes comme il les avait entendu prononcer, et nullement d'après l'orthographe des textes qu'il ne pouvait lire. De là le bizarre travestissement qui rendait méconnaissable la plupart de ces noms. Ainsi la ville de Nicée était appelée la Nique; Larisse devenait Larche; et l'Euripe, Négrepont, qui fut aussi le nouveau nom de l'île d'Eubée. Mais que ce ne soit point là un objet de reproche pour notre historien; car les

Grecs dénaturaient bien mieux encore les appellations latines ou romanes. La meilleure excuse des uns et des autres est la différence des intonations dans la langue de ces divers écrivains. Quoi qu'il en soit, dans la chronique de Villehardouin, l'obscurité qui régnait dans l'indication des lieux avait encore été augmentée par les fautes des mauvais copistes ; ce qui rendait presque impossibles à suivre les mouvemens militaires et la marche des croisés; mais grâce au secours des deux nouveaux textes manu

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